La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2024 | FRANCE | N°20PA03619

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 15 février 2024, 20PA03619


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... E... et Mme G... E..., née C..., ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer le sursis à statuer sur leur requête dans l'attente de la décision du juge pénal ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales assortis des majorations et des intérêts de retard, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2016.



Par un jugement no 1925006/1-1 du 30 septembre 20

20, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... et Mme G... E..., née C..., ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer le sursis à statuer sur leur requête dans l'attente de la décision du juge pénal ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales assortis des majorations et des intérêts de retard, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2016.

Par un jugement no 1925006/1-1 du 30 septembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, des mémoires complémentaires et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 27 novembre 2020, 4 décembre 2020, 22 octobre 2021, 25 juillet 2022, 27 septembre 2022, 6 juillet 2023, 27 juillet 2023, 26 octobre 2023, 20 novembre 2023 et le 7 février 2024, M. et Mme E..., représentés par le cabinet Chess Avocats, demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction judiciaire compétente ait tranché la question relative à la propriété des avoirs bancaires qui constitue une question préjudicielle ;

2°) d'annuler le jugement no 1925006/1-1 du 30 septembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

3°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge.

Ils soutiennent que :

- la question relative à la propriété des avoirs bancaires en litige constitue une question préjudicielle relevant de la compétence des juridictions judiciaires de sorte que la Cour doit surseoir à statuer sur la présente requête dans l'attente de la décision du juge judiciaire ainsi que le prévoit la documentation administrative publiée sous le n° BOI-CTX-DG-20-60-20 ;

- le jugement du Tribunal administratif de Paris est irrégulier dès lors que :

- les premiers juges ont procédé d'office à une substitution de base légale en retenant que l'article 151 du code général des impôts était applicable aux avoirs bancaires en question, conférant ainsi à Mme E... le statut de " co-titulaire " des comptes bancaires, alors que l'administration a seulement retenu la qualité de bénéficiaire économique ;

- les premiers juges ont ignoré leur argument selon lequel l'article 151 du code général des impôts est inapplicable en présence de sociétés interposées ;

- le tribunal a dénié l'existence des détournements commis par le conseil de la famille C... et a estimé que ces détournements étaient sans influence sur le litige fiscal ;

- les impositions litigieuses ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors que la proposition de rectification du 26 décembre 2017 ne comporte aucune référence aux 45 pièces qui ont été consultées par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, que le service ne leur a pas communiqué les coordonnées complètes du Procureur de la République ou du juge d'instruction et ne les a pas informés qu'il leur appartenait de demander à l'autorité judiciaire la communication des documents que l'administration fiscale ne détenait pas, qu'ils ne pouvaient avoir accès à leur dossier pénal dès lors qu'au moment où l'administration a exercé ce droit de communications, ils n'étaient pas encore mis en examen et que le service ne leur a pas communiqué la synthèse individuelle établie par la direction nationale des enquêtes fiscales alors que ce document est interne à l'administration fiscale ;

- les impositions litigieuses ont été établies en méconnaissance de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne dès lors que la procédure d'imposition ne leur a pas permis d'accéder à leur dossier pénal ;

- en application du droit à un procès équitable prévu par l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont un des corollaires est le principe d'égalité des armes, prévu à l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ils auraient dû avoir accès à leur dossier pénal ;

- ils n'étaient pas titulaires ou co-titulaires des comptes bancaires ouverts au sein de la HSBC Private Bank au nom des entités Astorn Services Investments Ltd et Maxtree Limited ;

- ils ne pouvaient être regardés comme bénéficiaires économiques ou détenteurs des avoirs figurant sur ces comptes et n'étaient pas dans l'obligation de déclarer ces comptes bancaires dès lors que :

- le jugement du Tribunal correctionnel de Paris en date du 16 décembre 2021 et l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 10 mai 2023, qui sont revêtus de l'autorité de la chose jugée, les ont relaxés des faits de fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale et ont statué sur la titularité des avoirs en retenant que ceux-ci étaient exclusivement rattachés à Mme B... C..., mère de Mme E... ;

- la synthèse individuelle " BUP " est dépourvue de toute valeur probante, compte tenu des erreurs qu'elle comporte, et n'est pas de nature à établir que Mme E... était bénéficiaire des avoirs figurant sur les comptes bancaires litigieux ;

