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13/10/2023 | FRANCE | N°20PA00126

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 13 octobre 2023, 20PA00126


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le ministre de la culture a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner, au titre de leur participation à la construction de l'immeuble abritant l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine :

- la société Frédéric Borel architecte à lui verser la somme de 207 450 euros ou, subsidiairement, la somme de 19 781,80 euros hors taxes, en réparation des désordres n° 25, 31 et 34,

- la société SFICA à lui verser la somme de 800 218,26 euros ou subsidiairement c

elle de 596 621,27 euros hors taxes, en réparations des désordres affectant le système d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le ministre de la culture a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner, au titre de leur participation à la construction de l'immeuble abritant l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine :

- la société Frédéric Borel architecte à lui verser la somme de 207 450 euros ou, subsidiairement, la somme de 19 781,80 euros hors taxes, en réparation des désordres n° 25, 31 et 34,

- la société SFICA à lui verser la somme de 800 218,26 euros ou subsidiairement celle de 596 621,27 euros hors taxes, en réparations des désordres affectant le système de refroidissement et le système de chauffage et des désordres n° 6, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 31, 34 et 35,

- la société SPIE SCGPM à lui verser la somme de 658 736,49 euros ou subsidiairement celle de 455 139,50 euros hors taxes, en réparation des désordres n° 1, 2, 6, 12, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 31, 34 et 35,

- la société Cégélec à lui verser la somme de 32 518,51 euros hors taxes, en réparation des désordres affectant le système de chauffage,

- la société Verre et métal à lui verser la somme de 46 393,02 euros hors taxes, en réparation des désordres n° 3, 8, 9, 10, 28-3 et 30-1,

- la société Maintenance technique optimisée à lui verser la somme de 74 646,40 euros hors taxes, en réparation des désordres n° 1, 2, 3, 4, 5, 11, 13, 14, 15, 16, 17 et 33,

- la société Balas à lui verser la somme de 3 500 euros hors taxes, en réparation du désordre n° 7,

- la société Decomo à lui verser la somme de 23 850 euros hors taxes, en réparation du désordre n° 22.

Par un jugement n° 1709517 du 15 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a :

- condamné la société SFICA à verser la somme de 19 944,05 euros à l'Etat en réparation des désordres affectant le système de rafraîchissement d'air,

- condamné solidairement les sociétés SFICA et Cégélec à verser la somme de 32 518,51 euros à l'Etat en réparation des désordres affectant le système de chauffage et la société Cégélec à garantir la société SFICA à concurrence de 50 % du montant de cette condamnation,

- condamné solidairement les sociétés SFICA et Maintenance technique optimisée à verser la somme de 14 000 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 17 et chacune de ces sociétés à se garantir mutuellement à hauteur de 50 % du montant de cette condamnation,

- condamné solidairement les sociétés SFICA et SPIE Batignolles à verser la somme de 18 000 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 35 et chacune de ces sociétés à se garantir mutuellement à hauteur de 50 % du montant de cette condamnation,

- condamné solidairement les sociétés SFICA, Frédéric Borel architecte et SPIE Batignolles à verser la somme de 4 771,80 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 31, les sociétés Frédéric Borel architecte et SPIE Batignolles à garantir la société SFICA à concurrence, chacune, d'un tiers du montant de cette condamnation et les sociétés SFICA et Frédéric Borel architecte à garantir la société SPIE Batignolles à concurrence, chacune, d'un tiers du montant de cette condamnation,

- condamné solidairement les sociétés SFICA, Frédéric Borel architecte et SPIE Batignolles à verser la somme de 14 980 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 34, les sociétés Frédéric Borel architecte et SPIE Batignolles à garantir la société SFICA à concurrence, respectivement, de 35 % et de 30 % du montant de cette condamnation et les sociétés SFICA et Frédéric Borel architecte à garantir la société SPIE Batignolles à concurrence de 35 % du montant de cette condamnation,

- condamné solidairement les sociétés SPIE Batignolles et Maintenance technique optimisée à verser la somme de 4 300 euros à l'Etat en réparation des désordres n° 1 et 2, la société SPIE Batignolles à garantir la société Maintenance technique optimisée à concurrence de 50 % du montant de cette condamnation et la société Maintenance technique optimisée à garantir la société SPIE Batignolles à concurrence de 50 % de la somme de 3 000 euros correspondant au désordre n° 1,

- condamné la société Maintenance technique optimisée à verser à l'Etat la somme de 15 000 euros en réparation du désordre n° 4, la somme de 7 000 euros en réparation du désordre n° 11, la somme de 8 000 euros en réparation des désordres n° 14 et 15, la somme de 9 000 euros en réparation du désordre n° 16 et celle de 6 346,40 euros au titre du désordre n° 33,

