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02/10/2023 | FRANCE | N°22PA04137

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 octobre 2023, 22PA04137


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Chambre des propriétaires du Grand Paris - Union nationale des propriétaires immobiliers Paris et Mme A... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a fixé les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés pour la ville de Paris, à compter du 1er juillet 2021.

Par un jugement n° 2116014/6-1 du 8 juillet 2022, le Tribunal adm

inistratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Chambre des propriétaires du Grand Paris - Union nationale des propriétaires immobiliers Paris et Mme A... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a fixé les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés pour la ville de Paris, à compter du 1er juillet 2021.

Par un jugement n° 2116014/6-1 du 8 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 septembre et 4 novembre 2022, Mme B..., représentée par Me Rigeade (SCP SVA), demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 juillet 2022 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a fixé les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés dans la commune de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est privé de base légale dès lors que le décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 est en voie d'annulation par le Conseil d'Etat ;

- il est illégal du fait de l'illégalité entachant l'arrêté du 22 décembre 2014 délivrant l'agrément d'observatoire local des loyers à l'association Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (OLAP) qui n'a pas été précédé de la consultation du comité régional de l'habitat et de l'hébergement ;

- il est entaché d'illégalité du fait de l'irrégularité de la composition des organes dirigeants de l'OLAP qui ne respecte pas l'équilibre entre les locataires, les bailleurs et les gestionnaires prévu par l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989 et de l'article 2 du décret du 5 novembre 2014 ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que les documents présentés par le préfet ne sont pas de nature à justifier que les catégories de logement et les secteurs géographiques ont été déterminés en fonction de la structuration du marché locatif constatée par l'OLAP conformément au II de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 ; le procès-verbal du conseil d'administration de l'OLAP du 28 mai 2021 ne mentionne pas la date à laquelle il a été approuvé ; ce procès-verbal et le document intitulé Médianes 2020 et loyers de référence 2021-Paris ne retiennent pas le même nombre de cases ; en tout état de cause, à la date de l'édiction de l'arrêté contesté, l'OLAP n'avait pas encore établi son rapport au titre de 2020 qui est daté de juillet 2021 ;

- l'arrêté contesté ne précise pas la durée pour laquelle les loyers de référence sont fixés en méconnaissance de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 ;

- il est entaché d'une erreur de droit résultant d'un détournement de procédure dès lors que le préfet n'a pas déterminé les secteurs géographiques selon l'homogénéité des loyers tel que déterminée par l'OLAP mais a repris les 80 quartiers administratifs de Paris qui existent depuis 1860 ;

- le préfet n'a pas défini les catégories de logement et des secteurs géographiques avec une précision suffisante ; la définition du loyer de référence n'est pas en adéquation avec l'ensemble des caractéristiques déterminant habituellement le montant du loyer dès lors que, d'une part, la répartition des 80 secteurs dans les 14 zones visées par l'arrêté contesté ne permet pas de constituer des zones homogènes en termes de niveaux de loyer constatés sur le marché locatif et, d'autre part, les critères du type de location, du nombre de pièces principales et de l'époque de construction ne permettent pas de définir des catégories de logement homogènes ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il fixe à 13% la majoration unitaire par mètre carré aux loyers de référence applicable aux logements loués meublés.

Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 7 mars 2023, l'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), représentée par Me Rigeade (SCP SVA), s'associe aux conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 4 juin 2021 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, présentées par Mme B... et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à intervenir au soutien de la requête ;

- l'arrêté contesté est illégal du fait de l'illégalité de l'arrêté du 22 décembre 2014, délivrant l'agrément d'observatoire local des loyers à l'association OLAP ;

- il est entaché d'illégalité du fait de l'irrégularité de la composition des organes dirigeants de l'OLAP ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que les documents présentés par le préfet ne sont pas de nature à justifier que les catégories de logement et les secteurs géographiques aient été déterminés en fonction de la structuration du marché locatif constatée par l'OLAP conformément au II de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 ;

