Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, ainsi que la décision par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a implicitement rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision préfectorale précitée.
Par un jugement n° 2216532 du 18 juillet 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2023, Mme B..., représentée par Me Boukhelifa, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 juillet 2023 ;
2°) d'annuler les décisions implicites de rejet du préfet de la Seine-Saint-Denis et du ministre de l'intérieur et des outre-mer ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit ;
- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi, signé à Rabat le 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier reçu à la préfecture de la Seine-Saint-Denis le 21 février 2022, Mme B..., ressortissante marocaine, née en 1981, a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En raison du silence gardé par le préfet de la Seine-Saint-Denis pendant plus de quatre mois, la demande de l'intéressée doit être regardée comme ayant été implicitement rejetée le 21 juin 2022. Saisi d'un recours hiérarchique reçu le 15 juillet 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a implicitement confirmé la décision de refus du préfet de la Seine-Saint-Denis. Ce dernier a rejeté expressément la demande de Mme B... par un arrêté du 6 février 2023 au motif que l'intéressée ne s'était pas présentée personnellement au guichet de la préfecture. Mme B... fait appel du jugement du 18 juillet 2023 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande, après avoir considéré que celle-ci devait être regardée comme tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 6 février 2023.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, pour demander l'annulation du jugement attaqué, Mme B... ne peut utilement soutenir que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une erreur de droit.
Sur l'étendue du litige :
3. Si le silence gardé par l'administration sur un recours gracieux ou hiérarchique fait naître une décision implicite de rejet qui peut être déférée au juge de l'excès de pouvoir, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement, qu'elle fasse suite ou non à une demande de communication des motifs de la décision implicite présentée en application des dispositions de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, se substitue à la première décision. Il en résulte que des conclusions à fin d'annulation de cette première décision doivent être regardées comme dirigées contre la seconde.
4. Dès lors que le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté expressément la demande de titre de séjour de Mme B... par un arrêté du 6 février 2023, la requête d'appel de celle-ci tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 21 juin 2022 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour et, d'autre part, de la décision du 15 septembre 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a implicitement confirmé la décision préfectorale précitée, doit être regardée comme étant dirigée contre l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 février 2023.
Sur le fond :
5. D'une part, en vertu des dispositions des articles R. 431-2 et R. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable à l'arrêté attaqué du 6 février 2023, la demande de titre de séjour s'effectue au moyen d'un téléservice pour les catégories de titres de séjour désignées à l'annexe 9 à ce code, au nombre desquelles ne figurent pas, comme en l'espèce, les demandes de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". La demande de titre de séjour, qui ne figure pas dans cette annexe, doit être déposée, soit en préfecture, soit par voie postale dans l'hypothèse où l'autorité administrative l'aurait autorisée pour des catégories de titre déterminées.
6. D'autre part, lorsque le refus de titre de séjour est fondé à bon droit sur l'absence de comparution personnelle du demandeur, ce dernier ne peut se prévaloir, à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour, de moyens autres que ceux tirés d'un vice propre de cette décision.
7. Dès lors qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a déterminé aucune catégorie de titre de séjour pouvant lui être adressée par voie postale, il pouvait légalement rejeter la demande de titre de séjour de Mme B... au seul motif qu'elle ne s'était pas présentée personnellement au guichet de la préfecture conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, la requérante n'indique pas avoir été dans l'impossibilité de se présenter personnellement auprès des services de la préfecture, ni ne justifie avoir personnellement entamé des démarches effectives pour obtenir d'être reçue par les services de la préfecture ou que toute tentative en ce sens aurait été rendue vaine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés comme inopérants.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03351