La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/07/2023 | FRANCE | N°18PA00331

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 juillet 2023, 18PA00331


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Boyer a demandé au tribunal de Wallis et Futuna de condamner à titre principal le préfet, administrateur supérieur des îles de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 7 261 319,96 euros TTC, somme assortie des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014 et de la capitalisation des intérêts au titre des préjudices subis du fait des sujétions techniques imprévues et des fautes commises à l'occasion de l'exécution du marché ayant pour objet les travaux d'extension et d'aménagement du

port de commerce de Mata-Utu et à titre subsidiaire, de condamner le préfet, admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Boyer a demandé au tribunal de Wallis et Futuna de condamner à titre principal le préfet, administrateur supérieur des îles de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 7 261 319,96 euros TTC, somme assortie des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014 et de la capitalisation des intérêts au titre des préjudices subis du fait des sujétions techniques imprévues et des fautes commises à l'occasion de l'exécution du marché ayant pour objet les travaux d'extension et d'aménagement du port de commerce de Mata-Utu et à titre subsidiaire, de condamner le préfet, administrateur supérieur des îles de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 6 805 319,96 euros TTC, somme assortie des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014 et de la capitalisation des intérêts au titre des préjudices subis du fait des sujétions techniques imprévues subies et des fautes commises à l'occasion de l'exécution de ce marché.

Par un jugement n°1760009 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Wallis-et -Futuna a condamné le territoire de Wallis-et-Futuna à verser la somme de 336 413,75 euros à la société Boyer, somme assortie des intérêts moratoires prévus au marché à compter du 27 décembre 2014 produisant eux-mêmes intérêts à compter du 27 décembre 2015 et à chaque échéance annuelle.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 janvier 2018, le 18 février 2020 et le 30 avril 2021, la société Boyer, représentée par Me Lapp demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 12 octobre 2017 ;

2°) à titre principal, de condamner le territoire des îles de Wallis et-Futuna à lui verser la somme de 7 261 319,96 euros TTC assortie des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014 capitalisés chaque année après une année d'intérêts';

3°) à titre subsidiaire, de condamner le territoire des îles de Wallis et-Futuna à lui verser la somme de la somme de 6 805 319,96 euros TTC assortie des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014, capitalisés chaque année après une année d'intérêts';

4°) de mettre à la charge du territoire des îles de Wallis-et-Futuna la somme de 15 000 euros HT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

Sur la responsabilité :

- la responsabilité de l'administration supérieure de Wallis-et-Futuna est engagée, en raison des fautes commises par le maître d'ouvrage et des sujétions imprévues rencontrées durant l'exécution des travaux ;

- le territoire en sa qualité de maître d'ouvrage et de maître d'œuvre, a commis d'une part, des fautes dans la conception et la fourniture de documents contractuels insuffisants s'agissant des études géotechniques de conception et la description des caractéristiques des sols à draguer et, d'autre part, une faute dans l'exercice de son pouvoir de direction et de contrôle ;

- elle a subi des sujétions techniques imprévues lors des opérations de dragage et de la réalisation du nouveau quai en palplanches, notamment le refus prématuré de certaines palplanches et la nécessité de dérocter, sans que l'administration puisse invoquer l'article 3.1 du cahier des spécifications techniques ;

- le lien de causalité entre les manquements du maître d'ouvrage et son préjudice est établi en l'absence d'éléments de nature à exonérer l'administration, l'avenant n°1 ne pouvant exonérer le maître d'ouvrage de sa responsabilité et aucune faute ne pouvant lui être imputée ;

- le lien de causalité entre les fautes et les préjudices liés à l'acheminement du matériel, à l'immobilisation du conducteur de travaux, au préfinancement des palplanches, à l'immobilisation de la barge Flocon et à la recherche de solutions techniques supplémentaires en août 2010 est établi ;

- l'avenant ne couvre pas les immobilisations de chantier (demande B7-2), les études géotechniques (demandes B2 et B5), les opérations de dragage (demandes B3-1 et B3-2), la période de préparation du chantier (demande B1), les conséquences induites de la modification de la conception du quai en ce qui concerne la désorganisation du chantier (demandes B7-3 à B7-5), le coût des installations complémentaires tenant à l'allongement des délais (demande B8), ainsi que le coût des contrôles supplémentaires tenant à l'allongement des délais (demande B9) ;

- l'avenant ne couvre pas davantage les conséquences des fautes du territoire de Wallis-et-Futuna ou de sujétions imprévues rencontrées après la signature de l'avenant, à savoir les études d'exécution consécutives au refus prématuré de certaines palplanches lors de la réalisation des travaux de l'avenant (demande B5), le déroctage du platier à l'emplacement des tirants, non prévu par l'avenant (demande B6) ;

