Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a mis en demeure les occupants illégalement installés sur le stade communal rue Jean des Barres à Oissery de quitter les lieux dans un délai de quarante-huit heures.
Par un jugement n° 2205764 du 14 juin 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 juin 2022 et 27 février 2023, MM. A..., représentés par Me Candon, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 7 juin 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'arrêté du président de la communauté de communes Plaines et Monts de France du 22 août 2017 prescrivant l'interdiction du stationnement des gens du voyage est illégal dès lors que la communauté de communes ne s'était pas conformée à ses obligations en matière de création d'aires d'accueil des gens du voyage à la date de son édiction ;
- l'arrêté du 7 juin 2022 est illégal dès lors que la communauté de communes ne respecte pas ses obligations en termes d'accueil ;
- il méconnait les dispositions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000, en l'absence d'atteinte à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publique ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'insuffisance du délai qui leur a été octroyé pour quitter les lieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 janvier 2023, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés et qu'au surplus la commune d'Oissery pouvait bénéficier du concours de la force publique quand bien même la communauté de communes Plaines et Monts de France ne respecterait pas ses obligations en matière d'aires d'accueil des gens du voyage.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Saint-Macary,
- et les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de l'installation, le 3 juin 2022, de 24 véhicules et 29 caravanes sur un terrain de football situé rue Jean des Barres, à Oissery, le maire de la commune et le président de la communauté de communes Plaines et Monts de France ont sollicité, respectivement les 4 et 7 juin 2022, l'intervention du préfet de Seine-et-Marne. Par un arrêté du 7 juin 2022, le préfet de Seine-et-Marne a pris un arrêté mettant en demeure les occupants du terrain de football de quitter les lieux dans un délai de 48 heures. MM. A... relèvent appel du jugement du 14 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. D'une part, aux termes du II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage : " Dans chaque département, (...) un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation et les communes où doivent être réalisés : / 1° Des aires permanentes d'accueil, ainsi que leur capacité ; / 2° Des terrains familiaux locatifs aménagés (...). / Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental (...) ". Aux termes du I de l'article 2 de la même loi : " A. Les communes figurant au schéma départemental et les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de création, d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l'article 1er sont tenus, dans un délai de deux ans suivant la publication de ce schéma, de participer à sa mise en œuvre. / B. (...) L'établissement public de coopération intercommunale compétent remplit ses obligations en créant, en aménageant, en entretenant et en assurant la gestion des aires et terrains dont le schéma départemental a prévu la réalisation sur son territoire (...) / L'établissement public de coopération intercommunale compétent peut également remplir ses obligations en contribuant au financement de la création, de l'aménagement, de l'entretien et de la gestion d'aires ou de terrains situés hors de son territoire (...). / III. - Le délai de deux ans prévu au I est prorogé de deux ans, à compter de sa date d'expiration, lorsque la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale a manifesté, dans ce délai, la volonté de se conformer à ses obligations (...) ". Aux termes de l'article 9 de cette même loi : " I.- Le maire d'une commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de création, d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l'article 1er peut, par arrêté, interdire en dehors de ces aires et terrains le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées au même article 1er, dès lors que l'une des conditions suivantes est remplie : / 1° L'établissement public de coopération intercommunale a satisfait aux obligations qui lui incombent en application de l'article 2 (...) / 5° L'établissement public de coopération intercommunale a décidé, sans y être tenu, de contribuer au financement d'une telle aire ou de tels terrains sur le territoire d'un autre établissement public de coopération intercommunale (...). / II.- En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I ou au I bis, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. / La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques (...) ". Enfin, aux termes de l'article 9-1 de cette loi : " Dans les communes non inscrites au schéma départemental et non mentionnées à l'article 9, le préfet peut mettre en œuvre la procédure de mise en demeure et d'évacuation prévue au II du même article, à la demande du maire, du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain, en vue de mettre fin au stationnement non autorisé de résidences mobiles de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques (...) ".
3. D'autre part, aux termes du A du I de l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales : " (...) Par dérogation à l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière de réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, les maires des communes membres de celui-ci transfèrent au président de cet établissement leurs attributions dans ce domaine de compétences (...) ".