- condamné solidairement les sociétés Maintenance technique optimisée et Verre et métal à verser la somme de 4 000 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 3, les sociétés Verre et métal et SPIE Batignolles à garantir la société Maintenance technique optimisée à concurrence, respectivement, de 35 % et de 30 % du montant de cette condamnation et la société Maintenance technique optimisée à garantir la société Verre et métal à concurrence de 35 % du montant de cette condamnation,

- condamné la société Maintenance technique optimisée à verser la somme de 1 000 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 5 et la société Verre et métal à la garantir à concurrence de 50 % du montant de cette condamnation,

- condamné la société Verre et métal à verser la somme de 6 100 euros à l'Etat en réparation des désordres n° 8, 9 et 10 et la somme de 11 724,23 euros en réparation des désordres

n° 28-3 et 30-1,

- condamné la société SPIE Batignolles à verser la somme de 3 000 euros à l'Etat en réparation du désordre n° 12,

- mis à la charge des sociétés SFICA et Maintenance technique optimisée les frais d'expertise et les autres dépens rendus nécessaires par les opérations d'expertise pour un montant de 24 340,85 euros chacune, et des sociétés SPIE Batignolles, Verre et métal, Cégélec et Frédéric Borel architecte, pour un montant de 8 113,62 euros chacune.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 janvier, 23 juillet et 24 septembre 2020 et 27 avril 2023, le ministre de la culture, représenté par la SELARL D4 avocats associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2, 6, 12, 14 et 17 du jugement du tribunal administratif ;

2°) de condamner la société SFICA à lui verser la somme de 102 263,26 euros HT en raison de l'absence de système de refroidissement ;

3°) de condamner les sociétés SFICA et SPIE SCGPM à lui verser la somme de 8 790 euros HT en réparation du désordre n° 6 ;

4°) de condamner la société Balas à lui verser la somme de 3 500 euros HT en réparation du désordre n° 7 ;

5°) de condamner la société Verre et métal à lui verser la somme de 23 424,82 euros HT en réparation des désordres n° 8, 9, 10, 28-3 et 30-1 ;

6°) de condamner in solidum les sociétés SFICA et SPIE SCGPM à lui verser la somme de 2 447,70 euros HT en réparation du désordre n° 18 ;

7°) de condamner la société SPIE SCGPM à lui verser la somme de 375 000 euros HT en réparation des désordres n° 20, 21 et 23 ;

8°) de condamner in solidum les sociétés SFICA, Decomo et SPIE SCGPM à lui verser la somme de 23 850 euros HT en réparation du désordre n° 22 ;

9°) de condamner la société Frédéric Borel architecte à lui verser la somme de 2 740 euros HT en réparation du désordre n° 25 ;

10°) de condamner in solidum les sociétés SFICA, Frédéric Borel architecte et SPIE SCGPM à lui verser la somme de 194 771,80 euros HT en réparation du désordre n° 31 ;

11°) de mettre à la charge in solidum de l'ensemble des sociétés les frais d'expertise à hauteur de 92 656,18 euros ;

12°) de mettre à la charge de chacune de ces sociétés une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son action n'est pas prescrite ;

- un désordre relatif à une température ne permettant pas une utilisation normale du bâtiment est réparable sur le fondement de la garantie décennale ; l'expert a retenu à hauteur de 20 % la responsabilité de la société SFICA faute pour elle d'avoir évoqué dans le CCTP des descriptions techniques permettant la mise en œuvre d'un système de refroidissement alors qu'elle connaissait l'éloignement du réseau Climespace, de conseils insuffisants et d'absence de prévision pour l'emplacement d'un groupe froid électrique et de liaison avec une installation existante ;

- le désordre n° 6 porte atteinte à l'esthétique de l'ouvrage et en compromet la destination dès lors qu'il s'agit d'une école d'architecture ; il participe en outre au défaut d'étanchéité de l'ouvrage ;

- s'agissant du désordre n° 7, le caractère décennal d'un désordre peut résulter de l'accumulation sur l'ouvrage de plusieurs défauts d'étanchéité ;

- les désordres n° 18 et 19 s'amplifieront en fonction des épisodes pluvieux, et la stagnation d'eau porte atteinte à la sécurité compte tenu de la proximité des locaux techniques et elle provoque en outre des odeurs nauséabondes qui provoquent une gêne considérable des usagers ; le juge administratif prend en compte la production de devis postérieurement à l'expertise pour chiffrer le préjudice ;

- si les désordres 1 à 19 pris isolément, pourraient être considérés comme mineurs, il convient de prendre en compte le nombre des infiltrations et des problèmes d'étanchéité, qui, de manière prévisible, s'aggraveront en l'absence de mesures adaptées ; le taux d'humidité, voire le pourrissement de certaines parties des bâtiments font craindre pour leur stabilité et vont rendre les bureaux et salles de cours impropres à leur destination ;

