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12/01/2024 | FRANCE | N°22PA02629

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 12 janvier 2024, 22PA02629


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 30 janvier 2020 par laquelle le comité médical du contrôle de la navigation aérienne a prononcé son inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux présenté le 6 mars 2020, et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de reconstituer sa carrière dans le délai de deux mois.



Par

un jugement n° 2006552 du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 30 janvier 2020 par laquelle le comité médical du contrôle de la navigation aérienne a prononcé son inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux présenté le 6 mars 2020, et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de reconstituer sa carrière dans le délai de deux mois.

Par un jugement n° 2006552 du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 30 janvier 2020 ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de Mme B..., et il a enjoint au ministre chargé des transports de reconstituer sa carrière dans le délai de trois mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 7 juin 2022 et 1er mai 2023, 7 juillet 2023 et 19 septembre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 8 avril 2022 ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de Mme B....

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 8 avril 2022 est irrégulier dès lors que sa minute ne comporte aucune signature ;

- il a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que le mémoire en réplique produit en première instance par Mme B..., qui présente des conclusions à fin d'injonction auxquelles le tribunal a fait droit, ne lui a pas été communiqué ; le jugement est en outre fondé sur une argumentation de l'intéressée qui n'était pas contenue dans les seules écritures qui lui ont été communiquées ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que Mme B... avait été privée des garanties procédurales attachées aux mesures prises en considération de la personne ;

- c'est également à tort que le tribunal a fait droit aux conclusions à fin d'injonction de la demande, dès lors que Mme B... a été admise à la retraite le 1er juin 2020 ;

- les autres moyens soulevés par Mme B... en première instance et en appel ne sont pas fondés.

Par quatre mémoires en défense enregistrés les 23 février 2023, 4 juin 2023 1er septembre 2023 et 12 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Crusoé, demande à la cour :

1°) d'ordonner, avant dire droit, une mesure d'expertise médicale ;

2°) de rejeter la requête ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas été signée par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et qu'il n'est pas justifié de l'existence et de la régularité de la délégation de signature accordée à son signataire ;

- les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés ;

- la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée ; elle est entachée de vices de procédure, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

La clôture de l'instruction a été fixée au 3 novembre 2023.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de la santé publique,

- la loi du 22 avril 1905,

- le règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil,

- le règlement (UE) 2015/340 de la Commission du 20 février 2015,

- le décret n°86-442 du 14 mars 1986,

- le décret n° 90-998 du 8 novembre 1990,

- l'arrêté du 1er juillet 2002 relatif au fonctionnement et aux modalités d'organisation des travaux du comité médical du contrôle de la navigation aérienne,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Crusoé, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ingénieur du contrôle de la navigation aérienne titulaire, affectée à l'aérodrome du Bourget, en Seine-Saint-Denis, a été soumise à une recherche de produits stupéfiants via un test urinaire, qui s'est révélé positif à la cocaïne. Le 4 mai 2018, l'évaluateur médical, sur renvoi du médecin examinateur, a prononcé son inaptitude médicale à titre conservatoire, dans l'attente notamment d'un examen par le service médical de psychologie clinique appliquée à l'aéronautique. Le 24 septembre 2018, l'évaluateur médical a déclaré Mme B... inapte pour une durée de douze mois. L'intéressée a formé un recours auprès du comité médical du contrôle de la navigation aérienne, en application des dispositions du troisième alinéa du I de l'article 6 du décret susvisé du 8 novembre 1990. Par une décision du 24 janvier 2019, Mme B... a été déclarée apte par le comité médical du contrôle de la navigation aérienne, sous réserve qu'elle satisfasse à trois contrôles aléatoires au cours de l'année. Un prélèvement réalisé le 12 septembre 2019 ayant révélé la présence de deux métabolites de la cocaïne dans les urines de l'intéressée, l'évaluateur médical, à nouveau saisi, a prononcé par une décision du 8 octobre 2019 son inaptitude au contrôle aérien. Le 16 octobre 2019, Mme B... a contesté cette décision devant le comité médical du contrôle de la navigation aérienne, et a ensuite sollicité, le 19 novembre 2019 son départ en retraite, ce qui lui a été accordé à compter du 1er juin 2020. Par une décision du 30 janvier 2020, le comité médical du contrôle de la navigation aérienne l'a déclarée définitivement inapte au contrôle aérien le 30 janvier 2020. L'intéressée a formé un recours gracieux contre cette dernière décision le 6 mars 2020, lequel a été implicitement rejeté le 10 mai 2020. Par un jugement du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 30 janvier 2020 ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de Mme B..., et il a enjoint au ministre chargé des transports de reconstituer sa carrière dans le délai de trois mois. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires relève appel de ce jugement.

