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28/06/2023 | FRANCE | N°22PA04954

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 28 juin 2023, 22PA04954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017.

Par un jugement n° 2017806/1-1 du 28 septembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 novembre 2022 et 21 mars 2023, M. et Mme B...

, représentés par Me Arpaïa, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017.

Par un jugement n° 2017806/1-1 du 28 septembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 novembre 2022 et 21 mars 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Arpaïa, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2022 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens.

Ils soutiennent que :

- l'administration fiscale n'établit pas l'appréhension effective des sommes qu'elle a qualifiées de distribuées sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, et elle ne pouvait pas se prévaloir de la maîtrise d'affaire sur ce fondement ;

- elle ne démontre pas que M. B... détenait la totalité des pouvoirs essentiels lui permettant de disposer sans contrôle des biens de la société ;

- les retraits d'espèces ne peuvent être regardés comme des revenus distribués sur le fondement de l'article 109 du code général des impôts ;

- l'administration fiscale a méconnu les paragraphes 220, 230 et 240 de l'instruction administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-10 du 12 septembre 2012 ainsi que le paragraphe 80 de l'instruction administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 du 12 septembre 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) " Multi Transports Express ", dont M. B... était alors le gérant et l'unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, à la suite de laquelle le dossier du foyer fiscal de M. et Mme B... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2016 et 2017. A l'issue de ce contrôle sur pièces, l'administration fiscale a imposé entre les mains de M. B..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en application des dispositions du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, une somme de 37 269 euros au titre de l'année 2016 et une somme de 23 558 euros au titre de l'année 2017. M. et Mme B... font appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la loi fiscale :

2. Si l'administration fiscale s'est prévalue, à l'issue du contrôle fiscal comme en première instance, des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts pour fonder les rehaussements en litige, elle demande en appel que les impositions contestées soient établies, à titre principal, sur le fondement des dispositions du 1° du 1 du même article ou, à titre subsidiaire, sur le fondement des dispositions du c de l'article 111 du même code. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que ces demandes de substitution de base légale n'ont pas pour effet de priver les contribuables des garanties de procédure prévues par la loi, il y a lieu d'examiner si elles sont fondées en droit.

3. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a initialement considéré que les sommes de 25 445 euros et 13 998 euros correspondant à des indemnités kilométriques respectivement en 2016 et 2017, de 1 502 euros et 1 560 euros correspondant à des dépenses de voyage en Tunisie respectivement en 2016 et 2017 et de 10 332 euros et 8 000 euros correspondant à des retraits d'espèces respectivement en 2016 et 2017, constituaient des revenus distribués entre les mains de M. B... sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / (...) ". Aux termes de l'article 110 de ce code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés / (...) ". Il appartient en principe à l'administration, lorsque le contribuable a régulièrement contesté les rectifications, d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions ainsi que de leur appréhension. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

5. Il résulte de l'instruction que les retraits d'espèces mentionné au point 3 n'ont pas été retenus pour rehausser les bénéfices de l'EURL " Multi Transports Express " au titre des exercices clos en 2016 et 2017. Ainsi, contrairement à ce que soutient le ministre, ces sommes ne peuvent être regardées, au sens et pour l'application des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, comme des bénéfices et, par suite, comme des revenus distribués par cette société à M. B... au titre des années 2016 et 2017. En revanche, s'agissant des autres sommes mentionnées au point 3, le ministre établit, sans être contesté sur ce point, que M. B... était, au cours des années d'imposition en litige, le gérant de droit et l'unique associé de l'EURL " Multi Transports Express ". Si les requérants, qui ne contestent pas l'existence et le montant de ces sommes, soutiennent que l'administration fiscale ne démontre pas que M. B... aurait exercé la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société et aurait disposé sans contrôle de ses fonds, les éléments apportés par l'administration fiscale sont toutefois suffisants pour permettre de regarder l'intéressé comme le seul maître de l'affaire et, par suite, comme réputé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. A ce dernier égard, M. et Mme B... n'établissent pas plus en appel qu'en première instance que les indemnités kilométriques et les dépenses de voyage en Tunisie, qui ont été comptabilisées en charges au titre des exercices clos en 2016 et 2017, ont été effectivement exposées dans l'intérêt de l'EURL " Multi Transports Express " et, ainsi, n'ont pas été appréhendées par M. B.... Dans ces conditions, l'administration fiscale a pu légalement estimer, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts invoquées en appel, que les sommes correspondant à des indemnités kilométriques et à des dépenses de voyage en Tunisie constituaient des revenus distribués par cette société à M. B... au titre des années 2016 et 2017.

6. En second lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes / (...) ".

7. Si les requérants, qui ne contestent pas l'existence et le montant des retraits d'espèces mentionnés au point 3, soutiennent que ces retraits effectués sur les comptes bancaires de l'EURL " Multi Transports Express " étaient destinés à rémunérer des personnes ayant réalisé des prestations au profit de la société, ils n'en justifient pas plus en appel qu'en première instance, alors qu'il est constant que les retraits d'espèces ont été effectués par M. B.... Dans ces conditions, l'administration fiscale a pu légalement estimer, sur le fondement des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts invoquées en appel, que les sommes correspondant à des retraits d'espèces constituaient des avantages occultes consentis par cette société à M. B... au titre des années 2016 et 2017.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

8. En premier lieu, compte tenu des substitutions de base légale qui ont été opérées plus haut, M. et Mme B... ne peuvent utilement se prévaloir, sur le fondement implicite de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du bénéfice des énonciations des paragraphes 220, 230 et 240 de l'instruction administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-10 du 12 septembre 2012 dès lors que ces paragraphes sont relatifs aux effets de la présomption légale de distribution édictée au 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

9. En second lieu, les requérants ne peuvent pas non plus utilement invoquer le bénéfice des énonciations du paragraphe 80 de l'instruction administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 du 12 septembre 2012 dès lors que ce paragraphe concerne la mise en œuvre de la procédure de l'article 117 du code général des impôts.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Par ailleurs, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées dès lors que la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens à la charge des requérants.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04954
Date de la décision : 28/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : ARPAÏA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-28;22pa04954 ?
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