- s'agissant des désordres n° 20, 21 et 23, leur caractère esthétique ne fait pas obstacle à ce qu'ils présentent un caractère décennal, ils sont en outre la conséquence du défaut d'étanchéité et le revêtement de façade permet de protéger et de rendre étanche la façade ;

- s'agissant du désordre n° 22, le sapiteur a indiqué que les fissures allaient se développer ;

- l'absence des dossiers des ouvrages exécutés, qu'il appartenait à l'architecte de lui transmettre, ne permet pas de se prononcer sur la responsabilité du désordre n° 25, aussi la responsabilité du groupement de maîtrise d'œuvre doit-elle être engagée ;

- s'agissant du désordre n° 31, si le sapiteur s'est contenté d'examiner la coursive du premier étage, le problème de conception est bien plus large et concerne l'ensemble des terrasses des bâtiments pour une surface de 950 m² et un montant de 150 000 euros, comme le montre le rapport d'IPSO qui doit être pris en compte dès lors que l'expert l'a annexé à son rapport ; la garantie décennale étant un régime de responsabilité sans faute, la société Frédéric Borel architecte ne peut utilement se prévaloir de l'absence de faute ;

- le rapport IPSO a été utile à la résolution du litige ;

- il a engagé des travaux de reprise en lien avec des désordres 1 à 19 liés à l'étanchéité pour un montant de 18 368,79 euros ;

- l'article 7 du jugement est devenu définitif ; le désordre n° 34 présente en outre un caractère décennal et implique des travaux de reprise à hauteur de 14 980 euros HT ;

- les erreurs de la société SFICA ont été déterminantes dans l'insuffisance de chauffage ;

- le désordre n° 17 est imputable à la société SFICA et n'est pas lié à un défaut d'entretien ;

- le désordre n° 34 est imputable à la société SFICA ;

- le désordre n° 35 est imputable à la société SFICA ;

- s'agissant du désordre n° 3, dès lors qu'il est imputable à la société Verre et Métal, cette société est redevable de l'ensemble des travaux de reprise ; par ailleurs l'argumentation technique de la société MTO n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'expertise ;

- les désordres n° 28-3 et 30-1 sont imputables à la société Verre et Métal et le devis utilisé pour chiffrer les travaux peut être utilisé bien que produit postérieurement à l'expertise ;

- l'intervention de la société Generali n'est pas recevable.

Par un mémoire enregistré le 3 mars 2020, la société Frédéric Borel architecte, représentée par Me de Bazelaire de Lesseux, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre et de rejeter les demandes du ministre de la culture formées contre elle ;

2°) de rejeter les appels en garantie formés contre elle ;

3°) subsidiairement, de limiter les condamnations aux montants retenus par l'expert judiciaire, de ne pas prononcer à son encontre de condamnation in solidum ou solidairement, et de condamner à la garantir les sociétés SFICA, Cégélec Tertiaire IDF, Verre et Métal, MTO, Balas et Decomo ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante les dépens et une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande du ministre est prescrite en vertu de l'article 2224 du code civil ;

- la garantie décennale est forclose ;

- l'intervention de la société Generali est irrecevable ;

- l'appel en garantie formé par la société SFICA à son encontre est irrecevable ;

- l'appel en garantie formé par la société MTO à son encontre est dépourvu d'objet ;

- s'agissant des désordres affectant les lots techniques, sa responsabilité ne peut être retenue dès lors qu'elle est intervenue comme architecte et non comme bureau d'études techniques, que sa mission était une mission de conception architecturale et de suivi d'exécution architecturale et qu'il s'agit de désordres ponctuels n'engageant que la responsabilité des entrepreneurs ;

- s'agissant du désordre n° 31 l'expert et le sapiteur ont seulement constaté une mauvaise évacuation des eaux sur la coursive imputable à des pissettes et à une cunette de dimensions insuffisantes dont ils ont évalué la reprise à 4 771 euros HT ; l'expert a annexé à son rapport l'étude IPSO mais ne l'a pas reprise dans ses conclusions ;

- les devis des travaux de reprises devaient être débattus contradictoirement ;

- le sapiteur et l'expert ont relevé un défaut d'entretien général imputable au demandeur ;

- le ministre a reconnu être en possession de tous les DOE ;

- s'agissant du désordre n° 34 il présente seulement un caractère esthétique.

Par un mémoire enregistré le 1er avril 2020, la société Decomo, représentée par la SCP IFL - Avocats, conclut au rejet de toute demande formée à son encontre, subsidiairement, à la condamnation des sociétés SPIE SCGPM et SFICA à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et à ce que soit mise à la charge de tout succombant une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le ministre de la culture ne demande plus sa condamnation ;

- le désordre n° 22, purement esthétique, ne présente pas de caractère décennal et elle avait préconisé un traitement préventif antisalissure.

