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08/03/2024 | FRANCE | N°23PA02068

France | France, Cour administrative d'appel, 9ème chambre, 08 mars 2024, 23PA02068


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.



Par un jugement n° 2207357 d

u 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.





Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2207357 du 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai 2023 et 23 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Birolini, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2207357 du 20 décembre 2022 rendu par le tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement contesté est insuffisamment motivé en tant qu'il ne fait pas mention des éléments de fait qui ont été retenus pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour, ne prend pas en considération l'ensemble des éléments tenant à sa situation personnelle s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire et a retenu une motivation erronée s'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français ;

- les juges de première instance ont commis une erreur de droit en retenant que la procédure de saisine de la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'était pas applicable aux ressortissants algériens et en estimant que les conditions pour prononcer une durée d'interdiction de retour sur le territoire français de deux ans étaient remplies ;

- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le préfet a retenu à tort que sa présence en France constituait une menace à l'ordre public.

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance du titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conditions de régularisation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- elle énonce à tort qu'il représente une menace à l'ordre public ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

En ce qui concerne la décision de refus d'octroi d'un délai volontaire :

- cette décision est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observation en défense.

La demande d'aide juridictionnelle de M. B... a été rejetée par une décision du 5 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- et les observations de Me Birolini, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 12 avril 1964, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 4 avril 2022, le préfet de la

Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... relève régulièrement appel du jugement du 20 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des termes du jugement contesté que les premiers juges ont, bien que succinctement, répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour. Même si les premiers juges n'ont pas précisément répondu à l'ensemble des arguments invoqués par M. B..., ce qu'ils n'étaient pas tenus de faire, une telle motivation est, en l'espèce, suffisante. Par ailleurs, en retenant qu'en application des dispositions combinées du 3° de l'article L. 611-1 et de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision de refus de titre de séjour qui était elle-même suffisamment motivée, les juges de première instance ont suffisamment motivé leur jugement. Au demeurant, si M. B... critique la teneur de la réponse apportée à ces moyens, ainsi que la motivation " erronée " du jugement en tant qu'il a statué sur les conclusions aux fins d'annulation de l'interdiction faite au requérant de retourner sur le territoire français, de telles contestations relèvent du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Les moyens doivent par suite être écartés.

3. En deuxième lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit commise par les premiers juges dans l'application des articles L. 435-1 et L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés comme étant inopérants.

4. En revanche, il résulte de l'instruction que M. B... avait soulevé en première instance le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que sa présence en France ne constituait pas une menace à l'ordre public. En omettant de répondre à ce moyen, les premiers juges ont, dès lors et dans cette mesure, entaché d'irrégularité le jugement attaqué. M. B... est, par suite, fondé à en demander l'annulation en tant que les premiers juges ont statué sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour.

5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour par la voie de l'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions de la requête de M. B....

Sur le fond du litige :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

6. En premier lieu, par arrêté n° 2021-1828 du 19 juillet 2021, publié au bulletin d'informations administratives de la préfecture de la Seine-Saint-Denis le même jour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation de signature à M. Mame Abdoulaye Seck, secrétaire général de la sous-préfecture du Raincy pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers. Dès lors qu'il n'est pas établi que les autorités précitées n'auraient pas été absentes ou empêchées lorsque l'arrêté en cause a été pris, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

7. En deuxième lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

8. L'arrêté en litige qui vise les dispositions légales applicables, en particulier l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, précise que M. B... a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et retient que si la situation des ressortissants algériens relèvent exclusivement de l'accord franco-algérien, sa demande a été examinée dans le cadre du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet. Il relève que l'intéressé ne justifie pas pouvoir bénéficier à ce titre d'une mesure de régularisation. Il précise également que M. B..., divorcé et père de deux enfants majeurs, ne peut prétendre au bénéfice de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il ne justifie d'aucun obstacle à la poursuite d'une vie privée et familiale normale en Algérie. Cet arrêté qui rappelle les dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au refus de délivrance d'un titre de séjour en raison de la menace à l'ordre public que constitue la présence en France d'un étranger, mentionne les trois condamnations prononcées à l'encontre de M. B... entre 2007 et 2010 et les délits à l'origine des peines infligées. Enfin, le préfet précise que l'intéressé ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 6-1 de l'accord

franco-algérien, en l'absence de justification suffisante de sa résidence en France depuis au moins dix ans, en particulier au titre des années 2012 à 2016. L'arrêté attaqué répond ainsi aux exigences de motivation posées l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

9. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué rappelé

ci-dessus, ni des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen suffisamment approfondi de la situation personnelle de M. B... avant de rejeter sa demande de délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation doit être écarté.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

11. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, cet article est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. S'agissant des ressortissants algériens, ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait préalablement dû saisir, en application du second alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour, ne peut qu'être écarté.