- il ne précise pas la durée pour laquelle les loyers de référence sont fixés en méconnaissance de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 ;

- il est entaché d'une erreur de droit résultant d'un détournement de procédure dès lors que le préfet n'a pas déterminé les secteurs géographiques selon l'homogénéité des loyers tel que déterminée par l'OLAP mais a repris les 80 quartiers administratifs de Paris qui existent depuis 1860 ;

- le préfet n'a pas défini les catégories de logement et les secteurs géographiques avec une précision suffisante ; la définition du loyer de référence n'est pas en adéquation avec l'ensemble des caractéristiques déterminant habituellement le montant du loyer ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il fixe à 13% la majoration unitaire par mètre carré des loyers de référence applicable aux logements loués meublés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 6 avril, 31 mai, 7 juillet et 22 août 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... et l'UNPI ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 5 mai, 12 et 16 juin 2023, Mme B... et l'UNPI persistent dans leurs conclusions à fin d'annulation et demandent à la Cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent en outre que :

- la méthodologie utilisée par l'OLAP est contraire au sens de l'article 140 de la loi du 13 novembre 2018 dès lors qu'elle prend en considération les " loyers conventionnés Anah " ainsi que les " prêts locatifs sociaux " ( PLS ) qui correspondent à des loyers inférieurs à ceux du marché locatif privé, ce qui fausse le calcul du loyer médian et de l'écart entre le niveau moyen de loyers constaté dans le parc locatif privé et celui constaté dans le parc locatif social ; dans ces conditions, la prise en compte de ces éléments entache d'illégalité l'arrêté contesté.

Par un courrier du 20 juin 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour est susceptible de se fonder sur le moyen d'ordre public, relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité de " l'intervention volontaire " de l'Union nationale des propriétaires immobiliers qui était partie en première instance et qui, dès lors, avait qualité pour faire appel, et qui n'a présenté son mémoire en intervention que le 7 mars 2023, soit après l'expiration du délai de recours contentieux.

Par un mémoire enregistré le 22 juin 2023, l'UNPI, représentée par Me Rigeade (SCP SVA), a présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.

Par un mémoire enregistré le 7 juillet 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

- la loi n° 20147-366 du 24 mars 2014 ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le décret n° 2015-650 du 10 juin 2015 ;

- le décret n°2019-315 du 12 avril 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rigeade, avocate de Mme B... et de l'Union nationale des propriétaires immobiliers.

Considérant ce qui suit :

1. Par un décret n° 2019-315 du 12 avril 2019, le Premier ministre a, sur proposition de la ville de Paris présentée le 28 janvier 2019, décidé que le dispositif d'encadrement des loyers prévu à titre expérimental par l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique serait mis en place sur l'intégralité du territoire de la ville de Paris. Par un arrêté du 4 juin 2021, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a fixé pour une année les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés pour la ville de Paris, à compter du 1er juillet 2021. Par un jugement du 8 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de l'association Chambre des propriétaires du Grand Paris - Union nationale des propriétaires immobiliers Paris et de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme B... relève appel de ce jugement.

Sur l'intervention de l'Union nationale des propriétaires immobiliers :

2. L'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) justifie, eu égard aux questions soulevées par l'arrêté du 4 juin 2021 fixant les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés dans la commune de Paris qui est susceptible de limiter l'exercice du droit de propriété et qui présente une portée excédant les seules circonstances locales, d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la requête de Mme B....

