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04/04/2024 | FRANCE | N°22PA04889

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 04 avril 2024, 22PA04889


Vu la procédure suivante :



Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 18 novembre 2022 ainsi que les 7 juillet, 27 juillet, 13 septembre, 5 octobre, 20 octobre et 27 octobre 2023, la société Auchan Hypermarché, représentée par Me Encinas, demande à la Cour :



1°) d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2022 par lequel le maire de la commune de Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne) a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale n° PC 077 445 21 00027 et AT 077 21 00021 à la société Lidl,

pour le transfert et l'extension d'un magasin, portant la surface de vente à 1 811,25 m2 ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 18 novembre 2022 ainsi que les 7 juillet, 27 juillet, 13 septembre, 5 octobre, 20 octobre et 27 octobre 2023, la société Auchan Hypermarché, représentée par Me Encinas, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2022 par lequel le maire de la commune de Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne) a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale n° PC 077 445 21 00027 et AT 077 21 00021 à la société Lidl, pour le transfert et l'extension d'un magasin, portant la surface de vente à 1 811,25 m2 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Savigny-le-Temple le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial est entaché d'irrégularité, car il n'est pas justifié du respect de la procédure d'envoi des convocations à la réunion de cette commission prévue par l'article R. 752-35 du code de commerce ;

- cet avis est entaché d'erreurs d'appréciation au regard des articles L. 752-6 et R. 752-6 du code de commerce : tout d'abord, en ce qui concerne l'aménagement du territoire : le projet ne favorise pas une proximité de l'offre avec les lieux de vie ; ce projet ne répond pas à l'objectif de consommation économe de l'espace, notamment en matière de stationnement ; le projet aura des effets négatifs sur l'animation du milieu urbain, dès lors qu'il ne répond pas à un besoin de la population, sera en concurrence avec les commerces existants, est excentré par rapport aux lieux de vie et risque de générer une friche ; la commission n'a pas apprécié correctement l'impact du projet sur les flux de circulation ; la desserte du projet par les transports en commun et les modes doux de circulation est insuffisante ; le projet aura des effets négatifs sur la préservation du tissu commercial de centre-ville ; ensuite, en ce qui concerne le développement durable : le projet est insuffisant en ce qui concerne la qualité environnementale et l'insertion paysagère et architecturale ; enfin, en ce qui concerne la protection des consommateurs, le projet est peu accessible par rapport aux lieux de vie, ne prévoit ni concept novateur, ni offre diversifiée par rapport aux commerces situés aux alentours et ne favorise pas les producteurs locaux de la zone de chalandise.

Par un mémoire en défense et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 mars, 11 septembre, 25 septembre et 27 octobre 2023, la société Lidl, représentée par Me Robbes, conclut, dans le dernier état de ses écritures, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, jusqu'à l'obtention d'un permis de construire valant exploitation commerciale de régularisation et, en tout état de cause, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société requérante, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 avril, 21 juillet, 14 septembre, 18 octobre et 26 octobre 2023, la commune de Savigny-le-Temple, représentée par Me Jobelot, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

La commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces, enregistrées les 28 mars et 10 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- les observations de Me Encinas, pour la société Auchan Hypermarché,

- les observations de Me Drouet substituant Me Jobelot, pour la commune de Savigny-le-Temple,

- et les observations de Me de Ferrière substituant Me Robbes, pour la société Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 novembre 2021, la société Lidl a présenté une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, n° PC 077 445 21 00027 et AT 077 21 00021, pour le transfert et l'extension d'un supermarché sur un terrain en friche situé 175, rue de l'Industrie à Savigny-le-Temple (77445), portant la surface de vente de 985 à 1811,25 m2. La commission départementale d'aménagement commercial de Seine-et-Marne a rendu un avis favorable à ce projet le 9 mars 2022. Saisie par la société Auchan hypermarché le 26 avril 2022, la commission nationale d'aménagement commercial a également rendu un avis favorable au projet le 28 juillet 2022. Par un arrêté du 19 septembre 2022 le maire de la commune de Savigny-le-Temple a délivré à la société Lidl le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale sollicité. Par la présente requête, la société Auchan hypermarché demande l'annulation du permis de construire litigieux en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité de l'arrêté du 19 septembre 2022 :

En ce qui concerne la procédure devant la commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. / Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. ".

3. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des pièces produites par la commission nationale d'aménagement commercial, que les convocations à la réunion du 28 juillet 2022 ont été transmises le 13 juillet 2022 aux membres de cette commission. Ces convocations comportaient l'ordre du jour de la séance et précisaient que les documents mentionnés à l'article R. 752-35 du code de commerce seraient disponibles, au moins cinq jours avant la séance, sur la plateforme de téléchargement. D'autre part, il ressort des copies d'écran de la plateforme de téléchargement que les documents mentionnés à l'article R. 752-17 ont été mis à disposition des membres de la commission via cette plateforme le 12 juillet 2022, soit plus de cinq jours avant la réunion de cette commission. Par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la convocation des membres de la commission et de l'absence de mise à disposition de ces derniers des documents mentionnés à l'article R. 752-35 du code de commerce doivent être écartés.

En ce qui concerne l'appréciation portée sur le projet par la commission nationale d'aménagement commercial :

4. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. Aux termes de cet article : " (...) / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine (...) ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation (...) ; / 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; (...) ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi.

Quant à l'objectif d'aménagement du territoire :

5. En premier lieu, la société Auchan hypermarché soutient que le projet éloigne le magasin Lidl par rapport aux habitations et aux lieux de vie. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le site d'implantation de ce projet se trouve à 1,5 km du centre-ville, représentant un trajet de 13 minutes à pied, que les personnes habitant les logements situés à l'ouest et à l'est pourront y accéder à pied, les voies d'accès étant praticables pour les piétons. Si la société requérante fait valoir que l'avenue Olof Palme (route départementale 151), située au sud-ouest du projet, serait impraticable pour les piétons, il ressort des pièces du dossier qu'une voie praticable pour les piétons et les cyclistes longe cette route. En outre, un projet de prolongement de la rue du Titane, reliant la route départementale 306 à l'avenue des Routoires et comportant une voie réservée aux piétons et aux cyclistes, est engagé depuis août 2023 et permettra d'accéder à pied et en vélo au magasin Lidl. En conséquence, le moyen tiré de la localisation du projet à une distance trop éloignée des habitations sera écarté.

6. En deuxième lieu, la société Auchan hypermarché estime que le projet ne répond pas à l'objectif de consommation économe de l'espace, notamment en matière de stationnement, dès lors que, s'il prévoit de réduire le nombre de places de stationnement, qui seront portées de 257 à 217, il augmentera l'emprise des voiries et places de stationnement de 7 335 à 7 480 m2, dont 2 790 m2 de surface perméable et 4 690 m2 de surface imperméable. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du rapport d'instruction de la direction départementale de Seine-et-Marne, que le projet s'implantera sur un terrain de friche industrielle (ancien garage " Eldorauto "), sur laquelle est situé un bâtiment inoccupé depuis 10 ans, alors, au demeurant, que le terrain sur lequel se trouve l'actuel magasin Lidl sera occupé par une entreprise commerciale. Ce projet ne prévoit aucune nouvelle construction, mais, au contraire, augmentera la surface perméable du site, en la portant de 3 690m2, soit 24 % du terrain d'assiette du projet à 6 335 m2, soit 41 % de ce terrain. En outre, si la société requérante invoque la diminution des espaces verts de 145 m2, cette réduction concerne essentiellement la suppression de la bande végétale au droit du bâtiment, qui sera compensée par la création d'un auvent, destiné à protéger celui-ci de la chaleur et des intempéries. Enfin, la superficie perméable est augmentée par la perméabilisation de 95 % du parc de stationnement, aucune disposition n'interdisant, du reste, de prévoir un nombre de places de stationnement réservé aux cycles supérieur à celui qu'imposent les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme. Par conséquent, le moyen tiré du non-respect de l'objectif de consommation économe de l'espace devra être écarté.

