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20/10/2023 | FRANCE | N°22PA04414

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 octobre 2023, 22PA04414


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 mai 2022 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2213871 du 27 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 octobre 2022, M. A... représenté par

Me Patureau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2213871 du 27 septembre 2022 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 mai 2022 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2213871 du 27 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 octobre 2022, M. A... représenté par Me Patureau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2213871 du 27 septembre 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté du 30 mai 2022 du préfet de police de Paris ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris, ou à tout préfet territorialement compétent, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; à défaut, d'enjoindre au préfet de police de Paris de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées ont été signées par une autorité incompétente ;

- elles ne sont pas suffisamment motivées ;

- la décision de refus de titre de séjour n'a pas été précédée d'un examen suffisant de sa demande au regard de l'ensemble des fondements invoqués ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du même code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 avril 2023, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mai 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- et les observations de Me Desouches substituant Me Patureau, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien né le 25 mai 1983, est entré en France, selon ses déclarations, courant 2014. Par un arrêté du 1er décembre 2016, le préfet des Yvelines l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en assortissant cette décision d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par arrêté du 30 octobre 2020, le préfet de police de Paris a rejeté sa demande d'admission au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable. Par jugement du 1er février 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite de rejet de la demande de M. A... tendant à l'abrogation de cet arrêté et a enjoint au préfet de police de Paris de réexaminer la situation de l'intéressé. Ce dernier a demandé, en exécution de ce jugement, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par arrêté du 30 mai 2022 du préfet de police de Paris faisant également obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Ce dernier relève appel du jugement du 27 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions :

2. M. A... réitère devant la cour les moyens, déjà énoncés devant les premiers juges, tirés de ce que les décisions attaquées auraient été signées par un auteur incompétent et seraient insuffisamment motivées. Toutefois, il y a lieu, en l'absence de tout élément de fait ou de droit nouveau, d'écarter ces moyens par adoption des motifs, suffisamment circonstanciés, retenus à bon droit par les premiers juges aux point 2 à 4 du jugement attaqué.

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police de Paris n'aurait pas procédé à un examen particulier et suffisant de la situation personnelle de M. A... ni qu'il aurait omis d'examiner la demande de titre de ce dernier, présentée sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors, ainsi que l'on relevé à bon droit les premiers juges, qu'en instruisant la demande de l'intéressé sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la suite de l'injonction prononcée par le tribunal administratif de Paris dans son jugement du 1er février 2022, le préfet de police a, implicitement mais nécessairement, examiné la situation de l'intéressé au regard de ses liens personnels et familiaux.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...). ".

5. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

6. S'agissant, d'une part, de l'admission exceptionnelle au titre de la vie privée et familiale, si M. A... expose que le centre de ses attaches matérielles et familiales est désormais en France où il vit depuis plus de sept ans et où il est inséré professionnellement, se prévaut également de sa maîtrise du français et de son bon comportement, quand bien même serait-il entré sur le territoire français à l'âge de 31 ans, les éléments invoqués ne traduisent pas la réalité et la stabilité de liens personnels effectifs en France. Sa situation professionnelle -telle qu'évoquée au point suivant- ne permet par ailleurs pas de considérer qu'il serait particulièrement inséré professionnellement et son intégration au sein de la société française n'est pas établie, alors qu'il a déjà fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement non exécutée. Célibataire et sans enfant, il ressort des pièces du dossier qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où, bien qu'il justifie que son père soit décédé, réside encore sa mère. Enfin, il ressort des pièces du dossier qu'il a toujours été hébergé par un tiers. Ainsi, les éléments dont le requérant se prévaut ne caractérisent pas des motifs exceptionnels ou des circonstances humanitaires justifiant la délivrance d'un titre de séjour.

7. S'agissant, d'autre part, de l'admission exceptionnelle au titre du travail, si M. A... se prévaut d'une activité professionnelle en qualité de manœuvre depuis son entrée en France en 2014 lui procurant un revenu mensuel de l'ordre de 1 300 euros, il n'apporte toutefois pas d'éléments tels qu'un contrat de travail ou une promesse d'embauche permettant d'estimer qu'il aurait de réelles perspectives professionnelles stables sur le territoire national. Les pièces du dossier révèlent, en effet, qu'ayant travaillé principalement par intermittence sur la période considérée, par contrats de missions temporaires d'intérim, avec la société Compass services, d'une durée d'un ou de quelques jours, il a déclaré être chômeur et sans ressources et faire " de petits boulots " lors de son audition par les services de police le 1er décembre 2016, et déclaré aux services fiscaux les revenus suivants : aucun en 2015, 2 668 euros en 2016, 924 en 2017, 5 321 en 2018, 9 506 en 2019, 11 418 en 2020 et 2 406 en 2021. De tels éléments ne suffisent ainsi pas à caractériser des circonstances humanitaires, ni des motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans ces conditions, et en dépit des efforts d'insertion dont l'intéressé a fait preuve, la décision contestée n'a pas méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Pour l'application de ces stipulations et dispositions, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que M. A... ne justifie pas de l'intensité de liens personnels noués au sein de la société française alors qu'il dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Eu égard aux circonstances exposées aux points 6 et 9, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle du requérant doivent être écartés.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Menasseyre, présidente,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2023.

La rapporteure,

M-D JAYERLa présidente,

A. MENASSEYRE

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04414


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04414
Date de la décision : 20/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : PATUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-20;22pa04414 ?
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