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. L'article 140 de la loi du 23 novembre 2018, dans sa version applicable à la date de l'arrêté contesté, dispose : " I. - A titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, dans les zones mentionnées à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'habitat, la commune de Paris, les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris, la métropole de Lyon et la métropole d'Aix-Marseille-Provence peuvent demander qu'un dispositif d'encadrement des loyers régi par le présent article soit mis en place./ Sur proposition du demandeur transmise dans un délai de deux ans à compter de la publication de la loi, un décret détermine le périmètre du territoire de la collectivité demandeuse sur lequel s'applique le dispositif, lorsque les conditions suivantes sont réunies : 1° Un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ;/ 2° Un niveau de loyer médian élevé ;/ 3° Un taux de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années, faible ;/ 4° Des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l'habitat et de faibles perspectives d'évolution de celles-ci./ Pour chaque territoire ainsi délimité, le représentant de l'Etat dans le département fixe, chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logements et par secteur géographique. (...). Les logements appartenant à ou gérés par des organismes d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de construction et de l'habitation ou appartenant à ou gérés par des sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 du même code, et faisant l'objet d'une convention mentionnée à l'article L. 351-2 dudit code sont exclus de cette expérimentation. II. - Pour l'application du I, les catégories de logements et les secteurs géographiques sont déterminés en fonction de la structuration du marché locatif constatée par l'observatoire local des loyers./ Chaque loyer de référence est égal au loyer médian calculé à partir des niveaux de loyers constatés par l'observatoire local des loyers selon les catégories de logements et les secteurs géographiques./ Chaque loyer de référence majoré et chaque loyer de référence minoré sont fixés, respectivement, par majoration et par minoration du loyer de référence./ Les compétences attribuées au représentant de l'Etat dans le département par le présent article sont exercées dans la région d'Ile-de-France par le représentant de l'Etat dans la région./ Le loyer de référence majoré est égal à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence./ Le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %./ III. - A. - Dans les territoires où s'applique l'arrêté mentionné au I, le loyer de base des logements mis en location est fixé librement entre les parties lors de la conclusion du contrat de bail, dans la limite du loyer de référence majoré. Une action en diminution de loyer peut être engagée si le loyer de base prévu dans le contrat de bail est supérieur au loyer de référence majoré en vigueur à la date de signature de ce contrat./ B. - Un complément de loyer peut être appliqué au loyer de base tel que fixé au A du présent III pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique./ Le montant du complément de loyer et les caractéristiques du logement le justifiant sont mentionnés au contrat de bail./ Lorsqu'un complément de loyer est appliqué, le loyer s'entend comme la somme du loyer de base et de ce complément./ Un complément de loyer ne peut être appliqué à un loyer de base inférieur au loyer de référence majoré./ (...) IV. - L'arrêté mentionné au I du présent article fixe, pour les logements meublés soumis aux titres Ier bis et Ier ter de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré par catégorie de logement et par secteur géographique. Le loyer de référence, le loyer de référence majoré et le loyer de référence minoré sont déterminés par l'application d'une majoration unitaire par mètre carré aux loyers de référence définis au II du présent article pour tenir compte du caractère meublé du logement. Cette majoration est déterminée à partir des écarts constatés entre les loyers des logements loués nus et les loyers des logements loués meublés observés par l'observatoire local des loyers./ Le complément de loyer tient compte des équipements et services associés aux logements meublés. (...) ".

4. Aux termes de l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 dans sa version applicable à la date de l'arrêté contesté : " Des observatoires locaux des loyers peuvent être créés à l'initiative des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents en matière d'habitat ou de l'Etat. Ces observatoires ont notamment pour mission de recueillir les données relatives aux loyers sur une zone géographique déterminée et de mettre à la disposition du public des résultats statistiques représentatifs sur ces données./ Le parc de référence pour l'observation et l'analyse des loyers est constitué de l'ensemble des locaux à usage d'habitation ou à usage mixte professionnel et d'habitation, à l'exception de ceux appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré et aux sociétés d'économie mixte de construction et de gestion des logements sociaux, ainsi que de ceux appartenant aux organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du code de la construction et de l'habitation./ Les observatoires locaux des loyers mentionnés au premier alinéa sont agréés, pour tout ou partie de la zone géographique qui y est mentionnée, par le ministre chargé du logement, dans des conditions fixées par décret, après avis du comité régional de l'habitat et de l'hébergement ou du conseil départemental de l'habitat et de l'hébergement mentionnés à l'article L. 364-1 du même code et sous condition du respect des prescriptions méthodologiques émises par une instance scientifique indépendante chargée de conseiller le ministre chargé du logement, dans des conditions définies par décret. L'agrément ne peut être accordé à un observatoire que si les statuts de celui-ci assurent, au sein de ses organes dirigeants, la représentation équilibrée des bailleurs, des locataires et des gestionnaires ainsi que la présence de personnalités qualifiées ou s'il existe en son sein une instance, chargée de la validation du dispositif d'observations, assurant la représentation équilibrée des bailleurs, des locataires et des gestionnaires et comprenant des personnalités qualifiées. (...) ".