-l'avenant n'a pas réglé toutes les conséquences de la désorganisation imputable aux fautes du maître d'ouvrage et aux sujétions imprévues (poste B7) ;

- l'avenant n'a pas permis d'indemniser les préjudices et surcoûts subis, et ne la prive pas de la possibilité de former une réclamation sur les demandes non traitées dans le cadre de l'avenant ;

- elle n'a commis aucune faute de nature à exonérer le territoire de Wallis-et-Futuna de tout ou partie de sa responsabilité ;

- le partage de responsabilité sur les difficultés rencontrées lors des travaux de dragage n'est pas justifiée dès lors que le maître d'ouvrage était responsable de la conception de l'ouvrage, et que l'erreur de conception du quai, qui n'était pas décelable au stade de l'appel d'offres, lui est exclusivement imputable ;

- la réduction du prix unitaire de dragage n'est que la conséquence des informations contenues dans le dossier d'appel d'offres, dont il ressortait que le prix initialement présenté était trop cher par rapport aux conditions de sol décrites ;

- il n'existait aucun moyen à la disposition de l'entreprise pour révéler, au stade de l'appel d'offres, la présence des plateaux et blocs coralliens ;

- elle a utilisé le matériel qui pouvait draguer les matériaux identifiés dans les documents contractuels du marché et les difficultés relatives au dragage ne peuvent lui être imputées ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas reconnu le lien de causalité entre la faute de l'administration et le surcoût du transport de matériel par bateau, l'immobilisation du conducteur de travaux, le préfinancement des palplanches et l'immobilisation de la barge Flocon.

Sur l'irrégularité du rejet des demandes consécutives à la faute de conception imputable au maître d'ouvrage et à sa faute dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction du marché :

- le préjudice subi en raison des fautes du maître d'ouvrage et des sujétions

imprévues s'élève à la somme de 7.261.319,96 euros TTC ;

- le préjudice subi pendant la période de préparation du chantier consécutif à la faute de l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction du marché (B1) a été évalué par l'expert à la somme de 201 542,58 euros ;

- le préjudice subi en raison du dimensionnement et de l'approvisionnement des éléments constitutifs du quai, consécutif à la faute de l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction du marché (B5) s'élève à la somme de 8360,73 euros ;

- le préjudice subi pendant les travaux de dragage consécutif au manquement par l'administration à son obligation d'information et à l'existence de sujétions imprévues (B3) s'élève à la somme de 268009,94 euros ;

- le préjudice lié au déroctage du platier (B6) s'élève à la somme de 15.699,10 euros ;

- le préjudice subi en raison de la désorganisation du chantier (B7) a été évalué par l'expert à la somme de 2.723.344 euros soit une somme de 447 642 euros au titre du coût de la main d'œuvre, une somme de 1 965 436,07 euros au titre de l'indemnisation du surcoût du matériel, une somme de 624 000 euros pour l'immobilisation de la barge Flocon, une somme de 737 254,06 euros au titre du coût de l'encadrement auquel il convient d'ajouter les frais d'expatriation qui s'élèvent à 377 124,30 euros pour six personnes déplacées sur la prolongation de chantier (dix-huit mois et vingt-huit jours) et les frais relatifs au deuxième déplacement du chef de chantier spécialisé en battage et des plongeurs qualifiés qui s'élèvent à 10 201,80 euros, et une somme de 1 057 043,68 euros au titre des frais généraux ;

- le préjudice relatif aux installations complémentaires, consécutif à la faute de l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction du marché (B8) s'élève à 55 480,14 euros ;

- le préjudice subi en raison des contrôles supplémentaires consécutif à la faute de conception (B9) évalué par l'expert à la somme de 18 683 euros ;

- le préjudice lié aux retards de paiement et intérêts moratoires consécutifs au manquement par le maître d'ouvrage à son obligation de paiement (B10) qui s'élèvent à 16 270,07 euros ;

- les frais financiers de la demande de règlement complémentaire (B12), c'est-à-dire les frais d'emprunt liés au coût d'acquisition ou de dépenses à un taux de 2,8 % entre le 30 janvier 2012, date à laquelle elle a commencé à supporter les surcoûts engendrés par la prolongation du chantier, et le dépôt du projet de décompte ;

- les préjudices sollicités étant calculés en base marché, ils doivent bénéficier de la révision de prix (B13) ;

