Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association des commerçants de La Foa et de ses environs, la société anonyme à responsabilité limitée Supermarket, Mme B... A..., et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022, par lequel le maire de La Foa (Nouvelle-Calédonie) a autorisé la société civile immobilière Nou 2 à construire un complexe commercial sur les lots n° 216, 218, 366 et 367 de la section La Foa nord village.
Par un jugement n° 2200159 du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 décembre 2022, des pièces enregistrées le 11 janvier 2023 et des mémoires enregistrés le 17 février 2023, le 30 juin 2023, le 20 septembre 2023 et le 3 novembre 2023, l'association des commerçants de La Foa et de ses environs, représentée par Me Mazolli, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2200159 du 29 septembre 2022 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022, par lequel le maire de La Foa a autorisé la société civile immobilière Nou 2 à construire un complexe commercial sur les lots n° 216, 218, 366 et 367 de la section La Foa nord village ;
3°) de lui allouer une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable dès lors qu'elle produit ses statuts et le procès-verbal de son assemblée générale tenue le 15 mai 2021 qui l'habilite à agir ;
- les premiers juges auraient dû faire droit à ses demandes et n'auraient pas dû écarter les moyens présentés à leur soutien ;
- le jugement est entaché d'irrégularité, comme insuffisamment motivé, en tant qu'il se prononce sur la motivation de l'arrêté contesté ;
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
- il est intervenu alors que les délais pour contester l'avis de la commission provinciale d'urbanisme commercial n'étaient pas expirés ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il méconnait les conditions de l'acte de cession, entre la Nouvelle-Calédonie et la commune, du terrain d'assiette du projet ;
- il est entaché de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2023 et le 11 décembre 2023 la province Sud, représentée par Me Dartois (Selarl CL avocats) conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 2 500 euros à la charge de l'association requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par des mémoires en défense enregistrés le 10 mai 2023, la société civile immobilière Nou 2, représentée par Me Elmosnino conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 250 000 francs CFP à la charge de l'association requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande de première instance est irrecevable en ce qui concerne l'association requérante, en application de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme, dès lors que cette association été créée pour les besoins du litige et que ses statuts n'ont pas été déposés dans le délai prévu par ces dispositions législatives ;
- elle est également irrecevable dès lors que l'association ne démontre pas agir dans le cadre de son objet statutaire, qui ne l'habilite pas à mener des actions contentieuses en matière d'urbanisme ;
- elle est encore irrecevable dès lors qu'une aucune délibération du conseil d'administration n'a été produite afin de saisir le tribunal administratif ;
- aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
Par des mémoires enregistrés le 20 août 2023, 3 octobre 2023 et 23 novembre 2023, la commune de La Foa, représentée par Me Charlier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 4 000 euros à la charge de l'association requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'acte de cession du terrain d'assiette du projet est irrecevable, comme soulevé tardivement en appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'urbanisme de la Nouvelle-Calédonie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Diémert,
- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,
- et les observations de Me Efthymiou, substituant Me Dartois, avocat de la province Sud.
Considérant ce qui suit :
1. L'association des commerçants de La Foa et de ses environs, la société anonyme à responsabilité limitée Supermarket, Mme B... A..., et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022, par lequel le maire de La Foa a autorisé la société civile immobilière Nou 2 à construire un complexe commercial sur les lots n° 216, 218, 366 et 367 de la section La Foa nord village. Le tribunal administratif a rejeté leur demande par un jugement du 29 septembre 2022 dont l'association des commerçants de La Foa et de ses environs relève appel devant la Cour.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête ;
2. En premier lieu, la société civile immobilière Nou 2 fait valoir que la demande de première instance est irrecevable, en tant qu'elle a été présentée par l'association requérante, en application de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme, dès lors que cette association été créée pour les besoins du litige et que ses statuts n'ont pas été déposés dans le délai prévu par ces dispositions législatives.
3. D'une part, aux termes de l'article 6-2 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Dans les matières qui relèvent de la compétence de l'État, sont applicables en Nouvelle-Calédonie les dispositions législatives et réglementaires qui comportent une mention expresse à cette fin. / Par dérogation au premier alinéa, sont applicables de plein droit en Nouvelle-Calédonie, sans préjudice des dispositions les adaptant à son organisation particulière, les dispositions législatives et réglementaires qui sont relatives : / [...] 6° À la procédure administrative contentieuse ; / [...]. ". Aux termes du I de l'article 21 de la même loi organique : " I. - L'État est compétent dans les matières suivantes : / [...] / 2° Justice, [...] procédure administrative contentieuse ; [...] ; / [...] ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu au moins un an avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ".