Par un mémoire enregistré le 25 mai 2020, la société SFICA, représentée par la SELARL 2H Avocats, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) subsidiairement, si elle devait être condamnée au titre des désordres n° 6, 18 et 19, 20, 21, 23 ou 31, de condamner la société SPIE Batignolles et la société Frédéric Borel architecte à la garantir à due proportion de leur part de responsabilité respective et si elle devait être condamnée au titre du désordre n° 22, de condamner ces deux sociétés et la société Decomo à la garantir ;

3°) de rejeter tout appel en garantie formé à son encontre ;

4°) d'annuler les articles 3, 4, 5, 6 et 7 du jugement attaqué et de rejeter les demandes du ministre de la culture et les appels en garantie à ce titre et de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a mis à sa charge des dépens ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a informé dès l'origine la maîtrise d'ouvrage déléguée de l'impossibilité du raccordement au réseau Climespace et lui a conseillé de retenir une solution de production de froid par l'énergie électrique ; c'est ainsi en pleine connaissance de cause que le maître d'ouvrage a décidé de prévoir dans le marché de simples mesures conservatoires destinées à permettre un raccordement ultérieur au réseau Climespace ; le système de production frigorifique ne faisait pas partie des ouvrages prévus au marché et les opérations d'expertise ont en outre confirmé que le raccordement au réseau Climespace peut désormais être mis en œuvre ;

- l'insuffisance de chauffage est liée à un simple problème de réglage ;

- le désordre n° 6 présente un caractère purement esthétique ; elle n'est en outre pas maître d'œuvre d'exécution et il s'agit en tout état de cause d'un défaut ponctuel et mineur d'exécution ; la somme de 8 790 demandée par le ministre correspond en outre à un devis qui n'a pas été produit lors des opérations d'expertise ;

- le désordre n° 17 est imputable exclusivement à un problème d'exécution ;

- les désordres n° 18 et 19 ne présentent pas de caractère décennal, le ministre n'apporte pas la preuve de ses allégations et le devis qu'il produit ne l'a pas été en cours d'expertise ; en outre il s'agit d'un pur problème d'exécution et elle n'était pas maître d'œuvre d'exécution ;

- les désordres n° 20 et 23 ne présentent pas de caractère décennal, ils sont imputables au seul entrepreneur et elle n'était pas maître d'œuvre d'exécution ;

- le désordre n° 21 ne présente pas de lien avec les infiltrations constatées dans le bâtiment et n'affecte pas la structure de l'immeuble et le rapport d'expertise impute ce désordre exclusivement à la société SPIE SGCPM ;

- le désordre n° 22 ne présente pas de caractère décennal, l'expert n'ayant pas mentionné un danger pour la sécurité des personnes, et seul le fabricant du matériau est responsable ;

- le désordre n° 31 doit être limité à celui constaté par l'expert et le sapiteur, à savoir la terrasse de la coursive du 1er étage, et sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors qu'elle n'est pas maître d'œuvre d'exécution ;

- le désordre n° 34 est lié à un défaut de conception qui relève des lots architecturaux, et non techniques, et à un défaut ponctuel d'exécution, qui ne lui est pas imputable ;

- elle n'est pas maître d'œuvre d'exécution et il ne lui appartenait pas de contrôler la conformité de l'exécution des travaux aux prescriptions des pièces s'agissant des lots architecturaux, aussi le désordre n° 35 ne lui est-il pas imputable.

Par des mémoires enregistrés les 3 juillet 2020 et 31 janvier 2023, la société Balas, représentée par Me François, conclut au rejet de la requête, subsidiairement à la limitation de la condamnation qui serait prononcée à son encontre à la somme de 2 000 euros hors taxe, à la limitation des frais d'expertise mis à sa charge à la somme de 93,86 euros ou 277,97 euros, à la condamnation des sociétés Frédéric Borel architectes, SPIE SCGPM, Cégélec Tertiaire IDF, Verre et Métal, MTO, Decomo et Canet à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et dans tous les cas à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande du ministre dirigée contre elle au titre du désordre n° 7 était prescrite depuis le 12 avril 2017, le ministre n'ayant exercé aucun acte interruptif à son encontre ;

- ce désordre ne présente pas de caractère décennal ;

- une condamnation prononcée au titre de ce désordre à son encontre ne pourrait excéder 2 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 6 août 2020, la société Verre et Métal, représentée par la SELAS DFG avocats, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de réformer l'article 10 du jugement attaqué en limitant sa condamnation à la somme de 1 000 euros HT, de réformer son article 12 en ce qu'il a mis à sa charge les sommes de 1 281,41 euros HT au titre du désordre n° 28.3, 10 442,82 euros HT au titre du désordre

n° 30.1 et de le réformer en ce qu'il a mis à sa charge une somme au titre des frais d'expertise ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la réclamation financière du ministre au titre des désordres n°8, 9 et 10 n'est pas précisée ;

- elle ne saurait être tenue responsable du désordre n° 28-3 dont ses travaux ne sont pas réputés être la cause directe et certaine ;

- elle ne conteste pas sa responsabilité au titre du désordre n° 30-1 mais le montant du devis de 10 442, 82 euros HT n'a pas été soumis à l'expert et apparaît disproportionné ;

- s'agissant du désordre n° 3 elle ne peut être tenue pour responsable que de la reprise des joints d'étanchéité évaluée à 1 000 euros HT ;

- sa condamnation n'est recherchée que pour une part infime des sommes sollicitées et les opérations d'expertise ont très peu porté sur ses ouvrages.

