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07/02/2024 | FRANCE | N°22PA00438

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 07 février 2024, 22PA00438


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Systemic a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2013 et des intérêts de retard correspondants, ainsi que de l'amende prévue au 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts mise à sa charge au titre des années 2011 et 2012.



Par un jugement no 2001655-1/1 du 25 no

vembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Systemic a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2013 et des intérêts de retard correspondants, ainsi que de l'amende prévue au 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts mise à sa charge au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement no 2001655-1/1 du 25 novembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2022, et des mémoires enregistrés les 18 novembre 2022 et 6 décembre 2022, la société Systemic, représentée par le cabinet d'avocats Avodia, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2001655-1/1 du 25 novembre 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période courue du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2013 et des intérêts de retard y afférents ainsi que l'amende prévue au 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts mise à sa charge au titre des années 2011 et 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de rectification est irrégulière, le service vérificateur n'ayant pas procédé à un contrôle sur pièces mais à une vérification de comptabilité, sans lui accorder les garanties attachées à cette procédure ;

- l'administration fiscale ne pouvait lui refuser le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les trois factures émises par la SNC Villeau dès lors que la preuve de l'absence de versement de la taxe sur la valeur ajoutée n'est pas apportée et que l'administration n'établit pas davantage qu'elle avait connaissance qu'elle participait à une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne pouvaient lui être assignés dès lors qu'il n'est pas établi que la taxe afférente aux factures délivrées par la SNC Villeau avait bien été portée en déduction sur les déclarations qu'elle a déposées ;

- elle n'est pas redevable de l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts ;

- le montant de cette amende est hors de proportion avec les sommes qu'elle a effectivement versées à la SNC Villeau.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 26 avril 2022 et 29 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Systemic ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Nadia Zeudmi Sahraoui,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Morisset pour la SAS Systemic.

Une note en délibéré, enregistrée le 6 février 2024, a été présentée pour la SAS Systemic, par Me Morisset.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Systemic, dont le dirigeant est M. A..., est une société spécialisée dans l'achat-revente de produits informatiques et dans les prestations de conseil en matière informatique. Elle a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013. A l'issue des opérations de contrôle, elle s'est vu notifier, selon la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre de la période du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2013, assortis de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts ainsi que de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du même code. Une amende égale à 50 % des sommes versées au titre des factures de complaisance a également été appliquée sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2011 et 2012. A la suite de la réclamation contentieuse préalable du 20 octobre 2017 par laquelle la société Systemic a contesté l'ensemble des impositions mises à sa charge, l'administration fiscale a, par une décision du 8 novembre 2019, dégrevé les pénalités pour manquement délibéré au titre des années 2011 à 2013. Par la présente requête, la société Systemic relève appel du jugement du 25 novembre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " I. - Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. ". L'article R*13-1 du même livre dispose que : " Les vérifications de comptabilité mentionnées à l'article L. 13 comportent notamment : a) La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce ; b) L'examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de la comptabilité à l'aide particulièrement des renseignements recueillis à l'occasion de l'exercice du droit de communication, et de contrôles matériels. ". Enfin, selon l'article L. 47 du même livre, dans sa rédaction alors applicable au litige : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette, le contrôle et le recouvrement des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. ". Et enfin selon l'article L. 101 du même livre, alors applicable au litige : " L'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle même terminée par un non-lieu. ".

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales, notamment auprès de l'autorité judiciaire, a seulement pour objet de permettre au service, pour l'établissement et le contrôle de l'assiette d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières, ou dans les mêmes conditions, de prendre connaissance, et le cas échéant, copie, de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Sauf disposition spéciale, il est mis en œuvre sans formalités particulières à l'égard de cette personne et, lorsqu'il est effectué auprès de tiers, n'est pas soumis à l'obligation d'informer le contribuable concerné. En revanche, l'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un membre d'une profession non commerciale lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise ou ce contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont, le cas échéant, elle peut remettre en cause l'exactitude. L'exercice régulier du droit de vérification de comptabilité suppose le respect des garanties légales prévues en faveur du contribuable vérifié, au nombre desquelles figure notamment l'envoi ou la remise de l'avis de vérification auquel se réfère l'article L. 47 du même livre.

