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25/03/2024 | FRANCE | N°23PA00695

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 25 mars 2024, 23PA00695


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour.



Par un jugement n° 2116823 du 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des pièces enregistrées les 17 février 2023 et 23 février 2024

, M. A..., représenté par Me Keufak Tameze, demande à la cour :



1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridiction...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour.

Par un jugement n° 2116823 du 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 17 février 2023 et 23 février 2024, M. A..., représenté par Me Keufak Tameze, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement n° 2116823 du 20 décembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;

3°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et ceci sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de mettre fin à son signalement dans le système d'information Schengen dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, la somme de 1 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que son comportement ne constituait pas une menace pour l'ordre public ;

- il méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations du 1° et du 2° de l'article 6 du même accord ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée du fait de l'avis défavorable de la commission du titre de séjour ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 6 1° de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Des pièces ont été enregistrées le 21 février 2024 pour le préfet de la Seine-Saint-Denis.

Par une décision du 22 juin 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande de M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- et les observations de Me Keufak Tameze, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 29 octobre 1963, entré en France le 23 mai 2001 selon ses déclarations, a sollicité le 16 octobre 2020 le renouvellement de son certificat de résidence. Il relève appel du jugement du 20 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de séjour.

Sur la demande tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".

3. Par décision du 22 juin 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande de M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Dans ces conditions, il n'y a plus lieu de statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Pour refuser de faire droit à la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. A... le 16 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a considéré que le comportement de l'intéressé constituait une menace pour l'ordre public et qu'il ne pouvait se prévaloir des stipulations du deuxième alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2° au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ". Les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 2 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny à une amende de 450 euros pour des faits de conduite d'un véhicule sans permis commis le 25 avril 2020. S'agissant des mentions à son nom au fichier du traitement des antécédents judiciaires, il ressort que l'intéressé a notamment été signalé en 2014 pour les mêmes faits ainsi qu'en 2010 pour " autres délits routiers " et en 2001, 2005 et 2010 pour entrée ou séjour irrégulier, faits anciens et dépénalisés. Cette seule condamnation pénale isolée ainsi que ces mentions ne permettent pas de caractériser la menace pour l'ordre public que constituerait la présence de l'intéressé en France. De plus, il ressort des pièces du dossier que M. A... est marié avec une ressortissante française depuis le 11 août 2017, qu'il justifie d'une présence ancienne significative sur le territoire français de liens avec ses proches, notamment avec les enfants de sa conjointe ainsi qu'avec son beau-frère et son frère, et qu'il bénéficie d'une insertion professionnelle depuis juillet 2019, en qualité de gardien suppléant au profit de la ville de Paris depuis décembre 2019. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A..., au regard du but poursuivi par l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être accueilli.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. La présente décision implique nécessairement qu'un titre de séjour soit délivré à M. A.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, ou à tout préfet territorialement compétent, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais d'instance :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu d'admettre M. A... à l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : Le jugement n° 2116823 du 20 décembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis, ou à tout préfet territorialement compétent, de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2024.

La rapporteure,

A. ColletLa présidente,

C. Vrignon-Villalba

La greffière,

N. Couty

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00695


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00695
Date de la décision : 25/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : KEUFAK TAMEZE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-25;23pa00695 ?
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