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06/03/2024 | FRANCE | N°22PA03594

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 06 mars 2024, 22PA03594


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision n° 1152 du 28 septembre 2021 par laquelle le maire de la commune de Moorea-Maiao a refusé de la titulariser en fin de stage.



Par un jugement no 2100558 du 7 juin 2022, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 1er août 2022

, Mme A..., représentée par Me Usang, demande à la Cour :



1°) d'annuler le jugement n° 2100558 du 7 juin 2022 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision n° 1152 du 28 septembre 2021 par laquelle le maire de la commune de Moorea-Maiao a refusé de la titulariser en fin de stage.

Par un jugement no 2100558 du 7 juin 2022, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2022, Mme A..., représentée par Me Usang, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100558 du 7 juin 2022 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision n° 1152 du 28 septembre 2021 portant refus de titularisation en fin de stage ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Moorea-Maiao la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable dès lors qu'elle a été présentée dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement attaqué ;

- au moment de la reprise en régie de la restauration scolaire la commune était tenue de l'intégrer au sein de la fonction publique en application des articles 73 et 74 de l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 et ne pouvait légalement la nommer en qualité de fonctionnaire stagiaire ;

- il appartient à la commune de Moorea-Maiao de démontrer qu'elle informé les agents des conditions d'intégration au sein de la fonction publique, de leur droit d'option et que des emplois à temps complet ont été ouverts ;

- le transfert de son contrat de travail vers la commune prononcé par le juge judiciaire a eu pour effet de lui octroyer la qualité de fonctionnaire titulaire ;

- la décision litigieuse n'est pas motivée ;

- aucun élément ne justifie le refus de titularisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2023, la commune de Moorea-Maiao, représentée par la Selarl ManaVocat, conclut au rejet de la requête de Mme A... et à ce que soit mise à sa charge la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de Mme A... était irrecevable dès lors qu'elle est dirigée contre le courrier du 28 septembre 2021 qui n'est pas la décision portant refus de titularisation et qu'en tout état de cause la demande de première instance présentée le 1er décembre 2021 était tardive ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 ;

- l'arrêté n° 119 DIPAC du 5 juillet 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été recrutée à compter de la rentrée scolaire 2003-2004 par un contrat à durée indéterminée pour exercer les fonctions de chef de cuisine au service de la restauration scolaire de Papetoai, service confié à la Fédération Tau Tamahere no Moorea-Maiao, association de droit privé. La commune de Moorea-Maiao ayant décidé, par une délibération du 10 novembre 2016, de reprendre en régie le service de restauration scolaire, par un arrêté du 30 avril 2020 Mme A... a été nommée à compter du 1er mai 2020 en qualité de fonctionnaire stagiaire dans le cadre d'emploi " exécution ". Par une décision du 28 septembre 2021, le maire de la commune a refusé la titularisation de la requérante en fin de stage et par un arrêté du 30 septembre 2021, il a mis fin au stage de Mme A... pour refus de titularisation à compter du 1er octobre 2021. Mme A... relève appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la légalité de la décision du 28 septembre 2021 :

2. En premier lieu, le licenciement d'un stagiaire en fin de stage n'entre dans aucune des catégories de mesures qui doivent être motivées en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

3. L'article 6 de l'arrêté du 5 juillet 2012 fixant le statut particulier du cadre d'emploi " exécution " de la fonction publique communale de la Polynésie française dispose que : " Les personnes recrutées en application de l'article 5 du présent arrêté sont nommées fonctionnaires stagiaires pour une durée d'un an (...) ".