5. En l'espèce, l'administration fiscale a notifié à la société Systemic des rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la remise en cause de la déductibilité de la TVA grevant trois factures émises par la SNC Villeau les 2 décembre 2011, 30 décembre 2011 et 12 avril 2012 au motif que ces factures constituaient des factures de complaisance. La société Systemic conteste ces redressements en faisant valoir que sous couvert d'une procédure de contrôle sur pièces, l'administration fiscale s'est livrée, en réalité, à un examen critique de sa comptabilité, et qu'elle n'a dès lors pas pu bénéficier des garanties attachées à la vérification de comptabilité. Toutefois, il résulte de l'instruction que le service vérificateur a exercé son droit de communication auprès du Tribunal de grande instance de Paris les 28 août 2014, 22 septembre 2014 et 12 janvier 2015 et a, à cette occasion, pris connaissance des procès-verbaux d'audition du dirigeant de la société Systemic et de perquisition des locaux de cette société, et également, des factures délivrées par la SNC Villeau ainsi que des extraits de comptabilité de la société Systemic sur lesquels figuraient les écritures comptables relatives à ces factures. Le service, qui n'a réalisé aucun examen critique des pièces comptables consultées au regard des déclarations de TVA de la société, s'est borné à considérer que les factures émises par la SNC Villeau devaient être regardées comme des factures de complaisance compte tenu des informations relevées dans les procès-verbaux, communiqués par l'autorité judiciaire, en date des 18 février 2013 et 19 et 20 novembre 2013 lesquelles ont permis à l'administration de constater que la SNC Villeau n'avait aucun salarié, avait pour unique associée la SA Immpart et avait été dissoute le 31 octobre 2012 et que le dirigeant de la société Systemic avait lui-même reconnu que les trois factures en litige comportaient un " faux intitulé " et étaient destinées à rémunérer une tierce personne en contrepartie de prestations d'intermédiaire. La seule circonstance que la consultation des factures enregistrées dans la comptabilité de la société requérante ait permis au service d'évaluer le montant de la taxe déduite à tort n'est pas suffisante pour considérer que l'administration a procédé à une vérification de comptabilité. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration fiscale aurait irrégulièrement procédé à une vérification de comptabilité sans lui accorder les garanties inhérentes à cette procédure.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. Toutefois, les personnes qui effectuent des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée n'exercent le droit à déduction qu'au moment de la livraison. 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ". Aux termes du 4 de l'article 283 du même code : " Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée. ". Et selon le 2 de l'article 272 du même code : " La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture ".

7. En vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée. Dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et se présente comme tel à ses clients, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y est mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture de complaisance et que le contribuable le savait ou ne pouvait l'ignorer. Si l'administration apporte des éléments suffisants en ce sens, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur cette opération, sans qu'il puisse être exigé de lui des vérifications qui ne lui incombent pas.

8. S'il n'est pas contesté que la SNC Villeau était régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés, assujettie à la TVA et se présentait comme telle à ses clients, l'administration fiscale a refusé à la société Systemic le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les trois factures émises par la SNC Villeau au motif que ces factures constituaient des factures de complaisance en se fondant, à cet effet, sur les renseignements obtenus auprès de l'autorité judiciaire les 28 août 2014, 22 septembre 2014 et 12 janvier 2015. Il ressort en effet, ainsi que l'a relevé le service, qu'au cours de ces auditions des 19 et 20 novembre 2013, le dirigeant de la société Systemic a reconnu que les trois factures émises par la SNC Villeau comportaient un " faux intitulé " et étaient destinées à rémunérer M. B... pour la réalisation de prestations d'intermédiaire, ce que la société requérante reconnaît dans ses écritures. Il a également été établi par le service que la SNC Villeau ne comptait aucun salarié et avait été dissoute dès le 30 octobre 2012. Dans ces conditions, l'administration fiscale établit que les factures relatives à ces prestations étaient des factures de complaisance mais également, compte tenu des aveux faits par M. A..., que la société Systemic savait que ces factures avaient cette nature. Contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration a pu constater l'existence de facture de complaisance sans avoir à établir que la SNC Villeau avait omis de reverser au Trésor public la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces factures. Par ailleurs, en constatant que la société Systemic avait accepté de payer des factures de cette nature, l'administration a ainsi rapporté la preuve de ce qu'elle avait sciemment participé à un circuit de fraude à la TVA. Enfin, la circonstance que la société requérante n'ait accepté de régler les factures émises par la SNC Villeau que dans le but d'obtenir un contrat important avec une société dont M. B... était l'intermédiaire est sans incidence sur l'existence de factures de complaisance et la participation de la société Systemic à un schéma de fraude à la TVA. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a, en application des dispositions précitées du code général des impôts, refusé à la société Systemic le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur ces factures.

