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30/01/2024 | FRANCE | N°22PA02527

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 30 janvier 2024, 22PA02527


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2016385/2-1 du 29 mars 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cou

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Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 juin 2022 et 2 janvier 2023, M. A..., représenté par Mes P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2016385/2-1 du 29 mars 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 juin 2022 et 2 janvier 2023, M. A..., représenté par Mes Philippe Morisset et Lucas Lopez, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mars 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ou, à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des prélèvements sociaux calculé sur une base de 965 euros pour 2013 et de 762 euros pour 2014 ;

3°) de mettre à la charge l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée à défaut de préciser les dates d'inscription en compte courant des crédits sur les comptes courants d'associés ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'appréhension des revenus distribués ;

- elle n'établit pas que les montants inscrits au compte courant d'associés correspondent à un crédit constaté à la clôture des exercices 2013 et 2014 de la société ;

- les prélèvements sociaux ne pouvaient pas être établis sur une base supérieure à 965 euros au titre de 2013 et à 762 euros au titre de 2014 en application des articles L 131-6 et R. 131-2 du code de la sécurité sociale.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 27 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Topin,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Lopez, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de la comptabilité de la SARL Garden Bear, qui exploite un bar de nuit à Paris 4ème, et dont M. A... était co-gérant et associé à 50 %, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux ont été mis à la charge de ce dernier au titre des années 2013 et 2014 à raison des revenus considérés comme distribués à son profit par la société. Par un jugement du 29 mars 2022, dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des impositions supplémentaires auxquelles il a été ainsi assujetti.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital. (...) ".

3. Il résulte de la proposition de rectification du 31 août 2016 que l'administration, à la suite de la réintégration dans les résultats de la société Garden Bear, d'une part, d'omissions de recettes, d'autre part, de charges considérées comme non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, pour des montants totaux de 66 795 euros et 80 144 euros respectivement au titre des exercices clos en 2013 et 2014, a rehaussé les revenus imposables de M. A... à hauteur de 33 397,50 euros au titre de l'année 2013 et de 40 072 euros au titre de l'année 2014, correspondant à 50 % des revenus considérés comme distribués pour lesquels la société, sous la seule signature de son avocat, l'a désigné comme bénéficiaire en application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts. Si l'administration, qui supporte la charge de la preuve, fait valoir que le requérant était associé à 50 % de l'entreprise, qu'il en était salarié, qu'il participait à la gestion avec le co-gérant et associé détenteur des autres parts et qu'un faible salaire lui était versé, elle ne produit toutefois aucun élément permettant d'établir l'appréhension de ces sommes par le requérant. Par suite, l'administration n'était pas fondée à imposer ces sommes au titre des revenus perçus en 2013 et en 2014.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts :

" 1. Sont considérés comme revenus distribués (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Et aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. (...) ". Les sommes mises à la disposition des associés non prélevées sur les bénéfices ont, sauf preuve contraire apportée par les associés, le caractère de revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

5. L'administration a réintégré dans les revenus imposables du requérant une somme de 10 000 euros au titre de chacune des années 2013 et 2014 correspondant aux montants crédités au compte-courant ouvert à son nom dans les écritures de la société Garden Bar au 31 décembre de chacune des années en cause. Elle a considéré que ces sommes avaient été distribuées à l'intéressé à défaut pour la société d'avoir justifié de ce qu'elles constituaient des apports. Si M. A... soutient que la motivation de la proposition de rectification du 31 août 2016 ne permet pas d'établir que les sommes inscrites au crédit de son compte courant l'auraient été au cours des exercices 2013 ou 2014, il ressort de ce document, au demeurant suffisamment motivé, que la société a inscrit ces sommes respectivement le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2014 et a déclaré que ces apports correspondaient à des règlements effectués par les associés, dont elle n'a toutefois pas justifié. En se bornant à faire valoir que les sommes en cause pourraient correspondre à un solde antérieur de son compte courant, ce que semble au demeurant contredire l'attestation de l'expert-comptable, jointe en réplique, sans assortir cette allégation du moindre justificatif probant, M. A... ne conteste pas utilement l'imposition des sommes en cause à titre de revenus distribués.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à l'espèce : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles sont assises sur leur revenu d'activité non salarié. Ce revenu est celui retenu pour le calcul de l'impôt sur le revenu, sans qu'il soit tenu compte des plus-values et moins-values professionnelles à long terme, des reports déficitaires, des exonérations, du coefficient multiplicateur mentionné au 7 de l'article 158 du code général des impôts et des déductions à effectuer du chef des frais professionnels et des frais, droits et intérêts d'emprunt prévues aux deuxième et dernier alinéas du 3° de l'article 83 du même code. (...)

Est également prise en compte, dans les conditions prévues au deuxième alinéa, la part des revenus mentionnés aux articles 108 à 115 du code général des impôts perçus par le travailleur non salarié non agricole(...) qui est supérieure à 10 % du capital social et des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenus en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes.

Un décret en Conseil d'Etat précise la nature des apports retenus pour la détermination du capital social au sens du présent alinéa ainsi que les modalités de prise en compte des sommes versées en compte courant. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, si les revenus distribués ont en principe le caractère de revenus des capitaux mobiliers passibles de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, la part de ces revenus perçue par le gérant majoritaire d'une société à responsabilité limitée, relevant en cette qualité du régime des travailleurs non-salariés non agricoles, son conjoint ou le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou leurs enfants mineurs non émancipés, doit être regardée, pour son assujettissement aux prélèvements sociaux, comme des revenus d'activité pour leur fraction excédant 10 % du capital social et des primes d'émission ainsi que des sommes versées en compte courant. Cette fraction entrant ainsi dans le champ des contributions portant sur les revenus d'activité, elle ne saurait être soumise à celles assises sur les revenus du patrimoine.

8. Si M. A... soutient qu'en sa qualité de gérant majoritaire résultant de l'existence d'un collège de gérance majoritaire, les revenus distribués ne pouvaient être assujettis aux contributions sociales sur les revenus du patrimoine pour leur fraction excédant 10 % du capital social, il ne justifie pas relever du régime d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles, malgré la mesure d'instruction faite en ce sens. Par suite, il n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à demander la réduction de sa base imposable à l'impôt sur le revenu au titre de 2013 et 2014 de respectivement

33 397,50 euros et 40 072 euros, et la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux correspondant. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme réclamée par M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La base de l'imposition de M. A... à l'impôt sur le revenu est réduite de 33 397,50 euros au titre de l'année 2013 et de 40 072 euros au titre de l'année 2014.

Article 2 : M. A... est déchargé en droits et pénalités des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui lui ont été assignées au titre des années 2013 et 2014 en conséquence de la réduction de base prononcée à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.

La rapporteure,

E. TOPINLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. ABDI-OUAMRANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA02527 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02527
Date de la décision : 30/01/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SELARL AVODIA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-30;22pa02527 ?
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