Sur la recevabilité de la requête :

2. La requête d'appel a été signée par M. A... E..., chef du bureau du contentieux à la sous-direction des affaires juridiques de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui par un arrêté du 17 mars 2022, publié au Journal officiel de la République française du 20 mars 2002, a reçu délégation à cette fin. La fin de non-recevoir opposée en défense par Mme B..., tirée du défaut d'habilitation du signataire de la requête, doit donc être écartée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. (...) ". Et aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. "

4. Il ressort des termes du jugement attaqué que, pour annuler la décision du 30 janvier 2020 du comité médical du contrôle de la navigation aérienne, ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de Mme B..., les premiers juges ont accueilli une argumentation de l'intéressée, tirée d'un défaut d'information quant à la possibilité d'être assistée du médecin de son choix, contenue dans un mémoire en réplique enregistré au tribunal le 21 juillet 2021, avant la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Les premiers juges ont en outre fait droit aux conclusions à fin d'injonction présentées pour la première fois par Mme B... dans ce mémoire du 21 juillet 2021 non communiqué au défendeur. Ils ont ainsi rendu leur jugement en méconnaissance du principe du contradictoire. Celui-ci doit, par suite et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen relatif à son irrégularité, être annulé.

5. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 6 du décret susvisé du 8 novembre 1990 : " I.- Peuvent seuls exercer les fonctions de contrôle dans les organismes mentionnés aux 1° et 3° du a de l'article 3 les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne titulaires d'un certificat médical de classe 3, requis pour exercer les privilèges de la licence de contrôleur de la circulation aérienne ou de contrôleur de la circulation aérienne stagiaire et prévu par le règlement (UE) 2015/340 de la Commission du 20 février 2015 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables aux licences et certificats de contrôleur de la circulation aérienne conformément au règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil, modifiant le règlement d'exécution (UE) n° 923/2012 de la Commission et abrogeant le règlement (UE) n° 805/2011 de la Commission. / La vérification de l'aptitude médicale, la délivrance du certificat médical de classe 3, sa prorogation et son renouvellement sont réalisés par les examinateurs aéromédicaux, les centres aéromédicaux ainsi que les évaluateurs médicaux dans les conditions et selon les modalités précisées par le règlement du 20 février 2015 précité. / Le comité médical du contrôle de la navigation aérienne prévu au II du présent article statue sur les recours formés à l'encontre des décisions individuelles prises par les autorités mentionnées à l'alinéa précédent. (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-6 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) Les dispositions du présent chapitre ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret. ".

