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06/07/2023 | FRANCE | N°22PA03710

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 06 juillet 2023, 22PA03710


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par quatre requêtes distinctes, la société civile immobilière Morin a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler les trois arrêtés du 17 août 2020 et l'arrêté du 20 août 2020 par lesquels le maire de Couilly-Pont-aux-Dames (Seine-et-Marne) a refusé de lui délivrer quatre permis de construire portant, respectivement, sur un immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré 128 A 2062 : lot B), sur une maison d'habitation (sur le terrain cadastré A 2061 : lot C), sur un

immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré A 2062 : lot D),...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par quatre requêtes distinctes, la société civile immobilière Morin a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler les trois arrêtés du 17 août 2020 et l'arrêté du 20 août 2020 par lesquels le maire de Couilly-Pont-aux-Dames (Seine-et-Marne) a refusé de lui délivrer quatre permis de construire portant, respectivement, sur un immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré 128 A 2062 : lot B), sur une maison d'habitation (sur le terrain cadastré A 2061 : lot C), sur un immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré A 2062 : lot D), et sur un immeuble comportant deux logements (sur le terrain cadastré 128 A 2059 : lot A) et, d'autre part, de condamner la commune à lui verser des indemnités en compensation des frais d'architecte engagés dans le cadre du projet et en réparation du manque à gagner du fait de la non-réalisation de l'opération.

Par quatre jugements n° 2008725, n° 2008726, n° 2008730 et n° 2008731 du 11 mai 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 août et 20 décembre 2022 sous le n° 22PA03710, la société civile immobilière Morin, représentée par Me Verdier (cabinet Lexlor), demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2008725 du 11 mai 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 août 2020 du maire de Couilly-Pont-aux-Dames ;

3°) de condamner la commune de Couilly-Pont-aux-Dames à lui verser la somme correspondant au montant de l'indemnité d'immobilisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Couilly-Pont-aux-Dames la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de l'insertion du projet dans son environnement ;

- il est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 111-16 et L 111-23 du code de l'urbanisme qui font obstacle à ce que le maire lui interdise les toitures-terrasses végétales ;

- le projet respecte les dispositions de l'article R. 111-17 de ce code ;

- le refus de permis de construire lui a causé un préjudice patrimonial important du fait des frais engagés au titre des honoraires d'architecte, d'un manque à gagner et de l'indemnité d'immobilisation qu'elle a versée au promettant et qu'elle n'a pu récupérer.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2022, la commune de Couilly-Pont-aux-Dames, représentée par Me Trennec, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de

3 000 euros soit mise à la charge de la société civile immobilière Morin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 août et 20 décembre 2022 sous le n° 22PA03712, la société civile immobilière Morin, représentée par Me Verdier (cabinet Lexlor), demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2008726 du 11 mai 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2020 du maire de Couilly-Pont-aux-Dames ;

3°) de condamner la commune de Couilly-Pont-aux-Dames à lui verser la somme correspondant au montant de l'indemnité d'immobilisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Couilly-Pont-aux-Dames la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de l'insertion du projet dans son environnement ;

- le projet respecte les dispositions de l'article R.111-17 du code de l'urbanisme ;

- les plans fournis font apparaître un recul de cinq mètres conformément à ce qui était demandé dans l'arrêté de déclaration préalable ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme dès lors que les pièces complémentaires demandées pour les lots B, C et D ont été produites dans le cadre de la demande de pièces concernant le lot A ;

- le refus de permis de construire lui a causé un préjudice patrimonial important du fait des frais engagés au titre des honoraires d'architecte et d'un manque à gagner.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2022, la commune de Couilly-Pont-aux-Dames, représentée par Me Trennec, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de

3 000 euros soit mise à la charge de la société civile immobilière Morin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

III. Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 août et 20 décembre 2022 sous le n° 22PA03713, la société civile immobilière Morin, représentée par Me Verdier (cabinet Lexlor), demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2008730 du 11 mai 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2020 du maire de Couilly-Pont-aux-Dames ;

3°) de condamner la commune de Couilly-Pont-aux-Dames à lui verser la somme correspondant au montant de l'indemnité d'immobilisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Couilly-Pont-aux-Dames la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société civile immobilière Morin présente les mêmes moyens et arguments que dans l'instance n° 22PA03712.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2022, la commune de Couilly-Pont-aux-Dames, représentée par Me Trennec, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de

3 000 euros soit mise à la charge de la société civile immobilière Morin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

IV. Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 août et 20 décembre 2022 sous le n° 22PA03714, la société civile immobilière Morin, représentée par Me Verdier (cabinet Lexlor), demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2008731 du 11 mai 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2020 du maire de Couilly-Pont-aux-Dames ;

3°) de condamner la commune de Couilly-Pont-aux-Dames à lui verser la somme correspondant au montant de l'indemnité d'immobilisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Couilly-Pont-aux-Dames la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société civile immobilière Morin présente les mêmes moyens et arguments que dans l'instance n° 22PA03712.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2022, la commune de Couilly-Pont-aux-Dames, représentée par Me Trennec, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de

3 000 euros soit mise à la charge de la société civile immobilière Morin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert ;

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public ;

- les observations de Me Verdier pour la société civile immobilière Morin.