Par des mémoires enregistrés les 24 septembre 2020 et 13 février 2023, la société Maintenance technique optimisée (MTO), venant aux droits de la société TFN Bâtiment, représentée par la SELARL Cabinet Ben Zenou, conclut à sa mise hors de cause et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête appel n'est pas dirigée contre elle ;

- les demandes dirigées contre elle ne sont pas fondées.

Par des mémoires enregistrés les 29 juin 2021 et 17 février 2023, la société SPIE Batignolles Ile-de-France (SCGPM), représentée par la SELARL Rodas - Del Rio, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête en ce qu'elle la concerne ;

2°) subsidiairement, de condamner la société Canet et la société Frédéric Borel architecte à la garantir in solidum des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au titre des désordres n° 18, 21, 22 et 23 ;

3°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il l'a condamnée au titre des désordres

n° 1, 2, 12, 31, 34 et 35 et de rejeter les demandes du ministre formées à ce titre à son encontre ;

4°) subsidiairement, de condamner à la garantir les sociétés TFN Bâtiment, Canet et Frédéric Borel architecte à la garantir in solidum de sa condamnation au titre du désordre n° 1, et les sociétés Canet et Frédéric Borel architecte à la garantir in solidum des condamnations prononcées à son encontre au titre des désordres n° 12, 31, 34, et 35 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le désordre n° 6 ne présente pas de caractère décennal et ne lui est pas imputable, la pose des tablettes ne relevant pas du lot " gros-œuvre " ;

- le désordre n° 18 ne compromet pas la sécurité du bâtiment, il ne lui est pas imputable et il était apparent lors de la réception des travaux ;

- les désordres n° 21 et 23 ne présentent pas de caractère décennal et étaient apparents lors de la réception des travaux ; ils sont imputables au titulaire du lot peinture qui était co-contractant du maître d'ouvrage ; le montant demandé pour leur réparation n'est pas justifié ;

- le désordre n° 22 ne présente pas de caractère décennal et ne lui est pas imputable ;

- le désordre n° 1 ne lui est pas imputable dès lors qu'il provient de la seule rigole ; il était apparent à la réception ; le montant de la réparation retenu par l'expert n'est pas justifié ;

- le désordre n° 2 ne lui est pas imputable, comme le montre le rapport du sapiteur ;

- le désordre n° 12 était apparent lors de la réception des travaux, il ne lui est pas imputable et le montant de la réparation retenu par l'expert n'est pas justifié ;

- le désordre n° 31 ne lui est pas imputable et le montant de 190 000 euros demandé par le ministre n'est pas justifié ;

- le désordre n° 34 relève d'un problème de conception et ne lui est pas imputable et le devis du montant de la réparation n'a pas été débattu contradictoirement ;

- le montant retenu au titre du désordre n° 35 n'est pas justifié et la responsabilité de la société Frédéric Borel architecte devra à tout le moins être retenue.

La société Generali, représentée par Me Rudermann, a présenté des observations, enregistrées les 30 juin 2021 et 3 mai 2023.

La requête a été communiquée à la société Canet, mandataire liquidateur de la société SFICA, qui n'a pas produit de mémoire.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés de l'irrecevabilité des conclusions d'appel incident tendant à la remise en cause des condamnations prononcées par le tribunal au titre des désordres qui ne sont pas concernés par les conclusions de l'appel principal, au motif qu'elles soulèvent un litige distinct, et de l'irrecevabilité des conclusions d'appel provoqué formées par les parties intimées dont la situation n'est pas aggravée par le présent arrêt.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Saint-Macary,

- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bajn, représentant la ministre de la culture, Me Legeay, représentant la société Verre et Métal, Me Berenholc, représentant la société MTO, Me