- les frais supportés par l'entreprise depuis le dépôt du projet de décompte définitif, par l'application des intérêts moratoires qui courent à compter du dépôt du décompte final le 27 juin 2014, et non à l'issue d'un double délai de 90 jours dès lors qu'elle n'a pas à supporter la charge du choix de maître d'œuvre de recourir à une expertise extérieure pour établir le projet de décompte général.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 février 2019 et le 28 février 2020, le territoire de Wallis-et Futuna, représenté par le préfet, administrateur supérieur des îles de Wallis-et-Futuna et la SCP d'avocats Seban et associés, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 15 000 euros soit mise à la charge de la société Boyer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par la voie de l'appel incident, il demande l'annulation du jugement en ce qu'il retient l'existence de sujétions techniques imprévues et des fautes du territoire non encore indemnisées, et en ce qu'il condamne en conséquence le territoire des Iles Wallis et Futuna à verser la somme de 336 413,75 euros à la société Boyer.

Il soutient que :

- le préjudice résultant des erreurs de conception commises au titre du dimensionnement et du calcul des palplanches et qui correspond aux postes B7, B8 et B9 de l'annexe VIII au rapport du sapiteur comptable s'élevant à la somme de 2 797 507,22 euros, a été totalement indemnisé par l'avenant n°1 ;

- même si l'avenant ne vaut pas renonciation de la part de la société Boyer à recours ultérieur portant sur ses demandes, non traitées dans le cadre de l'avenant, les autres difficultés rencontrées par la société Boyer ne trouvent leur origine ni dans des sujétions imprévues, ni dans des fautes du territoire ;

- aucune faute ne peut être retenue s'agissant des documents communiqués à l'entreprise concernant d'une part, des études géotechniques de conception mises à sa disposition et d'autre part, des études géotechniques relatives au sol à draguer ; la prestation de reconnaissance géotechnique complémentaire était due par la société Boyer au titre du marché ; aucun des textes applicables au territoire de Wallis et Futuna ne faisait obstacle à ce que des études de conception de cette nature soient confiées, par marché, à la société Boyer.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- l'ordonnance du 16 septembre 2016, par laquelle le président du tribunal de Wallis-et-Futuna a taxé les frais de l'expertise déposé le 13 septembre 2016.

Vu :

- la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis-et-Futuna le statut de territoire d'outre-mer ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable dans les îles Wallis-et Futuna.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Briançon, rapporteure,

- les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique,

- et les observations de Me Montaut, représentant la société Boyer, et de Me Vandepoorter, représentant le territoire des Iles Wallis et Futuna.

Une note en délibéré présentée par la société Boyer a été enregistrée le 4 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Le territoire des Iles Wallis et Futuna et la société Boyer ont conclu, le 25 février 2010, un marché de travaux portant sur l'extension et l'aménagement du port de commerce de Mata-Utu, à Wallis, et plus précisément sur la réalisation de travaux de dragage, de terrassement, de génie civil maritime et de bâtiments portuaires. Ce marché de travaux, d'un montant initial de 8 674 497 euros, financé par le 9ème Fonds européen de développement, était décomposé en deux lots : un lot n°1 attaché aux infrastructures, d'un montant initial de 5 946 392 euros et un lot n° 2 attaché aux superstructures, d'un montant de 2 728 105 euros. Eu égard aux difficultés rencontrées, un avenant n°1 en date du 28 juin 2012 a d'une part, prolongé la durée d'exécution du marché de 18 mois, et d'autre part, rémunéré les surcoûts occasionnés à hauteur de 2 701 683,73 euros. Le 25 juin 2014, la société Boyer a établi son projet de décompte définitif s'élevant à la somme de 9 914 434,89 euros pour le lot n°1. Après un audit du projet de décompte établi par un auditeur missionné par la délégation de l'Union européenne pour le Pacifique, le projet de décompte a été rejeté. La société Boyer a demandé au tribunal, à titre principal, la condamnation du territoire des îles de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 7 261 319,96 euros TTC au titre des préjudices subis du fait des sujétions techniques imprévues et des fautes commises à l'occasion de la réalisation du marché et, à titre subsidiaire, la somme de 6 805 319,96 euros TTC sur les mêmes fondements, ces sommes devant être assorties des intérêts moratoires à compter du 27 juin 2014 et de la capitalisation desdits intérêts. Par un jugement du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a condamné le territoire de Wallis-et-Futuna à verser la somme de 336 413,75 euros à la société Boyer, somme assortie des intérêts moratoires prévus au marché à compter du 27 décembre 2014 produisant eux-mêmes intérêts à compter du 27 décembre 2015 et à chaque échéance annuelle. La société requérante relève appel de ce jugement. Le territoire de Wallis-et Futuna, demande de rejeter la requête, et par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement en ce qu'il retient l'existence de sujétions techniques imprévues et des fautes du territoire et condamne en conséquence le Territoire des Iles Wallis et Futuna à verser la somme de 336 413,75 euros à la société Boyer.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du chantier, soit qu'elles trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat.