7. En troisième lieu, la société Auchan hypermarché soutient que le projet aura des effets négatifs sur l'animation du centre-ville de Savigny-le-Temple, dès lors qu'il ne répond pas à un besoin de la population et n'apporte aucune offre complémentaire aux commerces de la zone de chalandise, qu'il sera en concurrence avec les commerces existants, qu'il est excentré des lieux de vie et qu'il risque de générer une nouvelle friche. Toutefois, d'une part, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008. En tout état de cause, le magasin Lidl est présent sur le territoire de la commune de Savigny-le-Temple depuis l'année 2000 et son offre ne sera que légèrement augmentée. En outre, plusieurs programmes immobiliers sont envisagés ou réalisés dans l'agglomération de Sénart, à laquelle la commune de Savigny-le-Temple appartient, entraînant une augmentation de la population dans cette agglomération, qui est estimée à 5,4 % dans la zone de chalandise du projet entre 2017 et 2025. Par ailleurs, l'offre de " discount " alimentaire est adaptée aux besoins d'une population, plus défavorisée que celle de l'ensemble de l'Ile-de-France. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'offre alimentaire de la société Lidl, spécialisée dans les produits bon marché, aurait un impact négatif sur les commerces du centre-ville, alors que la densité commerciale dans la zone de chalandise est inférieure aux moyennes départementale et nationale et qu'un supermarché a fermé en fin 2022. Enfin, comme indiqué au point 6, dès lors que le terrain sur lequel se trouve l'actuel magasin Lidl sera occupé par une entreprise commerciale, la société Auchan hypermarché n'est pas fondée à soutenir que le projet conduira à la création d'une nouvelle friche. Ainsi, le moyen tiré des effets négatifs du projet sur l'animation du centre-ville doit être écarté.

8. En quatrième lieu, la société Auchan hypermarché soutient que l'étude sur la circulation routière se fonde sur des données trop anciennes ou obtenues en période de confinement lié à la crise sanitaire du Covid 19 et montre que le carrefour giratoire des routes départementales 306 et 351 a des réserves de capacité limitée et que le trafic augmentera du fait du projet. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'étude spécifique relative à la circulation a été réalisée par le bureau d'études B Trafic le 9 septembre 2021, sur la base de comptage réalisés en décembre 2020, en l'absence de restriction de déplacement et en appliquant un taux de majoration de 20 % sur les flux constatés. Si cette étude souligne un accroissement du trafic routier sur le secteur, elle indique que les conditions de circulation et d'accès au futur magasin devraient être fluides et que le carrefour giratoire des routes 306 et 351 est largement dimensionné pour supporter les flux générés par le projet (pages 16 à 21). Le moyen tiré de la méconnaissance du critère de l'effet du projet sur les flux de circulation ne peut donc qu'être écarté.

9. En cinquième lieu, la société Auchan hypermarché soutient que la desserte du projet par les transports collectifs et les modes de transport doux est insuffisante. Il ressort cependant des pièces du dossier, notamment de l'analyse d'impact (page 44) que ce projet est desservi par deux lignes d'autobus comportant des arrêts situés respectivement à 550 mètres et à 600 mètres du projet, ces lignes d'autobus permettant de rejoindre la gare de RER. En outre, il ressort de ces pièces qu'une nouvelle ligne d'autobus Tzen reliant Lieusaint à la gare de Melun sera entièrement mise en service en 2024 et desservira le projet et que la gare de Savigny-le-Temple (RER D) est située à 12 minutes à pied du projet, et les accès des piétons au projet depuis les stations de transport collectif sont sécurisés. Enfin, il ressort de ces pièces que l'avenue Olof Palme comporte une piste cyclable, qui permet de relier la rue de l'Industrie, dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet, au centre-ville et à la gare de Savigny-le-Temple, cette voie comportant aussi un accès sécurisé pour les piétons. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone sera écarté.

10. En dernier lieu, la société requérante soutient que le projet aura des effets négatifs sur la préservation du tissu commercial des centres-villes de Moissy-Cramayel et de Nandy, communes situées dans la zone de chalandise du projet souffrant d'une absence de vitalité du tissu commercial. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que les taux de vacance commerciale constatés dans les communes de Moissy-Cramayel et de Nandy, respectivement de 10,6 % et 7,7 %, sont inférieurs à celui de la moyenne nationale, qui s'élève à 12,5 %, alors que, comme cela est exposé au point 7, la construction de programmes immobiliers entraînera une augmentation de la population dans la zone de chalandise et, d'autre part, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'offre alimentaire de la société Lidl, spécialisée dans les produits bon marché, aurait un impact négatif sur les commerces du centre-ville. Du reste, la circonstance que la ville de Moissy-Cramayel participe au programme " Petites villes de demain " ne suffit pas à établir que le déplacement et l'extension du supermarché Lidl fragiliserait les commerces du centre-ville de cette commune. En conséquence, le moyen tiré des effets négatifs du projet sur la préservation du tissu commercial du centre-ville ne pourra qu'être écarté.