7. La décision du comité médical du contrôle de la navigation aérienne du 30 janvier 2020 a été prise en application des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 8 novembre 1990, dans le cadre d'attributions imposant à ce comité, en vertu des articles L. 1110-4, R. 4127-4 et R. 4127-104 du code de la santé publique, de ne fournir à l'administration ou à l'employeur, pour tenir compte du secret médical institué par la loi, que ses conclusions sur le plan administratif, sans indiquer les raisons médicales qui les motivent. Ainsi, et conformément aux dispositions précitées de l'article L. 211-6 du code des relations entre le public et l'administration, cette décision ne pouvait comporter de motifs relatifs à des éléments couverts par le secret médical. Mme B... ne peut donc utilement soulever le moyen tiré d'un défaut de motivation de la décision qu'elle conteste.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 1er juillet 2002 relatif au fonctionnement et aux modalités d'organisation des travaux du comité médical du contrôle de la navigation aérienne : " Le comité médical du contrôle de la navigation aérienne comprend sept membres titulaires et sept membres suppléants, docteurs en médecine, choisis en fonction de leur expérience en médecine aéronautique. / Les membres titulaires et suppléants du comité médical sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile. / Tout membre du comité dont le mandat est interrompu est remplacé jusqu'à l'expiration dudit mandat. / Au début de chaque période de trois ans, les membres titulaires et suppléants élisent parmi eux un président et un vice-président. / Le secrétariat du comité est assuré par un médecin désigné à cet effet par le ministre chargé de l'aviation civile. ". Aux termes de l'article 3 de cet arrêté : " Les membres du comité médical du contrôle de la navigation aérienne siègent en toute indépendance. Ils ne peuvent prendre part aux délibérations portant sur l'examen de cas individuels dont ils ont déjà eu à connaître à l'occasion de leur activité extérieure au comité. / Hormis les membres du comité médical, peuvent être entendus aux audiences du comité médical le médecin, le cas échéant, désigné par l'intéressé, l'intéressé lui-même et le médecin expert éventuellement convoqué par le président. / Les délibérations du comité se déroulent en la seule présence de médecins, y compris, s'il y a lieu, le médecin expert désigné et le médecin de l'intéressé, qui n'ont que voix consultative. Les autres personnes présentes lors de la séance sont invitées à quitter la salle avant délibération. / Le comité ne peut valablement délibérer que si trois au moins de ses membres sont présents, dont un médecin spécialiste de l'affection en cause. Les avis sont prononcés à la majorité des membres présents. En cas d'égalité des voix, la voix du président est prépondérante. / En cas d'absence du président, celui-ci est remplacé par le vice-président. ". Et aux termes de l'article 5 du même arrêté : " Le secrétariat du comité médical du contrôle de la navigation aérienne informe l'administration et l'intéressé de la date à laquelle son dossier sera examiné dès que celle-ci est fixée. / L'intéressé peut obtenir communication de la partie administrative de son dossier médical, des conclusions du médecin expert éventuellement désigné et de l'avis du comité médical. / La partie médicale de son dossier peut lui être communiquée directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet, dans les conditions prévues à l'article L. 1111-7 du code de la santé publique. ". Par ailleurs, selon l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté. ".

9. D'une part, Mme B... a été informée, par un courrier du 10 janvier 2020 transmis par lettre recommandée avec avis de réception, et auquel elle a répondu par un courrier du

19 janvier 2020, de l'inscription de son recours à la séance du 30 janvier 2020 du comité médical du contrôle de la navigation aérienne. Ce courrier précisait qu'elle pouvait être entendue par le comité sur demande préalable écrite ou qu'elle pouvait s'y faire représenter par le médecin de son choix. Il mentionnait en outre qu'elle pouvait accéder aux informations médicales la concernant, directement ou par l'intermédiaire d'un médecin désigné par elle à cet effet dans les conditions prévues à l'article L. 1111-7 du code de la santé publique. Il mettait par suite Mme B... à même de demander la consultation de son dossier, tant médical qu'administratif, et de demander à être entendue ou de faire entendre l'avis du médecin de son choix. D'autre part, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a produit en appel la feuille d'émargement de la séance du 30 janvier 2020 du comité médical du contrôle de la navigation aérienne, au cours de laquelle six médecins étaient présents, dont un psychiatre, la consommation d'alcool ou de stupéfiants relevant de cette spécialité au sein de l'annexe IV du règlement CE 2015/340, paragraphe " ATCO.MED.B.055 " de la section 2 correspondant aux exigences médicales applicables aux certificats médicaux de classe 3. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision du 30 janvier 2020 aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière.

