La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2023 | FRANCE | N°22PA00601

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 03 octobre 2023, 22PA00601


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'article 8 de la délibération n° 145 du congrès de la Nouvelle-Calédonie du

4 mai 2021 portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social.

Par un jugement n° 2100233 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 9 février 2022, 15 novembre 2022 (deux le même jour) et 1

0 août 2023, Mme C..., représentée par Me Loste, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'article 8 de la délibération n° 145 du congrès de la Nouvelle-Calédonie du

4 mai 2021 portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social.

Par un jugement n° 2100233 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 9 février 2022, 15 novembre 2022 (deux le même jour) et 10 août 2023, Mme C..., représentée par Me Loste, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2100223 du 10 novembre 2021 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler l'article 8 de la délibération n° 145 du congrès de la Nouvelle-Calédonie du 4 mai 2021 ;

3°) de mettre à la charge du congrès de la Nouvelle-Calédonie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les écritures en défense du congrès de la Nouvelle-Calédonie sont irrecevables, faute de production de l'habilitation de son président ;

- la disposition contestée a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière dès lors que des éléments erronés ont été présentés aux membres du congrès ;

- elle porte atteinte à l'égalité de traitement des pharmaciens du cadre de santé et implique des nominations arbitraires ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle supprime toute exigence d'une compétence adaptée aux fonctions d'inspection et de contrôle ;

- elle est entachée de détournement de procédure dès lors qu'elle a pour but de régulariser la situation d'un agent.

Par quatre mémoires enregistrés les 11 mai 2022, 9 décembre 2022, 30 janvier 2023 et 6 février 2023, le congrès de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SCP Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999,

- le code de la santé publique,

- la délibération n° 50/CP du 29 juin 2007,

- la délibération n°145 du 4 mai 2021 portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lécuyer, représentant le congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., directrice d'un laboratoire d'analyses médicales situé à Nouméa, a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'article 8 de la délibération n° 145 du 4 mai 2021 portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social, publiée au Journal officiel de Nouvelle-Calédonie le 13 mai 2021, modifiant l'article 5 de la délibération n° 50/CP du 29 juin 2007 portant statut particulier du corps des pharmaciens du cadre de la santé de la Nouvelle-Calédonie. Elle relève appel du jugement du 10 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Sur la recevabilité des mémoires présentés par le congrès de la Nouvelle-Calédonie :

2. Aux termes de l'article 62 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Le congrès est l'assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie ". Aux termes de l'article 69 de la même loi organique : " Le président du congrès intente les actions et défend devant les juridictions au nom du congrès. ". Aux termes de l'article 108 de cette loi organique : " L'exécutif de la Nouvelle-Calédonie est le gouvernement. Il est élu par le congrès et responsable devant lui (...) ". Enfin, aux termes de l'article 134 de ladite loi organique : " Le président du gouvernement représente la Nouvelle-Calédonie. / En vertu d'une délibération du gouvernement, il intente les actions et défend devant les juridictions, au nom de la Nouvelle-Calédonie, sous réserve des dispositions de l'article 69 (...) ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions, notamment de l'article 69 de la loi organique du 19 mars 1999, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que les écritures présentées par le congrès de la Nouvelle-Calédonie sont irrecevables, faute de production d'une habilitation spéciale de son président pour le représenter. D'autre part, il résulte également des dispositions citées au point 2 que le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a qualité pour défendre, au nom de la Nouvelle-Calédonie, devant les juridictions dans les instances mettant en cause la légalité des délibérations adoptées par le congrès, ce qui ne fait au demeurant pas obstacle à ce que le congrès, représenté par son président, présente comme en l'espèce des observations.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article 22 de la loi organique susvisée n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " La Nouvelle-Calédonie est compétente dans les matières suivantes : / (...) / 4° Protection sociale, hygiène publique et santé, contrôle sanitaire aux frontières ; (...) ".

5. L'article 5 de la délibération n° 50/CP du 29 juin 2007 portant statut particulier du corps des pharmaciens du cadre de la santé de la Nouvelle-Calédonie, qui disposait que " Les pharmaciens du cadre de la santé ayant suivi et validé la formation de pharmacien inspecteur D... nationale de santé publique peuvent se voir confier des fonctions d'inspection ou de contrôle. / Les pharmaciens du cadre de la santé exerçant les fonctions susmentionnées sont nommés en qualité de pharmaciens inspecteurs. / Le pharmacien inspecteur est notamment chargé de contrôler l'application des lois et règlements relatifs à l'exercice de la pharmacie et de la biologie médicale. ", a été modifié par les dispositions, contestées par Mme C..., de l'article 8 de de la délibération n° 145 du 4 mai 2021 du congrès de la Nouvelle-Calédonie portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social, et il dispose désormais que " Les pharmaciens du cadre de la santé peuvent se voir confier des fonctions d'inspection ou de contrôle. / Les pharmaciens du cadre de la santé exerçant les fonctions susmentionnées sont nommés en qualité de pharmaciens inspecteurs. / Le pharmacien inspecteur est notamment chargé de contrôler l'application des lois et règlements relatifs à l'exercice de la pharmacie et de la biologie médicale. ".

6. L'article 8 de la délibération n° 145 du 4 mai 2021 du congrès de la Nouvelle-Calédonie a nécessairement pour effet, comme l'admet le congrès, de supprimer toute formation préalable à l'exercice de fonctions d'inspection et de contrôle par les pharmaciens du cadre de la santé de la Nouvelle-Calédonie. Eu égard à l'importance des prérogatives confiées aux pharmaciens inspecteurs, chargés de contrôler l'application des lois et règlements relatifs à l'exercice de la pharmacie et de la biologie médicale, Mme C... est dans ces conditions fondée à soutenir qu'en adoptant ces dispositions, le congrès de la Nouvelle-Calédonie, alors qu'il lui incombe de veiller à la pleine et effective application des dispositions précitées de l'article 22 de la loi organique susvisée du 19 mars 1999 confiant à la Nouvelle-Calédonie compétence en matière de protection sociale, d'hygiène publique et santé et de contrôle sanitaire aux frontières, a commis une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 8 de la délibération n° 145 du congrès de la Nouvelle-Calédonie du 4 mai 2021 portant diverses mesures d'ordre sanitaire et social, et à demander l'annulation de cet article.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme C..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au congrès de la Nouvelle-Calédonie au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement d'une somme à Mme C... sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2100233 du 10 novembre 2021 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et l'article 8 de la délibération n° 145 du congrès de la Nouvelle-Calédonie du 4 mai 2021 sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme C... et du congrès de la Nouvelle-Calédonie est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et au congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2023.

La rapporteure,

G. A...Le président,

I. LUBEN

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00601


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00601
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : SCP MEIER-BOURDEAU LECUYER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-03;22pa00601 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award