En ce qui concerne la responsabilité pour faute du maître d'ouvrage :

3. Il résulte de l'instruction et n'est pas contesté en défense que, comme l'a retenu le tribunal, la responsabilité contractuelle du territoire est engagée en raison des erreurs commises dans la conception de l'extension du quai, notamment dans le dimensionnement et le calcul des palplanches. L'administration admet également que ces erreurs ont entrainé la désorganisation du chantier et un allongement important des délais, eu égard notamment aux " flottements " dans la direction du marché, ce qui a occasionné d'importants surcoûts. Par la voie de l'appel incident, l'administration soutient toutefois que d'une part, les difficultés rencontrées ne trouvent leur origine ni dans les fautes retenues par le tribunal tenant à l'insuffisance des documents du marché s'agissant des études géotechniques de conception et la description des caractéristiques des sols à draguer, ni dans les manquements dans l'exercice du pouvoir de direction et de contrôle ni dans les sujétions imprévues, l'ensemble des préjudices ayant été indemnisé par l'avenant n°1 signé le 28 juin 2012.

4. Par cet avenant, les parties se sont accordées sur les conséquences financières s'agissant notamment de la désorganisation du chantier et de la prolongation des délais d'exécution des travaux, et ont prévu d'une part, la prolongation de la durée d'exécution du marché de 18 mois, et d'autre part, la rémunération des surcoûts occasionnés à hauteur de 2 701 683,73 euros. Par ailleurs, si l'avenant prend en compte la faute de conception initiale en substituant plusieurs documents de conception et modifie la décomposition du prix global et forfaitaire du lot n°1 en introduisant des prix nouveaux, il précise en son point VII qu'il ne vaut pas renonciation de la part de la société Boyer à recours ultérieur portant sur les demandes non traitées dans ce cadre. Ainsi, la conclusion de cet avenant, qui ne prend pas en compte l'intégralité des surcoûts induits par le nouveau délai d'exécution s'agissant en particulier de la main d'œuvre et de son encadrement, ne fait pas obstacle, comme l'a relevé le tribunal, à ce que la société Boyer présente des réclamations sur les points dont il résulte de l'instruction qu'ils ne sont pas couverts par l'avenant.

S'agissant de la faute en matière de conception et d'insuffisance des documents concernant les études géotechniques et les caractéristiques des sols à draguer :

5. D'une part, aux termes de l'article 40.1 du cahier des spécifications spéciales : " (...) Les normes et règles citées dans les documents du dossier d'appel d'offres ne sont données qu'à titre indicatif dans le but de définir la qualité minimum des travaux et ouvrages à réaliser, celle des matériaux et fournitures à mettre en œuvre à cet effet, ainsi que les règles usuelles employées à déterminer cette qualité. Pour définir la qualité des matériaux et matières que le soumissionnaire se propose de mettre en œuvre pour la réalisation des travaux et pour les calculs de résistance ou autres (béton armé, fondations, etc.) il peut être référé aux normes et règles applicables en la matière dans l'un des Etats membres, pour autant que ces normes et règles conduisent à une réalisation qui est conforme aux règles de l'art et qui répond aux exigences particulières du marché, notamment dans le domaine climatique, physique et hydrologique du lieu où seront réalisés les ouvrages. Dans une note séparée, à joindre à la soumission, le soumissionnaire indique les règles et normes auxquelles il s'est référé pour l'élaboration de son offre ; s'il se réfère à des normes et règles autres que celles prévues, il joint à la note précitée des extraits de la documentation lui ayant servi de base. ". Et aux termes de l'article 1.2 du cahier des spécifications techniques générales stipulent que : " Les travaux comprennent notamment [à la charge du titulaire] (...) une étude géotechnique d'exécution du rideau de palplanche (sondages pressiométriques) " et aux termes de l'article 3.2.2 : " Étude géotechnique d'exécution sur la base de sondages pressiométriques " et enfin aux termes de l'article 3.6 :" L'entrepreneur devra établir les notes de calculs et dossiers d'exécution des ouvrages avec justification du quai en palplanches par l'établissement d'une étude géotechnique (sondages pressiométriques) ".

