Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Newpharma a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 mai 2020 du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, lui enjoignant, en application de l'article L. 470-1 du code de commerce, de prendre, dans un délai de 24 heures, toutes dispositions utiles afin que ne soient proposés à la vente, sur son site internet à destination des consommateurs français, que des gels hydro-alcooliques destinés à l'hygiène corporelle dont le prix de vente au détail n'excède pas les prix unitaires maximums par flacon fixés par le II de l'article 16 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020. Par un jugement n° 2007912 du 12 juillet 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour : Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 12 septembre 2022, 14 juin 2023 et 7 juillet 2023, la société Newpharma représentée par Me Hardouin, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2007912 du 12 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en date du 18 mai 2020 lui enjoignant, en application de l'article L. 470-1 du code de commerce, de prendre, dans un délai de 24 heures, toutes dispositions utiles afin que ne soient proposés à la vente, sur son site internet à destination des consommateurs français, que des gels hydro-alcooliques destinés à l'hygiène corporelle dont le prix de vente au détail n'excède pas les prix unitaires maximums par flacon fixés par le II de l'article 16 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 ; 2°) d'annuler l'injonction de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en date du 18 mai 2020 ; 3°) à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à l'interprétation du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 mettant en place un mécanisme de plafonnement des prix au regard de l'annexe de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros au titre l'articleL. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est entaché d'erreur de droit ; - les premiers juges ont excédé leurs pouvoirs en prenant une décision qui revient à interpréter l'annexe de la directive et son champ d'application sans avoir saisi la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel ; - la mesure d'encadrement du prix prévue par le décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 ne constitue pas une obligation contractuelle ; la question de la détermination du prix est par nature précontractuelle ; dès lors, les principes de libre circulation des services de la société de l'information et d'application du droit de l'Etat membre d'origine prévus respectivement aux articles 3.2 et 3.1 de la directive 200/31/CE du 8 juin 2000, transposée à l'article 17 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique, ne peuvent être écartés et ont été méconnus par la décision attaquée ; - en tout état de cause, même à considérer que la mesure d'encadrement du prix prévue par le décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 constituerait une obligation contractuelle, il ne peut être considéré que l'application de la loi belge prive le consommateur d'une disposition qui lui est plus favorable ; - si l'issue du litige imposait une interprétation des textes mentionnés, la Cour pourrait transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle suivante : " Dans le contexte d'une offre en vente par une officine pharmaceutique établie en Belgique où le prix du gel hydroalcoolique n'est pas régulé, à destination du marché français où le prix de ce produit est plafonné aussi bien dans le marché de gros (fournisseurs en amont) que de détail (vente au consommateur final), le sixième tiret de l'annexe de la Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (" directive sur le commerce électronique "), qui exclut l'application des paragraphes 1 et 2 de l'article 3 de ladite directive pour " les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs ", s'applique-t-il à la disposition nationale française qui crée ce mécanisme de plafonnement des prix ' " ; - si la clause de marché intérieur de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 s'applique, les conditions procédurales strictes auxquelles est soumise la possibilité, pour un Etat membre, de restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre Etat membre, possibilité prévue par le paragraphe 4 de l'article 3 de la directive, n'ont pas été respectées ; par ailleurs le régime procédural d'urgence n'a pas davantage été respecté ; - les conditions prévues par le a) du paragraphe 4 de l'article 3 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 permettant à la France de restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre Etat membre ne sont pas remplies dès lors que les services de la société Newpharma n'ont pas porté atteinte à l'objectif de protection de la santé publique ni n'ont constitué un risque sérieux et grave d'atteinte à cet objectif et que la mesure est disproportionnée au regard de l'objectif de protection de la santé publique dès lors qu'elle l'oblige à vendre ses produits à perte ; la décision attaquée est entachée d'un défaut de base légale ; - l'injonction attaquée méconnaît le principe de la libre circulation des marchandises prévu aux articles 34 