Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Patrimoine Entre2morin, M. A... B... et la société civile immobilière Phimajo ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler, notamment, l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le maire de Saint-Barthélemy a délivré à la société par actions simplifiée Free Mobile un permis de construire un pylône relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle cadastrée ZD 87, située Ru de Chambardin à Saint-Barthélemy (Seine-et-Marne) ainsi que l'arrêté rectificatif du 29 mars 2019 ayant le même objet.
Par un jugement nos 1902741, 1902742, 1902744, 1903209, 1903465, 1904954 du 19 novembre 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 14 février 2022 et un mémoire enregistré le 13 janvier 2023, M. A... B... et la société civile immobilière Phimajo, représentés par Me Ambroselli, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1902741, 1902742, 1902744, 1903209, 1903465, 1904954 du 19 novembre 2021 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le maire de Saint-Barthélemy a délivré à la SAS Free Mobile un permis de construire un pylône relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle cadastrée ZD 87, située Ru de Chambardin à Saint-Barthélemy (Seine-et-Marne) ainsi que l'arrêté rectificatif du 29 mars 2019 ayant le même objet ;
3°) de mettre à la charge de la société par actions simplifiée Free Mobile et de la commune de Saint-Barthélemy le versement de la somme globale de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur demande de première instance est recevable dès lors que, propriétaires de plusieurs parcelles boisées d'agrément non bâties immédiatement voisines du terrain d'assiette du pylône objet du permis de construire et ayant une vue directe sur ledit pylône, de type industriel d'ailleurs incongru dans cet environnement, ils disposent d'un intérêt à agir suffisant, d'autant plus que le projet est de nature à faire baisser la valeur desdites parcelles ;
- leur requête d'appel est recevable ;
- l'arrêté du 23 janvier 2019 ne comporte pas la mention de la qualité de son auteur, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et les administrations ;
- il a été pris en violation du principe d'impartialité, dès lors qu'il porte sur une construction prévue sur une parcelle appartenant au maire de la commune, et qu'il comporte en outre la mention qu'il a été signé " après avis favorable du maire " ;
- il a également été pris en méconnaissance de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme, faute pour le conseil municipal d'avoir désigné par une délibération spéciale un autre de ses membres pour signer le permis de construire ; cette irrégularité n'est pas purgée par l'arrêté du 29 mars 2019, lequel a été pris sur le fondement d'un arrêté de délégation de signature qui n'était pas entré en vigueur faute d'avoir été transmis au représentant de l'État ;
- le dossier de demande de permis de construire est incomplet :
° il ne mentionne pas l'adresse du terrain, l'adresse y mentionnée étant erronée ;
° la notice C4 est entachée d'insuffisances ;
° le plan masse projeté comporte des informations fausses ;
° le plan de situation ne répond pas aux caractéristiques requises ;
° les plans de l'ensemble des façades n'ont pas été fournis comme l'exige pourtant l'article R. 431-10 (a), du code de l'urbanisme ;
° la hauteur des arbres représentés sur les PC 3 et PC 5 est erronée ;
° le profil du terrain avant et après travaux n'a pas été produit ;
° les cotes d'implantation du pylône sont erronées et incohérentes ;
° le plan de repérage des photographies et des insertions dans le site ne respecte pas les exigences règlementaires ;
° l'insertion dans le site est un photomontage et non une perspective ou une axonométrie, alors qu'il a été établi par un professionnel ;
° les documents graphiques relatifs à l'insertion dans le site sont insuffisants et incomplets ;
° les photographies et les insertions dans le site sont erronées ;
- le dossier d'information prévu par l'article 1er de la loi n° 2015-136 du 10 février 2015 n'a pas été mis à la disposition des habitants ;
- le principe de précaution a été méconnu ;
- le permis de construire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles R. 111-27 et L. 101-2 du code de l'urbanisme, le style industriel et la hauteur de l'antenne de plus 40 m de hauteur constituant une rupture radicale avec l'environnement champêtre des lieux avoisinants.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 mai 2022, la société par actions simplifiée Free mobile, représentée par Me Martin (Cabinet Pamlaw-Avocats) conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 5 000 euros à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable, dès lors qu'elle ne critique pas le jugement attaqué ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
La requête a été communiquée à la commune de Saint-Barthélemy, qui n'a pas présenté d'observations en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des postes et des communications électroniques ;
- le code des relations entre le public et les administrations ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Diémert,
- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,
- et les observations de Me Ambroselli, avocat de M. A... B... et de la société civile immobilière Phimajo.
