Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté du 18 août 2021 par lequel le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a renouvelé son stage probatoire pour une année supplémentaire à compter du 1er janvier 2021 et d'enjoindre au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de procéder à sa titularisation à compter du 1er janvier 2021.
Par un jugement n° 2100372 du 11 février 2022, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 avril 2022 et le 22 février 2023, Mme A..., représentée par Me Joannopoulos, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100372 du 11 février 2022 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 août 2021 du président de la Nouvelle-Calédonie ;
3°) d'enjoindre au président de la Nouvelle-Calédonie de prononcer sa titularisation à compter du 1er janvier 2021 ;
4°) de condamner le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 350 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier faute d'avoir répondu au moyen tiré du déroulement irrégulier de son stage ;
- la décision du 18 août 2021 constitue une décision défavorable qui n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par des mémoires en défense, enregistrés 10 octobre 2022, le 6 février 2023 et le 1er mars 2023, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie représenté par la société d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête de Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;
- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 ;
- la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 ;
- la délibération n° 352 du 7 mars 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Jurin, rapporteur public,
- et les observations de Me Chatelineau, avocate du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Une note en délibéré a été produite pour le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le 23 mai 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a été nommée, en qualité de stagiaire, infirmière diplômée d'Etat du cadre des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie à compter du 1er janvier 2020, par un arrêté du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 7 janvier 2020. Par arrêté du 18 août 2021 cette même autorité a renouvelé son stage probatoire pour une année supplémentaire à compter du 1er janvier 2021. Mme A... fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de prononcer sa titularisation.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article 3 de la délibération du 7 mars 2014 portant statut particulier du cadre des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie : " Les fonctionnaires du cadre des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie sont soumis aux dispositions du statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux. / Tout candidat à un emploi du cadre des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie doit accomplir, en vue de sa titularisation, un stage probatoire d'une durée d'une année dans les conditions prévues par le statut général précité. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la décision de prolonger le stage de Mme A..., qui a exercé en qualité d'infirmière en Suisse pendant de nombreuses années avant sa nomination en qualité de stagiaire, et dont les compétences techniques ne sont pas remises en cause, a pour seuls motifs un défaut de ponctualité dont la matérialité n'est pas établie, ainsi qu'un usage de son téléphone portable sur son lieu de travail et pendant les heures de service, dont il n'est pas établi qu'il aurait eu une incidence négative sur le bon fonctionnement du service, sur la formation de l'intéressée ni sur la qualité des soins apportés aux patients.
4. Dans ces conditions Mme A... est fondée à soutenir que la décision de prolongation de son stage est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et, par suite, à en demander l'annulation.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". L'article L. 911-2 de ce même code dispose que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
7. Compte tenu du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que Mme A... soit titularisée à compter du 1er janvier 2021. En revanche, eu égard à ce même motif d'annulation, le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de procéder au réexamen de la situation de la requérante, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés à l'instance :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie demande au titre des frais liés à l'instance. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le versement d'une somme de 1 500 euros à verser à Mme A....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2100372 du 11 février 2022 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et l'arrêté du 18 août 2021 par lequel le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a renouvelé le stage probatoire de Mme A... pour une année supplémentaire à compter du 1er janvier 2021 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de statuer à nouveau sur la titularisation de Mme A... à l'issue de sa première année de stage, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie versera à Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
-Mme B..., présidente assesseure,
-M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.
La rapporteure,
P. B...Le président,
C. JARDIN
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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22PA01619