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01/03/2024 | FRANCE | N°23PA00873

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 5ème chambre, 01 mars 2024, 23PA00873


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet de police de Paris lui a refusé le renouvellement de son certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2217399 du 9 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.



Procédure devant la Cour :



Par un

e requête et des mémoires enregistrés le 28 février 2023, le 26 avril 2023 et le 31 juillet 2023, M. B..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet de police de Paris lui a refusé le renouvellement de son certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2217399 du 9 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 28 février 2023, le 26 avril 2023 et le 31 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Rochiccioli, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2217399 du 9 novembre 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet de police de Paris lui a refusé le renouvellement de son certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de la situation du requérant dans les mêmes conditions de délai et de lui délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 250 euros à Me Rochiccioli, son avocate, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, et qu'en cas de refus d'admission, cette somme lui sera versée.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :

- la procédure est irrégulière faute de preuve que l'avis du collège des médecins de l'OFII ait été émis de manière collégiale ;

- elle méconnaît les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité, excipée par voie d'exception, du refus de renouvellement de titre de séjour ;

- elle méconnait l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

Par un mémoire, enregistré le 26 juillet 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Par une décision du 8 février 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dubois ;

- les observations de Me Sainte Fare Garnot, substituant Me Rochiccioli, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de nationalité algérienne, né le 9 juin 1995 à Sidi M'Hamed (Algérie), est entré en France le 2 aout 2017 sous couvert d'un visa court séjour. Il a ensuite obtenu un titre de séjour pour raisons médicales le 18 aout 2020. Par un arrêté du 20 mai 2022, le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de titre, lui a fait l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 9 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant respectivement refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / [...] 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions de procédure sont applicables aux ressortissants algériens : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve contraire. En se bornant à soutenir que la démonstration du caractère collégial de cette délibération n'est pas rapportée par la seule signature de l'avis rendu le 11 octobre 2021 par les médecins composant le collège compte tenu de leur éloignement géographique, M. B... n'apporte aucun commencement de preuve susceptible de remettre en cause l'existence de cette délibération collégiale, conformément à la mention figurant sur cet avis, laquelle peut se tenir au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, aucune disposition n'imposant qu'elle se déroule en présentiel. Par ailleurs, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que le collège de médecins ait l'obligation de communiquer les éléments qui lui ont permis de rendre son avis, en particulier les informations sur lesquelles il s'est fondé pour prendre sa décision. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour aurait été édictée à l'issue d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, pour l'application des stipulations et dispositions citées au point 2, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'OFII venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. Si le demandeur entend contester le sens de l'avis du collège médical de l'OFII, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. D'une part, pour refuser à M. B..., qui souffre d'une hémiplégie gauche partielle et de troubles cognitifs, la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de police de Paris s'est fondé, notamment, sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) émis le 27 décembre 2021, indiquant que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si M. B... conteste le sens de l'avis émis par l'OFII le 27 décembre 2021, aucun des certificats médicaux dont il s'est prévalu en première instance et dont il se prévaut en appel ne permet d'établir qu'une interruption du suivi dont il bénéficie en France serait susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le certificat du praticien hospitalier en date du 24 février 2023 qu'il produit en cause d'appel faisant seulement état de ce que " une prise en charge adaptée à son handicap avec kinésithérapie, injections de toxine et évaluation neuro-orthopédique est poursuivi " et de ce que " ce suivi serait difficile d'accès dans son pays d'origine ". Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait, en suivant l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.

6. D'autre part, si M B... soutient que la prise en charge médicale dont il bénéficie en France ne serait pas disponible en Algérie, un tel moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant dès lors que l'arrêté attaqué n'a pas été pris au motif qu'une telle prise en charge serait disponible dans son pays d'origine.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. B... soutient que la décision attaquée méconnait les droits qu'il tient du texte précité en faisant valoir qu'il est entré en France en août 2017 sous couvert d'un visa court séjour, qu'il bénéficie d'un titre de séjour pour raisons médicales depuis le 18 aout 2020 et qu'il exerce un emploi dans l'animation. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant n'est entré qu'à l'âge de vingt-deux ans sur le territoire national, où il réside célibataire et sans charge de famille. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but d'ordre public poursuivi. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, par suite, qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 du présent arrêt que le moyen tiré de l'illégalité, excipée par la voie d'exception, du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

11. Si M. B... soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les dispositions de l'article précité, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 6 du présent arrêt qu'un tel moyen ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- M. Marjanovic, président assesseur,

- M. Dubois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er mars 2024.

Le rapporteur,

J. DUBOISLa présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00873 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00873
Date de la décision : 01/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Jacques DUBOIS
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-01;23pa00873 ?
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