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27/10/2023 | FRANCE | N°22PA01643

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 27 octobre 2023, 22PA01643


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) a implicitement rejeté sa demande de procéder à une étude relative aux nuisances sonores et atmosphériques liées à l'activité de la base aéronautique de Landivisiau ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux et d'enjoindre à l'ACNUSA de procéder à cette étude et de formuler des r

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) a implicitement rejeté sa demande de procéder à une étude relative aux nuisances sonores et atmosphériques liées à l'activité de la base aéronautique de Landivisiau ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux et d'enjoindre à l'ACNUSA de procéder à cette étude et de formuler des recommandations pour remédier aux nuisances sonores et atmosphériques liées à la base aéronautique de Landivisiau.

Par un jugement n° 2021130 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions et a enjoint à l'ACNUSA de procéder à cette étude et de formuler des recommandations.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 avril 2022 et 6 mars 2023, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, représentée par la SCP Lyon-Caen, Thiriez, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif Paris et de rejeter la demande de l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau ;

2°) de mettre à la charge de l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer ;

- l'ACNUSA est incompétente pour énoncer des recommandations, des prescriptions ou encore de donner suite à une demande d'informations portant sur les nuisances générées par un aérodrome militaire et était, par suite, tenue de rejeter la demande de l'association ;

- elle ne peut satisfaire à l'injonction qui lui a été faite, son personnel n'étant pas accrédité secret-défense.

Par des mémoires en défense enregistrés les 8 juillet 2022 et 11 mai 2023, l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau, représentée par la SAS Huglo Lepage Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'ACNUSA une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports ;

- l'arrêté du 23 novembre 1962 relatif au classement des aérodromes suivant leur usage aéronautique et les conditions de leur utilisation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Saint-Macary,

- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,

- et les observations de Me Thiriez, représentant l'ACNUSA et de Me Bégel, représentant l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau.

Considérant ce qui suit :

1. L'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau a saisi l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) afin qu'elle réalise une expertise sur les pollutions sonore et atmosphérique liées à la base aéronautique navale de Landivisiau et fasse des recommandations pour y remédier. Sa demande, réceptionnée le 3 juin 2020, a été implicitement rejetée le 3 août 2020. Le recours gracieux contre cette décision a également été rejeté. L'ACNUSA relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a, à la demande de l'association, annulé ces deux décisions et lui a enjoint de réaliser cette étude et de formuler des recommandations.

2. Aux termes de l'article L. 6361-5 du code des transports, dans sa rédaction applicable au litige : " L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires peut émettre, à son initiative ou sur saisine d'un ministre, d'une commission consultative de l'environnement mentionnée à l'article L. 571-13 du code de l'environnement, d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale inclus pour tout ou partie dans le périmètre du plan d'exposition au bruit ou du plan de gêne sonore d'un aérodrome, ou d'une association concernée par l'environnement aéroportuaire, des recommandations sur toute question relative aux nuisances environnementales générées par le transport aérien sur et autour des aéroports. Pour les nuisances sonores, ces recommandations sont relatives à la mesure du bruit, et notamment à la définition d'indicateurs de mesure adéquats, à l'évaluation et à la maîtrise des nuisances sonores du transport aérien et de l'activité aéroportuaire ainsi qu'à la limitation de leur impact sur l'environnement, notamment par les procédures particulières de décollage ou d'atterrissage élaborées en vue de limiter les nuisances sonores. L'autorité prend connaissance des informations et propositions émises par l'ensemble des parties concernées par la pollution atmosphérique liée à l'exploitation des aérodromes ou le bruit lié aux aérodromes et aux trajectoires de départ, d'attente et d'approche. Lorsque les territoires couverts par le schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie ou le plan de protection de l'atmosphère comprennent un aérodrome visé au I de l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts ou sont affectés par la pollution atmosphérique de ces aérodromes, elle est consultée par les autorités compétentes chargées d'élaborer ce plan ou schéma. Elle rend un rapport faisant état de la synthèse de ces informations et propositions chaque année. Les services de l'administration locale ou centrale répondent à ce rapport et, d'une façon générale, aux avis et recommandations de l'autorité dans un délai de six mois ".

