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04/03/2024 | FRANCE | N°23PA03134

France | France, Cour administrative d'appel, 8ème chambre, 04 mars 2024, 23PA03134


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 81 791,35 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation, en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 condamnant la République démocratique socialiste du Sri Lanka à lui verser la somme de 69 791,35 euros.



Par un jugement n° 1818426/4

-1 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 6...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 81 791,35 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation, en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 condamnant la République démocratique socialiste du Sri Lanka à lui verser la somme de 69 791,35 euros.

Par un jugement n° 1818426/4-1 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 69 791,35 euros assortie des intérêts légaux.

Par un arrêt n° 20PA02200 du 4 mai 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères contre ce jugement.

Par une décision n° 454277 du 10 juillet 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi formé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour :

Par la requête enregistrée sous le n° 20PA02200 le 10 août 2020, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères demandait à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 2020 et de rejeter la demande de M. A....

Il soutenait que :

- M. A... n'a pas démontré le caractère certain de son préjudice ; il n'a pas entamé toutes les procédures nécessaires pour obtenir l'exécution du jugement ; il n'est pas exclu que des biens appartenant à l'Etat Sri Lankais et susceptibles d'être saisis n'étaient pas protégés par l'immunité d'exécution ;

- le préjudice ne présente pas de caractère spécial, les victimes qui invoquent les jurisprudences Saleh et Susilawati étant de plus en plus nombreuses et l'indemnisation susceptible de leur être accordée fait peser une charge anormale sur le budget de l'Etat ;

- le préjudice ne présente pas de caractère de gravité, M. A... ayant négligé pendant sept ans de saisir son employeur pour qu'il lui paie ses heures supplémentaires ; le tribunal a omis de rechercher si M. A... ne disposait pas d'autres sources de revenus.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 décembre 2020, M. A..., représenté par Me Boisseau, concluait au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutenait que :

- l'avocat de l'ambassade du Sri Lanka a été saisi à trois reprises, en même temps que le ministère des affaires étrangères ; son silence traduit le refus d'exécuter le jugement ; un recours devant le juge de l'exécution était voué au rejet ; compte tenu de son âge et de ses faibles ressources, toute autre diligence était vaine ;

- les jurisprudences Saleh et Susilawati n'ont donné lieu qu'à un faible nombre de contentieux ;

- la circonstance qu'il aurait tardé à réclamer le paiement de ses heures supplémentaires est inopérante ; il a 77 ans et il est dépourvu de ressources.

Par des mémoires enregistrés sous le n° 23PA03134 les 18 octobre et 4 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Boisseau, persiste dans ses conclusions tendant au rejet de la requête et demande, en outre, à la cour :

1°) par la voie de l'appel incident, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 81 791,35 euros en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 condamnant la République démocratique socialiste du Sri Lanka à lui verser la somme de 69 791,35 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, portée à la somme de 6 500 euros si la ministre entendait, à la suite de l'annulation de l'arrêt n° 20PA02200 de la cour du 4 mai 2021, recouvrer ou déduire des condamnations à confirmer la somme de 2 000 euros mise à sa charge par cet arrêt sur le fondement de ces mêmes dispositions.

Il persiste dans ses moyens et soutient en outre que :

- la responsabilité de l'État du fait des lois est engagée sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques du fait de son impossibilité de faire exécuter par l'État du Sri Lanka le jugement du conseil de prud'hommes de Paris ;

- les préjudices dont il se prévaut présentent un caractère certain ; il a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris qui, par des ordonnances des 15 septembre et 13 octobre 2023, a rejeté ses demandes ;

- en tout état de cause, il a tenté devant le juge de l'exécution de renverser la présomption légale d'affectation des biens d'un État étranger " aux besoins de ses missions de souveraineté " ; l'identification de biens saisissables ne saurait constituer une obligation de résultat et la ministre elle-même n'énonce aucun bien de l'Etat étranger susceptible de faire l'objet d'une saisie forcée ; sa recherche d'un bien saisissable appartenant à la République démocratique socialiste du Sri Lanka n'étant pas affecté à ses missions non commerciales est loyale et de bonne foi ; il a identifié un véhicule de l'ambassade en France de l'Etat étranger comme étant saisissable ; l'article L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution n'exclut pas expressément toute saisie des véhicules ;

- ses préjudices présentent en outre un caractère spécial et grave ;

- il ressort du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 que son préjudice financier s'élève à 69 791,35 euros ;

- l'application de l'article 59 de la loi " Sapin II " du 9 décembre 2016 ne saurait avoir pour effet de remettre en cause les effets du jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 2020 sans méconnaître le principe de sécurité et de confiance légitime.