6. Contrairement à ce que soutient le territoire et, indépendamment des règles généralement admises, les spécifications techniques ne font nullement référence à la réalisation d'études géotechniques de conception mais se bornent à prévoir que le titulaire avait à sa charge la réalisation des études d'exécution du rideau de palplanches, des études géotechniques d'exécution sur la base de sondages pressiométriques ainsi que l'établissement des notes de calculs et des dossiers d'exécution des ouvrages avec justification du quai en palplanches par l'établissement d'une note géotechnique par sondages pressiométriques. La circonstance que le titulaire du marché ne pouvait fonder ses études géotechniques d'exécution sur les seules données indicatives figurant dans le dossier de consultation des entreprises et devait réaliser des études de sols complémentaires ne pouvait exonérer le maître d'ouvrage de la prise en charge des études de conception complémentaires ayant été rendues nécessaires du fait de l'insuffisance des données fournies dans l'appel d'offres, les sondages pressiométriques n'ayant de surcroît pas été jugés comme la méthode d'intervention la plus adaptée.

7. D'autre part, l'article 3.10.2 du cahier des spécifications techniques générales indique que le " matériau à draguer est constitué de formations sableuses (cf. rapport de reconnaissance géotechnique joint au bordereau I) comprenant du sable, des limons, des éléments de corail sur des épaisseurs supérieures à 3-4 mètres (pas de refus des sondages pressiométriques). / Toutefois, de nombreuses patates de corail sont visibles et constitueront des points durs. Les travaux de dragages pourront être réalisés en partie à l'aide de dragues hydrauliques (drague aspiratrice équipée de désagrégateur). / Les points durs nécessiteront l'utilisation d'une drague rétrocaveuse (pelle hydraulique avec bras suffisant pour atteindre la cote - 10 m hydro) et d'explosifs si nécessaire, sous réserve d'agrément préalable du maître d'ouvrage ". Les stipulations de l'article 3.1 du même document indiquent que " l'entrepreneur est réputé ... - avoir procédé à une visite détaillée des lieux et avoir pris parfaitement connaissance de toutes les conditions physiques et sujétions relatives aux lieux des travaux ... en particulier du point de vue ... de la nature des terrains, ... - avoir contrôlé toutes les indications des documents du dossier d'appel d'offres et s'être assuré qu'elles étaient suffisantes, exactes et concordantes, et avoir faite toutes les investigations, reconnaissances et essais complémentaires nécessaires à sa pleine information ".

8. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'étude géotechnique initiale produite au marché était incomplète et en partie erronée quant à la description des sols à draguer pour les besoins du chantier, ceci entrainant des conséquences très importantes pour la suite des travaux de dragage. Toutefois, la société Boyer qui avait une obligation contractuelle de se rendre sur les lieux avant de remettre son offre pour vérifier l'exactitude des relevés fournies, n'a procédé à aucune démarche sur certains points techniques qui nécessitaient un éclaircissement et n'a pas évalué le matériel d'extraction et de déstructuration potentiellement nécessaire en cas de zones indurées plus importantes que prévues. Ainsi, les difficultés matérielles rencontrées dans l'exécution du contrat en raison de la présence d'une dalle corallienne indurée résultant d'une insuffisance des documents de la consultation portant sur la description des caractéristiques des sols à draguer sont de nature à entrainer la responsabilité du maître d'ouvrage. Mais la société Boyer n'ayant procédé à aucune reconnaissance sur le terrain avant de remettre son offre, ce qui aurait pu lui permettre d'anticiper les difficultés et d'adapter le matériel utilisé pour les opérations de dragage, elle a également commis une faute de nature à exonérer le territoire de Wallis-et-Futuna de sa responsabilité à hauteur de 50 %.

S'agissant de la faute dans l'exercice des missions de contrôle et de direction :

9. Aux termes de l'article 17 du cahier des prescriptions spéciales : " (...) Il est fixé une période de préparation de six mois calendaires pour le lot n° 1 et de quatre mois pour le lot n° 2, à compter de la date de notification du démarrage de la période de préparation. Il est précisé que ce délai, qui peut être réduit d'un commun accord entre les parties, n'est pas compris dans le délai contractuel d'exécution des travaux ". Et aux termes de l'article 33.2 : " La période de préparation démarre à compter de l'ordre de service prescrivant son commencement, au plus tard dans le délai d'un (1) mois après la signature du marché. L'exécution des travaux démarre à compter de l'ordre de service prescrivant son commencement, au plus tard dans le délai d'un (1) mois après la fin de la période de préparation. ".