Jean-Baptiste, représentant la société Generali, Me Del Rio, représentant la société SPIE SCGPM, Me Rulkowski, représentant la société Balas, et Me Depondt, représentant la société Decomo.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministère de la culture a lancé en 2001 une opération immobilière pour la construction, dans le 13ème arrondissement de Paris, de l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine. La maîtrise d'ouvrage a été déléguée à l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels. La maîtrise d'œuvre de l'opération a été confiée à un groupement constitué, notamment, de la société Frédéric Borel architecte et du bureau d'études techniques SFICA, le lot 201 " gros œuvre - terrassement et VRD " à la société SPIE SCGPM, devenue SPIE Batignolles, le lot 202 " menuiseries extérieures - verrières " à la société Verre et métal, le lot 203 " chauffage - ventilation - désenfumage " à la société Cégélec, le lot 208 " couverture étanchéité " à la société TFN Bâtiment, à laquelle a succédé la société MTO, et le lot " plomberie " à la société Balas. La réception des travaux a été prononcée avec réserves le 12 avril 2007. Des désordres étant apparus, le ministre de la culture a saisi, le 19 juin 2013, le juge des référés du tribunal administratif d'une demande d'expertise, qui l'a ordonnée le 20 août 2013. Le rapport de l'expert et de son sapiteur a été déposé le 10 mai 2016. Le ministre relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris n'a fait droit que partiellement à sa demande de condamnation des constructeurs au titre de la garantie décennale.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions d'appel principal :

S'agissant de l'absence de système de refroidissement :

2. Il résulte de l'instruction que le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot 203 " chauffage, ventilation, désenfumage " ne prévoyait pas l'installation d'un système de refroidissement pour les amphithéâtres et la bibliothèque, mais une ventilation manuelle et des mesures conservatoires pour permettre le raccordement futur d'un éventuel système de refroidissement au réseau de froid géré par Climespace. Il résulte en outre du rapport d'expertise que si, lorsque l'établissement a décidé d'installer un groupe froid, le raccordement au réseau Climespace s'est avéré impossible, ce raccordement est devenu possible en cours d'expertise compte tenu de l'extension du réseau. Dans ces conditions, la décision du ministre d'installer un groupe froid autonome plutôt que son raccordement au réseau Climespace, alors que les mesures conservatoires mises en œuvre et l'extension de ce réseau permettaient ce raccordement, lui est imputable et non aux constructeurs. Par ailleurs, le marché initial ne prévoyant pas l'installation d'un groupe froid, l'acquisition de celui-ci apporte une plus-value à l'ouvrage qui n'a pas à être mise à la charge des constructeurs. Par suite, sans qu'il soit besoin de rechercher l'éventuelle faute qu'aurait commise la société SFICA lors de l'élaboration du CCTP du marché, la demande du ministre portant sur l'indemnisation du groupe froid ne peut qu'être rejetée.

S'agissant des désordres n° 1 à 19 :

3. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les désordres n° 1 à 19, qui concernent différentes parties de l'ouvrage, s'aggraveraient mutuellement et participeraient à un problème général d'étanchéité du bâtiment de nature à le rendre impropre à sa destination.

4. D'autre part, si le ministre de la culture produit des factures au titre de travaux liés aux désordres n° 1 à 19 d'un montant total de 18 368,79 euros, montant qu'il ne reprend d'ailleurs pas dans ses conclusions, il demande de répercuter le montant total de ces factures sur le montant des indemnisations qu'il sollicite et demande la confirmation des articles du dispositif du jugement 4, 8, 9, 10, 11, 13 relatifs aux désordres 1 à 5, 11, 12 et 14 et 17. Dans ces conditions, il ne peut être regardé comme contestant le montant des indemnisations qui lui ont été accordées au titre de ces désordres.

Quant au désordre n° 6 :

5. Il résulte de l'instruction que les fenêtres extérieures côté boulevard Masséna sont affectées de traces d'écoulement, liées à un défaut d'inclinaison des tablettes situées sous les fenêtres. Il ne résulte toutefois d'aucun élément de l'instruction que ces écoulements, qui ne concernent que le mur extérieur, aient un impact sur son étanchéité, ni que leur incidence sur l'esthétisme du bâtiment rendrait celui-ci impropre à sa destination compte tenu, en tout état de cause, de l'absence de conséquence de ce désordre sur les principales caractéristiques architecturales du bâtiment, même pris ensemble avec les autres désordres présentant un caractère esthétique. Le caractère décennal de ce désordre n'étant pas établi, le ministre de la culture n'est pas fondé à rechercher la responsabilité décennale des sociétés SFICA et SPIE SCGPM à ce titre.

Quant au désordre n° 7 :

6. Il résulte de l'instruction que la canalisation d'évacuation des eaux pluviales provenant de la terrasse du 5ème étage fuit, du fait d'un joint défectueux. Il ne résulte toutefois d'aucun élément de l'instruction que cette fuite est susceptible de provoquer, dans un délai prévisible, des problèmes d'étanchéité ou de compromettre la solidité du bâtiment. Le caractère décennal de ce désordre n'étant pas établi, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception de prescription opposée par l'intéressée, le ministre de la culture n'est pas fondé à rechercher la responsabilité décennale de la société Balas à ce titre.

