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30/06/2023 | FRANCE | N°22PA05410

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 30 juin 2023, 22PA05410


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er février 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et lui a interdit de retourner sur le territoire français. Par un jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 décembre 2022, et une pièce c...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er février 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et lui a interdit de retourner sur le territoire français. Par un jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 20 décembre 2022, et une pièce complémentaire, enregistrée le 25 mai 2023 et non communiquée, M. B..., représenté par Me Weinberg, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 1er février 2022 ; 2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de quinze jours sous astreinte de vingt-cinq euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : En ce qui concerne la décision portant refus de séjour : - elle est insuffisamment motivée en fait ; - elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation notamment en ce que l'intéressé avait également présenté une demande sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle ; - elle est entachée de multiples erreurs de fait ; - elle est entachée d'une erreur de droit ; - le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée en lui opposant le défaut de visa de long séjour ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 6-5 et du titre III de l'accord franco-algérien ainsi que de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour sur laquelle elle se fonde ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur laquelle elle se fonde. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2023, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - et les observations de Me Milly, substituant Me Weinberg, pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 25 janvier 2001 à Ain El Hamman (Algérie), déclarant être entré en France le 20 avril 2019, a sollicité par courrier daté du 27 juin 2021 la délivrance d'un titre de séjour au titre de l'admission exceptionnelle au regard de sa vie privée et personnelle. Par arrêté du 1er février 2022, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français. Par un jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 dont il interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. B..., le préfet de Seine-et-Marne lui a notamment opposé la circonstance qu'il était célibataire et sans enfant et qu'il ne justifiait pas de considérations humanitaires ou exceptionnelles. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les parents de l'intéressé ont connu de graves problèmes de santé qui les ont contraints de cesser leur activité professionnelle. La famille s'est retrouvée dans une situation de grande précarité économique et matérielle. Dans ce contexte économique précaire et au regard de la situation médicale de ses deux parents, M. B... a été contraint d'interrompre sa scolarité, afin de trouver une activité professionnelle pour les soutenir financièrement. Insatisfait de cette situation, M. B... est arrivé en France le 20 avril 2019 sous couvert d'un visa C délivré par les autorités espagnoles alors qu'il était âgé de moins de dix-huit ans et depuis cette date il réside chez un cousin où il est totalement pris en charge notamment financièrement. En effet, par une déclaration de prise en charge totale signée le 25 juin 2020 devant un officier d'état civil algérien, ses parents ont déclaré confier M. B... à M. C... qui l'a recueilli et le prend en charge financièrement et affectivement. Dès son arrivée sur le territoire, M. B... a été scolarisé au lycée Léonard de Vinci en seconde générale et technologique au titre de l'année scolaire 2019-2020 puis en seconde professionnelle technicien d'usinage au titre de l'année 2020-2021 et en première professionnelle pour l'année 2021-2022, et enfin en terminale professionnelle au titre de l'année scolaire 2022-2023. En dépit des obstacles rencontrés au début de sa scolarité en France en raison notamment de difficultés de compréhension des consignes et de nature linguistique, il ressort des pièces du dossier que ses professeurs ont relevé son sérieux, sa motivation et sa progression, qui lui ont permis de surmonter les difficultés rencontrées et d'atteindre une moyenne supérieure à 15/20 au cours des deux derniers trimestres de première dans les disciplines scientifiques et techniques. 3. Par ailleurs, l'intéressé a obtenu le 23 novembre 2020 le diplôme d'études en langue française niveau A2 puis niveau B1 le 12 juillet 2021. En outre, il résulte de l'instruction que si le gouvernement algérien prévoit la mise en œuvre du baccalauréat professionnel, par la révision du système actuel d'orientation vers le cursus d'enseignement professionnel, la mise en place d'une ingénierie pédagogique propre au baccalauréat professionnel et la création d'un office des examens et concours de la formation et de l'enseignement professionnels ne sont pas encore finalisées, et qu'en conséquence, M. B... ne pourra bénéficier d'un cursus analogue à celui qu'il suit actuellement dans son pays d'origine. Dans les circonstances très particulières de l'espèce, compte tenu de ses efforts de formation et d'insertion, la décision par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de délivrer au requérant une carte de séjour temporaire est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant, nonobstant la circonstance que ses parents résident en Algérie. Par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens, cette mesure encourt l'annulation, ainsi que les décisions subséquentes portant obligation de quitter dans le délai de trente jours le territoire français, fixation du pays de destination, et interdiction à l'intéressé de retourner sur le territoire français. 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 du tribunal administratif de Melun. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 5. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de Seine-et-Marne délivre au requérant un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un tel titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés à l'instance : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2201972 du 17 novembre 2022 et l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 1er février 2022 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " à M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.Délibéré après l'audience du 9 juin 2023 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Simon, premier conseiller,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 30 juin 2023. La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERELa greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.N° 22PA05410 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05410
Date de la décision : 30/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : WEINBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-30;22pa05410 ?
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