10. La société Boyer soutient que l'administration supérieure a commis plusieurs manquements dans son pouvoir de contrôle et de direction du marché du fait de l'absence de prolongation de la période de préparation du chantier, de l'intervention tardive de l'ordre de service de démarrage des travaux et de l'information tardive sur le dimensionnement des ouvrages. Conformément aux règles du marché, l'ordre de service n°1 a fixé le début de la période de préparation au 26 mars 2010, pour une durée de six mois, soit jusqu'au 26 septembre 2010 et l'ordre de service prescrivant le démarrage des travaux a été notifié le 14 octobre 2010, soit dans le délai d'un mois prescrit par l'article 33.2 du cahier des prescriptions spéciales. Toutefois, en ne donnant pas suite à la demande de prolongation d'un mois de la période de préparation du chantier formulée le 21 septembre 2010, la société Boyer a rencontré des difficultés pour mener à bien les études du quai et l'acheminement du matériel, ce refus, notamment du fait du retard pris dans la validation des solutions techniques et le dimensionnement des ouvrages pour la réalisation du mur en palplanches, ayant empêché une réorganisation du chantier qui a eu pour conséquence directe une désorganisation du chantier et un allongement important des délais induisant des surcoûts. Par suite, la société Boyer est fondée à soutenir que le territoire de Wallis-et-Futuna a commis une faute dans l'exercice de ses missions de contrôle et de direction, et ne peut être regardée comme ayant elle-même commis des fautes de nature à exonérer le territoire de tout ou partie de sa responsabilité.

En ce qui concerne la responsabilité sans faute :

11. Les stipulations de l'article 20 du cahier des prescriptions spéciales du marché indiquent expressément que : " le titulaire ne pourra prétendre à aucune indemnité sur tout ou partie des travaux quels que soient : - les difficultés ou sujétions rencontrées à l'exécution du marché, - les retards dus ... à la nature du sol... ".

12. La société Boyer soutient que les difficultés rencontrées à raison de la présence de la dalle corallienne constituaient des sujétions techniques imprévues. Ne peuvent être regardées comme des sujétions techniques imprévues que des difficultés matérielles rencontrées lors de l'exécution d'un marché présentant un caractère exceptionnel, imprévisibles lors de la conclusion du contrat et dont la cause est extérieure aux parties. Si les caractéristiques du sol observées, tant du point de vue de sa cohésion, que de sa compacité ou de sa dureté ont différé des prescriptions contractuelles et que l'étude géotechnique produite au marché par le maître d'ouvrage prévoyait la présence d'un sol sablonneux, avec la présence de quelques patates de corail (ou "'points durs'"), il est constant que la société Boyer qui, comme il a été dit au point 13, n'a pas effectué de constat initial de l'état des lieux du site, permettant un meilleur repérage des zones indurées avant de remettre son offre, et n'a pas évalué le matériel d'extraction et de déstructuration potentiellement nécessaire en cas de zones indurées plus importantes que prévues dans le sous-sol concerné. Ainsi, la seule découverte d'une importante dalle corallienne indurée peu profonde dans le sous-sol sous-marin concerné alors qu'il résulte de l'instruction que la société Boyer, en tant que professionnel du secteur aurait dû faire preuve de prudence dans l'évaluation de la situation et d'anticipation des difficultés pour l'exécution du marché, ne peut être qualifiée d'imprévisible.

Sur les préjudices :

13. Comme il a été rappelé au point 4, la signature de l'avenant ne fait pas obstacle à ce que la société Boyer présente des réclamations sur les points non indemnisés, quel que soit le fait générateur du préjudice invoqué. De même, il ne ressort ni de cet avenant ni des courriers préalables à sa conclusion que la prolongation du délai de réalisation du lot 1 de 12 à 30 mois visait à couvrir, par la suppression des pénalités de retard susceptibles d'être infligées à la société Boyer, la totalité des préjudices en raison de cette prolongation des délais et de la désorganisation du chantier qui en est résulté. Ainsi, seuls les préjudices résultant des fautes retenues et non pris en compte par l'avenant n°1, dont la société Boyer établit la réalité, peuvent être indemnisés.

14. En premier lieu, la société Boyer est fondée à soutenir que l'ordre de service n°5 du 1er avril 2011 ordonnant la réalisation d'études géotechniques supplémentaires permettant de valider le nouveau dimensionnement du rideau de palplanches excède le périmètre des études d'exécution dues par l'entreprise au titre du marché. Au titre de la réalisation des études géotechniques irrégulièrement mises à sa charge le 1er avril 2011, il y a lieu de retenir la somme, au demeurant non contestée par la requérante, de 239 117,57 euros retenue par l'expert au titre du poste B2 et accordée par le tribunal.

