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14/06/2023 | FRANCE | N°21PA01381

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 14 juin 2023, 21PA01381


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 435 750 euros à titre de dommages et intérêts pour perte faite et manque à gagner ;

2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le tribunal ne s'estimerait pas compétent, de renvoyer le litige au Tribunal des conflits ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que

les entiers dépens, frais et débours mis à la charge de la liquidation judiciaire depuis le 8...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 435 750 euros à titre de dommages et intérêts pour perte faite et manque à gagner ;

2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le tribunal ne s'estimerait pas compétent, de renvoyer le litige au Tribunal des conflits ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens, frais et débours mis à la charge de la liquidation judiciaire depuis le 8 février 2007, date d'ouverture de la procédure collective.

Par un jugement n° 1904104/1-2 du 19 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 mars et 5 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Philippe Galland, demande à la Cour :

1°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 4 435 750 euros " à titre de dommages

et intérêts pour perte faite et manque à gagner qui sont les conséquences directes des agissements d'un agent du poste comptable " ;

2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le tribunal ne s'estimerait pas compétent, de renvoyer le litige au Tribunal des conflits ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance du 25 septembre 2018 est définitive ;

- le juge-commissaire s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal administratif pour se prononcer sur la demande en compensation et en dommages et intérêts ;

- dans la mesure où le juge-commissaire a désigné le juge administratif comme compétent pour statuer sur cette demande, on ne saurait opposer l'absence de réclamation préalable ;

- une demande préalable a été présentée le 16 mars 2021 ;

- elle a qualité pour agir ;

- la juridiction administrative est compétente pour apprécier l'absence de qualité à ester en justice du Comptable public ;

- la créance déclarée par le S.I.E. n'était pas fondée ;

- elle est fondée à présenter une demande en dommages et intérêts à l'encontre de l'administration ;

- un agent incompétent a engagé en 2006 une procédure devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ;

- les créances déclarées étaient contestées à la date du jugement d'ouverture, et l'étaient encore en 2017 ;

- des créances contestées ne peuvent pas être prises en compte pour déterminer un passif exigible en vue de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ;

- il n'est pas établi qu'elle se serait trouvée dans l'impossibilité de faire face à un passif exigible avec son actif disponible ;

- il existe un lien entre la faute invoquée et le préjudice consécutif à la sanction disciplinaire dont elle a fait l'objet ;

- ce préjudice s'élève à 4 435 750 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande est irrecevable en l'absence de demande préalable ;

- la requérante qui est en liquidation judiciaire n'a pas qualité pour agir ;

- les premiers juges n'étaient pas tenus de saisir le Tribunal des conflits ;

- la demande est présentée devant une juridiction incompétente pour en connaitre ;

- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 27 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., qui exerçait une activité professionnelle d'avocat, et demeurait redevable envers le Trésor de diverses impositions, a été assignée en liquidation judiciaire le 23 juin 2006 par le comptable public chargé du recouvrement de ces impositions. Par un jugement en date du 8 février 2007, le tribunal de grande instance de Paris a ouvert la procédure de liquidation judiciaire à son encontre. Le 18 avril 2017, le comptable public a déclaré sa créance au passif de la procédure collective pour un montant de 441 986,24 euros. Mme A..., qui estime que le comptable public a commis, dans ce cadre, une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 435 750 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi.

2. Le juge compétent pour statuer sur les contestations relatives à un impôt est en principe également compétent pour connaître des actions en responsabilité relatives à cet impôt. Dans le cas où la faute imputée à l'administration fiscale a pour origine l'engagement de l'action en recouvrement forcé d'un impôt sur le revenu en déclarant prématurément une créance au passif d'un redevable en redressement judiciaire, le juge administratif est compétent, la contestation n'étant pas née de la procédure collective ni soumise à son influence juridique.

3. Mme A... recherche la responsabilité de l'Etat en soutenant que le comptable public aurait commis une faute en engageant une procédure de redressement judiciaire à son encontre devant le tribunal de grande instance de Paris pour le recouvrement d'une dette fiscale de taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, la demande de Mme A... relève de la compétence de la juridiction administrative.

4. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ".

5. Il ne résulte pas de l'instruction que les conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Paris et tendant à la condamnation de l'Etat à la réparation du préjudice subi et procédant des fautes qui auraient été commises par l'administration chargée du recouvrement de l'impôt aient été précédées d'une demande préalable adressée à l'administration. Les conclusions présentées à cet effet lors de l'audience du 20 mars 2018 devant le juge commissaire ne sauraient être regardées comme une telle demande. Contrairement à ce qui est soutenu, l'existence d'une demande en date du 16 mars 2021, postérieure au jugement attaqué, n'est pas de nature à faire obstacle à l'irrecevabilité de la demande présentée devant les premiers juges. Contrairement à ce qui est également soutenu, la circonstance que le juge commissaire, dans son ordonnance du 25 septembre 2018, ait estimé le juge administratif compétent pour statuer sur la demande indemnitaire qui lui était soumise ne dispensait pas Mme A... de respecter les règles de procédure rappelées au point 4. et d'adresser à l'administration une demande préalable. Il suit de là que les conclusions indemnitaires présentées devant le Tribunal administratif de Paris étaient irrecevables.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé

F. MAGNARDLe président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 21PA01381


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01381
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SCP GRV ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;21pa01381 ?
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