10. En troisième lieu, l'article 6 du décret du 8 novembre 1990 cité au point 6 du présent arrêt renvoie au règlement (UE) 2015/340 de la Commission du 20 février 2015 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables aux licences et certificats de contrôleur de la circulation aérienne conformément au règlement (CE)

n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil, modifiant le règlement d'exécution (UE)

n° 923/2012 de la Commission et abrogeant le règlement (UE) n° 805/2011 de la Commission. L'annexe IV de ce règlement 2015/340 prévoit, en son paragraphe " ATCO.MED.B.055 Psychiatrie ", au titre de la section 2 correspondant aux exigences médicales applicables aux certificats médicaux de classe 3, pour les contrôleurs de la circulation aérienne : " a) Les candidats souffrant de troubles mentaux ou comportementaux dus à la consommation d'alcool ou à l'usage ou à la consommation abusive d'autres substances psychoactives, notamment de drogues avec ou sans dépendance, doivent être déclarés inaptes jusqu'à expiration d'une période de sobriété ou d'absence avérée de consommation de substances psychoactives et sous réserve d'une évaluation psychiatrique satisfaisante à l'issue d'un traitement efficace. Les candidats doivent être renvoyés vers l'autorité de délivrance des licences. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a fait l'objet de deux tests urinaires révélant, selon deux méthodes différentes, la présence de cocaïne ou de métabolites de la cocaïne, en avril 2018 et en septembre 2019. Par ailleurs, un test capillaire du 2 octobre 2019 s'est également révélé positif, détectant la présence chez l'intéressée de cocaïne, de benzoylecgonine (BZE), de norcocaïne et d'anhydroecgonine methyl ester (AEME). Une consommation de cocaïne entraînant nécessairement des troubles mentaux ou comportementaux incompatibles avec l'extrême vigilance requise par l'exercice des fonctions de contrôle aérien, les tests urinaires et capillaire susmentionnés justifiaient que Mme B... fût déclarée inapte aux fonctions de contrôle aérien. Ni l'absence de définition d'un " seuil minimal " de consommation, ni les circonstances que Mme B..., qui soutient sans l'établir avoir subi une " contamination passive " comme en témoignerait son bon état de santé bucco-dentaire notamment, ne sont de nature à entacher d'erreur de droit ou d'appréciation la décision litigieuse du 30 janvier 2020, en tant qu'elle déclare l'intéressée inapte aux fonctions de contrôleur aérien.

12. En revanche, il résulte des dispositions citées au point 10 que l'inaptitude qu'elles prévoient ne peut être prononcée que " jusqu'à expiration d'une période de sobriété ou d'absence avérée de consommation de substances psychoactives et sous réserve d'une évaluation psychiatrique satisfaisante à l'issue d'un traitement efficace ", ce qui exclut la possibilité pour le comité médical du contrôle de la navigation aérienne de déclarer légalement, sur leur fondement, un agent définitivement inapte, et lui impose de définir par principe une période de sobriété ou d'absence avérée de consommation. Par suite, et alors même qu'en l'espèce Mme B... a demandé, le 19 novembre 2019, à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juin 2020, la décision du 30 janvier 2020 est dans cette mesure entachée d'erreur de droit et doit donc être annulée en tant que l'inaptitude prononcée présente un caractère définitif.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise médicale sollicitée, que la décision du 30 janvier 2020 ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par Mme B... doivent être annulées en tant seulement que l'inaptitude prononcée par le comité médical du contrôle de la navigation aérienne à l'égard de l'intéressée présente un caractère définitif.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

14. Il résulte de l'instruction que Mme B... a été admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juin 2020. Par suite, et eu égard à ce qui a été dit au point 11 du présent arrêt, les conclusions à fin d'injonction qu'elle présente, tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de reconstituer sa carrière, doivent, en tout état de cause, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme à Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2006552 du 8 avril 2022 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La décision du 30 janvier 2020 du comité médical du contrôle de la navigation aérienne ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par Mme B... contre cette décision sont annulées en tant seulement que l'inaptitude prononcée à l'égard de l'intéressée présente un caractère définitif.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à Mme D... B....

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2024.

La rapporteure,

G. C...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

É. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA02629


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02629
Date de la décision : 12/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : AARPI ANDOTTE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-12;22pa02629 ?
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