5. Aux termes de l'article 2 du décret du 10 juin 2015 : " Les catégories de logement et les secteurs géographiques mentionnés au II de l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique sont déterminés selon les modalités suivantes : 1° Les catégories de logement sont déterminées en fonction au moins des caractéristiques du logement relatives au type de location, meublée ou non meublée, au nombre de pièces principales au sens de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation et à l'époque de construction ;/ 2° Les secteurs géographiques délimitent des zones homogènes en termes de niveaux de loyer constatés sur le marché locatif ".

6. En premier lieu, Mme B... se borne à reproduire en appel les moyens, sans les assortir d'éléments nouveaux, qu'elle avait développés dans sa demande de première instance, tirés de ce que l'arrêté contesté serait privé de base légale au motif que le décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 serait " en voie d'annulation " par le Conseil d'Etat et qu'il méconnaîtrait l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018, faute de préciser la durée de validité des loyers de référence qu'il fixe. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 10 du jugement, d'écarter ces moyens repris en appel par Mme B....

7. En deuxième lieu, Mme B... soutient que l'arrêté du 22 décembre 2014 du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité délivrant l'agrément d'observatoire local des loyers à l'association OLAP étant entaché d'illégalité en l'absence de consultation du comité régional de l'habitat et de l'hébergement, les données recueillies par l'OLAP ne pouvaient être retenues par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris pour fixer, par son arrêté du 4 juin 2021, les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés.

8. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. L'arrêté du 22 décembre 2014 délivrant l'agrément d'observatoire local des loyers à l'OLAP, qui ne présente pas de caractère réglementaire, ne constitue pas la base légale de l'arrêté contesté. En outre, cet arrêté n'a pas été pris en application de l'arrêté du 22 décembre 2014. Par suite, l'exception d'illégalité de l'arrêté du 22 décembre 2014 soulevée par Mme B... ne peut qu'être écartée.

9. En troisième lieu, Mme B... soutient que la représentation des bailleurs, des locataires et des gestionnaires ne serait pas équilibrée au sein des organes dirigeants de l'OLAP en méconnaissance des dispositions de l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989, reprises par l'article 2 du décret du 5 novembre 2014. Si elle entend ainsi soulever le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté du 22 décembre 2014 délivrant l'agrément d'observatoire local des loyers à l'OLAP, le respect d'une telle représentation étant l'une des conditions prévues par les dispositions de l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989 citées au point 4 pour obtenir cet agrément, il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8. Par ailleurs, il ressort de l'article 11 des statuts de l'OLAP versés au dossier que son conseil d'administration est composé de 19 sièges répartis entre les collèges des bailleurs et des locataires à hauteur de 4 sièges chacun, le collège des gestionnaires à hauteur de 2 sièges, le collège des pouvoirs publics et institutions nationales à hauteur de 3 sièges, le collège des collectivités territoriales disposant de 4 sièges et celui des organismes et personnalités qualifiés de 2 sièges. Il ressort de l'article 12 de ces mêmes statuts que le bureau désigné au sein du conseil d'administration de l'OLAP comprend 5 sièges dont 2 sièges attribués au collège des locataires et 1 siège attribué à chacun des collèges des bailleurs, des gestionnaires et des organismes et personnalités qualifiés. Au vu de ces éléments, et alors que les dispositions de l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989, reprises ainsi qu'il a déjà été dit par l'article 2 du décret du 5 novembre 2014, n'imposent pas une répartition des sièges strictement égalitaire entre les différents collèges au sein du conseil d'administration et du bureau de l'OLAP, la requérante n'est pas fondée, en tout état de cause, à soutenir que la représentation des bailleurs, des locataires et des gestionnaires ainsi que des organismes et personnalités qualifiés ne serait pas équilibrée.