12. En quatrième lieu, les conditions dans lesquelles M. B..., ressortissant algérien, peut être admis à séjourner en France sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Le requérant ne peut, dès lors, utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour contester la décision attaquée portant refus de titre de séjour. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de la

Seine-Saint-Denis au regard de ces dispositions sont inopérants et ne peuvent qu'être écartés.

13. En cinquième lieu, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de modalités semblables d'admission exceptionnelle au séjour à celles prévues par l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

14. M. B... fait valoir la durée de son séjour en France depuis le mois de février 2002, la présence de ses deux enfants, désormais majeurs et titulaires de titres de séjour, ainsi que de son petit-fils de nationalité française qu'il prend en charge régulièrement et se prévaut de son engagement au sein de l'association des anciens combattants et prisonniers de guerre. Toutefois, il ne justifie pas des conditions de son séjour sur le territoire français avant 2016, par la seule production d'un extrait d'un jugement du tribunal de grande instance de Bobigny daté du 24 juin 2010, d'une déclaration de choix d'un médecin traitant établie au mois de janvier 2012 et en l'absence de toute pièce justificative au titre des années 2013 à 2015. M. B... qui a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de trente-sept ans ne justifie pas être dépourvu de toute attache familiale en Algérie et ne démontre pas, par la seule présence en France de ses deux enfants et de son petit-fils, que le centre de ses intérêts privés et familiaux serait durablement établi sur le territoire français. Par ailleurs, les circonstances qu'il soit investi dans des activités associatives et qu'il soit francophone ne permettent pas d'établir une insertion particulière et significative, M. B... ne démontrant par ailleurs aucune intégration professionnelle. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant d'exercer son pouvoir discrétionnaire de régularisation. Ce moyen doit par suite être écarté.

15. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

16. M. B... qui ne fait état d'aucun argument distinct de ceux exposés ci-dessus au point 14, tenant à la durée de son séjour en France, aux attaches familiales dont il dispose sur le territoire français et à son investissement associatif, ne démontre pas par ces seules circonstances que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6-5 de l'accord franco-algérien doivent être écartés.

17. En septième lieu, aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".

18. La menace pour l'ordre public s'apprécie au regard de l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant le comportement personnel de l'étranger en cause. Il n'est donc ni nécessaire, ni suffisant que le demandeur ait fait l'objet de condamnations pénales. L'existence de celles-ci constitue cependant un élément d'appréciation au même titre que d'autres éléments tels que la nature, l'ancienneté ou la gravité des faits reprochés à la personne ou encore son comportement habituel.

19. A supposer même que les condamnations prononcées à l'encontre de M. B... reposeraient sur des faits anciens et ne seraient pas constitutives d'une menace actuelle pour l'ordre public au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il résulte de l'instruction que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait, en tout état de cause, pris la même décision de refus de titre de séjour en se fondant, ainsi qu'il a été dit aux points 14 et 16, sur les seuls motifs tirés de ce que l'intéressé ne pouvait bénéficier d'une mesure de régularisation au titre du pouvoir discrétionnaire du préfet et ne remplissait pas les conditions d'attribution d'un certificat de résidence algérien sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par suite, le moyen tiré de ce que sa présence en France ne constituerait pas une menace actuelle à l'ordre public, ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

20. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants :(...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ;(...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 de ce code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués ".

21. En l'espèce, l'obligation de quitter le territoire français ayant été prononcée à la suite d'un refus de délivrance de titre de séjour, elle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, laquelle comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est suffisamment motivée comme énoncé au point 8.

22. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté attaqué, ni des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. B... avant de prendre à son encontre une mesure d'éloignement du territoire.

23. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation commise par le préfet de la Seine-Saint-Denis, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 14 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

24. L'arrêté attaqué qui vise les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application, précise que le risque que M. B... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français est motivé par trois précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre par le préfet de la Seine-Saint-Denis les 10 janvier 2006, 1er février 2010 et 6 janvier 2020, qu'il n'a pas exécutées en se maintenant sur le territoire. Par suite, la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

25. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". L'article L. 612-10 du même code dispose que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ". Il ressort de ces dispositions que lorsqu'un préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ volontaire, il lui appartient d'assortir cette décision d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois faire obstacle à la prise d'une telle mesure.

26. Contrairement à ce que soutient M. B..., ni la durée de son séjour en France qui n'est au demeurant pas démontrée comme énoncé précédemment, ni les liens familiaux dont il dispose sur le territoire, ne sont de nature à caractériser des circonstances humanitaires susceptibles de faire obstacle à la décision d'interdiction de retour sur le territoire français tant dans son principe que dans sa durée portée à deux ans. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet de la Seine-Saint-Denis doit être écarté.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 4 avril 2022. Ses conclusions à fin d'annulation doivent par suite être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 23 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 8 mars 2024.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA02068


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02068
Date de la décision : 08/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : BIROLINI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-08;23pa02068 ?
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