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29/02/2024 | FRANCE | N°22PA05151

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 29 février 2024, 22PA05151


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :





La société française du radiotéléphone a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 août 2021 par lequel le maire de la commune de Romainville (Seine-Saint-Denis) s'est opposé à la déclaration préalable de travaux relative à l'implantation d'antennes relais de téléphonie mobile déposée le 26 janvier 2021, sur le toit d'un immeuble situé 2 rue Youri Gagarine.



Par un jugement n° 2114436 du 6 octobre 20

22, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.







Procédure devant la Cour :





P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société française du radiotéléphone a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 août 2021 par lequel le maire de la commune de Romainville (Seine-Saint-Denis) s'est opposé à la déclaration préalable de travaux relative à l'implantation d'antennes relais de téléphonie mobile déposée le 26 janvier 2021, sur le toit d'un immeuble situé 2 rue Youri Gagarine.

Par un jugement n° 2114436 du 6 octobre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 5 décembre 2022 et le 17 octobre 2023, la société française du radiotéléphone, représentée par Me Bidault, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2114436 du 6 octobre 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 août 2021 du maire de la commune de Romainville ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Romainville, à titre principal de lui délivrer une décision de non-opposition à la déclaration préalable ou, à titre subsidiaire, de se prononcer à nouveau sur la déclaration préalable, dans les deux cas dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Romainville le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé s'agissant de l'examen du moyen tiré de la méconnaissance par l'arrêté du point III du règlement plan local d'urbanisme intercommunal ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit pour s'être borné à considérer que l'adaptation sollicitée n'était pas nécessaire sans rechercher si cette adaptation était nécessaire ;

- elle aurait dû bénéficier des dispositions dérogatoires prévues par le point III du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal et par l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme relatives aux adaptations mineures ;

- l'arrêté contesté ne pouvait se fonder sur les dispositions de l'orientation d'aménagement et de programmation dès lors que :

. il se borne à faire état d'une non-conformité du projet sans aucune justification ;

. ladite orientation d'aménagement et de programmation opposée est illégale en ce qu'elle est fondée sur la " thématique environnement " qui ne correspond à aucune catégorie visée par l'article L. 123-1-4 du code de l'urbanisme, qu'elle fixe des restrictions trop précises et que ses prescriptions relèvent d'une police administrative spéciale et non de la réglementation d'urbanisme ;

- le motif tiré du dépassement de la hauteur maximale est illégal dès lors que les travaux projetés sont étrangers à la non-conformité alléguée au règlement du plan local d'urbanisme intercommunal et que les règles de hauteur ne s'appliquent pas aux équipements publics et aux installations liées à l'exploitation de services publics.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 septembre et 30 octobre 2023, la commune de Romainville, représentée par Me Chaineau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société française du radiotéléphone le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Bidault, représentant la société française du radiotéléphone.

Considérant ce qui suit :

1. La société française du radiotéléphone a déposé, le 6 juillet 2021, une déclaration préalable en vue de l'implantation de six antennes-relais de téléphonie mobile sur le toit-terrasse d'un immeuble d'habitation situé 2 rue Youri Gagarine à Romainville (Seine-Saint-Denis). Par un arrêté du 23 août 2021, le maire de Romainville s'est opposé à cette déclaration préalable. La société relève appel du jugement du 6 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement contesté :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Si la société requérante fait grief au jugement contesté de ne pas être suffisamment motivé en ce qu'il n'a pas exposé les raisons pour lesquelles il estime que l'adaptation du projet n'est rendue nécessaire ni par la nature du sol ni par la configuration des parcelles ni par le caractère des constructions avoisinantes, il ressort de ses mentions qu'il cite, au point 4, les dispositions des points III.1.b et III.1.d du règlement du plan local d'urbanisme ainsi que celles de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme et qu'il précise au point 5 que le projet prévoit l'implantation d'antennes-relais de téléphonie mobile en bordure du toit-terrasse d'un immeuble. Il en résulte qu'il est ainsi suffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement contesté :

3. En premier lieu, aux termes du point III. 1. b. du règlement du PLUi d'Est Ensemble, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " 1. Dispositions écrites / b. Aspect extérieur des constructions / Les toitures : / Les éléments techniques : / (...) Les antennes d'émission ou de réception des signaux radioélectriques doivent être installées obligatoirement en toiture de la façon la moins visible possible depuis l'espace public. Lorsqu'elles sont implantées en terrasse, elles doivent être en retrait horizontal d'au moins 3 mètres par rapport à l'acrotère (...) ". Le point I. d) précise que : " Autres dispositions générales / (...) Adaptation mineure / Les règles et les servitudes définies par le Plan Local d'Urbanisme intercommunal ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes (...) ". Aux termes de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme : / 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; / 2° Ne peuvent faire l'objet d'aucune autre dérogation que celles prévues par les dispositions de la présente sous-section ".