10. En quatrième lieu, il ressort du document intitulé " médianes 2020 et loyers de référence 2021 - Paris " établi par l'OLAP en avril 2021, soit antérieurement à l'édiction de l'arrêté contesté du 4 juin 2021, et du procès-verbal de la réunion du comité de pilotage de l'observation des loyers de l'OLAP qui a eu lieu le 28 mai 2021, que la structuration du marché locatif parisien en 2020 a été constatée par l'OLAP en fonction de 14 zones géographiques qui constituent des regroupements de quartiers administratifs, des types de locations des logements, meublées ou non meublées, du nombre de pièces que contiennent les logements, et de l'époque de construction de ces derniers. Il ressort de ces documents, et même si elle n'a rendu public son rapport sur l'évolution en 2020 des loyers d'habitation du secteur locatif privé dans l'agglomération parisienne qu'en juillet 2021, l'OLAP avait recueilli les données concernant le marché locatif parisien et constaté sa structuration avant que le préfet ne prenne l'arrêté contesté. En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, le document intitulé " médianes 2020 et loyers de référence 2021 - Paris " et le procès-verbal de la réunion du comité de pilotage de l'observation des loyers de l'OLAP du 28 mai 2021 mentionnent le même nombre de cases retenu par l'OLAP, c'est-à-dire 224 cases se décomposant en 162 cases pour les données observées et diffusées par l'OLAP, 32 cases pour les données estimées et diffusées par l'OLAP et 30 cases pour des données estimées et non diffusées. La circonstance que ce procès-verbal ne mentionne pas la date à laquelle il a été approuvé est sans incidence sur la validité des données recueillies par l'OLAP et sur la structuration du marché locatif parisien en 2020 telle qu'elle a été constatée par l'OLAP. En outre, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a déterminé 14 secteurs géographiques et les catégories de logement en fonction de la structuration du marché locatif et à partir des niveaux de loyers constatés par l'OLAP. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les catégories de logements et les zones géographiques retenues n'auraient pas été déterminées à partir de la structuration du marché locatif constatée par l'OLAP ne peut qu'être écarté.

11. En cinquième lieu, il résulte des dispositions de l'article 2 du décret du 10 juin 2015, citées au point 5, que les secteurs géographiques mentionnés au II de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018 doivent délimiter des zones homogènes en termes de niveaux de loyer constatés sur le marché locatif. Il ressort des pièces du dossier que les 14 zones géographiques retenues par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris contenaient suffisamment de logements pour respecter les règles de diffusion des données, qu'elles ne correspondaient ni aux arrondissements de Paris, ni à ses quartiers administratifs et qu'elles ne constituaient pas des zones administratives préexistantes, conformément aux prescriptions méthodologiques du Comité scientifique de l'observation des loyers. En se bornant à soutenir qu'il ne serait pas établi que les secteurs géographiques délimiteraient des zones homogènes en termes de niveaux de loyer constatés sur le marché locatif, sans opposer de critique précise à la méthodologie retenue ou aux éléments ayant résulté de son application, Mme B... ne remet pas sérieusement en cause la pertinence de la délimitation retenue par le préfet. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de droit dans l'application de l'article 2 du décret du 10 juin 2015 et d'une erreur d'appréciation du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris dans la délimitation des zones géographiques doivent être écartés.

12. En sixième lieu, Mme B... n'apporte aucun élément probant ni aucune argumentation pertinente au soutien du moyen tiré du détournement de procédure.