Par un mémoire enregistré le 10 novembre 2023, sous le n° 23PA03134, la ministre de l'Europe et des affaires étrangères persiste dans ses conclusions et dans ses moyens.

Elle soutient en outre que :

- si M. A... a saisi, postérieurement à la décision du Conseil d'Etat du 10 juillet 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris, il n'établit pas le caractère certain de son préjudice dès lors que ses demandes présentées devant le juge de l'exécution sont purement formelles, portent sur des mesures d'exécution générales, imprécises ou concernent des biens manifestement insaisissables comme les véhicules appartenant à une ambassade en France qui sont des biens affectés à l'usage de la mission diplomatique ;

- il n'apporte au demeurant aucun commencement de preuve de ce qu'il n'existerait aucun bien appartenant à l'Etat étranger qui ne serait pas affecté à ses missions non commerciales rendant impossible toute saisie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Boisseau, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a travaillé en qualité de chauffeur à l'ambassade de la République démocratique socialiste du Sri-Lanka du 15 mai 2007 au 3 mai 2014. Par un jugement du 12 décembre 2016, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la République démocratique socialiste du Sri-Lanka à lui verser la somme de 69 791,35 euros, correspondant à des rémunérations qui ne lui avaient pas été versées, à son indemnité de licenciement, à des dommages et intérêts pour travail dissimulé et pour perte de droits à la retraite complémentaire ainsi qu'à la somme accordée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères ayant implicitement rejeté la demande formée le 27 juillet 2018 par M. A..., tendant à ce que l'Etat lui verse une indemnité de 81 791,35 euros pour rupture de l'égalité devant les charges publiques, au titre des condamnations prononcées contre l'Etat du Sri-Lanka qui n'ont pu être recouvrées, M. A... a saisi le tribunal administratif de Paris. Par un jugement du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 69 791,35 euros, assortie des intérêts moratoires avec capitalisation. Par un arrêt du 4 mai 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté les conclusions de la requête du ministre de l'Europe et des affaires étrangères tendant à l'annulation de ce jugement et au rejet de la demande de M. A... présentée devant le tribunal administratif de Paris. Par une décision du 10 juillet 2023, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi formé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la cour.

Sur le fondement de la responsabilité de l'Etat français :

2. Aux termes de l'article L. 111-1 du code des procédures civiles d'exécution : " (...) L'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution ". Aux termes de l'article L. 111-1-1 du même code, issu de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de l'action publique : " Des mesures conservatoires ou des mesures d'exécution forcée ne peuvent être mises en œuvre sur un bien appartenant à un Etat étranger que sur autorisation préalable du juge par ordonnance rendue sur requête ". Aux termes de l'article L. 111-1-2 du même code : " Des mesures conservatoires ou des mesures d'exécution forcée visant un bien appartenant à un Etat étranger ne peuvent être autorisées par le juge que si l'une des conditions suivantes est remplie : / 1° L'Etat concerné a expressément consenti à l'application d'une telle mesure ; / 2° L'Etat concerné a réservé ou affecté ce bien à la satisfaction de la demande qui fait l'objet de la procédure ; / 3° Lorsqu'un jugement ou une sentence arbitrale a été rendu contre l'Etat concerné et que le bien en question est spécifiquement utilisé ou destiné à être utilisé par ledit Etat autrement qu'à des fins de service public non commerciales et entretient un lien avec l'entité contre laquelle la procédure a été intentée./ Pour l'application du 3°, sont notamment considérés comme spécifiquement utilisés ou destinés à être utilisés par l'Etat à des fins de service public non commerciales, les biens suivants : / a) Les biens, y compris les comptes bancaires, utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de l'Etat ou de ses postes consulaires, de ses missions spéciales, de ses missions auprès des organisations internationales, ou de ses délégations dans les organes des organisations internationales ou aux conférences internationales ; / b) Les biens de caractère militaire ou les biens utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions militaires ; / c) Les biens faisant partie du patrimoine culturel de l'Etat ou de ses archives qui ne sont pas mis ou destinés à être mis en vente ; / d) Les biens faisant partie d'une exposition d'objet d'intérêt scientifique, culturel ou historique qui ne sont pas mis ou destinés à être mis en vente ; / e) Les créances fiscales ou sociales de l'Etat ".

