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14/06/2023 | FRANCE | N°22PA00771

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 14 juin 2023, 22PA00771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... et Mme E... D... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 à concurrence de la réduction en base, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, d'une somme de 50 000 euros.

Par un jugement n° 2011872/1-1 du 23 décembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur dema

nde.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 f...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... et Mme E... D... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 à concurrence de la réduction en base, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, d'une somme de 50 000 euros.

Par un jugement n° 2011872/1-1 du 23 décembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 février 2022 et 13 juin 2022, M. et Mme D..., représentés par Me Thiébaut, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions à concurrence de la réduction en base, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, d'une somme de 50 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens.

Ils soutiennent que c'est à tort que l'administration fiscale a qualifié de revenu d'origine indéterminée la somme de 50 000 euros créditée sur leur compte bancaire dès lors qu'ils justifient de l'origine et de la nature de cette somme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- en l'absence de moyens, les conclusions d'appel à fin de dégrèvement présentées par les requérants sont irrecevables en tant qu'elles portent sur les autres rectifications imposables à l'impôt sur le revenu et les pénalités y afférentes au titre de l'année 2012, et ne portent donc qu'à hauteur des droits et pénalités correspondant au montant de 50 000 euros contesté ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2012 et 2013, M. et Mme D... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de ces années en conséquence de la réintégration dans leur revenu imposable de revenus de capitaux mobiliers et de revenus d'origine indéterminée. M. et Mme D... font appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions au titre de l'année 2012 à concurrence de la réduction en base, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, d'une somme de 50 000 euros.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. Le ministre soutient que les conclusions présentées par M. et Mme D... sont irrecevables dès lors qu'elles ne sont appuyées d'aucun moyen dirigé contre les autres rectifications que celles portant sur la taxation d'une somme de 50 000 euros dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée. Toutefois, une telle fin de non-recevoir ne peut qu'être écartée dès lors qu'il résulte de l'instruction que les requérants ne contestent aucune autre rectification en appel.

Sur le fond du litige :

3. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) / la charge de la preuve incombe (...) / au contribuable (...) en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ". M. et Mme D..., qui ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, ont été taxés d'office à raison de revenus d'origine indéterminée au titre des années 2012 et 2013 en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales.

4. Si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue. Il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus.

5. M. et Mme D..., qui ne contestent pas la régularité du recours à la taxation d'office, soutiennent que la somme de 50 000 euros, portée au crédit de leur compte bancaire ouvert en France à leur nom, le 4 janvier 2012, et taxée comme un revenu d'origine indéterminée, provient du remboursement par M. A... B... de la somme inscrite au crédit du compte courant d'associé de M. D... dans les écritures de la société Le Désir. Pour en apporter la preuve, les requérants établissent que M. D... et M. A... B..., dont la qualité d'associé de la société Le Désir n'est d'ailleurs pas contestée par l'administration fiscale, ont convenu que M. A... B... devait acquérir, par un acte sous seing privé signé le 12 décembre 2011, la totalité des parts de la société Le Désir détenues par M. D... moyennant le paiement d'une somme de 50 000 euros et qu'en vertu d'un protocole transactionnel signé le même jour, M. A... B... rembourserait à M. D... la somme de 50 000 euros inscrite au crédit du compte courant d'associé de ce dernier. M. et Mme D... établissent également que, d'une part, deux chèques de banque ont été émis le 5 décembre 2011 au profit de M. D... par la succursale de Lausanne de la banque Crédit Agricole pour un montant de 50 000 euros chacun et que, d'autre part, ces chèques ont été encaissés au crédit du compte bancaire des requérants respectivement les 13 décembre 2011 et 4 janvier 2012. Enfin, M. et Mme D... ont produit, à l'appui de leurs observations sur la proposition de rectification du 7 décembre 2015, une attestation manuscrite du 16 décembre 2015 par laquelle M. A... B..., qui fournit à l'appui de cette attestation une copie de sa carte nationale d'identité française, indique qu'il a remis à M. D... un chèque de banque d'un montant de 50 000 euros correspondant " au remboursement de son compte courant d'associé suite à la cession des parts qu'il détenait dans la société Le Désir ". Si le ministre fait valoir en défense que le protocole transactionnel du 12 décembre 2011 n'a pas de date certaine, que les chèques de banque ne font pas apparaître qu'ils ont été tirés depuis un compte bancaire détenu par M. A... B... et que l'attestation de ce dernier est dépourvue de force probante, ces circonstances ne sont toutefois pas suffisantes pour remettre en cause les faits exposés par M. et Mme D... qui sont concordants et corroborés par l'existence de mouvements bancaires retraçant un flux financier de 50 000 euros intervenu à des dates suffisamment rapprochées, lesquels mouvements bancaires donnent à ces faits un degré suffisant de précision et de vraisemblance s'agissant de l'origine et de la nature de la somme en litige. Dans ces conditions, les requérants doivent être regardés comme apportant la preuve que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé la somme de 50 000 euros, dont l'origine et la nature sont justifiées, en tant que revenu d'origine indéterminée au titre de l'année 2012.

6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis à concurrence des conséquences d'une réduction des bases d'imposition de 50 000 euros au titre de l'année 2012.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme D... et non compris dans les dépens. En revanche, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens ne peuvent qu'être rejetées dès lors que la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens à la charge des requérants.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2011872/1-1 du 23 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La base d'imposition des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme D... ont été assujettis au titre de l'année 2012 est réduite d'une somme de 50 000 euros.

Article 3 : M. et Mme D... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 2 ci-dessus, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme D... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme E... D..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00771


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00771
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : TOWERY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;22pa00771 ?
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