Quant à l'objectif de développement durable :

11. En premier lieu, la société Auchan hypermarché soutient que le projet est peu ambitieux en matière environnementale, dès lors que les dispositifs d'économie d'énergie se limitent aux obligations réglementaires, que l'imperméabilisation restera importante alors que le projet prévoit de réduire le nombre de places de stationnement et que le dossier de demande ne précise pas ce qui est prévu concernant la mise en place d'un séparateur d'hydrocarbures. Cependant, il ressort des pièces du dossier de demande (pages 71 à 104) que le projet améliorera les performances thermiques et énergétiques du bâtiment, en particulier par l'isolation des façades, de la toiture et des menuiseries ainsi que le choix de matériels techniques de dernière génération, en ce qui concerne les installations frigorifiques et les panneaux photovoltaïques. En outre, comme exposé au point 6, les surfaces perméables seront augmentées par rapport à l'existant et un système de récupération des eaux de pluie comportant une noue paysagère et une structure réservoir sous les parkings perméables sera mis en place. Enfin, il est précisé, en page 92 du dossier de demande, que, " en l'état actuel des connaissances et des études réalisées sur le sujet, la mise en place d'un séparateur d'hydrocarbures n'apparaît pas nécessaire au vu des caractéristiques du projet. L'emploi ou non d'un tel dispositif devra néanmoins être établi en concertation avec les services de l'urbanisme de la commune de Savigny-le-Temple ". La société Auchan hypermarché n'est, par conséquent, pas fondée à soutenir que le projet serait entaché d'une erreur d'appréciation du critère de la qualité environnementale du projet.

12. En second lieu, la société requérante fait valoir que l'insertion paysagère et architecturale du projet est limitée, en réduisant la superficie d'espaces verts et en ne traitant pas l'ensemble des façades avec un bardage en bois et une végétalisation. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du plan de masse et des vues sur l'état actuel et l'état projeté, que le projet, qui s'implante dans une zone industrielle composée de constructions sans intérêt architectural, améliore l'aspect du bâtiment existant, par le vitrage et la mise en place d'un bardage en bois et d'une végétalisation sur la façade principale, visible depuis la route départementale 306, ainsi que sur le pourtour de la toiture. Il ressort également de ces pièces que les 10 arbres qui seront abattus afin de créer une noue paysagère destinée à récupérer les eaux pluviales et autour de laquelle des massifs de graminées et une prairie humide, seront replantés. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation en ce qui concerne l'insertion paysagère et architecturale du projet devra être écarté.

Quant à l'objectif de protection des consommateurs :

13. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante accessibilité du site d'implantation du projet par rapport aux lieux de vie, au regard des transports publics et des modes de déplacement doux doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 5 et 9 du présent arrêt.

14. En second lieu, la société Auchan hypermarché soutient que le projet ne prévoit ni concept novateur, ni offre diversifiée par rapport aux commerces alentours qui justifieraient le déplacement et l'extension du magasin actuel et qu'il ne valorise pas les producteurs locaux. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le projet prévoit une amélioration du confort d'achat des clients et proposera une offre de produits de marques nationales, de ses propres marques et de 89 sociétés de la région Ile-de-France, la circonstance qu'aucun de ces producteurs ne soit situé dans la zone de chalandise étant sans incidence sur l'appréciation du critère lié à la variété de l'offre proposée. En conséquence, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation au regard de la variété de l'offre commerciale sera écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la société Auchan hypermarché n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 19 septembre 2022 par lequel le maire Savigny-le-Temple a délivré à la société Lidl un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les frais liés à l'instance :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Savigny-le-Temple, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Auchan hypermarché demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société requérante le versement à la commune de Savigny-le-Temple et à la société Lidl, respectivement, d'une somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Auchan hypermarché est rejetée.

Article 2 : La société Auchan hypermarché versera à la société Lidl une somme de 1 500 euros et à la commune de Savigny-le-Temple une même somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Auchan hypermarché, à la société Lidl, à la commune de Savigny-le-Temple et à la commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 avril 2024.

La rapporteure, Le président,

I. JASMIN-SVERDLIN J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04889


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04889
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : ADDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;22pa04889 ?
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