Quant aux désordres 8, 9 et 10 :

7. Le jugement attaqué a fait droit à la demande du ministre au titre des dégradations et cloquages de peintures liées à des infiltrations dues à un défaut d'étanchéité des joints de fenêtre à hauteur de 6 100 euros. Si le ministre de la culture soutient que le montant des réparations s'élève à 12 300 euros, il se borne à renvoyer au rapport du sapiteur, dont il résulte qu'il a évalué à 3 000 euros au total le coût de la réfection des peintures et à 3 100 euros au total la reprise des joints défectueux, pour l'ensemble des trois désordres. Le requérant n'est dès lors pas fondé à demander un rehaussement de son indemnisation à ce titre.

Quant aux désordres n° 18 et 19 :

8. Il résulte de l'instruction que de l'eau stagne, sous forme de flaque, dans un local en sous-sol du fait d'écoulements muraux et que le mur du fond du local comporte des traces de coulures. Il ne résulte toutefois d'aucun élément de l'instruction que ces désordres présentent un caractère évolutif. Si le ministre de la culture soutient que la flaque d'eau est située à proximité d'un local technique et compromet la sécurité du bâtiment, il ne précise ni la localisation de ce local, ni ce qu'il contient, ni la nature du risque, et n'établit ainsi pas l'existence d'un risque susceptible de se manifester dans un délai prévisible. Il résulte par ailleurs du rapport d'expertise que ce local, dont le ministre soutient qu'il dégage une odeur nauséabonde, est inaccessible au public et il ne résulte pas de l'instruction et n'est pas même allégué qu'il serait à l'origine de remontées d'odeurs. Le caractère décennal des désordres en litige n'étant pas établi, le ministre de la culture n'est pas fondé à rechercher la responsabilité décennale des sociétés SFICA et SPIE SCGPM à ce titre.

S'agissant des désordres n° 20, 21 et 23 :

9. Si le ministre de la culture soutient que les désordres n° 20, 21 et 23 relatifs, respectivement, à un cloquage de la peinture en terrasse, à l'effritement du revêtement béton et à la peinture écaillée côté quai, nuisent à l'esthétisme du bâtiment dont l'objectif est de permettre un dialogue entre la construction moderne et le bâti ancien, une usine d'air comprimé du XIXème siècle, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que ces désordres, compte tenu de leur caractère très limité, aient une incidence sur l'effet esthétique recherché par la coexistence des deux bâtiments, même pris ensemble avec les autres désordres présentant un caractère esthétique. S'il fait également valoir que ces désordres sont liés à un problème d'étanchéité du bâtiment, le rapport d'expertise précise sans être contredit par d'autres éléments de l'instruction que ces désordres proviennent d'un défaut de mise en œuvre ou d'un problème de qualité de la peinture. Il ne résulte enfin pas de l'instruction que ces désordres engendreraient des problèmes d'étanchéité. Dans ces conditions, ces désordres, qui ne présentent pas de caractère décennal, ne sauraient engager la responsabilité de la société SPIE SCGPM au titre la garantie décennale.

S'agissant du désordre n° 22 :

10. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que le parement du bâtiment côté quai comporte des microfissures ayant vocation à se développer, bien que lentement. Il ne résulte toutefois pas de ce rapport que ces fissures, dans lesquelles s'incruste la poussière et qui peuvent être résorbées par un simple nettoyage et l'application d'un produit hydrofuge, sont de nature à compromettre la solidité du bâtiment ou son étanchéité. Dès lors que ce désordre ne présente pas de caractère décennal, le ministre de la culture n'est pas fondé à rechercher la responsabilité décennale des sociétés SFICA, Decomo et SPIE SCGPM à ce titre.

S'agissant du désordre n° 25 :

11. Il résulte de l'instruction que des tôles de parement situées sous une passerelle se disjoignent et que des filets de sécurité ont été mis en place pour en prévenir la chute. Pour rechercher la responsabilité décennale de la société Frédéric Borel architecte à ce titre, le ministre de la culture se borne à soutenir qu'elle ne lui aurait pas transmis les dossiers des ouvrages exécutés. Cette carence, à la supposer établie, est toutefois dépourvue de lien avec le désordre en litige. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que l'absence de ces dossiers empêcherait le ministre de la culture de rechercher la responsabilité décennale des constructeurs responsables de ce désordre, la seule circonstance que l'expert sapiteur a indiqué ne pas être en mesure de se prononcer sur l'origine et les responsabilités impliquées dans ce désordre, probablement lié au principe de pose, n'étant pas de nature à l'établir. Dans ces conditions, et compte tenu de l'argumentation du ministre, la demande de condamnation de la société Frédéric Borel architecte au titre de ce désordre doit être rejetée.