13. En septième lieu, il ressort de l'article 2 de l'arrêté contesté que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a déterminé les catégories de logement pour lesquelles il a fixé les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés, en fonction des caractéristiques du logement relatives au type de location, meublée ou non meublée, du nombre de pièces principales au sens de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation et à l'époque de construction : avant 1946, de 1946 à 1970, de 1971 à 1990 et après 1990, c'est-à-dire en respectant les critères fixés par les dispositions de l'article 2 du décret du 10 juin 2015, citées au point 5. Dans ces conditions, Mme B... ne peut utilement critiquer le choix des critères mis en œuvre par le préfet. En outre, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 10, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a retenu ces critères sans avoir eu connaissance des données recueillies par l'OLAP pour l'année 2020. Si Mme B... soutient également que les 14 zones géographiques retenues par le préfet n'ont pas été déterminées avec une précision suffisante, il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a déjà été dit, que ces zones ne seraient pas homogènes en termes de niveaux de loyer constatés sur le marché locatif.

14. En huitième lieu, ni la loi du 23 novembre 2018, ni le décret du 10 juin 2015, ni aucune autre disposition textuelle ne prévoient que les loyers fixés dans le cadre d'une convention conclue entre l'Agence nationale de l'habitat (Anah) et ceux fixés par un bailleur bénéficiant d'un prêt locatif social doivent être exclus des données recueillies par l'OLAP pour déterminer les niveaux de loyers selon les catégories de logement et les secteurs géographiques et pour calculer l'écart entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ainsi que le niveau de loyer médian, contrairement aux " logements appartenant à ou gérés par des organismes d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de construction et de l'habitation ou appartenant à ou gérés par des sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 du même code, et faisant l'objet d'une convention mentionnée à l'article L. 351-2 dudit code qui sont exclus de cette expérimentation " en vertu de l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018. En outre, la prise en compte des loyers " conventionnés Anah " et des " prêts locatifs sociaux " privés dans le champ d'observation de l'OLAP est conforme aux prescriptions méthodologiques de collecte, de contrôle, traitement et diffusion des données du Comité scientifique de l'observatoire des loyers. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la prise en compte de ces éléments fausserait les résultats de l'OLAP et entacherait d'illégalité l'arrêté en litige doit être écarté.

15. En neuvième et dernier lieu, il ressort notamment du document intitulé " médianes 2020 et loyers de référence 2021 - Paris " établi par l'OLAP que les médianes 2020 ont été calculées à partir de 56 700 observations, que les données observées et les données estimées et diffusées correspondaient respectivement à 92,4 % et 5,3 % du parc locatif de la ville de Paris, soit un total de 97,7%. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces données ne seraient pas de nature à permettre à l'OLAP de constater les écarts entre les loyers des logements loués nus et les loyers des logements loués meublés sur le marché locatif parisien, ni à permettre au préfet de déterminer précisément la majoration unitaire par mètre carré applicable aux loyers de référence pour tenir compte du caractère meublé du logement par catégories de logement et dans chaque secteur géographique. Il ressort de l'annexe 2 de l'arrêté contesté que le préfet n'a pas appliqué un coefficient de majoration de 13% à l'ensemble des logements meublés parisiens mais que celui-ci est différent en fonction des catégories de logements et des secteurs géographiques. Par suite, le moyen tiré de ce que le coefficient de majoration de 13% serait entaché d'erreur d'appréciation doit être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme B... sur ce fondement. Par ailleurs, l'UNPI, intervenant au soutien de la requête, n'étant pas partie à la présente instance, ses conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des mêmes dispositions ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de l'Union nationale des propriétaires immobiliers est admise.

Article 2 : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'Union nationale des propriétaires immobiliers présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à l'Union nationale des propriétaires immobiliers et à la Chambre des propriétaires du Grand Paris - Union nationale des propriétaires immobiliers Paris.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2023.

La rapporteure,

V. LARSONNIER Le président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA04137 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04137
Date de la décision : 02/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SCP SVA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-02;22pa04137 ?
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