Considérant ce qui suit :
1. Le 3 octobre 2018, La société par actions simplifiée Free Mobile a déposé le 3 octobre 2018 une demande de permis de construire relative à l'implantation d'un pylône relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle ZD 87, située " Ru de Chambardin " à Saint-Barthélemy (Seine-et-Marne) enregistrée sous le n° PC 077 402 18 00004. Par un arrêté du 23 janvier 2019, le maire de Saint-Barthélemy a accordé le permis de construire sollicité. La société civile immobilière Phimajo ayant demandé, le 4 mars 2019, le retrait de cet arrêté au préfet de Seine-et-Marne, ce dernier a, par un courrier du 20 mars 2019 indiqué à sa gérante, Mme B..., qu'une lettre d'observation avait été adressée à la commune afin qu'elle régularise l'irrégularité formelle révélée à l'occasion du contrôle de légalité. Par un arrêté " rectificatif " du 29 mars 2019, le maire de Saint-Barthélemy a accordé le permis de construire sollicité par la société Free Mobile. L'association Patrimoine Entre2morin, M. A... B..., la société civile immobilière Phimajo ayant demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler, notamment, l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le maire de Saint-Barthélemy a délivré à la SAS Free Mobile un permis de construire un pylône relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle cadastrée ZD 87, située Ru de Chambardin à Saint-Barthélemy (Seine-et-Marne) ainsi que l'arrêté rectificatif du 29 mars 2019 ayant le même objet, cette juridiction a rejeté leur demande par un jugement du 19 novembre 2021, dont M. A... B... et la société civile immobilière Phimajo relèvent appel devant la Cour.
Sur la recevabilité de la requête :
2. Contrairement à ce que soutient en défense la société par actions simplifiée Free Mobile, la requête comporte une critique effective du jugement attaqué et ne se borne pas à reproduire identiquement les écritures de première instance, les critiques dirigées contre la solution d'irrecevabilité pour défaut d'intérêt à agir retenue par les premiers juges devant être regardées comme visant, tant l'irrecevabilité opposée à M. B... que celle opposée à la société civile immobilière. La fin de non-recevoir soulevée par la société Free mobile doit donc être écartée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. / Le présent article n'est pas applicable aux décisions contestées par le pétitionnaire ".
4. D'une part, il résulte des dispositions citées au point précédent qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
5. D'autre part, le propriétaire d'un terrain non construit est recevable, quand bien même il ne l'occuperait ni ne l'exploiterait, à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager si, au vu des éléments versés au dossier, il apparaît que la construction projetée est, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance de son bien.
6. En premier lieu, la société civile immobilière Phimajo produit une attestation, établie par un notaire, de laquelle il ressort que l'installation du pylône relais de radiotéléphonie mobile qui a fait l'objet du permis de construire litigieux est de nature à entrainer une perte de la valeur vénale des terrains alentours de 20 %. Cette attestation, qui est très circonstanciée et qui mentionne précisément les parcelles en cause, relève notamment que leur caractère d'agrément sera affecté par l'implantation d'un pylône métallique de caractère industriel, qualifiée " d'agression déplorable " dans un paysage champêtre préservé. Dans ces conditions, la société civile immobilière Phimajo doit être regardée comme justifiant d'un intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire litigieux.
7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est associé de la société civile immobilière Phimajo, qui est une société civile familiale, et qu'il occupe non seulement la maison d'habitation située dans un hameau à moins d'un kilomètre du terrain d'implantation du pylône dont ladite société est propriétaire, mais qu'il jouit également des terrains boisés d'agrément situés autour du lieu d'implantation du projet. Dans ces conditions, l'intéressé doit également être regardé comme justifiant d'un intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire litigieux.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... et la société civile immobilière Phimajo sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté comme irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le maire de Saint-Barthélemy a délivré à la société par actions simplifiée Free Mobile un permis de construire un pylône relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle cadastrée ZD 87, située Ru de Chambardin à Saint-Barthélemy (Seine-et-Marne) ainsi que de l'arrêté rectificatif du 29 mars 2019 ayant le même objet.
9. Ce jugement est donc irrégulier et doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A... B... et de la société civile immobilière Phimajo. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sans évoquer, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Melun.
Sur les frais du litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société par actions simplifiée Free Mobile, qui succombe dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge le versement d'une somme globale de 2 000 euros sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1902741, 1902742, 1902744, 1903209, 1903465, 1904954 du 19 novembre 2021 du tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A... B... et de la société civile immobilière Phimajo.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Melun.
Article 3 : La société par actions simplifiée Free mobile versera à M. A... B... et à la société civile immobilière Phimajo une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société civile immobilière Phimajo, à la société par actions simplifiée Free mobile et à la commune de Saint-Barthélemy.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne et, en application de l'article R. 751-1 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Meaux.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 juin 2023.
Le rapporteur,
S. DIÉMERTLe président,
J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA00708