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07/07/2023 | FRANCE | N°23PA00054

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 07 juillet 2023, 23PA00054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un jugement n°

2211465 du 20 décembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la même demande.

Procédure devant la Cour :

I- Par une requête enregistrée sous le n° 23PA00054 et un mémoire en réplique enregistrés les 6 janvier 2023 et 20 mars 2023, M. A..., représenté par Me Helalian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022 ;

3°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que :

- le jugement attaqué n° 2211465 du 20 décembre 2022 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de toute communication de la procédure à son conseil ;

- c'est également à tort que sa requête a été rejetée pour tardiveté par une ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022.

Par un mémoire enregistré le 18 février 2023, M. A... doit être regardé comme ayant entendu se désister des conclusions de sa requête en tant qu'elles sont dirigées, dans le cadre de la présente instance, contre le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2023, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

II- Par une requête enregistrée sous le n° 23PA00715 et un mémoire complémentaire enregistrés les 18 février 2023 et 19 mars 2023, M. A..., représenté par Me Helalian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montreuil ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué n° 2211465 du 20 décembre 2022 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de toute communication de la procédure à son conseil ;

- c'est également à tort que sa requête a été rejetée pour tardiveté par une ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2023, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- et les observations de Me Helalian, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 1er juillet 2022, le préfet des Hauts-de-Seine a obligé M. A..., ressortissant ivoirien né le 14 octobre 1999, à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... relève régulièrement appel, d'une part, de l'ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022 par laquelle la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande et, d'autre part, du jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la même demande.

2. Les requêtes susvisées nos 23PA00054 et 23PA00715, dirigées contre le même arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022, concernent la situation administrative de M. A..., présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n° 23PA00054 :

Sur l'étendue du litige :

3. Par un mémoire enregistré le 18 février 2023, M. A... doit être regardé comme ayant entendu se désister des conclusions de sa requête en tant qu'elles sont dirigées, dans le cadre de la présente instance, contre le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022. Ce désistement étant pur et simple, il y a lieu d'en donner acte.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Pour rejeter comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté, la demande de M. A..., la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a relevé que la notification de l'arrêté du 1er juillet 2022 du préfet des Hauts-de-Seine, qui comportait la mention des voies et délais de recours, était intervenue le jour même, et que la requête de l'intéressé avait été enregistrée le 17 juillet 2022, soit au-delà du délai de recours contentieux de quarante-huit heures fixé à l'article R. 776-2 du code de justice administrative. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... avait saisi dès le 2 juillet 2022 le tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une requête tendant à l'annulation de l'arrêté en litige, dont il a été accusé réception par ce Tribunal, transmise au tribunal administratif de Montreuil par une ordonnance du 4 juillet 2022. Par suite, la requête de M. A... n'était pas tardive.

Sur la requête n° 23PA00715 :

5. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Aux termes de l'article R. 711-2 du même code : " R. 711-2 Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... était représenté en première instance par Me Helalian qui n'a toutefois été destinataire d'aucune des pièces de la procédure et en particulier n'a pas reçu communication du mémoire en défense du préfet des Hauts-de-Seine et n'a pas été convoquée à l'audience. Il suit de là que M. A... est fondé à soutenir que le jugement attaqué n° 2211465 du 20 décembre 2022 est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 6 que l'ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022 et le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022 doivent être annulés. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022 :

8. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

9. D'une part, l'arrêté vise les textes applicables, notamment les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet des Hauts-de-Seine a fait application pour décider de son éloignement du territoire. Il mentionne également les éléments de fait propres à la situation personnelle de M. A... en énonçant que depuis la décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire prise à son encontre le 4 juillet 2019, l'intéressé se maintient en situation irrégulière sur le territoire. D'autre part, la décision refusant à M. A... l'octroi d'un délai de départ volontaire, prise au visa des articles L. 612-2 et suivants du même code, précise qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français sans justifier d'aucune circonstance particulière, qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement et a déclaré lors de son audition par les services de police son intention de ne pas se conformer à la mesure d'éloignement. La décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé sera éloigné, qui vise les articles L. 721-3 à L. 721-5 du code précité, relève que la décision ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, l'arrêté vise les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquels la décision d'interdiction de retour sur le territoire français a été prise, mentionne la date d'entrée en France de M. A... et précise en particulier que sa situation familiale ne révèle pas de fortes attaches sur le territoire, qu'il ne s'est pas conformé à une précédente mesure d'éloignement et ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière faisant obstacle à l'interdiction de retour sur le territoire qui lui est opposée. Il énonce également que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ne porte pas une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale. Il mentionne ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision interdisant à M. A... de retourner sur le territoire français tant dans son principe que dans sa durée. Par suite, l'arrêté contesté répond aux exigences de motivation posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

10. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté attaqué, ni des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen suffisamment approfondi de la situation personnelle de M. A....

11. En troisième lieu, M. A... fait valoir sa qualité de père d'une enfant de nationalité française, née le 11 février 2022 et sa vie maritale avec une ressortissante française. La qualité de parent d'enfant français constitue une condition de plein droit pour la délivrance d'une carte temporaire de séjour sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et s'oppose à l'exécution d'une mesure d'éloignement dès lors que la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant est démontrée. Il ressort des pièces du dossier que la communauté de vie dont il se prévaut n'est pas établie avant 2021 et que sa contribution à l'entretien et à l'éducation de son enfant, qui n'excède pas six mois à la date de l'arrêté attaqué, demeure très récente. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, le préfet des Hauts-de-Seine n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle en l'obligeant à quitter le territoire français.

12. En quatrième lieu, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet des Hauts-de-Seine au regard des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés

ci-dessus au point 11 du présent arrêt.

13. En cinquième lieu, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision, soulevé à l'encontre des décisions refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination, doit être écarté.

14. En dernier lieu, faute d'établir l'illégalité de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait, par voie d'exception, dépourvue de base légale.

15. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er juillet 2022.

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2211519 du 16 décembre 2022 de la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Montreuil et le jugement n° 2211465 du 20 décembre 2022, du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil sont annulés.

Article 2 : Il est donné acte du désistement des conclusions de la requête n° 23PA00054 de M. A... en tant qu'elles sont dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil n° 2211465 du 20 décembre 2022.

Article 3 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur

et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 7 juillet 2023.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00054, 23PA00715


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00054
Date de la décision : 07/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : HELALIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-07;23pa00054 ?
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