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27/02/2024 | FRANCE | N°22PA01594

France | France, Cour administrative d'appel, 9ème chambre, 27 février 2024, 22PA01594


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits, intérêts de retard et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017.



Par un jugement n° 2100081 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregi

strée le 8 avril 2022, M. B..., représenté par Me Naïm, avocat, demande à la Cour :



1°) d'annuler le jugement n° 210...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits, intérêts de retard et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017.

Par un jugement n° 2100081 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2022, M. B..., représenté par Me Naïm, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100081 du 8 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, intérêts de retard et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017 ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il appartient à l'administration de démontrer qu'il aurait agi en qualité de consultant indépendant au titre des années en litige ;

- l'administration n'établit pas le bien-fondé des rectifications en litige ;

- les revenus rectifiés ne pouvaient, à tout le moins, être taxés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux dès lors qu'il se trouve dans un lien de subordination ;

- les sommes qui ont fait l'objet des impositions litigieuses ne pouvaient pas être imposées dans la catégorie des bénéfices non-commerciaux mais dans celles des traitements et salaires ou des revenus non dénommés.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot ;

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., exerçant une activité de consultant informatique, a fait l'objet d'un contrôle de son dossier fiscal au titre des années 2014 à 2017. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 12 juillet 2019, notifié au requérant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2014 à 2017, sur le fondement des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts, ainsi que, outre des intérêts de retard, une majoration de 80 % pour activité occulte prévue à l'article 1728 du code général des impôts. Par un jugement n° 2100081 du 8 février 2022 dont il interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 à 2017.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article 155 A du code général des impôts : " I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A. (...). ". Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.

3. L'administration fiscale apporte la preuve que des sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières en vertu des dispositions précitées par la production d'éléments attestant de ce que ces personnes ont réalisé les prestations de services en cause ou de ce qu'elles contrôlent la personne qui perçoit la rémunération de ces services. Dans l'hypothèse où l'administration s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au contribuable d'apporter des éléments permettant d'établir que la facturation de ces prestations par la société établie hors de France aurait trouvé une contrepartie réelle dans une intervention qui lui aurait été propre et de regarder le service ainsi rendu comme l'ayant été pour son compte.

4. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification en date du 12 juillet 2019 et des renseignements fournis suite à une demande d'assistance administrative internationale formés auprès du Royaume-Uni et de la Lettonie, que les sociétés Rafel Consulting et Inkorp Consulting, établies au Royaume-Uni, ont facturé à la société SA Vision It Group, située en France, des prestations informatiques, respectivement pour la première à hauteur de 67 752 euros pour l'année 2014 et 19 088 euros pour l'année 2015, et pour la seconde à hauteur de 28 820 euros pour l'année 2015, 124 379 euros pour l'année 2016 et 57 393 euros pour l'année 2017 pour lesquelles elles ont été rémunérées par des virements bancaires sur des comptes bancaires ouverts en Lettonie auprès de la banque ISC Rietumu Banka alors même qu'elles ne disposaient ni d'établissement secondaire ni de filiale dans ce pays. L'administration fiscale a également relevé que les jours de prestations facturés par les deux sociétés correspondaient à ceux facturés par la société Vision It Group à ses clients Natixis et BNP Paribas Arbitrage. Par ailleurs, M. B... était bien nommément désigné dans les contrats de prestations de service entre Vision It Group, Natixis et BNP Paribas Arbitrage comme la personne chargée d'exécuter la prestation pour le compte de la SA Vision It Group, document portant par ailleurs sa signature. La SA Vision It Group a facturé mensuellement les prestations à ses clients Natixis et BNP Paribas Arbitrage par des factures identifiant le requérant au moyen du trigramme " CMO " (première lettre du prénom suivie des deux premières lettres du nom de famille), selon l'usage constant de cette société pour désigner ses consultants. Enfin, les renseignements fournis à la suite de la demande d'assistance administrative internationale auprès des autorités fiscales britanniques ont permis de mettre en évidence que les sociétés Rafel Consulting et Inkorp Consulting étaient en sommeil (dormant company) depuis leur création jusqu'à la date de leur radiation, qu'elles ne possédaient aucun moyen humain ou matériel pour mener à bien une activité économique, ni numéro de TVA intracommunautaire alors que des prestations de service étaient facturées à un assujetti français.

5. De surcroît, M. B..., qui du reste ne conteste pas sérieusement l'analyse du service, n'apporte aucun élément permettant d'établir que la facturation des prestations informatiques par les sociétés Rafel Consulting et Inkorp Consulting aurait trouvé une contrepartie réelle dans une intervention qui leur aurait été propre et de regarder le service ainsi rendu comme l'ayant été pour leur compte. Il n'établit pas non plus, ni même n'allègue, que ces sociétés exerceraient, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale autre que la prestation de services. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme ayant apporté la preuve que les rémunérations versées par les sociétés Rafel Consulting et Inkorp Consulting pouvaient être regardées comme entrant dans les prévisions de l'article 155 A du code général des impôts.

6. Si M. B... soutient que l'administration n'a pas établi que son activité réalisée de consultant auprès des sociétés Natixis et BNP Paribas devait être qualifiée d'activité indépendante non commerciale, et qu'elle doit être regardée comme une activité salariale ou une activité génératrice de revenus non dénommés, il résulte de l'instruction et notamment de ce qui a été dit aux points 4 et 5 précédents que l'administration a établi la réalisation par M. B... de son activité en dehors de tout lien de subordination avec la société Vision It Group, eu égard à l'existence de l'apparence de la situation que le requérant a créée au moyen de la facturation de ses prestations, à la société Vision It Group, par les sociétés Rafel Consulting et Inkorp Consulting, la société Vision It Group l'ayant d'ailleurs désigné au titre de son contrat avec la société Natixis comme " prestataire chargé d'exécuter la prestation pour [son] compte ". S'agissant des prestations exécutées auprès de cette dernière société, la production d'un compte-rendu d'activité établi au nom du requérant ne suffit pas à permettre de considérer que la société Vision It Groupe aurait été son employeur, en l'absence de tout élément qu'il appartient au requérant de produire quant aux modalités de recrutement et d'organisation de son activité courante par cette société.

7. Compte tenu des éléments mentionnés aux points 4 à 6, l'activité de consultant en informatique exercée par M. B... en France au cours des années 2014 à 2017 doit être regardée comme une activité professionnelle, individuelle et indépendante, dont les revenus sont taxables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement des dispositions de l'article 92 du code général des impôts.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. B... en lien avec la présente instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administrateur des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France.

Délibéré après l'audience du 2 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 27 février 2024.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRÈRE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA01594 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01594
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CABINET F. NAIM

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;22pa01594 ?
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