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été nommée en qualité de fonctionnaire stagiaire par un arrêté du 30 avril 2020 prenant effet au 1er mai 2020. La décision du 28 septembre 2021 par laquelle le maire a refusé de titulariser l'intéressée et a mis fin à son stage à compter du 1er octobre 2021 est intervenue postérieurement à l'expiration de sa période de stage d'un an, qui doit dès lors être considérée comme ayant été implicitement prolongée, et constitue ainsi une décision de refus de titularisation prise en fin de stage. Dès lors, la requérante ne peut utilement soutenir que la décision litigieuse aurait dû être motivée.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 73 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs : " Les agents qui occupent un emploi permanent des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 1er sont réputés titulaires d'un contrat à durée indéterminée de droit public s'ils remplissent les conditions énoncées ci-après à la date de promulgation de la loi n° 2011-664 du 15 juin 2011 actualisant l' ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs : / a) Être en fonction ou bénéficier d'un congé ; / b) Avoir accompli des services continus d'une durée minimale d'un an dans un emploi permanent des collectivités ou des établissements mentionnés à l'article 1er au cours des trois années civiles précédentes ou être bénéficiaire d'un contrat d'une durée de plus de douze mois ou renouvelé par tacite reconduction pendant une durée totale supérieure à douze mois. ". Aux termes de l'article 74 de la même ordonnance : " Les agents mentionnés à l'article 73 ont vocation à être intégrés sur leur demande, après inscription sur une liste d'aptitude établie par l'autorité de nomination après avis d'une commission spéciale, dans les cadres d'emplois de fonctionnaires régis par le présent statut général s'ils remplissent les trois conditions suivantes : / a) Être en fonction ou bénéficier d'un congé à la date de l'intégration ; / b) Avoir accompli, à la date de l'intégration, des services effectifs d'une durée minimale d'un an dans un emploi permanent d'une collectivité ou d'un établissement mentionné à l'article 1er ; / c) Remplir les conditions énumérées à l'article 4 pour avoir la qualité de fonctionnaire. (...) ".

6. Mme A... soutient qu'en application des dispositions précitées elle ne pouvait être légalement nommée au sein de la fonction publique communale en qualité de fonctionnaire stagiaire et aurait dû être nommée en qualité de titulaire. Toutefois, il est constant qu'à la date de promulgation de la loi du 15 juin 2011, Mme A... était employée par la fédération Tau Tamahere no Moorea-Maiao, qui a le statut d'association de droit privé, et n'occupait pas un emploi permanent des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 1er de l'ordonnance du 4 janvier 2005. Dès lors, la requérante, qui n'a jamais contesté l'arrêté la nommant fonctionnaire stagiaire, ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir des dispositions précitées des articles 73 et 74 de cette ordonnance qui ne sont pas applicables à sa situation ni, par suite, soutenir que l'administration doit démontrer avoir respecté les règles de procédures instituées par cette ordonnance et notamment l'avoir informée des conditions d'intégration au sein de la fonction publique et de l'exercice de son droit d'option.

7. En troisième lieu, lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique gérant un service public administratif, il appartient à cette dernière, en l'absence de dispositions législatives spécifiques, et réserve faite du cas où le transfert entraînerait un changement d'identité de l'entité transférée, soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat dans la mesure où des dispositions législatives ou réglementaires n'y font pas obstacle. Dans cette dernière hypothèse, le refus des salariés d'accepter les modifications qui résulteraient de cette proposition implique leur licenciement par la personne publique, aux conditions prévues par le droit du travail et leur ancien contrat. En revanche, la garantie résultant des dispositions précitées ne peut être utilement invoquée à l'appui d'une contestation des conditions dans lesquelles la personne publique aurait procédé à leur titularisation dans un emploi, corps ou cadre d'emplois de la fonction publique.

8. Contrairement à ce que soutient Mme A..., il résulte du point précédent que le transfert, à la commune de Mooreia-Maiao, du contrat de travail la liant à la Fédération Tau Tamahere no Moorea-Maiao, prononcé par la cour d'appel de Papeete en application de l'article Lp. 1212-5 du code du travail, n'a eu ni pour objet ni pour effet de lui conférer la qualité de fonctionnaire titulaire.

9. Enfin, un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne. L'autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu'elle retient caractérisent des insuffisances dans l'exercice des fonctions et la manière de servir de l'intéressé. Cependant, la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

10. D'une part, contrairement à ce que soutient la requérante il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de refus de titularisation ait été prise en raison d'une suppression de poste.

11. D'autre part, si Mme A... soutient qu'aucun élément ne justifie la décision de refus de titularisation, à supposer qu'elle puisse être regardée comme soulevant ainsi le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bienfondé.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est en tout état de cause pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 28 septembre 2021 portant refus de titularisation en fin de stage.

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Moorea-Maiao, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune de Moorea-Maiao au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Moorea-Maiao en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Moorea-Maiao.

Délibéré après l'audience du 20 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, présidente,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mars 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI SAHRAOUILa présidente,

P. HAMON

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03594


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03594
Date de la décision : 06/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL MANAVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-06;22pa03594 ?
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