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04/04/2024 | FRANCE | N°23PA04419

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 04 avril 2024, 23PA04419


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 mai 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2313817/3-3 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédure devant la C

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Par une requête enregistrée le 21 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Sangue, demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 mai 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2313817/3-3 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Sangue, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2313817/3-3 du 10 octobre 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 16 mai 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français sont entachées de deux erreurs de droit ;

- ces décisions ont été prises en violation des articles 4 paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais, L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er mars 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 14 décembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, a refusé d'admettre M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 12 janvier 1987, est entré en France le 25 août 2017. Par un arrêté du 16 mai 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. M. A... relève appel du jugement du 10 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais : " (...) Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : soit la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / Soit la mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Aux termes de ces dispositions : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Toutefois, pour l'examen des demandes déposées par des ressortissants sénégalais en qualité de salarié, l'autorité administrative doit également prendre en compte la liste des métiers figurant en annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006.

3. Par ailleurs, en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité professionnelle ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

4. Pour refuser l'admission exceptionnelle au séjour de M. A..., le préfet de police s'est fondé sur la menace à l'ordre public que représente le requérant, ce dernier ayant présenté, à l'appui de sa demande de titre de séjour, une fausse pièce d'identité espagnole. Si M. A... soutient que la production de faux documents n'est pas constitutive d'une menace à l'ordre public, il ne conteste pas utilement la matérialité des faits. Ainsi, le préfet de police a pu, sans méconnaître des stipulations et dispositions précitées de l'accord franco-sénégalais et de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, estimer que la situation de l'intéressé ne relevait pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels, la circonstance que le préfet ait visé, en lieu et place de l'accord franco-sénégalais, l'accord franco-marocain, étant constitutive d'une simple erreur de plume.

5. En second lieu, selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. M. A... soutient qu'il réside en France depuis 2017, qu'il est titulaire d'un contrat de travail et qu'il est bien intégré socialement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant n'établit, ni même n'allègue, disposer d'attaches privées et familiales en France et que, en revanche, son épouse et son enfant résident dans son pays d'origine. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées sera écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A... ne pourra qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 avril 2024.

La rapporteure,

I. JASMIN-SVERDLINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA04419 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA04419
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : SANGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;23pa04419 ?
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