15. En deuxième lieu, la société Boyer demande le versement d'une somme de 33 816,35 euros (B5) correspondant aux frais générés par le préfinancement des palplanches, commandées dès décembre 2010, et aux études techniques supplémentaires réalisées par la société Best Pacific. Elle soutient qu'eu égard aux difficultés d'approvisionnement en Europe, elle a commandé les palplanches dès la fin 2010 afin d'être en mesure de démarrer les travaux dès janvier 2011 alors que la décision de l'administration relative au dimensionnement du quai n'a été prise que le 28 juin 2012. Les palplanches ont donc été stockées du mois de janvier 2011 au 15 décembre 2011, et acheminées sur site le 9 mars 2012. Il résulte de l'instruction, et notamment des calculs effectués par l'expert-sapiteur, que le préjudice subi peut être évalué à la somme de 33 816,35 euros. Ainsi, en l'absence de contestation quant à l'évaluation du coût de cette prestation et alors que ce point n'a pas été réglé par l'avenant, il y a lieu de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à verser ladite somme à la société Boyer.

16. En troisième lieu, la société soutient qu'elle a subi un préjudice du fait des incertitudes sur la date de démarrage du chantier qui lui a fait perdre les conditions avantageuses obtenues auparavant et correspondant à la différence de prix entre le voyage par navire de ligne et le voyage par bateau " beacher " initialement envisagé le 19 septembre 2010. Le territoire de Wallis-et-Futuna soutient que l'ordre de service prescrivant le démarrage des travaux lui a été notifié le 14 octobre 2010 dans le cadre des prévisions contractuelles. Toutefois, il résulte de l'instruction que les incertitudes autour de la période de préparation du chantier n'a pas permis à la société Boyer de faire venir son matériel par l'affrètement qu'elle avait mis en place et qu'elle a dû recourir aux services d'un navire de ligne. Ainsi, il y a lieu de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à indemniser la société de ce préjudice (poste B1) valorisé par l'expert à la somme, non contestée, de 201 542,58 euros.

16. En quatrième lieu, la société sollicite la réparation des préjudices non pris en charge par l'avenant et résultant du manquement par l'administration à son obligation d'information s'agissant d'une part, des opérations de dragage correspondant au poste B3 et s'élevant à la somme de 268 009,94 euros et d'autre part, du déroctage du platier nécessaire pour la mise en œuvre des tirants correspondant au poste B6 et s'élevant à la somme de 15 699,10 euros. Compte tenu de ce qui précède et du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à verser à la société Boyer la somme globale de 141 854,52 euros au titre de ces préjudices.

17. En cinquième lieu, la société Boyer sollicite une rémunération complémentaire au titre du poste B7 pour les surcoûts induits par la prolongation des délais d'exécution et la désorganisation du chantier. Il résulte de l'instruction que le coût des salariés a été évalué par l'expert, en l'absence de planning, à la somme de 298 241,91 euros. Ce coût de la main d'œuvre incluant les frais de déplacement est désormais justifié pour un montant de 447 642 euros, de même que le surcoût pour l'encadrement évalué à la somme de 737 254,06 euros. Par ailleurs, si la société Boyer demande la somme de 1 965 436,07 euros au titre du surcoût du matériel engendré par la prolongation du chantier en se basant sur une approche par les amortissements, seule la somme de 168 000 euros pour l'immobilisation de la barge Flocon durant 56 jours est justifiée. Enfin, la société Boyer est également fondée à demander la somme de 1 057 043,68 euros au titre des frais généraux, dont le caractère réel et certain est établi eu égard à l'augmentation du volume des prestations, somme résultant de l'application d'un taux de 17% sur la période de prolongation de 30 mois.

18. En sixième lieu, la société Boyer sollicite au titre du poste B8 la réparation du préjudice lié aux installations complémentaires résultant de la faute de l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction. Il résulte de l'instruction que l'entreprise Boyer a droit en réparation de ce préjudice à la somme de 55 480,14 euros.

19. En septième lieu, la société Boyer demande la somme de 18 683 euros au titre du poste B9 en raison des contrôles supplémentaires consécutifs à la faute de conception. Il résulte de l'instruction que l'augmentation du volume des prestations impliquait nécessairement un nombre accru de contrôles, qui a généré une dépense de 18 683 euros non prise en compte par l'avenant.

20. En huitième lieu, il résulte de l'instruction qu'à plusieurs reprises les règlements sont intervenus avec plusieurs jours, voire semaines de retard, ce qui a engendré une situation de trésorerie délicate pour la société Boyer, laquelle sollicite des intérêts moratoires à raison de ces retards de paiement (B10). En retenant le taux d'intérêt de la Banque centrale européenne, ce préjudice doit être évalué à la somme de 4042,09 euros.

21. En neuvième lieu, la société Boyer demande le versement d'une somme de 57 155,29 euros (B11) au titre des frais engagés pour le montage juridique du dossier de réclamation qui ne peut, en l'espèce, être inclus dans les frais généraux de la société. Ainsi, et compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à verser à la société Boyer la somme de 28 577,64 euros.

