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27/10/2023 | FRANCE | N°22PA02171

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 27 octobre 2023, 22PA02171


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté de péril imminent du 15 juillet 2019 du maire d'Aubervilliers, ainsi que son arrêté modificatif du 18 juillet 2019.

Par un jugement n° 1909299 du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 mai 2022, le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République,

représenté par la SELARL D4 Avocats associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté de péril imminent du 15 juillet 2019 du maire d'Aubervilliers, ainsi que son arrêté modificatif du 18 juillet 2019.

Par un jugement n° 1909299 du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 mai 2022, le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République, représenté par la SELARL D4 Avocats associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté de péril imminent du 15 juillet 2019 ainsi que l'arrêté de péril imminent modificatif du 18 juillet 2019 du maire d'Aubervilliers ;

3°) subsidiairement, de désigner avant dire droit un expert ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Aubervilliers une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas été mis en mesure de présenter toute observation utile avant la fin des opérations d'expertise ;

- il n'y a plus de situation de péril imminent ;

- les arrêtés contestés sont entachés de détournement de pouvoir.

Par une ordonnance du 24 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au

22 février 2023.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la demande du syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République avait perdu son objet à la date du jugement attaqué compte tenu de l'intervention de l'arrêté de " mise en sécurité - péril ordinaire " du 15 novembre 2021.

Un mémoire a été produit pour la commune d'Aubervilliers le 12 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Saint-Macary,

- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,

- et les observations de Me Dumont, représentant le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République et de Me Gauch, représentant la commune d'Aubervilliers.

Une note en délibéré produite pour le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République a été enregistrée le 24 octobre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République, représenté par le cabinet Alpha Leduc XI, gère un immeuble de trois étages à usage de commerce et d'habitation situé à Aubervilliers. Cet immeuble a fait l'objet d'un arrêté de péril imminent le 2 mars 2017, prescrivant notamment la réalisation d'une étude sur la stabilité du bâtiment A qui a été faite par la société BTP Consultants à la demande de la commune d'Aubervilliers. A la suite de cette étude du 13 mars 2019, concluant que le bâtiment présentait une dangerosité imminente et nécessitait une action corrective rapide afin de garantir la sécurité des personnes et des biens, la commune d'Aubervilliers a saisi le tribunal administratif de Montreuil sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation afin qu'il désigne un expert. Par une ordonnance du 8 juillet 2019, le tribunal a désigné un expert qui a remis son rapport le

10 juillet 2019, auquel il a apporté un correctif le 12 juillet 2019. A la suite de ce rapport, le maire d'Aubervilliers a pris un arrêté de péril imminent le 15 juillet 2019, modifié par un arrêté du 18 juillet 2019 et enjoignant aux copropriétaires, aux exploitants des fonds de commerce et au syndicat des copropriétaires de l'immeuble de procéder à la réalisation de mesures de sécurisation dans des délais impartis. Un arrêté de " mise en sécurité - péril ordinaire " a ensuite été pris le 15 novembre 2021. Le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de péril imminent du 15 juillet 2019, modifié par un arrêté du 18 juillet 2019.

2. Aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, repris à l'article L. 511-9 du même code : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate (...) ". L'article R. 556-1 du code de justice administrative prévoit qu'il est statué sur cette demande du maire suivant la procédure de référé prévue à l'article R. 531-1 de ce code, lequel dispose que : " S'il n'est rien demandé de plus que la constatation de faits, le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d'avocat et même en l'absence d'une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction. (...) Avis en est donné immédiatement aux défendeurs éventuels. Par dérogation aux dispositions des articles R. 832-2 et R. 832-3, le délai pour former tierce opposition est de quinze jours ".

3. La circonstance que les propriétaires d'un immeuble menaçant ruine n'auraient pas été avertis par le maire, préalablement à la saisine du juge du tribunal d'instance, de la procédure qui allait être diligentée à leur égard est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du maire enjoignant aux intéressés de faire procéder aux travaux d'urgence prescrits par le rapport d'expertise. Les dispositions précitées imposent en revanche que ces propriétaires aient été mis à même de participer à l'expertise.

4. D'une part, il résulte de l'instruction que le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République a été informé que la commune saisissait le tribunal administratif de Montreuil par un courrier daté du 5 juillet 2019, posté le 8 juillet 2019, dont il a été avisé le 9 juillet 2019 et qu'il a retiré dès le 10 juillet 2019. Il résulte également de l'instruction que l'ordonnance du

8 juillet 2019 par laquelle le tribunal administratif de Montreuil a désigné un expert lui a été notifiée le 10 juillet 2019. Par ailleurs, si la commune d'Aubervilliers a procédé à l'affichage de la venue de l'expert sur l'immeuble concerné le 8 juillet 2019, cet affichage ne permet pas d'établir que le syndicat aurait été régulièrement informé de la tenue des opérations d'expertise, dès lors qu'il soutient sans être contredit que l'immeuble était inhabité. D'autre part, il résulte de l'instruction que la réunion d'expertise s'est déroulée le 9 juillet 2019 et le rapport d'expertise a été remis le 10 juillet 2019. En l'absence de toute précision sur l'heure de remise du rapport de l'expert et l'heure à laquelle le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République s'est vu notifier le courrier du 5 juillet 2019 et l'ordonnance du 8 juillet 2019, il ne résulte pas de l'instruction que le syndicat ait été mis à même de participer à l'expertise. Enfin, la circonstance que l'expert ait apporté, le 12 juillet 2019, un correctif à son rapport est sans incidence sur le caractère non-contradictoire de l'expertise dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces corrections seraient intervenues à la suite d'observations formées par le syndicat. Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République, qui n'a pas été mis à même de participer à l'expertise à la suite de laquelle a été prise l'arrêté de péril imminent, a été privé d'une garantie. Ce vice est de nature à entraîner l'illégalité des arrêtés du maire d'Aubervilliers des 15 et 18 juillet 2019.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République est fondé à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

6. ll y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Aubervilliers une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1909299 du 10 mars 2022 du tribunal administratif de Montreuil et les arrêtés des 15 et 18 juillet 2019 du maire d'Aubervilliers sont annulés.

Article 2 : La commune d'Aubervilliers versera au syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires du 65 avenue de la République et à la commune d'Aubervilliers.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Briançon, présidente,

M. Mantz, premier conseiller,

Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2023.

La rapporteure,

M. SAINT-MACARY

La présidente,

C. BRIANÇON

La greffière,

A. GASPARYAN

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02171
Date de la décision : 27/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIANÇON
Rapporteur ?: Mme Marguerite SAINT-MACARY
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : D4 AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-27;22pa02171 ?
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