3. Ces dispositions reprennent en droit interne la règle coutumière du droit public international selon laquelle les Etats bénéficient par principe de l'immunité d'exécution pour les actes qu'ils accomplissent à l'étranger, cette immunité faisant obstacle à la saisie de leurs biens, à l'exception de ceux qui ne se rattachent pas à l'exercice d'une mission de souveraineté.

4. La responsabilité de l'Etat du fait des lois est susceptible d'être engagée, sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de l'adoption d'une loi à la condition que cette loi n'ait pas entendu exclure toute indemnisation et que le préjudice dont il est demandé réparation, revêtant un caractère grave et spécial, ne puisse, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés.

5. Il résulte des dispositions du code des procédures civiles d'exécution issues de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de l'action publique citées au point 2 qu'elles n'ont pas entendu exclure toute indemnisation et que, dans ces conditions, la responsabilité de l'Etat est susceptible d'être engagée à l'égard de M. A... sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, en raison de l'impossibilité pour celui-ci de faire exécuter par l'Etat du Sri Lanka le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 le condamnant à verser à M. A... la somme de 69 791,35 euros.

Sur le caractère certain du préjudice :

6. En application de l'article L. 111-1-1 du code des procédures civiles d'exécution cité au point 2, les mesures d'exécution forcée ne peuvent être mises en œuvre sur un bien appartenant à un Etat étranger, dans les conditions prévues à l'article L. 111-1-2 du même code, que sur autorisation préalable du juge de l'exécution, par une ordonnance rendue sur requête. Dès lors que la loi impose l'intervention préalable du juge de l'exécution, le préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir l'exécution d'un jugement par un Etat étranger ne peut revêtir un caractère certain tant que le juge, qui doit être ainsi saisi, n'a pas constaté qu'aucune des conditions posées à l'article L. 111-1-2, permettant l'exécution forcée, n'est remplie.

7. Il résulte de l'instruction que le 15 septembre 2023, postérieurement à la décision du 10 juillet 2023 du Conseil d'Etat, M. A... a saisi, en vue d'obtenir le paiement de la créance dont il a été reconnu titulaire, par le jugement du 12 décembre 2016 du conseil de prud'hommes de Paris, à l'encontre de la République démocratique socialiste du Sri-Lanka, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris. Par une ordonnance du même jour, ce dernier a rejeté sa demande au motif notamment qu'" aucune des conditions posées à l'article L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution, permettant l'exécution forcée du jugement du conseil de prud'hommes de Paris en date du 12 décembre 2016, n'est remplie " et qu'" aucun bien n'est désigné dans la requête ". Le 13 octobre 2023, M. A... a réitéré sa demande et sollicité du juge de l'exécution l'autorisation de mettre en œuvre des mesures d'exécution forcée sur deux au moins des trois véhicules de l'ambassade en France de la République démocratique socialiste du Sri-Lanka. Par une ordonnance du même jour, sa demande a été rejetée au motif que " rien ne permet de considérer que les véhicules dont la saisie est sollicitée sont affectés à des fins commerciales étrangères à toute activité diplomatique ". Le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a ainsi constaté qu'aucune des conditions posées à l'article L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution, permettant l'exécution forcée du jugement du conseil de prud'hommes de Paris en date du 12 décembre 2016 n'était remplie. Dans ces conditions, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères n'est pas fondé à soutenir que les demandes de M. A... présentées devant le juge de l'exécution auraient été purement formelles au motif qu'elles ne portaient que sur des mesures d'exécution générales, imprécises ou visaient des biens manifestement insaisissables. Par suite, la circonstance nouvelle à la date à laquelle la cour statue tirée de la saisine préalable du juge de l'exécution, et alors que ni devant le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, ni devant la juridiction administrative, M. A... n'est tenu d'apporter la preuve de ce que la République démocratique socialiste du Sri Lanka ne détiendrait sur le territoire français aucun bien susceptible d'être saisi en application de l'article L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution, est de nature à établir le caractère certain de son préjudice.