et 35 du traité de fonctionnement de l'Union européenne ; elle constitue un moyen de discrimination arbitraire et une restriction déguisée au commerce entre les Etats membres et ne respecte pas le principe de proportionnalité ; Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le règlement communautaire n° 593/2008 du parlement européen et du conseil 17 juin 2008 dit B... A... sur la loi applicable aux obligations contractuelles ; - le règlement n° 864/2007 du parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007 dit B... A... sur la loi applicable aux obligations non contractuelles ; - la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (" directive sur le commerce électronique ") ; - le code de la consommation ; - le code de commerce ; - la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 ; - la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire ; - le décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ; - le décret n° 2020-663 du 31 mai 2020, et notamment son article 59, portant abrogation du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 visé ci-dessus ; - le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020, et notamment son article 52, portant abrogation du décret n° 2020-663 du 31 mai 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - et les observations de Me Hardouin pour la société Newpharma. Considérant ce qui suit : 1. La société Newpharma, dont le siège social est en Belgique, gère un site internet dédié à la vente de produits de pharmacie et de parapharmacie à destination des consommateurs français. A la suite de contrôles du site internet entre le 30 avril et le 4 mai 2020, les agents du service national des enquêtes de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont dressé, le 4 mai 2020, un procès-verbal constatant différents manquements aux dispositions relatives à l'encadrement du prix maximum de vente des gels hydro-alcooliques destinés à l'hygiène corporelle prévu par l'article 11 du décret 2020-293 du 23 mars 2020 alors en vigueur. Ces manquements ont été notifiés à la société par un courrier du 5 mai 2020 et elle a présenté ses observations par un courrier du 7 mai 2020. Par une décision du 18 mai 2020, le service national des enquêtes de la DGCCRF lui a enjoint, en application de l'article L. 470-1 du code de commerce de prendre toutes dispositions utiles, dans un délai de 24 heures, afin que ne soient proposés à la vente, sur son site internet à destination des consommateurs français, que des gels hydro-alcooliques destinés à l'hygiène corporelle dont le prix de vente au détail n'excède pas les prix unitaires maximums par flacon fixés par l'article 16 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020. Par un jugement n° 2007912 du 12 juillet 2022 dont la société Newpharma interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 mai 2020 précitée. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, la société Newpharma soutient que le tribunal administratif a excédé ses pouvoirs en prenant une décision qui revient à interpréter l'annexe de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 et, partant, son champ d'application au motif que la question de la détermination du prix est par nature contractuelle et ne peut en elle-même représenter une obligation contractuelle. Or, en présence d'un doute raisonnable quant à la portée de la directive, il appartenait au tribunal de surseoir à statuer et de renvoyer l'affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne.
3. Toutefois, alors qu'il ne résulte du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aucune obligation pour la juridiction nationale saisie du fond d'un litige mettant en cause l'application et de l'interprétation du droit de l'Union, de saisir à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne de ce litige, les premiers juges, en relevant qu'il résulte de l'article 17 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 qui transpose de manière complète la directive 2000/31/CE que la mesure d'encadrement des prix des gels ou solutions hydroalcooliques constitue une obligation contractuelle ayant pour objet, dans un contexte de crise sanitaire de protéger les droits du consommateur, n'ont pas outrepassé leurs pouvoirs en interprétant les termes de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000, en ce qu'elle exclut, en application du paragraphe de son article 3 et de son annexe, de la clause du marché intérieur prévue aux paragraphes 1 et 2 de ce même article, notamment, les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs, comme incluant, au titre de ces obligations, la fixation du niveau de prix de ces produits. Par suite, le moyen doit être écarté. 4. En deuxième lieu, hormis dans le cas où il se prononce sur la régularité du jugement, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision attaquée dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entaché le jugement entrepris est inopérant et ne peut qu'être écarté. Sur le bien-fondé du jugement : 5. D'une part, aux termes de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique dans sa version en vigueur du 12 mai 2020 au 10 juillet 2020 : " I.- Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : (...) /8° Prendre des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions constatées sur le marché de certains produits ". Aux termes de l'article 16 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 visé ci-dessus, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée : " I. - Les dispositions du présent article sont applicables à la vente des gels ou solutions hydro-alcooliques destinés à l'hygiène corporelle, quelle que soit leur dénomination commerciale. / II. - Les prix de la vente au détail des produits mentionnés au I ne peuvent excéder : 1° Pour les contenants correspondant à un volume inférieur ou égal à 50 ml, 35,17 euros par litre toutes taxes comprises, soit un prix unitaire par flacon de 50 ml maximum de 1,76 euro toutes taxes comprises ; / 2° Pour les contenants correspondant à un volume supérieur à 50 ml et inférieur ou égal à 100 ml, 26,38 euros toutes taxes comprises par litre, soit un prix unitaire maximum par flacon de 100 ml de 2,64 euros toutes taxes comprises ; / 3° Pour les contenants correspondant à un volume supérieur à 100 ml et inférieur ou égal à 300 ml, 14,68 euros toutes taxes comprises par litre, soit un prix unitaire maximum par flacon de 300 ml de 4,40 euros toutes taxes comprises ; / 4° Pour les contenants correspondant à un volume supérieur à 300 ml, 13,19 euros toutes taxes comprises par litre, soit un prix unitaire maximum par flacon d'un litre de 13,19 euros toutes taxes comprises ". 6. D'autre part, aux termes de l'article 3 de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (" directive sur le commerce électronique ") : " 1. Chaque Etat membre veille à ce que les services de la société de l'information fournis par un prestataire établi sur son territoire respectent les dispositions nationales applicables dans cet Etat membre relevant du domaine coordonné. / 2. Les Etat membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre Etat membre. 3. Les paragraphes 1 et 2 ne sont pas applicables aux domaines visés à l'annexe / 4. Les Etats membres peuvent prendre, à l'égard d'un service donné de la société de l'information, des mesures qui dérogent au paragraphe 2 si les conditions suivantes sont remplies : / a) les mesures doivent être : / i) nécessaires pour une des raisons suivantes : (...) / - la protection de la santé publique, (...) / - la protection des consommateurs. ii) prises à l'encontre d'un service de la société de l'information qui porte atteinte aux objectifs visés au point i) ou qui constitue un risque sérieux et grave d'atteinte à ces objectifs ; iii) proportionnelles à ces objectifs ; (...) ". Selon l'annexe de la même directive : " Comme prévu à l'article 3, paragraphe 3, les paragraphes 1 et 2 de l'article 3 ne s'appliquent pas dans les cas suivants : (...) - les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs (...) ". Aux termes de l'article 17 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique qui a procédé à la transposition de cette directive : " L'activité définie à l'article 14 (commerce électronique) est soumise à la loi de l'Etat membre sur le territoire duquel la personne qui l'exerce est établie, sous réserve de la commune intention de cette personne et de celle à qui sont destinés les biens ou services. / L'application de l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet : 1° De priver un consommateur ayant sa résidence habituelle sur le territoire national de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi française relatives aux obligations contractuelles, conformément aux engagements internationaux souscrits par la France. Au sens du présent article, les dispositions relatives aux obligations contractuelles comprennent les dispositions applicables aux éléments du contrat, y compris celles qui définissent les droits du consommateur, qui ont une influence déterminante sur la décision de contracter ". 7. En premier lieu, la société Newpharma soutient que la décision attaquée, prise sur le fondement de l'article 16 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020, méconnaît les dispositions de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information et notamment du commerce électronique dans le marché intérieur et plus particulièrement les paragraphes 1 et 2 de l'article 3 en lui imposant une obligation de prix de vente maximum au détail non prévue par la législation belge. 8. Tout d'abord, un service de vente en ligne de médicaments, non soumis à obligation de prescription, tel que celui en cause au principal, est susceptible de constituer un service de la société de l'information, au sens de l'article 2, sous a), de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000, et, partant, de relever du champ d'application de cette directive pour ce qui est des exigences applicables à ce service qui relèvent du " domaine coordonné ", au sens de l'article 2, sous h), de ladite directive précitée.