- en tout état de cause, à supposer même que Mme E... ait eut la qualité de bénéficiaire économique, cette circonstance ne l'obligeait pas à déclarer lesdits comptes bancaires ;

- c'est à tort que le service a fondé les rectifications en litige sur l'article 151 du code général des impôts dès lors que celui-ci est inapplicable, en l'absence de dispositions précisant les modalités d'application, qu'il ne saurait trouver application que si le contribuable détient directement les avoirs et non lorsque ceux-ci sont détenus par l'intermédiaire de sociétés ;

- en présence d'une société interposée, seul l'article 123 bis est susceptible d'être appliqué ; c'est la position qui a été exprimée par l'administration dans un document rédigé sous la forme de questions/réponses, sur le dispositif de régularisation des avoirs détenus à l'étranger et dans la documentation administrative référencée BOI-5 I-1-00 ;

- le respect du principe de l'annualité de l'impôt faisait obstacle à ce que le service procède par extrapolation pour évaluer le montant des revenus imposables ;

- le service a évalué le montant des revenus imposables au titre des années en litige alors qu'il avait été dument informé des détournements commis par M. F..., ancien conseil de la famille C... ;

- la quote-part des avoirs figurant sur les comptes ouverts au nom de l'entité Maxtree Limited ne pouvait être fixée à un tiers dès lors que l'administration avait indiqué ne pas avoir d'information sur le mode de détention par Mme E... des entités Maxtree Limited et Astorn Services Investments Ltd ni sur la quote-part détenue par chacun des ayants-droits et que ces avoirs auraient dû être répartis entre elle, sa mère, son frère et sa sœur.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juin 2021, 14 septembre 2022, 19 octobre 2023, 8 novembre 2023, 22 janvier 2024 et 5 février 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer sur les conclusions de M. et Mme E... compte tenu des dégrèvements prononcés en cours d'instance.

Il soutient qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les impositions, majorations et intérêts de retard relatifs aux années 2007 à 2016 qui ont été dégrevées en cours d'instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

- les observations de Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une demande d'entraide judiciaire présentée par les autorités suisses, le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nice a fait procéder, le 20 janvier 2009, à une perquisition au domicile de M. A..., ancien informaticien de la filiale établie à Genève (Suisse) de la banque britannique HSBC Private Bank, soupçonné d'avoir dérobé des données de sa " base clients ". L'autorité judiciaire, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, a communiqué les données ainsi saisies à l'administration fiscale, le 9 juillet 2009, le 2 septembre 2009 et le 12 janvier 2010. L'administration fiscale a estimé qu'il existait une présomption que M. et Mme E... détiennent des avoirs à l'étranger non déclarés logés sur des comptes bancaires de la banque HSBC établie à Genève. Sur avis conforme de la commission des infractions fiscales, elle a déposé plainte contre les intéressés auprès du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris, le 20 décembre 2012, estimant, notamment, qu'ils s'étaient frauduleusement soustraits à l'établissement et au paiement d'une partie des impôts. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 26 décembre 2017, notifié à M. et Mme E..., selon la procédure de taxation d'office, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2007 à 2016 lesquelles ont été assorties de majoration et des intérêts de retard. M. et Mme E... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le non-lieu à statuer :

2. Par une décision du 19 octobre 2023, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2010 à 2016 pour un montant en droits de 318 267 euros et 319 456 euros de pénalités et intérêts de retard. Par une deuxième décision du 8 novembre 2023, ont été dégrevées les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2009, soit les sommes de 66 817 euros en droits et 77 509 euros de pénalités et intérêts de retard. Enfin, par une troisième décision du 25 janvier 2024, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2007 et 2008 ont été entièrement dégrevées pour des montants de 144 204 euros en droits et 177 579 euros de pénalités et intérêts de retard. Dès lors, les conclusions de M. et Mme E... tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris du 30 septembre 2020, à la décharge, en droits, intérêts de retard et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2016 ainsi que celles tendant à ce que la Cour sursoie à statuer jusqu'à ce que la juridiction judiciaire compétente ait tranché la question relative à la propriété des avoirs bancaires ont perdu leur objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme E....

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et Mme G... E..., née C..., et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales (division du contentieux).

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure ;

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI SAHRAOUILe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03619


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03619
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL CHESS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;20pa03619 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award