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23/05/2024 | FRANCE | N°23PA00401

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 23 mai 2024, 23PA00401


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de son fils, a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser des préjudices qu'elle estime que son fils a subis à la suite de vaccinations effectuées en 2010 et d'ordonner une expertise médicale afin de lui permettre de chiffrer ses préjudices.





Par un jugement n° 2103381 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de son fils, a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser des préjudices qu'elle estime que son fils a subis à la suite de vaccinations effectuées en 2010 et d'ordonner une expertise médicale afin de lui permettre de chiffrer ses préjudices.

Par un jugement n° 2103381 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 janvier et 15 mai 2023, Mme D..., agissant en qualité de représentante légale de son fils, représentée par Me Joseph, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de condamner l'ONIAM à indemniser les préjudices qu'elle estime que son fils a subis à la suite de la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole seule, ou combinée avec la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite par le vaccin Infanrix Hexa ;

3°) d'ordonner une expertise médicale pour, d'une part, déterminer s'il existe un lien entre la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole seule, ou combinée avec la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite par le vaccin Infanrix Hexa, et l'autisme dont est atteint son fils et, d'autre part, évaluer son préjudice corporel ;

4°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les frais d'expertise.

Elle soutient que :

- si la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole n'était que recommandée en 2010, elle était obligatoire de fait ;

- les sels d'aluminium qui sont contenus dans presque tous les vaccins, ont déclenché chez son fils, qui a reçu le 4 mai 2010, puis en rappel le 13 juillet suivant, l'Infanrix Hexa contenant les valences diphtérie, tétanos et poliomyélite et composé de 0,82 mg d'aluminium, ainsi que, le 22 novembre 2010, le vaccin Priorix contenant les valences rougeole, oreillons et rubéole, des troubles autistiques apparus peu de temps après avoir reçu ce dernier vaccin ;

- une expertise est nécessaire afin de chiffrer les préjudices subis par son fils.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mars 2023, l'ONIAM, représenté par Me Welsch, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conditions d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas remplies dès lors que la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole reçue par le fils de la requérante le 22 novembre 2010 ne présentait pas de caractère obligatoire ;

- en tout état de cause, le lien de causalité entre la vaccination et l'état de santé de l'enfant n'est pas établi.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 11 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 janvier 2024.

Un mémoire, enregistré le 16 avril 2024, a été présenté par la caisse primaire d'assurance maladie Pau-Pyrénées agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., né le 10 février 2010, a reçu une vaccination antituberculeuse le 7 avril 2010, deux injections du vaccin Infanrix Hexa contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la coqueluche les 4 mai et 13 juillet 2010, une injection du vaccin Pentavac le 9 juin 2010 contre ces mêmes infections et une injection du vaccin Priorix contre la rougeole, les oreillons et la rubéole le 22 novembre 2010. A la suite de troubles du comportement, l'enfant a été pris en charge par les médecins de l'hôpital Robert Debré à compter d'août 2012 et le diagnostic d'un syndrome autistique a été posé le 29 janvier 2013. Le 6 octobre 2020, Mme D... a saisi l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) d'une demande tendant à l'indemnisation des préjudices subis par son fils du fait de ses troubles autistiques qu'elle impute à la vaccination qui lui a été administrée contre la rougeole, les oreillons et la rubéole. Par un courrier du 12 janvier 2021, l'ONIAM a rejeté sa demande. Par un jugement du 1er décembre 2022, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de l'ONIAM à l'indemniser des préjudices qu'elle estime que son fils a subis à la suite de vaccinations administrées en 2010 et, d'autre part, à ce que soit ordonné une expertise médicale afin de chiffrer les préjudices.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

2. Aux termes de l'article L. 3111-2 du code de la santé publique, dans sa version applicable en 2010, année durant laquelle le jeune A... C... a reçu plusieurs vaccins : " Les vaccinations antidiphtérique et antitétanique par l'anatoxine sont obligatoires, sauf contre-indication médicale reconnue ; elles doivent être pratiquées simultanément. Les personnes titulaires de l'autorité parentale ou qui ont la charge de la tutelle des mineurs sont tenues personnellement responsables de l'exécution de cette mesure, dont la justification doit être fournie lors de l'admission dans toute école, garderie, colonie de vacances ou autre collectivité d'enfants. (...) ". Aux termes de l'article L. 3111-3 du même code : " La vaccination antipoliomyélitique est obligatoire, sauf contre-indication médicale reconnue, à l'âge et dans les conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Académie nationale de médecine et du Haut Conseil de la santé publique. Les personnes titulaires de l'autorité parentale ou qui ont la charge de la tutelle des mineurs sont tenues personnellement de l'exécution de cette obligation ". Aux termes de l'article L. 3111-9 du même code : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale. (...) ".

3. Il résulte des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique précitées que seules les conséquences dommageables d'une vaccination qui est rendue obligatoire par les dispositions du titre premier du livre premier de la troisième partie du code de la santé publique peuvent faire l'objet d'une indemnisation par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale.

4. Il résulte de l'instruction, notamment du calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales 2010 selon l'avis du Haut Conseil de la santé publique publié dans le bulletin officiel Santé, Protection sociale, Solidarité n° 2010/4 du 15 mai 2010 que, le 22 novembre 2010, date à laquelle le jeune A... C... a été vacciné par le vaccin Priorix contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, cette vaccination ne revêtait pas un caractère obligatoire. La requérante soutient que cette vaccination était très fortement recommandée par les médecins et que, dans ces conditions, elle s'apparentait de fait à une vaccination obligatoire. Toutefois, cette circonstance ne peut être assimilée à l'obligation légale de procéder à la vaccination des enfants au sens de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, la décision de recourir à la vaccination dans ce cas appartenant toujours aux parents. Dans ces conditions, et à supposer même que les troubles autistiques présentés par l'enfant résulteraient directement de la vaccination par le vaccin Priorix ou indirectement, si celle-ci a joué un " rôle de catalyseur " des effets secondaires des autres vaccins comme le soutient la requérante, ce qui au demeurant ne résulte pas de l'instruction, la réparation des préjudices subis par le jeune A... C... n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique et ne peut dès lors être pris en charge par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'expertise :

6. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision (...) ".

7. Il ne revient au juge d'ordonner une expertise que lorsqu'il n'est pas en mesure de se prononcer au vu des pièces et éléments qu'il a recueillis et que l'expertise présente ainsi un caractère utile.

8. En l'espèce, eu égard aux motifs exposés aux points précédents, il ne résulte pas de l'instruction qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée par Mme D..., qui ne présente pas d'utilité pour la solution du litige. Par suite, ses conclusions tendant à la désignation d'un expert doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ONIAM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme D... demande au titre des frais liés à l'instance. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... le versement de la somme que l'ONIAM demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'ONIAM sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis et à la caisse primaire d'assurance maladie Pau-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement, en application de l'article R. 222-6 du code de justice administrative,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.

La rapporteure,

V. LarsonnierLa présidente,

C. Vrignon-Villalba

Le greffier,

P. Tisserand

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA00401


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00401
Date de la décision : 23/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SCP JOSEPH - MANDROYAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-23;23pa00401 ?
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