9. En second lieu, la société requérante fait valoir qu'il n'est pas établi que la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur ces factures avait bien été portée par elle en déduction sur les déclarations de TVA souscrites au titre des années 2011 et 2012. Toutefois, le ministre soutient en défense, sans être contesté, que la société Systémic a comptabilisé les trois factures litigieuses en charges les 2 décembre 2011, 30 décembre 2011 et 12 avril 2012 et que la taxe sur la valeur ajoutée correspondante a été inscrite en comptabilité au débit du compte 445660 " TVA déductible " aux mêmes dates. La société requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la taxe relative à ces factures n'aurait donné lieu à aucune déduction alors qu'il lui appartient, en application de l'article L. 177 du livre des procédure fiscale, de justifier du montant de la taxe déductible porté sur ses déclarations au titre de la période litigieuse. En outre, alors que les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci, la société, qui n'a, au cours du contrôle, aucunement contesté avoir déduit la TVA mentionnée sur les factures émises par la SNC Villeau, s'abstient de produire ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, l'administration fiscale, qui n'était pas tenue d'effectuer une vérification de comptabilité, apporte la preuve du bien-fondé des rappels de TVA mis à la charge de la société Systemic.

Sur les pénalités :

10. Aux termes des dispositions du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts : " Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ". Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

11. D'une part, l'administration fiscale a estimé, pour les motifs relevés au point 8 du présent arrêt, que la société Systemic a activement participé à un circuit de factures de complaisance en acceptant en toute connaissance de cause des factures libellées au nom d'une personne autre que le fournisseur réel des services facturés. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que la société requérante a dissimulé l'identité du prestataire réel des prestations facturées et a ainsi sciemment accepté l'utilisation d'un prête-nom ou d'une identité fictive. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a appliqué aux sommes portées sur les factures litigieuses l'amende prévue par les dispositions du 1 du I de l'article 1737 précité du code général des impôts.

12. D'autre part, la société soutient que le montant de l'amende pour factures de complaisance qui lui a été infligée est hors de proportion avec les sommes qu'elle a effectivement versées à la SNC Villeau. Alors qu'elle ne conteste pas avoir versé à la SNC Villeau la somme de 287 040 euros au titre de l'année 2011, la société requérante allègue qu'elle a, pour l'année 2012, versé à la SNC Villeau la somme de 191 360 euros et non la somme de 538 200 euros comme relevé par l'administration fiscale. Le montant de l'amende mise à sa charge au titre de l'année 2012 doit donc, selon l'intéressée, être limité à 95 680 euros, soit un montant égal à 50 % des sommes qu'elle estime avoir effectivement versées à la SNC Villeau durant cette année. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 22 janvier 2015, que la société Systemic a, au cours de la période d'imposition en litige, enregistré en comptabilité trois factures établies par la SNC Villeau. Les renseignements obtenus auprès de l'autorité judiciaire indiquent à cet égard que la société Systemic a versé à la SNC Villeau la somme de 287 040 euros en règlement de la facture émise le 2 décembre 2011. Le 8 février 2012, la société Systemic a versé à la SNC Villeau la somme de 191 360 euros en règlement de la facture délivrée le 30 décembre 2011, et le 2 mai 2012, elle a, par l'entremise de la société Inforca, versé à la SNC Villeau la somme de 346 840 euros en règlement de la facture émise le 12 avril 2012, soit un montant total de 538 200 euros qui a été versé à la SNC Villeau en 2012. Dès lors, le service vérificateur a, à bon droit, considéré qu'une amende pour factures de complaisance devait être mise à la charge de la société Systemic pour un montant de 145 520 euros au titre de l'année 2011 et un montant de 269 100 euros au titre de l'année 2012. La société Systemic n'est dès lors pas fondée à demander la décharge, fût-elle partielle, des amendes mises à sa charge.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Systemic n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 25 novembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2013, des intérêts de retard et de l'amende prévue au 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2011 et 2012. Les conclusions présentées par la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Systemic est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Systemic et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Perrine Hamon, présidente-assesseure,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI SAHRAOUILe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00438
Date de la décision : 07/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL AVODIA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-07;22pa00438 ?
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