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17/05/2024 | FRANCE | N°22PA00320

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 17 mai 2024, 22PA00320


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Paris la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 1920507 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté le

ur demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Paris la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1920507 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 janvier 2022 et le 9 janvier 2024, M. et Mme B..., représentés par Me Zapf, avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1920507 du 25 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- en n'accordant le bénéfice de l'abattement prévu à l'article 150-0 D ter du code général des impôts qu'aux cessions d'entreprise détenue par une seule personne interposée, l'administration a ajouté une condition à cette disposition légale et méconnu sa propre doctrine exprimée par le paragraphe 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 ;

- ce faisant et en se référant aux travaux parlementaires, elle a méconnu le principe d'interprétation stricte de la loi ;

- elle a méconnu le principe de sécurité juridique affirmé dans la décision du Conseil Constitutionnel n° 2004-500 du 16 décembre 1999.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision du Conseil Constitutionnel n° 2004-500 du 16 décembre 1999 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Carrère, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... se sont prévalus, dans leur déclaration de revenus de l'année 2008, pour la taxation des plus-values de cession de deux entreprises, de l'abattement prévu à l'article 150-0 D ter du code général des impôts. Suite à un contrôle portant sur leurs revenus de cette année, l'administration leur a refusé le bénéfice de cet abattement d'un montant de 861 902 euros, motif pris qu'il n'avaient pas respecté la condition de détention des entreprises cédées par une personne interposée. Le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 par suite de ce refus, ainsi que des pénalités correspondantes, par un jugement n° 1920507 du 25 novembre 2021 dont appel.

2. L'article 150-0 A du code général des impôts dispose que les gains nets retirés des cessions à titre onéreux de droits sociaux sont soumis à l'impôt sur le revenu. L'article 150-0 D bis du même code prévoit, dans sa version applicable au litige, qu'à condition que le chef d'entreprise ait cessé toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés, et d'avoir fait valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession, le cédant bénéficie d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième. Aux termes de l'article 150-0 D ter de ce même code, dans sa version alors en vigueur : " I -L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis s'applique (...) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / (...) 2° Le cédant doit : / (...) b) Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ;(...) ". Ces dispositions, destinées à favoriser la continuation des entreprises lors du départ en retraite de leur chef effectif, constituent une exception aux règles de taxation des plus-values de cession professionnelle, et sont, par suite, d'interprétation stricte.

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. et Mme B... n'ont détenu continûment et directement la moitié des actions de la société Zi Media qu'entre le 1er décembre 2003 et le 12 mars 2008, l'autre moitié étant antérieurement détenue au travers d'une chaîne de deux sociétés, dont les requérants possédaient la quasi-totalité du capital de la société faîtière. De même, ils n'ont détenu continûment et directement pendant la même période que 9,89 % des actions de la société Cosmedia, le reste étant détenu indirectement, à l'identique de la précédente société. Les requérants soutiennent que cette détention indirecte d'une partie du capital des sociétés cédées n'est pas contraire à la notion de " personne interposée ", au sens des dispositions précitées, laquelle aurait une valeur générique et serait compatible avec des cas de détention incluant l'interposition de deux ou plusieurs personnes morales. Pour autant, de telles dispositions, qui doivent être interprétées strictement à défaut de disposition expresse visant des hypothèses de chaînes de participation, ne trouvent à s'appliquer que lorsque le cédant détient les droits en cause pour le pourcentage prévu, soit directement ou avec son groupe familial, soit le cas échéant au travers d'une personne interposée dans laquelle il exerce en droit ou en fait des fonctions dirigeantes. Ainsi, les moyens tirés de l'inexacte application de la loi et du principe d'interprétation stricte de la loi ne peuvent qu'être écartés.

4. Si les requérants soutiennent que l'instruction administrative 5 C-1-07 du 22 janvier 2007, à supposer même qu'elle soit à l'origine du redressement litigieux, a également ajouté une condition à la loi, en écartant les cas d'interposition de plusieurs sociétés, il apparaît que cette interprétation ne diffère rien de la lettre du 2° du I de l'article 150-0 D ter du même code. Ainsi, les moyens tirés tant de la méconnaissance de la doctrine administrative d'interprétation de la loi que de la méconnaissance de la loi par cette instruction doivent également être écartés.

5. En second lieu, pour démontrer la méconnaissance du principe constitutionnel de sécurité juridique, M. et Mme B... ne sauraient utilement invoquer la décision du Conseil Constitutionnel visée ci-dessus en date du 16 décembre 1999, qui fixe au législateur un objectif d'intelligibilité et de clarté de la loi. Par ailleurs, faute d'indiquer en quoi cette disposition limitant à l'interposition d'une seule personne porterait atteinte à la sécurité juridique, le moyen tiré de la méconnaissance de ce principe n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le

bien-fondé.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).

Délibéré après l'audience du 26 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 mai 2024.

Le président-rapporteur,

S. CARREREL'assesseure la plus ancienne

S. BOIZOT

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances, et la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00320


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00320
Date de la décision : 17/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Stéphane CARRERE
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : TZA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-17;22pa00320 ?
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