4. La société requérante soutient que la décision ne pouvait lui opposer le motif tiré de ce que le projet est implanté sans respecter le retrait de 3 mètres et qu'elle aurait dû bénéficier d'adaptations mineures prévues par les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme et du code de l'urbanisme, du fait de la configuration du toit de l'immeuble sur lequel est implanté le projet d'antenne, lequel accueille déjà les infrastructures d'un autre opérateur de téléphonie mobile ainsi que des éléments techniques liés au fonctionnement de cet immeuble, et rend ainsi impossible le respect de la distance de 3 mètres de retrait. Toutefois, et dès lors que la configuration du toit de l'immeuble sur lequel seront implantées les antennes ne relève ni de la nature du sol ni de la configuration des parcelles ni du caractère des constructions avoisinantes, c'est à bon droit et sans méconnaitre les dispositions rappelées au point 3 que lui a été opposé le motif contesté.

5. En deuxième lieu, la décision contestée a relevé que le projet est situé à moins de 100 mètres d'un groupe scolaire et d'une crèche, considérés comme éléments sensibles, et qu'il n'est dès lors pas compatible avec " les orientations d'aménagement et de programmation du PLUi thématique Environnement " selon lesquelles " Aucune nouvelle antenne relai ne pourra être implanté[e] dans un rayon de 100 mètres autour des équipements sensibles tels que les établissements de soin, les équipements sportifs et [c]eux accueillant du jeune public tels que par exemple les crèches et les établissements scolaires (...) ".

6. Si un organe délibérant est compétent pour fixer, en fonction des circonstances locales, les règles concernant la destination, la nature et l'implantation des constructions autorisées sur son territoire, parmi lesquelles figurent les antennes relais de téléphonie mobile, ces dispositions ne permettent pas en revanche, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de faire légalement obstacle à l'implantation des antennes de téléphonie mobile à proximité de certains bâtiments, en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier une telle exclusion.

7. Toutefois, la commune de Romainville n'invoque, hormis un avis du 8 avril 2010 de l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail et une instruction du 15 avril 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relative à l'urbanisme de proximité des lignes de transport d'électricité, aucune circonstance locale particulière et ne s'appuie sur aucun élément circonstancié de nature à établir l'existence, en l'état des connaissances scientifiques, d'un risque pouvant résulter, pour le jeune public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile et justifiant que, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en œuvre par les autorités compétentes, soient réglementées l'implantation de ces antennes dans les communes relevant du PLUi dans un rayon de cent mètres autour d'équipements dits " sensibles ". Il résulte de ce qui précède que la décision ne pouvait légalement se fonder sur la méconnaissance de l'orientation d'aménagement et de programmation contestée.

8. Si la décision contestée a opposé en dernier lieu le motif tiré de ce que l'installation a pour effet de dépasser la hauteur maximale de 31 mètres prévue par l'article V.f) du règlement du plan local d'urbanisme, ces dernières dispositions prévoient toutefois que ne sont pas soumis à cette limitation " les équipements publics et les installations liées à l'exploitation des services publics " dont relèvent les antennes qui sont l'objet de la déclaration préalable. Il en résulte que la décision ne pouvait légalement se fonder sur ce motif.

9. Il résulte de ce qui précède que la société française du radiotéléphone n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Romainville, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société française du radiotéléphone demande au titre des frais exposés par elle. Il y a lieu de mettre à la charge de la société française du radiotéléphone une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Romainville sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société française du radiotéléphone est rejetée.

Article 2 : La société française du radiotéléphone versera une somme de 1 500 euros à la commune de Romainville.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société française du radiotéléphone et à la commune de Romainville.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 février 2024.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA05151


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05151
Date de la décision : 29/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-29;22pa05151 ?
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