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14/06/2023 | FRANCE | N°21PA01611

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 14 juin 2023, 21PA01611


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 441 986,24 euros, objet de la déclaration de créances établie le 18 avril 2007 par le comptable du service des impôts des entreprises de Paris 1er arrondissement auprès de Me Pellegrini, en qualité de liquidateur.

Par une ordonnance n° 1918031/1-2 du 25 janvier 2021, le vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédur

e devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 mars 2021, 8 sep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 441 986,24 euros, objet de la déclaration de créances établie le 18 avril 2007 par le comptable du service des impôts des entreprises de Paris 1er arrondissement auprès de Me Pellegrini, en qualité de liquidateur.

Par une ordonnance n° 1918031/1-2 du 25 janvier 2021, le vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 mars 2021, 8 septembre 2021 et 6 janvier 2022, Mme A..., représentée par Me Philippe Galland, demande à la Cour :

1°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 441 986,24 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- on ne peut lui opposer un délai courant à compter de la déclaration de créances établie le 18 avril 2007 pour constater la tardiveté d'une contestation fondée sur la prescription intervenue le 12 décembre 2017 ;

- la demande est dirigée contre de nouveaux actes de poursuite intervenus en 2018 ;

- elle est fondée à se prévaloir de la prescription intervenue le 31 décembre 2017 ;

- la requête est recevable en raison de l'assignation en liquidation judiciaire délivrée le 23 juin 2006 et de la déclaration de créances établie le 18 avril 2007 ;

- la déclaration de créances fiscales par un comptable des finances publiques entre les mains du mandataire judiciaire d'une procédure collective peut faire l'objet d'une opposition à poursuite ainsi que le prévoit la doctrine référencée BOI-REC-EVTS-10-30 ;

- la requête est recevable en raison de ce que le liquidateur à la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 8 février 2007 a engagé, le 11 mai 2018, une procédure de vente forcée des immeubles lui appartenant en communauté avec son époux ;

- l'administration a formé le 11 septembre 2018 une demande en justice formée aux fins d'admission de la totalité des créances déclarées en 2007 ;

- cette demande a été rejetée le 25 septembre 2018 par le juge judiciaire qui a reconnu que la prescription était acquise ;

- elle a intérêt à agir ;

- la créance de l'administration est prescrite depuis le 12 septembre 2017 ;

- la prescription est même acquise depuis le 8 mai 2011 du fait que le comptable du Trésor n'a pas exercé son droit de poursuite individuelle à l'expiration du délai de trois mois suivant le jugement prononçant la liquidation judiciaire ;

- le comptable public ne peut plus invoquer contre elle l'interruption de la prescription depuis le 8 mai 2007 à minuit ;

- le paragraphe 152 de l'instruction 12-C-1-98 du 23 mars 1998, publié le 31 mars 1998 au Bulletin officiel des impôts et repris au paragraphe 153 de la documentation administrative référencée 12 C-6222, est opposable à l'administration fiscale ;

- l'interprétation publiée est totalement conforme à la loi ;

- le comptable public a réduit sa créance à 93 211,74 euros à la date du 30 mars 2012 et ensuite à néant à la date du 17 avril 2016 ;

- le comptable public n'était créancier de nulle somme, les prétendus défauts de paiement de taxe sur la valeur ajoutée n'étant pas établis ;

- les formes et délais de contestation des actes contestés n'ont pas été portés à sa connaissance ;

- les motifs invoqués ne pourraient être accueillis sans violation de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 juillet et 22 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande est irrecevable en l'absence de contestation de mesures de poursuite ;

- à supposer même que les actes invoqués soient constitutifs de mesures de poursuite, la réclamation du 11 juin 2019 serait tardive et par suite irrecevable ;

- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... relève appel de l'ordonnance du 25 janvier 2021 par laquelle le vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer les sommes, d'un montant total de 441 986,24 euros, correspondant à de la taxe sur la valeur ajoutée due par l'intéressée au titre des années 1999 à 2006, déclarées le 18 avril 2007 par le comptable du service des impôts des entreprises du 1er arrondissement de Paris au passif de Mme A..., dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 8 février 2007.