4. En premier lieu, la commune d'Oissery est membre de la communauté de communes Plaines et Monts de France, qui est compétente en matière de création, d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs. Il ressort des pièces du dossier qu'alors que le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage de Seine-et-Marne, publié le 20 juillet 2020, prévoit, pour la période 2020-2026, la présence, sur le territoire de cet établissement de coopération intercommunale, de vingt places d'aire d'accueil, aucune de ces places n'avait été créée au 1er juin 2021. Il n'est pas contesté par le préfet de Seine-et-Marne qu'elles n'avaient toujours pas été créées à la date de son arrêté du 7 juin 2022. Si le préfet fait valoir que la communauté de communes devait être regardée comme ayant satisfait aux obligations du schéma jusqu'au 20 juillet 2024 dès lors qu'elle bénéficiait des délais de deux ans prévus aux A du I et au III de l'article 2 de la loi du 5 juillet 2000, il ressort des pièces du dossier que les obligations fixées par le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage de Seine-et-Marne pour la période 2020-2026 figuraient déjà au précédent schéma couvrant la période 2013-2019 et ne pouvaient ainsi bénéficier, à nouveau, des délais prévus aux A du I et au III de l'article 2 de la loi du 5 juillet 2000. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas allégué que la communauté de communes Plaines et Monts de France contribue au financement d'aires ou de terrains sur le territoire d'un autre établissement de coopération intercommunale. Dans ces conditions, l'arrêté du 22 août 2017 par lequel le président de la communauté de communes Plaines et Monts de France a interdit le stationnement des caravanes et des résidences mobiles sur le territoire de la communauté de communes en dehors des terrains de camping et de caravanage et des aires d'accueil des gens du voyage était illégal à la date de l'arrêté contesté du préfet de Seine-et-Marne.
5. Il résulte toutefois des travaux préparatoires de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et de la loi du 7 novembre 2018 relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites que le législateur a entendu faire bénéficier de la procédure d'évacuation forcée par décision du préfet prévue au II de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 les communes de moins de 5 000 habitants non inscrites au schéma départemental d'accueil des gens du voyage et n'entrant dans aucun des cas permettant de prendre un arrêté interdisant sur leur territoire le stationnement en dehors des aires ou terrains prévus à cet effet.
6. Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Oissery, qui comprend moins de 5 000 habitants et n'est pas inscrite au schéma départemental d'accueil et d'habitat de Seine-et-Marne, n'est pas assujettie à l'obligation de réaliser des aires d'accueil des gens du voyage. Elle ne figure en outre dans aucun des cas mentionnés au 1° à 6° du I et 1° à 5° du I bis de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000. Dès lors, le préfet de Seine-et-Marne pouvait, en vertu des dispositions de l'article 9-1 de cette loi, prendre, sur le fondement du II de l'article 9 de cette même loi, la mise en demeure contestée, sans qu'y fasse obstacle l'illégalité de l'arrêté du 22 août 2017. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'illégalité de l'arrêté du 22 août 2017 et de ce que la communauté de communes Plaines et Monts de France ne respectait pas ses obligations à la date de l'arrêté contesté sont inopérants et doivent, par suite, être écartés.
7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies produites par MM. A... devant le tribunal, que les occupants du terrain de football alimentent leurs véhicules en électricité à partir de l'armoire électrique du centre de loisirs, au moyen de relais et de câbles posés à même le sol, gazonné et donc particulièrement inflammable. Le procès-verbal de renseignement administratif dressé par les services de gendarmerie le 7 juin 2022 souligne, à cet égard, des risques pour la sécurité. En outre, le campement, installé à proximité d'un groupe scolaire accueillant de jeunes élèves de maternelle et de primaire, alors que l'année scolaire n'était pas achevée, était de nature à porter atteinte à la tranquillité des élèves. Dans ces conditions, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas fait une inexacte application des dispositions du II de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 en prenant l'arrêté contesté.
8. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'occupation illicite du terrain de football de la commune d'Oissery était de nature à porter atteinte à la sécurité et à la tranquillité publiques. Les requérants ne font par ailleurs valoir aucune circonstance particulière qui aurait justifié qu'un délai supérieur à 48 heures leur soit accordé pour quitter les lieux. Il ressort en outre des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, 62 places de stationnement étaient disponibles dans le département de Seine-et-Marne. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le délai de 48 heures qui leur a été imparti est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que MM. A... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté leur demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de MM. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MM. C... et B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Briançon, présidente,
Mme d'Argenlieu, première conseillère,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2023.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
C. BRIANÇON
La greffière,
V. BREME
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22PA02755