Une note en délibéré a été présentée pour la société civile immobilière Morin le 23 juin 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 21 novembre 2018, le maire de Couilly-Pont-aux-Dames ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de la société civile immobilière Morin à fins de division en quatre lots à bâtir, A, B, C et D, d'un terrain situé 412 rue de Condé. Le 19 juin 2020, la société civile immobilière Morin a déposé quatre demandes de permis de construire correspondant à chacun des lots du terrain et portant, respectivement, sur un immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré 128 A 2062 : lot B), sur une maison d'habitation (sur le terrain cadastré A 2061 : lot C), sur un immeuble comprenant deux logements (sur le terrain cadastré A 2062 : lot D), et sur un immeuble comportant deux logements (sur le terrain cadastré 128 A 2059 : lot A). Par un arrêté du 20 août 2020 et trois arrêtés du 17 août 2020, le maire de Couilly-Pont-aux-Dames a refusé de délivrer les quatre permis de construire sollicités aux motifs que la société pétitionnaire devait déposer un seul permis de construire pour l'ensemble de quatre lots, que la distance de la construction aux limites séparatives ne respecte pas les dispositions de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme et que le projet ne s'intègre pas à son environnement. Par courrier du 22 octobre 2020, la SCI Morin a sollicité auprès du maire de Couilly-Pont-aux-Dames une indemnisation à hauteur de 83 589,12 euros. La société civile immobilière Morin relève appel des jugements du 11 mai 2022 par lesquels le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. Les requêtes de la société civile immobilière Morin enregistrées sous les nos 22PA03710, 22PA03712, 2PA03713 et 22PA03714 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

3. Le maire de Couilly-Pont-aux-Dames s'étant fondé sur plusieurs motifs pour refuser les permis de construire sollicités, les premiers juges ont relevé l'illégalité de ceux tirés, d'une part, de ce qu'une seule demande de permis de construire aurait dû être présentée pour les quatre projets et, d'autre part, de l'erreur d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme. Ils ont en revanche estimé que le maire aurait pris la même décision, sur les quatre demandes de permis de construire, s'il s'était fondé uniquement sur les dispositions de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme établissant une distance minimum entre la construction et les limites séparatives en fonction de la hauteur de la construction.

4. Statuant sur l'appel du demandeur de première instance dirigé contre un jugement qui a rejeté ses conclusions à fin d'annulation d'une décision administrative reposant sur plusieurs motifs en jugeant, après avoir censuré tel ou tel de ces motifs, que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée sur le ou les motifs que le jugement ne censure pas, il appartient au juge d'appel, s'il remet en cause le ou les motifs n'ayant pas été censurés en première instance, de se prononcer, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, sur les moyens critiquant la légalité du ou des motifs censurés en première instance, avant de déterminer, au vu de son appréciation de la légalité des différents motifs de la décision administrative, s'il y a lieu de prononcer l'annulation de cette décision ou de confirmer le rejet des conclusions à fin d'annulation.

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-7 du code de l'urbanisme, applicable en l'espèce : " À moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres ".

6. Pour refuser d'accorder les quatre permis de construire sollicités sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 111-7 du code de l'urbanisme, le maire de Couilly-Pont-aux-Dames s'est notamment fondé sur l'insuffisance de la distance d'implantation des quatre bâtiments envisagés par rapport aux limites séparatives, compte tenu de leur hauteur respective. Si la société pétitionnaire soutient que la hauteur des bâtiments doit être déterminée à partir du sol naturel et non à partir du sol après excavation, comme l'aurait estimé la commune, les dispositions réglementaires précitées prévoient de déterminer la différence d'altitude entre la limite parcellaire la plus proche et le point le plus haut du bâtiment en se plaçant à l'horizontale de ce point, sans référence, en tout état de cause, à la hauteur par rapport au sol naturel. En l'espèce, compte tenu, d'une part, de ce que le terrain d'assise des projets est en pente et, d'autre part, de la hauteur des bâtiments prévus pour chacun des lots A, B, C et D apparaissant dans chacun des dossiers de demande de permis de construire, la distance de quatre mètres par rapport aux limites séparatives de ces différents bâtiments apparaît manifestement insuffisante, dans les quatre projets, pour permettre le respect de la règle posée à l'article R. 111-7 du code de l'urbanisme. Il s'ensuit que le maire de Couilly-Pont-aux-Dames a pu légalement rejeter ces demandes sur le fondement des dispositions de l'article R.111-17 du code de l'urbanisme, et que le moyen tiré de l'erreur de droit commise au regard de ces dispositions doit donc être écarté.

7. Dès lors, compte tenu en outre de ce qui a été rappelé au point 4, il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens articulés à l'encontre des quatre arrêtés litigieux.

8. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux point 5 à 7 que les arrêtés de refus de permis de construire litigieux ne sont pas illégaux et ne sauraient ainsi révéler une faute de la commune de nature à engager sa responsabilité.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société civile immobilière Morin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les quatre jugements attaqués, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des quatre arrêtés des 17 et 20 août 2020 du maire de Couilly-Pont-aux-Dames rejetant ses demandes de permis de construire afférentes. Ses conclusions d'appel doivent être rejetées, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle, dès lors qu'elle succombe dans l'instance, à ce qu'elle en puisse invoquer le bénéfice. Il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge le versement à la commune de Couilly-Pont-aux-Dames de la somme globale de 1 500 euros sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes nos 22PA03710, 22PA03712, 2PA03713 et 22PA03714 de la société civile immobilière Morin sont rejetées.

Article 2 : La société civile immobilière Morin versera une somme de 1 500 euros à la commune de Couilly-Pont-aux-Dames sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Morin et à la commune de Couilly-Pont-aux-Dames.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juillet 2023.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-et-Marne, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 22PA03710, ...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03710
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : SCP ARENTS-TRENNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-06;22pa03710 ?
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