9. Par ailleurs, afin de permettre la libre circulation des services de la société de l'information dans toute l'Union européenne, la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 prévoit que les prestataires peuvent fournir leurs services sur la base de la réglementation de l'Etat membre dans lequel ils sont établis (le pays d'origine). Les Etats membres ne peuvent restreindre la circulation des services de la société de l'information en provenance des autres Etats membres que dans le cadre des dérogations mentionnées dans la directive au paragraphe 4 de l'article 3. 10. Enfin, l'annexe de la directive 2000/31/CE dispose qu'en vertu du paragraphe 3 de son article 3, la clause du marché intérieur ne s'applique pas aux obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs, cette disposition devant s'interpréter notamment à l'aune du règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (B... I) et, pour les obligations d'information précontractuelle, du règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement Européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles ("B... II"). 11. Selon la Cour de justice de l'Union européennes, la notion d'" obligation contractuelle ", au sens de l'article 1er dudit règlement B... I, désigne une obligation juridique librement consentie par une personne à l'égard d'une autre. La notion d'" obligation non contractuelle ", comprend, quant à elle, toute demande qui vise à mettre en cause la responsabilité d'un défendeur et qui ne se rattache pas à ladite " matière contractuelle " et résulte de toute atteinte résultant de l'un des événements mentionnés à l'article 2 du règlement B... II, à savoir un fait dommageable, un enrichissement sans cause, une gestion d'affaires ou une " culpa in contrahendo ". 12. En outre, les considérants 55 et 56 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 précisent que la clause du marché intérieur ne peut, d'une part, porter atteinte au droit applicable aux obligations contractuelles relatives aux contrats conclus par les consommateurs et, d'autre part, avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui procurent les règles impératives relatives aux obligations contractuelles prévues par le droit de l'Etat membre dans lequel il a sa résidence habituelle. De plus, s'agissant de la dérogation pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les consommateurs, celles-ci doivent être interprétées comme comprenant les informations sur les éléments essentiels du contenu du contrat, y compris les droits du consommateur, ayant une influence déterminante sur la décision de contracter. Le considérant 11 de la même directive rappelle que la directive est sans préjudice du niveau de protection existant notamment en matière de protection de la santé publique et son considérant 21 précise que le domaine coordonné ne couvre que les exigences relatives aux activités en ligne, telles que l'information en ligne, la publicité en ligne, les achats en ligne, la conclusion de contrats en ligne et ne concerne pas les exigences des Etats membres relatives aux biens telles que les normes en matière de sécurité, les obligations en matière d'étiquetage ou la responsabilité des produits. 13. Au regard des éléments précités et sans qu'il soit nécessaire de saisir à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne, il convient de considérer que la mesure d'encadrement temporaire des prix en cause doit être regardée comme portant sur un élément, le niveau du prix du produit vendu au consommateur, constitutif d'une obligation contractuelle, au sens de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 et de l'article 1er du règlement dit " B... A... " mentionné, liant le vendeur et l'acheteur d'un produit au moyen d'un service en ligne, cette mesure ayant été adoptée pour protéger les consommateurs en réaction à des fluctuations excessives des prix dans une situation de crise afin de garantir leur sécurité et la santé publique en permettant à tous de se procurer du gel hydroalcoolique préconisé pour lutter contre la propagation du virus du Covid 19. Elle ne peut ainsi être regardée comme constituant, uniquement, un élément de l'information sur le service rendu au travers d'un site de vente en ligne. Dès lors, c'est à bon droit et sans entacher sa décision d'aucun défaut de base légale que l'administration a considéré que les paragraphes 1 et 2 de l'article 3 de la directive n'étaient pas applicables aux ventes de gel hydroalcoolique de la société Newpharma, nonobstant la circonstance que la société Newpharma a respecté le droit belge qui lui n'a pas limité le prix de vente des gels hydro-alcooliques, et a prononcé en conséquence l'injonction en cause. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 4 de l'article 3 de la directive et de la procédure afférente permettant de mettre en œuvre une dérogation sont inopérants. 14. En deuxième lieu, aux termes de l'article 34 du traité de fonctionnement de l'Union européenne, " les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres ". L'article 35 du même traité dispose que " les restrictions quantitatives à l'exportation, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres ". Selon l'article 36 du même traité, " Les dispositions des articles 34 et 35 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, (...), justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes (...). Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres ". 