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14/06/2023 | FRANCE | N°22PA03073

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 14 juin 2023, 22PA03073


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2209041/6-1 du 24 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant

la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Pier...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2209041/6-1 du 24 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Pierre Lebriquir, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " salarié " dans le délai d'un mois suivant la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la décision lui refusant la délivrance du renouvellement de son titre de séjour est illégale dès lors qu'il ne représente pas une menace à l'ordre public.

Par un mémoire enregistré le 15 mars 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 15 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée le 5 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Topin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant malien né le 30 septembre 1991 à Lakanguémou, qui s'est vu délivrer un premier titre de séjour " salarié " le 30 décembre 2019, renouvelé une première fois le 30 décembre 2019, a sollicité le 27 août 2021 un nouveau renouvellement de ce titre de séjour portant la mention " salarié ", sur le fondement des dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 avril 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois. M. B... relève appel du jugement du 24 juin 2022 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du préfet de police. Il doit être regardé comme demandant à la Cour, outre l'annulation de ce jugement, l'annulation de l'arrêté contesté devant le tribunal.

Sur la recevabilité de la requête de première instance :

2. Aux termes de l'article L. 614-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions et délais prévus au présent chapitre, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision relative au délai de départ volontaire et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Aux termes de l'article L. 614-6 de ce code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) II. - Conformément aux dispositions de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. (...) ". Aux termes de l'article R. 776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. Si le préfet de police soutenait devant le tribunal que la demande présentée par M. B... était tardive dès lors qu'elle avait été enregistrée au greffe du tribunal le 19 avril 2022, soit plus de quarante-huit heures après la notification, le 14 avril 2022, de l'arrêté attaqué, il ne ressort pas de cet arrêté, tel que produit par le requérant que les voies et délais de recours y auraient été mentionnées, et le préfet de police, qui produit en défense la même version de l'arrêté, n'allègue ni démontre que

M. B... aurait été informé des voies et délais de recours par un feuillet de l'arrêté non produit par le requérant. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet de police doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ". Aux termes de l'article L. 412-5 de ce même code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a refusé le renouvellement du titre de séjour en qualité de salarié de M. B... au seul motif que la présence de l'intéressé sur le territoire français constituait une menace pour l'ordre public en raison de sa condamnation, le 10 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Pontoise, à une peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis pour vol. Toutefois, cette condamnation, à la suite d'une homologation de peine proposée par le procureur de la République dans le cadre d'une reconnaissance de culpabilité de l'intéressé, pour des faits commis le 10 septembre 2021, relatifs à un vol de sept téléphones portables dans un entrepôt appartenant à Colissimo, ne suffit pas à considérer que la présence du requérant sur le territoire français serait de nature à constituer une menace à l'ordre public au regard de leur caractère isolé, de l'absence de violences physiques et de la nature de la peine prononcée. M. B... est par suite fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande de renouvellement de titre de séjour pour ce motif d'ordre public, le préfet de police a entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué ainsi que l'arrêté contesté, par lequel le préfet de police a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui remettre, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par M. B....

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2209041/6-1 du 24 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le préfet de police a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une période de trente-six mois est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. B... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt et de lui remettre, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

La rapporteure,

Signé

E. TOPINLe président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03073
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : LEBRIQUIR

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;22pa03073 ?
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