2. Il résulte de l'instruction que Mme A... se prévalait notamment, devant le premier juge, de ce que les sommes qui lui étaient réclamées par la déclaration de créances du 18 avril 2007 n'étaient pas exigibles à raison de la prescription quadriennale de l'action en recouvrement du comptable public du SIP Paris 1er arrondissement, acquise depuis le 12 septembre 2017. Le premier juge ne pouvait en conséquence, sur le fondement de l'article R. 281-3-1 c du livre des procédures fiscales, lequel prévoit que le délai de réclamation court à compter du " premier acte de poursuite permettant de contester l'exigibilité de la somme réclamée ", opposer à Mme A... la tardiveté de ses conclusions au motif que le moyen tiré de la prescription intervenue le 12 septembre 2017 aurait dû être soulevé dans un délai de deux mois décompté à partir du 23 avril 2007, date de la notification de la déclaration de créances à Me Pellegrini, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de Mme A.... Il y a lieu en conséquence d'annuler l'ordonnance attaquée, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le Tribunal administratif de Paris.

3. En vertu de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, la juridiction administrative est compétente pour connaître des contestations relatives au recouvrement des impositions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 199 du même livre lorsqu'elles portent sur l'existence de l'obligation de payer, le montant de la dette, l'exigibilité de la somme réclamée ou tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Toutefois, le tribunal de la procédure collective est, quelle que soit la nature des créances en cause, seul compétent pour connaître des contestations relatives à la mise en œuvre des règles propres à la procédure collective.

4. En premier lieu, Mme A... fait valoir à l'appui de ses conclusions en décharge de l'obligation de payer que la prescription des sommes mentionnées au point 1. est acquise depuis le 8 mai 2011, et à tout le moins depuis le 12 septembre 2017, que cette prescription a été reconnue par l'ordonnance du juge-commissaire en date du 25 septembre 2018, et que le comptable public a réduit sa créance à 93 211,74 euros à la date du 30 mars 2012 puis à néant à la date du 17 avril 2016. Ces moyens sont en tout état de cause sans influence sur l'exigibilité des sommes dues le 23 juin 2006, date de l'assignation en liquidation judiciaire délivrée à Mme A... et le 18 avril 2007, date de la déclaration de créances établie par le comptable du service des impôts des entreprises du 1er arrondissement de Paris. Une telle exigibilité ne saurait non plus être valablement contestée par le moyen relatif à l'assiette de l'impôt, tiré de ce que les cotisations litigieuses de taxe sur la valeur ajoutée auraient été établies à tort, non plus que par le moyen, dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé et la portée, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande en décharge de l'obligation de payer qui procéderait de l'assignation en liquidation judiciaire délivrée le 23 juin 2006 et de la déclaration de créances établie le 18 avril 2007, une telle demande ne peut qu'être rejetée.

5. En deuxième lieu, si Mme A... invoque des actes intervenus postérieurement à la prescription, qui serait selon elle acquise depuis le 12 septembre 2017, elle ne se prévaut d'aucune opposition à poursuite formée devant le comptable, dans les conditions et délais fixés à l'article R. 281-3-1 du livre des procédures fiscales. En outre, les actes invoqués, à savoir, d'une part, la procédure de vente forcée d'immeubles engagée le 11 mai 2018 par le liquidateur à la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 8 février 2007, qui constitue un acte propre à la procédure collective, d'autre part, la demande présentée le 11 septembre 2018 par l'administration fiscale devant le juge-commissaire dans le cadre de la procédure collective, laquelle ne constituait qu'un maintien de sa déclaration de créance du 18 avril 2007, en réponse à une demande de rejet de ladite créance présentée par Mme A... devant le juge commissaire, ne constituent pas des actes de poursuite du comptable.

6. Enfin, à supposer que Mme A... ait entendu solliciter la décharge de l'obligation de payer, en se prévalant d'une prescription acquise le 12 septembre 2017, sans former opposition contre un acte précis mais en invoquant, de manière particulièrement confuse, divers actes intervenus tout au long de la procédure collective, une telle demande est également irrecevable car sans objet faute d'être dirigée contre un acte de poursuite émis par le comptable à son encontre, comme le lui a déjà rappelé la Cour, dans une décision n° 17PA01911 du 29 novembre 2018, qui avait le même objet que la présente requête.

7. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par Mme A... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1918031/1-2 du 25 janvier 2021 du vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande de Mme A... présentée devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé

F. MAGNARDLe président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA01611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01611
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SCP GRV ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;21pa01611 ?
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