22. En dixième lieu, la demande présentée au titre de frais financiers attachés à la demande de règlement complémentaire (B12) n'est pas en lien direct avec les fautes ouvrant droit à réparation et ne peut qu'être rejetée. De même, les sommes retenues ci-dessus étant sans lien avec les prix définis par les clauses contractuelles, elles ne peuvent faire l'objet de la révision des prix prévue par le marché.

23. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Boyer a droit au paiement de la somme complémentaire de 3 133 053,63 euros en exécution du marché conclu le 25 février 2010 pour l'extension et l'aménagement du port de commerce de Mata-Utu et non pris en compte par l'avenant signé le 28 juin 2012.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

24. D'une part, aux termes de l'article 53 du cahier des charges relatif aux marchés de travaux financés par le fonds européen de développement (FED) : " le paiement au titulaire des montants dues au titre de chaque état du décompte et du décompte définitif établi par le maître d'œuvre est effectué par le maître d'ouvrage dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle cet état ou décompte lui a été présenté. En cas de dépassement de ce délai, le titulaire a droit à des intérêts moratoires calculés au prorata du nombre de jours de retard, au taux indiqué dans le cahier des prescriptions spéciales, à concurrence d'un délai maximal qui y est également précisé ". D'autre part, l'article 51.2 du cahier des prescriptions spéciales indique que le maître d'œuvre doit communiquer au maître d'ouvrage et au titulaire le décompte définitif dans un délai de 90 jours suivant la réception du projet de décompte établi par le titulaire. Enfin, l'article 53 du cahier des prescriptions spéciales indique également que : " l'intérêt de retard porte sur la période comprise entre la date d'expiration du délai de paiement exclue, et la date de débit du compte du Maître d'ouvrage, incluse ".

25. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le point de départ des intérêts moratoires n'est pas, comme le soutient la société Boyer, la date d'envoi de son projet de décompte le 27 juin 2014, mais l'expiration du délai de quatre-vingt-dix jours imparti au maître d'ouvrage à compter de la date à laquelle le décompte définitif établi par le maître d'œuvre lui a été présenté, ou, lorsque le décompte définitif n'a pas été notifié par le maître d'œuvre, la date théorique à laquelle il aurait dû l'être. Ainsi, la société Boyer a droit aux intérêts moratoires sur la somme de 3 133 053,63 euros à compter du 27 décembre 2014. Ces intérêts produiront eux-mêmes intérêts à compter du 27 décembre 2015 et à chaque échéance annuelle.

Sur les frais d'expertise :

26. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ".

27. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 15 700 000 F CFP, pour moitié à la charge du territoire de Wallis-et-Futuna et pour moitié à la charge de la société Boyer. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que la société Boyer s'est acquittée de cette somme, à titre provisoire, il convient de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 7 350 000 F CFP.

28. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la somme de 336 413,75 euros que le territoire de Wallis-et-Futuna a été condamné à verser à la société Boyer par l'article 1er du jugement du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Wallis-et-Futuna est portée à celle de 3 133 053,63 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 27 décembre 2014 produisant eux-mêmes intérêts à compter du 27 décembre 2015 et à chaque échéance annuelle, ainsi qu'à la somme de 7 350 000 F CFP au titre des dépens de l'instance.

Sur les frais liés au litige :

29. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 336 413,75 euros que le territoire de Wallis-et-Futuna a été condamné à verser à la société Boyer par l'article 1er du jugement du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Wallis-et-Futuna est portée à celle de 3 133 053,63 euros, assortie des intérêts moratoires à compter du 27 décembre 2014 produisant eux-mêmes intérêts à compter du 27 décembre 2015 et à chaque échéance annuelle.

Article 2 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 15 700 000 F CFP, sont définitivement mis à la charge pour moitié du territoire de Wallis-et-Futuna et pour moitié de la société Boyer. La société Boyer s'étant acquittée de cette somme, à titre provisoire, il convient de condamner le territoire de Wallis-et-Futuna à lui verser la somme de 7 350 000 F CFP.

Article 3 : Le jugement n°1760009 du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Wallis-et -Futuna est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et des conclusions incidentes du territoire de Wallis-et-Futuna, dont celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Boyer et au préfet, administrateur supérieur des Iles de Wallis-et-Futuna.

Copie en sera adressé à l'expert.

Délibéré après l'audience du 29 juin 2023 , à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Briançon, présidente assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 juillet 2023 .

La rapporteure,

C. BRIANÇON

La présidente,

M. HEERS

La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00331
Date de la décision : 31/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANÇON
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : CABINET ALTANA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-31;18pa00331 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award