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15/03/2024 | FRANCE | N°23PA02255

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 5ème chambre, 15 mars 2024, 23PA02255


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.



Par un jugement n° 2107545 du 23 janvier 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. B....



Par une requête enregistrée le 20 mai 2023, M. B..., représenté par Me Pacheco, demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2107545 du 23 janvier 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. B....

Par une requête enregistrée le 20 mai 2023, M. B..., représenté par Me Pacheco, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun n° 2107545 du 23 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet police l'obligeant à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son avocat, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'incompétence ;

- l'arrêté est entaché d'insuffisance de motivation ;

- l'arrêté est entaché d'une méconnaissance du droit à être entendu en violation de la directive 2008/115 du 16 décembre 2008 ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de base légale, dès lors qu'il est entré en France régulièrement sous couvert d'un visa ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté est entaché d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 19 décembre 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête de M. B... en soutenant qu'aucun des moyens de sa requête n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 5 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dubois a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 26 mars 1986 à Maatkas (wilaya de Tizi-Ouzou), a fait l'objet les 4 mars 2020 et 4 juillet 2021 de deux arrêtés lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Saisi par M. B... d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du 4 juillet 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande par un jugement n° 2107545 du 23 janvier 2023 dont M. B... relève régulièrement appel.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. D... C..., attaché d'administration de l'Etat, placé sous l'autorité du chef du 8ème bureau, qui disposait d'une délégation de signature à cette fin, accordée par un arrêté n° 2021-00377 du 3 avril 2021 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial le même jour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de son auteur manque en fait et doit être écarté.

3. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit ainsi être écarté.

4. En troisième lieu, M. B... soutient que l'arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire français aurait été pris en méconnaissance de son droit à être entendu lequel serait, selon lui, " garanti par la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ". Toutefois, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 C-383/13 PPU, les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus. En outre, la directive précitée du 16 décembre 2008 a fait l'objet d'une transposition en droit interne notamment par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité et par le décret du 8 juin 2011 n° 2011-820, de sorte que M. B... n'est pas fondé à se prévaloir d'une éventuelle méconnaissance de ses dispositions. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaitrait les dispositions de cette directive relatives au droit à être entendu ne peut qu'être écarté comme doublement inopérant.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré ".

6. Il ressort de l'arrêté attaqué que celui-ci a été édicté au motif que M. B... n'a pas justifié d'une entrée régulière en France et s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour. Si M. B... soutient qu'il est entré en France régulièrement sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités françaises, il ressort du visa ainsi produit que celui n'était valable que jusqu'au 15 janvier 2018, alors qu'il ressort du tampon figurant sur le passeport de l'intéressé que celui-ci n'est entré en France que le 10 juillet 2018, ainsi que l'a relevé le juge de première instance au point 1 de son jugement, ce que ne conteste pas M. B... en cause d'appel. Par suite, c'est à bon droit que le préfet de police, pour prononcer à l'encontre de M. B... une mesure d'obligation de quitter le territoire français, s'est fondé sur les dispositions précitées du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., célibataire et sans charge de famille, n'est entré en France en dernier lieu qu'en juillet 2018 à l'âge de trente-deux ans. La seule circonstance qu'il serait intégré auprès d'une association française d'aide à l'insertion en France des populations originaires d'Afrique du Nord ne saurait suffire à caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts d'ordre public poursuivis par l'arrêté. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance, par l'arrêté attaqué, des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

9. En sixième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... au regard des éléments portés à sa connaissance. Le moyen invoqué ne peut dès lors qu'être écarté.

10. En septième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

11. Il résulte de ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation doivent être rejetées, de même que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de police et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 27 février 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Vinot, présidente de chambre,

M. Marjanovic, président assesseur,

M. Dubois, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2024.

Le rapporteur,

J. DUBOISLa présidente,

H. VINOT

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA02255


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02255
Date de la décision : 15/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Jacques DUBOIS
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : PACHECO

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-15;23pa02255 ?
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