Sur le caractère spécial du préjudice :

8. Pour contester le caractère spécial du préjudice, le ministre de l'Europe et des affaires européennes soutient que, depuis que le Conseil d'Etat a rendu les décisions n° 325253 du 11 février 2011 et les décisions de Section du 14 octobre 2011 n° 329788, 329789, 329790 et 329791, et au fur et à mesure que se diffuse la connaissance de cette jurisprudence, les demandes n'auraient cessé de croitre et qu'il serait déraisonnable de faire peser sur le budget de l'Etat le versement de telles sommes alors que leur montant résulte pour une part du manque de diligence de M. A... à faire valoir ses droits auprès de son employeur pendant la durée de son contrat de travail. Il précise qu'entre 2006 et 2020, il aurait été saisi de quatorze requêtes et de cinq recours gracieux préalables qui se référeraient aux jurisprudences dont il fait état. Cependant, compte tenu du faible nombre des victimes d'agissements analogues imputables à des ambassades d'Etats étrangers sur le territoire français, les préjudices dont M. A... se prévaut peuvent être regardés comme présentant un caractère spécial. Par ailleurs, la circonstance que son employeur soit un Etat étranger, qui comme tel bénéficie d'immunités, ne peut faire obstacle à la reconnaissance du caractère spécial de son préjudice, M. A... ne pouvant être réputé avoir par avance accepté le risque résultant de la méconnaissance par son employeur des dispositions d'ordre public applicables à son affiliation à un régime de retraite.

Sur la gravité du préjudice :

9. Il résulte de l'instruction qu'eu égard à la nature et au montant des sommes en cause, allouées par la juridiction prudhommale au titre notamment des rémunérations qui n'ont pas été versées, de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour travail dissimulé et de la perte de droit à la retraite complémentaire, et à la situation de

M. A..., né en 1943, et ne disposant que de ressources modestes, le préjudice invoqué revêt un caractère de gravité de nature à ouvrir droit à indemnisation sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques. La circonstance que M. A... aurait tardé à alerter son employeur de son absence d'affiliation n'est pas de nature à ôter au préjudice subi par celui-ci son caractère de gravité.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'Europe et des affaires étrangères n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 69 791,35 euros, correspondant au montant total des sommes mises à la charge de la République démocratique du Sri-Lanka par le jugement du conseil de prudhommes de Paris du 12 décembre 2016 assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2018 avec capitalisation annuelle à compter du 27 juillet 2019.

Sur les conclusions d'appel incident :

11. Dans le dernier état de ses écritures, M. A... demande à la cour la condamnation de l'Etat à lui verser la somme globale de 81 791,35 euros en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 12 décembre 2016 condamnant la République démocratique socialiste du Sri Lanka à lui verser la somme de 69 791,35 euros. Toutefois, l'intéressé ne conteste pas l'évaluation par le tribunal de ses préjudices qui s'élève à 69 791,35 euros. En l'absence de tout moyen soulevé à l'appui de ces conclusions incidentes, ces dernières ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'Europe et des affaires étrangères est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Délibéré après l'audience du 5 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2024.

La rapporteure,

V. Larsonnier La présidente,

A. Menasseyre

Le greffier,

P. Tisserand

La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA03134 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03134
Date de la décision : 04/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : BOISSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-04;23pa03134 ?
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