La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2023 | FRANCE | N°22PA00581

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 novembre 2023, 22PA00581


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) ICM a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un jugement n° 2004803 du 9 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, en droits et

pénalités, pour un montant de 256 872 euros, a réduit les bases d'imposition d'une somme de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) ICM a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un jugement n° 2004803 du 9 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, en droits et pénalités, pour un montant de 256 872 euros, a réduit les bases d'imposition d'une somme de 108 466,72 euros au titre de l'exercice clos en 2012 et d'une somme de 1 250 400 euros au titre de l'exercice clos en 2013, et a déchargé la société ICM, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre de ces deux exercices dans la seule mesure des réductions des bases d'imposition, et a rejeté le surplus de la demande de la société ICM.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 9 février, 21 avril et 13 septembre 2022, la société ICM, représentée par la Selas Fasquel et Duglue, prise en la personne de Me Fasquel, avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2004803 du 9 décembre 2021du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées, en droits et pénalités.

Elle soutient que :

- l'avis de mise en recouvrement du 20 décembre 2018 est irrégulier au regard de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, le montant des impositions supplémentaire mis en recouvrement étant supérieur à celui figurant sur le document du 22 novembre 2018 l'informant du montant devant être mis en recouvrement ;

- les dégrèvements faisant suite à la réintégration dans le bénéfice imposable de la société, au titre de l'exercice clos en 2012, de la dette correspondant au solde créditeur au 1er janvier 2012 du compte courant d'associé de M. C... dans les écritures de la société n'ont fait l'objet d'aucune discussion lors de l'interlocution du 20 juillet 2017, contrairement à la demande de la société, ce qui a privé celle-ci d'une des garanties essentielles prévues par la Charte du contribuable vérifié ;

- le solde créditeur au 1er janvier 2012 du compte courant d'associé de M. B... est entièrement justifié ;

- la dette de la société à l'égard de M. C..., telle qu'inscrite au bilan d'ouverture de l'exercice 2012, est justifiée ;

- la majoration de 40 % qui lui a été infligée n'est pas justifiée.

Par des mémoires en défense enregistrés les 25 mars, 22 août et 24 octobre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société ICM ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vrignon-Villalba ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Fasquel, pour la société ICM.

Une note en délibérée, enregistrée le 20 octobre 2023, a été présentée par Me Fasquel pour la société ICM.

Considérant ce qui suit :

1. La société ICM est une société holding qui détient des parts de sociétés et qui rend des prestations de services administratifs et financiers à l'ensemble des sociétés du groupe détenu par M. B... et sa famille. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au terme de laquelle, par des propositions de rectifications des 3 décembre 2015 et 22 juillet 2016, l'administration fiscale a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et à des rehaussements de l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2012 et 2013. Un avis de mise en recouvrement a été émis le 20 décembre 2018 pour des montants respectifs en droits, intérêts de retard et pénalités de 3 669 344 euros, 456 723 euros et 1 344 777 euros au titre des deux exercices. Par une réclamation du 16 juillet 2019, la société ICM, en sa qualité de société mère du groupe intégré, a contesté les impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'impôt sur les sociétés et les pénalités correspondantes. Cette réclamation contentieuse a fait l'objet d'une décision de rejet le 27 janvier 2020. Par un jugement du 9 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, en droits et pénalités, pour un montant de 256 872 euros, a réduit les bases d'imposition d'une somme de 108 466,72 euros au titre de l'exercice clos en 2012 et d'une somme de 1 250 400 euros au titre de l'exercice clos en 2013, a déchargé la société ICM, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre de ces deux exercices dans la seule mesure des réductions des bases d'imposition, et a rejeté le surplus de la demande de la société ICM. La société ICM relève appel de ce jugement en tant que le tribunal a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 256-1 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. / (...) ". Aux termes de l'article R. 256-1 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / (...) Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts ou de l'article 223 A bis du même code la société mère d'un groupe ou l'établissement public industriel et commercial qui s'est constitué seul redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats d'un groupe est amené à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'un ou de plusieurs membres du groupe, l'administration adresse à cette société mère ou à cet établissement public, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle ou il est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document ".

3. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement qui a été émis le 20 décembre 2018 porte sur des montants respectifs en droits et pénalités de 3 669 344 euros et de 1 801 500 euros, alors que le document d'information du 22 novembre 2018 adressé par l'administration à la SA ICM en sa qualité de société mère, auquel l'avis de mise en recouvrement se réfère, mentionnait les montants de 3 495 344 euros et de 1 731 900 euros. Cette différence provient du fait que la lettre du 22 novembre 2018 prend en compte, contrairement à l'avis de mise en recouvrement, la correction symétrique des bilans sur l'année 2012, qui avait été admise par l'administration lors du recours hiérarchique selon le compte-rendu du 5 décembre 2016, en compensation de l'acceptation par la société de la réintégration d'une perte " GA Invest " d'un montant de 522 000 euros au titre de l'année 2013. Ce dégrèvement, dont la société a été informée dans la lettre du 22 novembre 2018 et qui a finalement été prononcé en cours d'instance devant le tribunal, par deux décisions des 19 novembre 2020 et 10 mars 2021, a ramené le montant des droits, majorations et intérêts de retard laissés à la charge de la requérante à des montants identiques à ceux dont elle avait été informée dans la lettre du 22 novembre 2018. Par suite, et alors que la société disposait de tous les éléments utiles de compréhension lui permettant d'apprécier le montant mis en recouvrement, cette discordance de montants ne peut être regardée comme ayant privé la contribuable d'une garantie ou de la possibilité de contester utilement les droits et pénalités restant en litige.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Les dispositions contenues dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 47 sont opposables à l'administration ". Cette charte prévoit, notamment la possibilité de faire appel à l'interlocuteur départemental en cas de désaccord persistant avec le vérificateur.

5. Il résulte de l'instruction qu'à la demande de la société ICM, une rencontre a eu lieu avec l'interlocuteur départemental le 20 juillet 2017. La seule circonstance que le procès-verbal de cet entretien, que l'administration n'avait au demeurant pas l'obligation de rédiger, ne mentionne pas expressément le montant des sommes en litige sur le compte courant de M. D..., comme il le fait s'agissant du compte courant de M. B..., ne suffit pas pour établir que le service aurait refusé de discuter de ces sommes alors que la société aurait demandé que cela soit le cas. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la société ICM aurait été privée de l'une des garanties de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié et de l'irrégularité en résultant de la procédure en ce qui concerne les impositions correspondantes ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les passifs injustifiés au 1er janvier 2012 :

6. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de prendre en compte, pour la détermination de l'actif net à la clôture de l'exercice, toutes les dettes qui sont mises à la charge de la société envers des tiers si ces dettes sont, à la date de la clôture de l'exercice, certaines dans leur principe et dans leur montant. Il appartient au contribuable de justifier, par la production de tous éléments suffisamment précis, l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise.

S'agissant du compte courant d'associé de M. B... :

7. Au titre de l'exercice clos en 2012, l'administration fiscale a réintégré dans le résultat imposable de la société ICM des sommes portées au crédit du compte courant d'associé de M. B... au 1er janvier 2012, dont elle a estimé qu'elles n'étaient pas justifiées.

8. S'agissant en premier lieu, des sommes de 40 680 euros et 7 500 euros respectivement créditées les 7 mars et 5 juin 2006 au compte-courant d'associé de M. B..., la société ICM fait valoir qu'elles sont issues d'un règlement de la SNC Fortuna Beach Hôtel, dont M. B... détenait des parts dans le cadre d'un investissement dans les " DOM-TOM ", qui a été opéré par virement sur le compte bancaire de la société, la contrepartie étant ensuite inscrite au compte courant d'associé de M. B..., ainsi qu'en attestent les deux relevés de comptes produits aux débats de l'instance. Toutefois, si la copie des statuts de la SNC Fortuna Beach Hôtel permet d'attester de la qualité d'associé de M. B..., la seule production de l'extrait du compte-courant d'associé n° 455201 de M. B... au grand livre des comptes généraux de la SA ICM sur lequel sont inscrites les somme de 40 680 euros à la date du 7 mars 2006 et de 7 500 euros à la date du 5 mai 2006, sous le libellé " FBH ", ne permet pas d'établir la nature de ces sommes, ni leur caractère d'apport personnel de M. B.... Dans ces conditions, la société ICM n'établit pas plus en appel qu'en première instance, alors qu'elle seule peut le faire, la réalité des dettes alléguées vis-à-vis de M. B... et, par suite, le principe même de la déductibilité des sommes en cause.

