La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2024 | FRANCE | N°23PA03706

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 25 avril 2024, 23PA03706


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Lilou a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2021 de la maire de Paris portant révision des redevances pour emplacements réservés pour les transports de fonds ainsi que le titre de recette d'un montant de 10 000 euros émis à son encontre le 12 juillet 2021.



Par un jugement n° 2120528/4-2 du 12 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de recette contesté.



Pro

cédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 14 août 2023, la Ville de Paris, représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Lilou a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2021 de la maire de Paris portant révision des redevances pour emplacements réservés pour les transports de fonds ainsi que le titre de recette d'un montant de 10 000 euros émis à son encontre le 12 juillet 2021.

Par un jugement n° 2120528/4-2 du 12 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de recette contesté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 août 2023, la Ville de Paris, représentée par Me Falala, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2120528/4-2 du 12 juin 2023 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la société Lilou ;

3°) de mettre à la charge de la société Lilou le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tarif n'est pas disproportionné compte tenu des avantages procurés par la place dont la société Lilou dispose au droit de son magasin, avantages qu'elle avait invoqués en première instance ;

- les moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

Un mémoire enregistré le 2 avril 2024, présenté pour la société Lilou par Me Mestoudjian postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue le 11 décembre 2023 par une ordonnance du 23 novembre 2023, n'a pas été communiqué ni analysé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Falala, représentant la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. La société Lilou est titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public du 29 mars 2005 pour un emplacement situé au droit de l'établissement qu'elle exploite au 23, avenue Paul Doumer à Paris (16ème arrondissement). La Ville de Paris a émis, le 12 juillet 2021, un titre de recette pour un montant de 10 000 euros. La Ville de Paris relève appel du jugement du 12 juin 2023 par lequel, saisi à cette fin par la société Lilou, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de recette contesté.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :

2. Aux termes de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...). ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. ".

3. Qu'elle détermine ou qu'elle révise le tarif d'une redevance d'occupation domaniale, l'autorité compétente doit tenir compte des avantages de toute nature que le titulaire de l'autorisation est susceptible de retirer de l'usage privatif du domaine public. Cette fixation ou cette révision du tarif ne saurait aboutir à ce que le montant de la redevance atteigne un niveau manifestement disproportionné au regard de ces avantages.

4. En contestant, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le titre exécutoire contesté, les droits définis par la Ville de Paris, la société requérante a entendu en première instance avoir excipé de l'illégalité de l'arrêté du 11 janvier 2021 relatif à la fixation, à compter du 1er janvier 2021, des tarifs de redevances pour certaines occupations de la voie publique à Paris.

5. Par l'arrêté du 11 janvier 2021 précité, la maire de Paris a fixé à 10 000 euros par an et par emplacement le montant de la redevance due pour les emplacements réservés pour les transports de fonds.

6. Pour annuler le titre de recette contesté, le tribunal administratif de Paris a relevé qu'en invoquant le coût induit par la neutralisation de places de stationnement, les coûts supportés à raison de la gestion du domaine public ainsi que les tarifs appliqués dans d'autres communes, la Ville de Paris n'avait pas légalement fondé sa décision de fixation des tarifs des emplacements réservés sur les avantages de toute nature procurés à la société par cet emplacement.

7. Outre qu'elle avait invoqué la circonstance que la société bénéficiait de la neutralisation à titre exclusif de l'emplacement en litige, la Ville de Paris fait valoir sans être contestée que cette société occupe ainsi de façon permanente toute l'année un emplacement d'une longueur égale au double de celle d'un emplacement normalement dévolu au stationnement, ce qui lui permet notamment d'assurer la sécurité des convoyeurs de fonds. Il ne résulte pas de ce qui précède que le tarif opposé serait manifestement disproportionné au regard des avantages procurés. Dans ces conditions, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement s'est fondé sur le motif rappelé au point 6 pour annuler le titre exécutoire contesté.

8. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Lilou devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens soulevés par la société Lilou :

9. En premier lieu, à supposer que la société requérante entende, en se prévalant sans plus de précision du défaut de notification de " l'acte ", invoquer le moyen tiré de ce que ne lui a pas été notifié l'arrêté du 11 janvier 2021, un tel arrêté ne constitue pas une décision individuelle mais un acte réglementaire qui a fait l'objet d'une publication au bulletin officiel de la Ville de Paris du 29 janvier 2021. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'il ne peut lui être opposable.

10. En second lieu, aux termes de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci. / Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à : /

a) imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de

transaction non équitables, (...) ".

11. En application des dispositions de l'article L. 2213-3 du code général des collectivités territoriales, le maire peut, au titre de ses pouvoirs de police du stationnement, réserver des emplacements sur les voies publiques de l'agglomération pour faciliter le stationnement des véhicules de transport de fonds. Aussi, en fixant le tarif des redevances de ces emplacements réservés, la Ville de Paris n'a pas agi comme une entreprise intervenant dans le champ concurrentiel sur un marché, au sens des stipulations du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne susmentionnées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est inopérant et doit, dès lors, être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que la société Lilou n'est pas fondée à demander l'annulation du titre de recettes émis le 12 juillet 2021 par la Ville de Paris pour un montant de 10 000 euros. Ses conclusions aux fins de remboursement du montant du titre de recettes qu'elle a payé le 29 juillet 2021 doivent être rejetées en conséquence.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de la maire de Paris du 11 janvier 2021 relatif à la fixation, à compter du 1er janvier 2021, des tarifs de redevances pour certaines occupations de la voie publique à Paris :

13. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ".

14. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 11 janvier 2021 est devenu définitif le 30 mars 2021. Par suite, les conclusions déposées devant le tribunal administratif le 22 septembre 2021 tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 2021 sont tardives et doivent, pour ce motif, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Il y a lieu, de mettre à la charge de la société Lilou le versement d'une somme de 1 500 euros à la Ville de Paris sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2120528/4-2 du 12 juin 2023 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Lilou devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La société Lilou versera une somme de 1 500 euros à la Ville de Paris.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Ville de Paris et à la société Lilou.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2024.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA03706


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03706
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : FALALA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-25;23pa03706 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award