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14/02/2024 | FRANCE | N°22PA04100

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 14 février 2024, 22PA04100


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015.



Par un jugement n° 1806412/2 du 6 juillet 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 6 septem

bre 2022, M. B..., représenté par Me Marion Dos Santos, demande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugement du 6 juillet 2022 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Par un jugement n° 1806412/2 du 6 juillet 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Marion Dos Santos, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 juillet 2022 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance de la doctrine administrative ;

- à titre principal, les § 90 et 120 de la doctrine BOFIP BOI-RSA-CHAMP-20-30-50 faisaient obstacle à l'imposition en litige ;

- il n'a pas bénéficié d'un avantage en nature au sens de la législation relative aux cotisations sociales ;

- à titre subsidiaire, l'évaluation de l'avantage doit être réduite dès lors qu'il n'occupait pas personnellement toutes les pièces de ce logement, qu'il s'acquittait des factures de gaz, d'électricité et d'eau et qu'il était soumis à des sujétions ;

- une réduction de 30 % doit être appliquée conformément au § 160 de la doctrine BOFIP BOI-RSA-BASE-20-20.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 octobre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 12 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Topin,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal personnel de M. B..., l'administration a considéré que le logement de fonction mis gracieusement à sa disposition par la commune de Torcy (Seine-et-Marne) lui avait procuré un avantage en nature imposable et, après évaluation forfaitaire, a réintégré la valeur de cet avantage dans son revenu imposable des années 2013, 2014 et 2015 dans la catégorie des traitements et salaires. M. B... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Melun qui a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en résultant.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. B... soutient que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance de la doctrine administrative, il résulte du point 12 du jugement attaqué que le tribunal a précisément motivé la réponse à ce moyen qu'il a regardé comme inopérant. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier.

Sur les conclusions à fin de décharge ou de réduction des impositions contestées :

En ce qui concerne la loi fiscale :

3. Aux termes de l'article 82 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits (...) / Le montant des rémunérations allouées sous la forme d'avantages en nature est évalué selon les règles établies pour le calcul des cotisations de sécurité sociale en application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou de l'article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime ".

4. Il résulte de l'instruction, notamment des attestations produites, établies par les représentants de la commune de Torcy pour laquelle M. B... exerçait les fonctions de directeur des services de la jeunesse, étayées par des documents précis et circonstanciés, que le requérant établit qu'il n'avait pas la jouissance exclusive de l'ensemble du logement composé de quatre chambres et dans lequel des tiers étaient également logés par la commune de manière occasionnelle. Il a néanmoins bénéficié à titre gratuit de la jouissance d'une de ces chambres. Il est ainsi fondé à soutenir qu'il ne pouvait être imposé que sur la partie du logement dont il avait un usage personnel soit sur une valeur correspondant à un quart de la valeur retenue par l'administration à titre d'avantage en nature.

En ce qui concerne la doctrine administrative :

5. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable à l'espèce : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

6. Selon les dispositions du § n° 120 de l'instruction BOI-RSA-BASE-20-20 relative notamment aux avantages en nature : " L'avantage de logement est évalué forfaitairement ou, sur option de l'employeur, d'après la valeur locative cadastrale augmentée des avantages accessoires retenus pour leur valeur réelle. / L'option pour l'évaluation forfaitaire ou selon la valeur locative cadastrale peut être exercée pour l'ensemble des salariés ou salarié par salarié ". Aux termes des dispositions du § n° 160 de cette instruction, un abattement pour sujétions de 30 % sur la valeur locative cadastrale ou sur la valeur forfaitaire de l'avantage logement doit être appliqué " Pour les salariés ne pouvant accomplir leur activité sans être logés dans les locaux où ils exercent leurs fonctions ".

7. En premier lieu, M. B..., qui est fondé à se prévaloir de la doctrine administrative dès lors qu'elle se rapporte à une situation qui, selon lui, justifiait qu'il ne déclare pas l'avantage en litige, ne peut toutefois utilement soutenir que les dispositions des paragraphes n° 120 et suivants de l'instruction BOI-RSA-BASE-20-20 font obstacle à ce que l'administration procède à l'imposition de l'avantage en nature consenti au contribuable dans l'hypothèse où l'employeur ne l'aurait pas évalué lui-même selon les modalités prévues par les dispositions du § 120 et expressément mentionné sur ses bulletins de salaires.

8. En second lieu, si le requérant fait valoir qu'il doit bénéficier d'un abattement pour sujétions de 30 % sur la valeur de l'avantage lié au logement en application des dispositions du paragraphe n° 160 de l'instruction BOI-RSA-BASE-20-20, en invoquant des sujétions liées à " une forme d'astreinte ", il ne résulte pas de l'instruction que M. B... se soit vu attribuer la disposition de la chambre qu'il occupait à raison de nécessités de service. Il n'est donc pas fondé à solliciter à ce titre le bénéfice d'un abattement sur l'évaluation de l'avantage à laquelle a procédé l'administration.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à obtenir la réduction des trois-quarts de la base imposable qui lui a été assignée au titre des années 2013, 2014 et 2015 au titre de l'avantage en nature résultant de la mise à disposition d'un logement et la réduction correspondante, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à sa charge. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de

1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La base d'imposition assignée à M. B... au titre de l'impôt sur le revenu des années 2013, 2014 et 2015 à raison de l'avantage résultant de la mise à disposition d'un logement est réduite des trois-quarts.

Article 2 : M. B... est déchargé, en conséquence de la réduction d'assiette prononcée à l'article 1er ci-dessus, des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015, en droits et pénalités.

Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 5 :' Le surplus de la requête de M. B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 février 2024.

La rapporteure,

E. TOPINLe président,

I. BROTONS

La greffière

C. ABDI-OUAMRANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04100
Date de la décision : 14/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : DOS SANTOS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-14;22pa04100 ?
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