S'agissant du désordre affectant les terrasses en toiture :

12. D'une part, il résulte de l'instruction que par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 13 février 2015, la mission de l'expert a été étendue, à sa demande, à l'évacuation des eaux de pluie sur la coursive du 1er étage et à l'écoulement des pissettes. L'expert a en conséquence limité son analyse des problèmes d'évacuation à la coursive du 1er étage et le tribunal a fait droit à la demande d'indemnisation présentée par le maître d'ouvrage au titre de ce désordre n° 31. Si le ministre de la culture a également demandé devant le tribunal la condamnation des constructeurs à l'indemniser des problèmes d'évacuation qui existeraient sur l'ensemble des terrasses des toitures, cette demande concerne un désordre distinct de celui examiné par l'expert.

13. D'autre part, pour justifier sa demande d'indemnisation du désordre qui affecterait l'évacuation des eaux de pluie de l'ensemble des terrasses en toiture pour une surface de 950 m², le ministre se prévaut d'un rapport établi de manière non contradictoire par le cabinet d'études IPSO, dont il ne résulte pas de l'instruction que l'expert, qui n'a annexé ce rapport qu'en raison de sa nature de " dire " du maître d'ouvrage, s'en serait approprié le contenu. Les conclusions de ce rapport, d'ailleurs assez lapidaires, sont contestées par les constructeurs et ne sont pas corroborées par d'autres éléments de l'instruction. La somme de 190 000 euros HT demandée à ce titre par le ministre de la culture n'est en outre pas justifiée. Dans ces conditions, ce dernier n'est pas fondé à rechercher la responsabilité décennale des constructeurs au titre de ce désordre.

S'agissant des dépens :

14. Il est constant que le tribunal a déjà mis à la charge des constructeurs, au titre des dépens, la somme totale de 81 136,18 euros, incluse dans la somme totale de 92 656,18 euros que demande le ministre de la culture à ce titre. Il n'y a dès lors pas lieu de statuer sur cette demande. Si le ministre soutient par ailleurs que la somme de 11 520 euros restante, qui correspond au coût du rapport du cabinet d'études IPSO auquel il a eu recours, doit être mise à la charge des constructeurs, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que ces frais aient été utilement exposés, les désordres n° 20 et 26 au titre desquels l'expert sapiteur a utilisé ce rapport n'ayant pas donné lieu à indemnisation pour le premier et pas même à une demande d'indemnisation pour le second. Dans ces conditions, les conclusions du ministre formées à ce titre doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions d'appel incident :

15. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 3, 4 et 12, les conclusions d'appel incident présentées par la société Frédéric Borel architecte au titre des désordres n° 31 et 34, par SFICA au titre des désordres liés au système de chauffage et n° 17, 31, 34 et 35, par Verre et Métal au titre des désordres n° 3, 28-3 et 30-1 et par SPIE SCGPM au titre des désordres n° 1, 2, 12, 31, 34 et 35 soulèvent des litiges distincts de ceux faisant l'objet de l'appel principal du ministre de la culture et sont, par suite, irrecevables. Elles doivent, dès lors, être rejetées.

16. En second lieu, d'une part, la société SFICA n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la somme de 24 340,85 euros mise à sa charge par le tribunal au titre des dépens. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que la somme de 8 113,62 euros mise à la charge de la société Verre et Métal à ce titre soit excessive compte tenu des désordres au titre desquels sa responsabilité a été retenue et qui ont été examinés par l'expert et son sapiteur. Les conclusions de ces deux sociétés tendant à l'annulation ou à la réformation de ces sommes doivent, dès lors, être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions d'appel provoqué :

17. Les conclusions d'appel principal n'ayant pas pour effet d'aggraver la situation de la société SPIE SCGPM, ses conclusions aux fins d'appel en garantie des sociétés Canet et Frédéric Borel architecte au titre du désordre n° 1 et 12 et de la société Frédéric Borel architecte au titre du désordre n° 35 sont irrecevables. Elles doivent, par suite, être rejetées.

Sur les frais du litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du ministre de la culture présentées sur ce fondement. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à chacune des sociétés Canet, en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SFICA, SPIE SCGPM, Balas, Verre et métal, Decomo et Frédéric Borel architecte sur ce fondement et de rejeter les conclusions de la société MTO présentées sur ce même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de la culture est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à chacune des sociétés Canet, SPIE SCGPM, Balas, Verre et métal, Decomo et Frédéric Borel architecte sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la culture et aux sociétés Canet, SPIE SCGPM, Balas, Verre et métal, Decomo, Frédéric Borel architecte, MTO, Cégélec tertiaires IDF et Generali.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Heers, présidente de chambre,

Mme Bruston, présidente-assesseure,

Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2023.

La rapporteure,

M. SAINT-MACARY

La présidente,

M. HEERS

La greffière,

A. GASPARYAN

La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA00126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00126
Date de la décision : 13/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marguerite SAINT-MACARY
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : D4 AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-13;20pa00126 ?
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