9. S'agissant, en deuxième lieu, de la somme de 43 203,81 euros créditée sur le compte courant d'associé de M. B... le 4 novembre 2008, la société ICM fait valoir qu'elle a pour origine la liquidation de la SCI DE RIS RMB. Elle produit, outre l'extrait du compte-courant d'associé n° 455201 de M. A... B... au grand livre des comptes généraux de la société ICM sur lequel est inscrite la somme de 43 203,81 euros à la date du 4 novembre 2008 sous le libellé " VIRT ", le relevé de compte-courant au 15 novembre 2008 adressé à " SCI DE RIS RMB - LIQ. AMIABLE Monsieur A... B... " sur lequel figure un virement en date du 4 novembre 2008 à " DAV 58339967001 ICM SA ". Ce document n'est cependant pas de nature à justifier que la somme ainsi virée de la SCI DE RIS RMB à la société ICM constitue un apport personnel de M. B.... Dans ces conditions, la société ICM n'établit pas plus en appel qu'en première instance, alors qu'elle seule peut le faire, la réalité de la dette alléguée vis-à-vis de M. B... et, par suite, le principe même de la déductibilité des sommes en cause.

10. S'agissant, en troisième lieu, de la somme de 3 667,80 euros créditée sur le compte courant d'associé de M. B... le 27 avril 2010, la société ICM fait valoir, pour la première fois en appel, que M. B... détient un tiers du capital de la SCI Montgolfière, qu'il détient un compte-courant d'associé dans la comptabilité de cette société sur lequel est issue une somme de 30 794,80 euros, incluant celle de 3 667,80 euros, créditée le 27 avril 2010 sur son compte-courant d'associé dans la comptabilité de la société ICM. Celle-ci justifie en effet qu'une somme de 30 794,80 euros a été débitée le 31 décembre 2009 du compte-courant d'associé n° 455200 de M. B... dans la comptabilité de la SCI Montgolfière, que le même jour un chèque du même montant a été établi par la SCI Montgolfière au bénéfice de M. B... et que ce chèque a été crédité, le 27 avril 2010, au compte-courant d'associé n° 455201 de M. A... B... dans la comptabilité de la société ICM et qu'il a été effectivement encaissé sur le compte bancaire de cette société le même jour. À la suite de l'interlocution régionale qui s'est tenue le 20 juillet 2017, l'administration a admis que le crédit était justifié à hauteur de la somme de 27 127 euros correspondant à la quote-part, pour les années 2004 et 2005, de M. B... dans les résultats de la SCI Montgolfière, mais qu'il n'était pas justifié pour le surplus en l'absence de motif de versement. Dans la mesure où la société requérante justifie du caractère personnel pour l'associé de la somme de 3 667,80 euros payée par chèque à l'ordre de M. B... et inscrite le 27 avril 2010 au compte-courant d'associé de M. B... dans la comptabilité de la SA ICM, la société requérante justifie l'existence de ce passif dans ses écritures au 1er janvier 2012. À cet égard, l'administration ne saurait requérir de la société qu'elle atteste l'origine de cette somme au moment de son inscription, au cours ou avant l'année 2005, au compte-courant d'associé de M. B... dans la comptabilité de la SCI Montgolfière.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société ICM est seulement fondée à demander à la décharge, en base, de la somme de 3 667,80 euros au titre de l'exercice clos en 2012.

S'agissant du compte-courant d'associé de M. C... :

12. La société requérante fait valoir que M. C..., associé de la SA ICM, lui a consenti des avances en compte-courant d'un montant de 7 900 000 euros de novembre 2010 à novembre 2012 ainsi qu'il s'y était engagé par lettre du 31 octobre 2010. Elle indique que cette avance a été accordée par l'intermédiaire de la SA de droit luxembourgeois Managa pour le montant indiqué versé à hauteur de 2 900 000 euros le 5 novembre 2010 et à hauteur de 5 000 000 euros le 9 novembre 2010, puis qu'elle a été remboursée à M. C... le 24 décembre 2012. Comme le relève l'administration fiscale, il ressort des avis de crédit datés des 5 et 9 novembre 2010 de l'établissement bancaire de la SA ICM que les versements des sommes indiquées sont pour ordre de la SA Managa, et non de M. C..., sachant qu'aucune pièce produite ne justifie l'origine personnelle, pour M. C..., de ces sommes ni même qu'il se serait substitué à la SA Managa en tant que créancier. À cet égard, son engagement auprès de la SA ICM, par lettre du 31 octobre 2010, à consentir une avance en compte-courant " par virements effectués pour mon compte en faveur de la société ICM " ne précise notamment pas l'émetteur du versement, s'il devait être distinct de M. C.... La circonstance que ces sommes ont été personnellement " remboursées " à M. C... le 14 décembre 2012 n'est pas de nature, non plus, à qualifier rétrospectivement leur versement au cours de l'année 2010 comme des avances ou des apports de M. C... à la SA ICM, ce " remboursement " pouvant, le cas échéant, s'analyser comme des distributions. Il en résulte que la société requérante ne justifie pas l'existence d'une dette à l'égard de M. C..., ni même d'ailleurs vis-à-vis de la SA Managa en l'absence de la preuve de l'extinction d'une telle dette à son égard. Si la société requérante indique qu'aucune variation de l'actif net ne saurait être constatée au titre de l'exercice clos en 2012 compte tenu du " remboursement " desdites sommes avant le terme de cet exercice, le passif qui s'apprécie au 1er janvier 2012, premier jour du premier exercice non prescrit, n'en demeure pas moins injustifié, en l'absence d'une dette justifiée de la société ICM à l'égard de M. C....