5. Les termes de " décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol " figurant dans diverses dispositions de nature législative ou réglementaire du livre VI du code de l'urbanisme, et notamment dans son article L. 600-1-1, ne peuvent, en l'absence de volonté expresse du législateur d'écarter l'application en Nouvelle-Calédonie des dispositions en cause au titre des adaptations prévues par les dispositions précitées de la loi organique du 19 mars 1999, ou de dispositions expresses en ce sens du règlement, que s'entendre comme visant, par analogie, les catégories de décisions possédant la même substance et la même portée, prises sur le fondement de la législation et de la réglementation respectivement édictées par les autorités compétentes de la Nouvelle-Calédonie et de ses trois provinces en vertu des compétences qui leur sont dévolues par la loi organique statutaire.
6. Les permis de construire délivrés sur le fondement des dispositions du code de l'urbanisme de la Nouvelle-Calédonie doivent être regardés, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme comme des décisions relatives " à l'occupation ou à l'utilisation du sol ", dès lors qu'elles présentent la même substance et la même portée que les permis de construire régis, notamment, par titre II du livre IV du code de l'urbanisme. Les dispositions de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme leur sont donc applicables.
7. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le permis de construire litigieux a été affiché en mairie de La Foa à compter du 2 mars 2022 et, d'autre part, que les statuts de l'association requérante ont été adoptés lors de l'assemblée générale constitutive du 18 mai 2021. Ainsi, ces statuts n'ont pu faire l'objet du dépôt auprès des services du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, dans le délai, qu'elles prévoient, d'un an précédant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.
8. En second lieu, la société civile immobilière Nou 2 fait valoir que la demande de première instance est également irrecevable, en tant qu'elle a été présentée par l'association requérante, à raison de l'absence d'intérêt à agir de cette dernière, faute que ses statuts l'habilitent à initier des recours contentieux en matière d'urbanisme.
9. Il est constant que l'article 2 des statuts de l'association stipule qu'elle " a pour but : / (...) / de s'opposer par tous les moyens légaux et par toutes les voies de droit aux actes de concurrence déloyale ". Dès lors que la délivrance d'un permis de construire ne peut être regardé comme participant, par elle-même, à de tels actes, ces stipulations n'ont ni pour effet ni pour objet de prévoir la possibilité pour l'association de saisir le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir contre une telle décision. L'association est dès lors dépourvue d'intérêt à agir contre le permis de construire litigieux et la demande de première instance est ainsi, pour ce second motif, irrecevable.
10. Il résulte de ce qui précède que, l'association des commerçants de La Foa et de ses environs n'étant pas recevable à contester devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'arrêté du 1er mars 2022, par lequel le maire de La Foa a autorisé la société civile immobilière Nou 2 à construire un complexe commercial sur les lots n° 216, 218, 366 et 367 de la section La Foa nord village, ses conclusions d'appel dirigées contre le jugement rejetant sa demande ne peuvent qu'être rejetées.
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'association des commerçants de La Foa et de ses environs, qui succombe dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu mettre à sa charge le versement à la commune de La Foa et à la société civile immobilière Nou 2 d'une somme de 750 euros sur le fondement des mêmes dispositions. La province Sud n'étant pas partie à l'instance, pour y avoir seulement été appelée à présenter des observations, ses conclusions présentées sur le même fondement ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association des commerçants de La Foa et de ses environs est rejetée.
Article 2 : L'association des commerçants de La Foa et de ses environs versera à la commune de La Foa et à la société civile immobilière Nou 2, respectivement, une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de La Foa et de la société civile immobilière Nou 2 fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions de la province Sud présentées au même titre sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des commerçants de La Foa et de ses environs, à la commune de La Foa, à la société civile immobilière Nou 2 et à la province Sud.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,
- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.
L'assesseure la plus ancienne,
I. JASMIN-SVERDLINLe président - rapporteur
S. DIÉMERT
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA05496