Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... et Mme E... C... épouse A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté leurs demandes de mutation à la Réunion et les décisions de mutation de MM. Richard (PSEUDOFontaine/PSEUDO), Yves (PSEUDOLombardo/PSEUDO), Nicolas PSEUDOConver/PSEUDO) et Thierry (PSEUDOLepinay/PSEUDO).
Par un jugement n° 1913948/5-2 du 2 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 juillet et 5 septembre 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Jean-Yves Trennec puis par Me Blandine Arents, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté leurs demandes de mutation à la Réunion et les décisions de mutation de MM. Richard C..., Yves D... et Nicolas Conver ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à leur mutation à la Réunion et de placer MM. C..., D... et Conver dans une situation légale et règlementaire, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les décisions attaquées méconnaissent l'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 dès lors que rien n'interdisait à M. A... de présenter une demande de mutation alors qu'il n'avait que 14 mois de présence dans le poste qu'il occupait et que l'avis défavorable émis par son supérieur hiérarchique, préoccupé par le seul intérêt de son service, ne constitue pas un critère devant être pris en compte ; au demeurant, le ministre n'a pas produit les avis émis sur les demandes de mutation de MM. C..., Conver et D... ;
- ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'ils justifient avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux dans le département de la Réunion, qu'une telle démonstration n'est pas faite s'agissant des agents ayant bénéficié d'une mutation en 2019 et qu'ils disposaient d'un nombre de points supérieurs à ces agents selon le barème défini par l'instruction du 3 avril 2018.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 26 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 juillet 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Topin,
- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... qui sont gardiens de la paix affectés à la préfecture de police de Paris, ont sollicité leur mutation à la Réunion au titre de l'année 2019. Par un jugement du 2 juin 2022, dont ils relèvent appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions implicites rejetant leurs demandes et des décisions de mutation de trois de leurs collègues.
2. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa version applicable à l'espèce : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. / Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l'avis des commissions est donné au moment de l'établissement de ces tableaux. (...) (...) Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité lorsqu'ils produisent la preuve qu'ils se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts, aux fonctionnaires handicapés relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu'aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. (...) / Dans les administrations ou services mentionnés au deuxième alinéa du présent article, l'autorité compétente peut procéder à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème rendu public. Le recours à un tel barème constitue une mesure préparatoire et ne se substitue pas à l'examen de la situation individuelle des agents. Ce classement est établi dans le respect des priorités figurant au quatrième alinéa du présent article. Toutefois, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices par lesquelles elle définit, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la demande de mutation de
M. A... a été refusée au motif d'un avis négatif de sa hiérarchie résultant de son ancienneté insuffisante dans le dernier poste qu'il occupait au sein de la préfecture de police, et que la demande de Mme A..., présentée de manière simultanée, a été rejetée en conséquence du rejet de la demande de son mari. Il ressort en effet du dossier que M. A... n'était dans son poste que depuis octobre 2017, soit quatorze mois à la date à laquelle il a présenté sa demande de mutation, durée très inférieure à celle de trois ans habituellement souhaitée. Les requérants ne contestent pas utilement ces motifs en se bornant à indiquer qu'un avis défavorable est habituellement apposé par les supérieurs hiérarchiques qui ne veulent pas se séparer de leurs agents ou que le temps de présence de M. A... dans son poste ne faisait pas obstacle à une demande de mutation, dès lors qu'en application des principes fixés par l'article 60 précité de la loi du 11 janvier 1984, le ministre était en droit de prendre en compte l'intérêt du service pour se prononcer sur les demandes dont il était saisi. Par ailleurs, si les requérants, qui ne produisent que des décisions de 2022 et 2023, soit postérieures à l'année 2019, reconnaissant l'existence du centre de leurs intérêts matériels et moraux à La Réunion, justifient toutefois y être nés et y avoir effectué leur scolarité, il ressort du dossier que MM. C..., Conver et D... étaient également nés à La Réunion, de sorte qu'ils y avaient également le centre de leurs intérêts matériels et moraux, les deux premiers ayant de surcroît occupé leur premier poste dans ce département, et qu'ils justifiaient d'une ancienneté dans le poste qu'ils occupaient de, respectivement, plus de trois ans, plus de sept ans et s'agissant de M. D..., près de six ans. Au regard du motif tiré du bon fonctionnement du service, invoqué par le ministre dans ses écritures devant le tribunal, la seule circonstance que M. et Mme A... auraient eu le centre de leurs intérêts moraux et matériels à la Réunion et qu'ils aient été détenteurs d'un nombre de points supérieurs sur la base du barème, au demeurant indicatif, prévu par l'instruction du 3 avril 2018 relative aux mouvements de mutation des agents du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, ne suffit pas à considérer que le ministre aurait entaché les décisions contestées d'erreur manifeste d'appréciation, ni en tout état de cause d'erreur de droit.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, dès lors, être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme E... C... épouse A..., à MM. Richard C..., Yves D..., Nicolas Conver et Thierry Lepinay et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Topin, présidente assesseure,
- M. Magnard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.
La rapporteure,
Signé
E. TOPIN
Le président,
Signé
I. BROTONSLe greffier,
Signé
A. MOHAMAN YERO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA03176