13. Par ailleurs, en l'absence de toute pièce justificative établissant la nature des sommes versées par la SA Managa à la société ICM, celle-ci n'est en tout état de cause pas fondée à se prévaloir de ce qu'elle a, en pensant que les sommes en cause lui avaient été versées par la SA Managa pour le compte de M. C..., commis une erreur qu'il conviendrait de rectifier en inscrivant au passif du bilan de clôture de l'exercice 2012 la dette de 7,9 millions à l'égard de la SA Managa, ce qui aurait pour effet de neutraliser la remise en cause de la diminution de l'actif.

En ce qui concerne la pénalité pour manquement délibéré et les intérêts de retard :

14. Aux termes du I de l'article 1727 du code général des impôts : " Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. À cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code ". Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

15. La société requérante soutient que la majoration de 40 % n'est pas justifiée, d'une part, en ce qui concerne le passif considéré comme injustifié du compte courant de M. B... dans la mesure où tous les mouvements comptables ont été enregistrés au crédit du compte courant de M. B... et qu'au titre d'exercices précédents, l'interlocuteur départemental avait conclu à l'absence d'éléments de passif injustifiés, d'autre part, en ce qui concerne l'anormalité des avances en compte courant consenties par M. C... à la société ICM qui a le caractère d'une dette remboursable exposée dans l'intérêt de l'entreprise et qui n'a pas pour objet d'éluder l'impôt. Elle remet en cause également la pénalité pour manquement délibéré afférente aux autres rehaussements de l'impôt sur les sociétés eu égard à la modicité de leur montant.

16. Il résulte de l'instruction que l'administration a mis en exergue un passif injustifié en l'absence de justificatifs suffisants quant à l'existence de dettes de la SA ICM à l'égard de M. B... et de M. C... pour des montants particulièrement importants et de manière réitérée, même en tentant compte des décharges d'impositions opérée par le tribunal et de celle mentionnée au point 12. La société ne pouvait ainsi pas ignorer que ces dettes envers ses associés n'étaient pas justifiées, sachant qu'il ressort, au surplus, de la réponse aux observations du contribuable du 26 juillet 2016 que d'autres dettes à l'égard de membres de la famille de M. B... n'ont pas non plus été justifiées. Enfin, la société requérante qui se borne à contester la majoration de 40 % applicable aux " autres redressements " eu égard à leur modicité n'assortit son moyen d'aucune précision, notamment quant à la nature et à l'étendue des " autres redressements " pourtant nombreux et divers au titre des deux exercices vérifiés, permettant d'apprécier le bien-fondé de sa contestation. Par suite, l'administration justifie le bien-fondé, pour le surplus, de l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la société ICM est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en base, de la somme de 3 667,80 euros au titre de l'exercice clos en 2012.

Sur les frais liés à l'instance :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, la somme que la société ICM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les bases de l'impôt sur les sociétés fixées à la société ICM sont réduites d'une somme de 3 667,80 euros au titre de l'exercice clos en 2012.

Article 2 : La société ICM est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012 dans la seule mesure de la réduction des bases d'imposition définies à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement n° 2004803 du 9 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA ICM et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée du contrôle Fiscal Île-de-France.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Dubois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 novembre 2023.

La rapporteure,

C. VRIGNON-VILLALBALa présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA00581 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00581
Date de la décision : 10/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : CONSEILS REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-11-10;22pa00581 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award