15. La société Newpharma fait valoir qu'en posant le principe de libre circulation, les articles 34 et 35 du traité de fonctionnement de l'Union européenne ont interdit les mesures d'équivalent à des restrictions quantitatives. Elle considère qu'à supposer que les mesures qu'il prévoit constituent des exceptions à la règle de marché résultant des paragraphes 1 et 2 de l'article 3 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000, le décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 précité institue une mesure d'effet équivalent d'autant plus grave qu'elle crée une discrimination en ce qu'elle n'affecte pas de la même manière en droit comme en fait la commercialisation des produits nationaux et de ceux en provenance d'autres Etats en méconnaissance des principes posés par la jurisprudence européenne. 16. Il résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne que toute mesure d'un Etat membre susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce au sein de l'Union doit être considérée comme une mesure d'effet équivalent à des restrictions quantitatives au sens de cette disposition. 17. Ainsi, constituent des mesures d'effet équivalent à des restrictions quantitatives les entraves à la libre circulation des marchandises résultant, en l'absence d'harmonisation des législations nationales, de l'application à des marchandises en provenance d'autres Etats membres, où elles sont légalement fabriquées et commercialisées, de règles relatives aux conditions auxquelles doivent répondre ces marchandises, même si ces règles sont indistinctement applicables à tous les produits.
18. En revanche, n'est pas susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce entre les Etats membres, au sens de cette jurisprudence, l'application à des produits en provenance d'autres Etats membres de dispositions nationales qui limitent ou interdisent certaines modalités de vente, pour autant qu'elles s'appliquent à tous les opérateurs concernés exerçant leur activité sur le territoire national et qu'elles affectent de la même manière, en droit comme en fait, la commercialisation des produits nationaux et celle des produits en provenance d'autres Etats membres. 19. Enfin, la Cour de justice a précisé que l'article 34 du Traité ne fait néanmoins pas obstacle aux interdictions ou aux restrictions justifiées par l'une des raisons d'intérêt général énumérées à l'article 36 ou par des exigences impératives, exigences au rang desquelles figure, notamment, la protection de la santé. Dans l'un et l'autre cas, la mesure concernée doit, conformément au principe de proportionnalité, être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint. 20. En l'espèce, la société fait valoir que le prix auquel elle proposait les produits litigieux n'était que légèrement supérieur au prix maximum français, et que cette différence s'explique par le fait que la société Newpharma s'approvisionne principalement en Belgique où il n'y avait pas de réglementation équivalente, de sorte que le prix sur le marché de gros variait en fonction de l'offre et de la demande et que le prix sur le marché de gros dans l'Union européenne était à cette époque supérieur au prix de vente au consommateur fixé par le décret n° 2020-548 précité du 11 mai 2020. Or, il est constant que l'injonction en litige ne s'applique qu'au prix de vente aux consommateurs des produits que la société Newpharma vend en France au moyen d'un service de vente en ligne, et que le prix maximal de vente qui lui est ainsi imposé s'applique indistinctement à toute vente de ce type de produit effectuée en France dans les mêmes conditions. En outre, alors qu'elle n'implique pour elle aucune obligation de s'approvisionner auprès de fournisseurs établis en France la limitation au niveau du prix de vente qu'elle impose, elle ne s'applique que pendant une durée limitée, soit jusqu'au 10 juillet 2020, date de fin de la période d'état d'urgence sanitaire instituée par la loi du 23 mars 2020 et prorogée par la loi du 11 mai 2020, visée ci-dessus, et trouve ainsi sa justification dans une raison impérieuse d'intérêt général, susceptible de justifier une entrave à la libre circulation des marchandises, tenant à la nécessité d'endiguer la propagation de l'épidémie de Covid-19 et de protéger la santé de la population, dans un contexte caractérisé par une pénurie de moyens de prévention et de protection efficaces contre la diffusion d'un virus particulièrement contagieux à transmission aléatoire, autres que des mesures de distanciation dont les conditions ne peuvent être remplies en toutes circonstances. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que des mesures moins restrictives auraient permis d'atteindre ce résultat. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 34 et 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté. 21. Il résulte de tout ce qui précède que la société Newpharma n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :Article 1er : La requête de la société Newpharma est rejetée.Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Newpharma et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Délibéré après l'audience du 5 janvier 2024, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Hamdi, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 19 janvier 2024.La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERE La greffière,E. LUCELa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 22PA04166 2