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14/06/2023 | FRANCE | N°22PA04230

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 14 juin 2023, 22PA04230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 mars 2021 par laquelle le préfet de police a implicitement refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son fils F... E....

Par un jugement n° 2124155/3-3 du 15 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 5 novembre 2021 en ce qu'elle a implicitement rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. E... au bénéfice de son fils, F..., enjoint

au préfet de police de délivrer à ce dernier une carte de séjour temporaire dans u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 mars 2021 par laquelle le préfet de police a implicitement refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son fils F... E....

Par un jugement n° 2124155/3-3 du 15 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 5 novembre 2021 en ce qu'elle a implicitement rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. E... au bénéfice de son fils, F..., enjoint au préfet de police de délivrer à ce dernier une carte de séjour temporaire dans un délai de deux mois et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 septembre 2022, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal.

Il soutient que :

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges n'est pas fondé ;

- les autres moyens de la demande de première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 17 octobre 2022, M. E..., représenté par Me Christophe Pouly conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête du préfet n'est pas recevable à défaut d'être motivée ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 30 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée le 21 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Topin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., de nationalité marocaine, a, le 20 mai 2017, sollicité l'introduction en France, au titre du regroupement familial, de son fils, M. F... E..., né le 1er avril 2000. Par un arrêté du 21 juin 2018, le préfet de police a rejeté cette demande en raison du caractère partiel de la demande de regroupement familial et compte-tenu du fait que le requérant n'apportait pas la preuve qu'il soit de l'intérêt supérieur de son fils d'être séparé de sa mère et de sa sœur, avec lesquelles ce dernier vivait jusqu'alors au Maroc. Le 1er août 2020, M. E... a déposé une nouvelle demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse, Mme B... D..., de son fils F... et de sa fille, C... E..., née le 9 mai 2005, sur le fondement des dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur. Par un courrier du 5 mars 2021, le préfet de police a informé M. E... qu'il avait décidé d'accueillir favorablement sa demande uniquement en ce qui concerne son épouse et sa fille mineure. Par courrier du 5 novembre 2021, le préfet de police a indiqué au requérant que la procédure de regroupement familial ne concernait que le conjoint et les enfants mineurs et a invité le fils de M. E..., majeur à la date du dépôt de la demande, à solliciter un visa de long séjour auprès du consulat de France. Le préfet de police relève appel du jugement du 15 juillet 2022 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 5 novembre 2021 refusant d'admettre au titre du regroupement familial F... E... et lui a enjoint de délivrer une carte de séjour temporaire.

Sur la recevabilité de la requête :

2. La requête d'appel du préfet de police, qui comporte une critique du jugement attaqué, répond aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. E... doit être écartée.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a pas contesté le refus de regroupement familial qu'il avait sollicité au bénéfice de F... en 2017 qui est dès lors devenu définitif. F..., âgé de 21 ans à la date de la décision attaquée, était en mesure de vivre sans sa famille proche, quand bien même ses parents le soutenaient financièrement pour qu'il poursuive ses études au Maroc. Par ailleurs, il n'est pas établi qu'il n'aurait plus de famille dans son pays d'origine. Enfin, la décision attaquée ne faisait pas obstacle à ce qu'il sollicite son admission au séjour dans le cadre légal et réglementaire que l'administration a porté à la connaissance du requérant par la décision attaquée. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la décision par laquelle le préfet de police a refusé le regroupement familial au bénéfice de F... porte une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale du requérant au regard des buts qu'elle poursuit. Le préfet de police est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision contestée devant lui.

5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... devant le Tribunal administratif de Paris.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par M. E... en première instance :

6. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier du dossier et aurait méconnu sa compétence. Ce moyen doit donc être écarté.

7. En second lieu, pour les motifs exposés au point 4. du présent arrêt, M. E... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice par le préfet de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 5 novembre 2021 en ce qu'elle concernait M. F... E..., lui a enjoint de délivrer une carte de séjour temporaire à l'intéressé dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance. Les articles 1, 2 et 3 de ce jugement doivent dès lors être annulés et la demande présentée par M. E... devant ce tribunal ne peut qu'être rejetée, ainsi que ses conclusions d'appel présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 15 juillet 2022 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... E....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

La rapporteure,

Signé

E. TOPINLe président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04230
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : POULY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;22pa04230 ?
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