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28/06/2023 | FRANCE | N°22PA04953

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 28 juin 2023, 22PA04953


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Multi Transports Express a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2016 et 2017.

Par un jugement n° 2017811/1 du 28 septembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme de 5 000 euros correspondant à l'amende prévue au I de l'arti

cle 1729 D du code général des impôts et dégrevée en cours d'instance, et a rejeté le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Multi Transports Express a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2016 et 2017.

Par un jugement n° 2017811/1 du 28 septembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme de 5 000 euros correspondant à l'amende prévue au I de l'article 1729 D du code général des impôts et dégrevée en cours d'instance, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 novembre 2022 et 27 février 2023, l'EURL Multi Transports Express, représentée par Me Arpaïa, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2022 en tant qu'il n'a pas prononcé la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016 ;

2°) de prononcer la réduction, en droits et intérêts de retard, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens.

Elle soutient qu'en vertu du droit de correction prévu au deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, elle est en droit de déduire du passif injustifié de 127 385,02 euros au titre de l'exercice clos en 2016, la somme de 25 687,95 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens sont irrecevables dès lors qu'elles sont dépourvues d'objet ;

- le moyen soulevé par la société requérante n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, l'administration fiscale a assujetti, selon la procédure de rectification contradictoire, l'EURL Multi Transports Express, qui exerçait une activité de transports de marchandises et de personnes, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2016 et 2017. L'EURL Multi Transports Express fait appel du jugement du 28 septembre 2022 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016 à raison de la réintégration dans son résultat imposable d'un passif injustifié de 127 385,02 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code et dans sa rédaction applicable à l'année 2016 d'imposition en litige : " (...) / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés / (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit / Elles ne sont pas non plus applicables aux omissions ou erreurs qui résultent de dotations aux amortissements excessives au regard des usages mentionnés au 2° du 1 de l'article 39 déduites sur des exercices prescrits ou de la déduction au cours d'exercices prescrits de charges qui auraient dû venir en augmentation de l'actif immobilisé / Les corrections des omissions ou erreurs mentionnées aux deuxième et troisième alinéas restent sans influence sur le résultat imposable lorsqu'elles affectent l'actif du bilan. Toutefois, elles ne sont prises en compte ni pour le calcul des amortissements ou des provisions, ni pour la détermination du résultat de cession / (...) ".

3. En vertu des dispositions précitées du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, une erreur ou omission affectant l'évaluation d'un élément quelconque de l'actif ou du passif du bilan d'un des exercices non prescrits peut, si elle a été commise au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, être corrigée de manière symétrique dans les bilans de clôture et d'ouverture des exercices non prescrits, y compris dans le bilan d'ouverture du premier d'entre eux. En revanche, la circonstance qu'une méthode erronée a été appliquée pour la première fois lors d'un exercice clos depuis plus de sept ans, puis de manière constante d'exercice en exercice, faussant à chaque fois l'évaluation d'un même poste du bilan - selon un principe identique, mais pour des montants variant en fonction de la composition effective de ce poste -, ne suffit pas à justifier que la correction de la valeur de ce poste au cours d'un des exercices non prescrits puisse être effectuée également dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices. Il ne pourrait en aller ainsi que si et dans la mesure où les éléments individualisés du poste concerné dans ce bilan d'ouverture, parce qu'ils avaient également figuré dans le bilan de clôture d'un des exercices clos depuis plus de sept ans, ont affecté l'évaluation de ce bilan d'ouverture d'une erreur intervenue au cours d'un de ces exercices clos depuis plus de sept ans.

4. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a estimé que la somme de 127 385,02 euros figurant au débit du compte 467000 " autres comptes débiteurs et créditeurs divers ", à l'ouverture du premier exercice non prescrit le 1er janvier 2016, devait être regardée comme un passif injustifié, qu'elle a, en conséquence, réintégré dans le résultat de cet exercice. L'EURL Multi Transports Express, qui soutient, pour la première fois en appel, qu'elle est en droit de bénéficier du droit de correction prévu au deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, établit, dans la présente instance, sans être sérieusement contredite par le ministre, que figurait au crédit du compte 467000, à la clôture de l'exercice clos le 31 décembre 2009, une somme de 25 687,95 euros constituant un passif injustifié pour elle, et qu'aucun mouvement de ce compte au cours des sept années suivantes n'a eu pour effet de porter le solde de ce compte à un montant inférieur. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, la société requérante dispose ainsi du droit, prévu au deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, de corriger l'erreur correspondant à cette somme de 25 687,95 euros dès lors qu'elle figure à son passif depuis plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit et n'a pas été réduite ultérieurement. Dans ces conditions, c'est à tort que l'administration fiscale a réintégré dans les résultats de la société requérante, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2016, une somme de 127 385,02 euros et non de 101 697,07 euros.

5. Il résulte de ce qui précède que l'EURL Multi Transports Express est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016, à concurrence de la réintégration d'une somme de 25 687,95 euros comme passif injustifié. Par voie de conséquence, la société requérante est également fondée à demander la réduction des intérêts de retard correspondants.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'EURL Multi Transports Express et non compris dans les dépens. En revanche, ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens ne peuvent qu'être rejetées dès lors que la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens à la charge de la société requérante.

D E C I D E:

Article 1er : La base d'imposition de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle l'EURL Multi Transports Express a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016 est réduite d'une somme de 25 687,95 euros.

Article 2 : L'EURL Multi Transports Express est déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2016 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus, ainsi que des intérêts de retard correspondants.

Article 3 : Le jugement n° 2017811/1 du 28 septembre 2022 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à l'EURL Multi Transports Express une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de l'EURL Multi Transports Express est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Multi Transports Express, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04953


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04953
Date de la décision : 28/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : ARPAÏA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-28;22pa04953 ?
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