3. D'une part, les dispositions précitées sont issues de la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999 portant création de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, qui a inséré les dispositions relatives à cette autorité au sein du titre II du livre II du code de l'aviation civile, relatif aux aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique. Cette loi a ainsi entendu limiter le pouvoir d'étude et de recommandation de l'ACNUSA aux aéroports ouverts à la circulation aérienne publique. Il est constant que l'aérodrome de Landivisiau, qui figure sur la liste n° 2 de l'arrêté du 23 novembre 1962 relatif au classement des aérodromes suivant leur usage aéronautique et les conditions de leur utilisation, est réservé à l'usage des administrations de l'Etat et n'est pas ouvert à la circulation aérienne publique. D'autre part, si les dispositions de niveau législatif du code de l'aviation civile relatives à l'ACNUSA ont été transférées, par l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports, au sein du titre VI du livre III de la sixième partie du code des transports, qui n'est pas spécifique aux aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique, cette ordonnance n'a pas eu pour objet d'élargir le champ de compétences de l'ACNUSA et aucune disposition de ce code ne prévoit que la compétence de cette autorité s'étend aux aérodromes non ouverts à la circulation aérienne publique. A cet égard, l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 6332-1 du code des transports, qui prévoient que les dispositions du chapitre II du titre III du livre III de la sixième partie du code s'appliquent aux aérodromes réservés à l'usage des administrations de l'Etat, dès lors que ce chapitre concerne la police des aérodromes et des installations à usage aéronautique et non les compétences de l'ACNUSA et qu'aucune disposition relative au champ de compétences de cette autorité ne renvoie à cet article. L'association défenderesse ne peut davantage se prévaloir utilement de ce que l'aérodrome de Landivisiau serait concerné par un plan d'exposition au bruit, cette circonstance ayant seulement pour objet d'habiliter les collectivités territoriales incluses pour tout ou partie dans le périmètre de ce plan à saisir l'ACNUSA lorsqu'elle est compétente, et non d'étendre le champ de compétence de cette autorité aux aérodromes concernés par un tel plan. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a retenu, pour annuler les décisions contestées, la compétence de l'ACNUSA pour réaliser une étude et émettre des recommandations sur la base aéronautique navale de Landivisiau.

4. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau devant le tribunal administratif.

5. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'ACNUSA n'a pas compétence pour réaliser une étude et émettre des recommandations sur la base aéronautique navale de Landivisiau. Par suite, elle était en situation de compétence liée pour rejeter la demande de l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau demandant la réalisation d'une étude relative aux nuisances sonores et atmosphériques liées à l'activité de la base aéronautique de Landivisiau. Dès lors, les moyens tirés du défaut de motivation et de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions contestées ne peuvent être utilement invoqués et doivent être écartés.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement, que l'ACNUSA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision implicite du 3 août 2020 ainsi que celle par laquelle elle a rejeté le recours gracieux exercé à son encontre, et lui a enjoint de procéder à une étude et de formuler des recommandations.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau une somme de 1 500 euros à verser à l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas perdante dans la présente instance, la somme que l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau demande sur ce fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2021130 du tribunal administratif de Paris du 10 février 2022 est annulé et la demande formée par l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau est rejetée.

Article 2 : L'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau versera à l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires et à l'association des riverains de la base aéronautique de Landivisiau.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Briançon, présidente,

M. Mantz, premier conseiller,

Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2023.

La rapporteure,

M. SAINT-MACARY

La présidente,

C. BRIANÇON

La greffière,

A. GASPARYAN

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA01643


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01643
Date de la décision : 27/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIANÇON
Rapporteur ?: Mme Marguerite SAINT-MACARY
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN et THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-27;22pa01643 ?
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