Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2022 par lequel le préfet de police a refusé le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " salarié ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.
Par un jugement n° 2201766 du 25 mars 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 avril et 6 juillet 2022, M. B... A..., représenté par Me Atger, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2201766 du 25 mars 2022 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente un récépissé portant autorisation de travail le temps du réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet commis a une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire le français :
- elle est illégale par voie d'exception, dès lors que la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est elle-même illégale ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale par voie d'exception, dès lors que les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont elles-mêmes illégales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Gobeill a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., né le 16 octobre 1980, de nationalité marocaine, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 3 janvier 2022, le préfet de police lui a refusé la délivrance du titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office. M. A... relève appel du jugement du 25 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de renouvellement du titre de séjour :
2. En premier lieu, la circonstance que les premiers juges aient procédé à une substitution de base légale n'est pas de nature à entacher la décision attaquée d'un défaut de motivation, celle-ci énonçant l'ensemble des éléments de fait qui ont conduit le préfet de police, à qui il ne revenait pas de faire état de l'intégralité des éléments factuels relatifs à la situation du requérant, à prendre une telle décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la décision attaquée qui, ainsi qu'il a été dit, est suffisamment motivée, que le préfet de police ne se serait pas livré à un examen personnalisé de la situation de l'intéressé.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord ". Aux termes de l'article R. 5221-32 du code du travail : " Le renouvellement d'une autorisation de travail mentionnée au I de l'article R. 5221-1 est sollicité dans le courant du deuxième mois précédant son expiration. La demande de renouvellement est accompagnée de documents dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'immigration et du travail. L'autorisation de travail est renouvelée dans la limite de la durée du contrat de travail restant à courir ou de la mission restant à accomplir en France ". Aux termes de l'article L. 114-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une demande est adressée à une administration incompétente, cette dernière la transmet à l'administration compétente et en avise l'intéressé ".
5. Il ressort de ces dispositions que l'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en œuvre. Ainsi, en imposant la production d'une autorisation de travail, l'article 3 cité ci-dessus doit être regardé comme renvoyant aux dispositions de l'article R. 5221-32 du code du travail.
6. Si M. A... fait valoir qu'en vertu de l'article 3 de l'accord franco-marocain, le renouvellement de son titre de séjour " salarié " lui revenait de plein droit, il résulte toutefois des stipulations et dispositions précitées que l'octroi d'un titre de séjour implique la production d'une autorisation de travail, dont le renouvellement n'est pas de droit. Il en résulte que M. A..., qui reconnait du reste dans ses écritures que sa première autorisation de travail délivrée le 6 juillet 2020 n'était accordée que pour la durée de validité de son titre de séjour, était ainsi tenu, à l'échéance de ce dernier, de produire une nouvelle autorisation de travail en remplacement de celle-ci devenue caduque. S'il fait valoir que la demande de production de ladite autorisation, sollicitée par les services préfectoraux, a été adressée à une adresse électronique erronée et qu'il y a eu une confusion sur l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation de travail, ces circonstances sont en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision dès lors qu'il n'était pas titulaire de l'autorisation de travail qu'il était tenu de produire.
7. En quatrième lieu, M. A... soutient que c'est à tort que les premiers juges ont relevé comme étant sans incidence sur la légalité de la décision attaquée la circonstance que le préfet de police a énoncé que le requérant n'a jamais travaillé pour la société Omicrone et qu'il a produit un nouveau contrat de travail. A supposer même établies ces erreurs de fait, le préfet de police a retenu que M. A... n'a pas produit d'autorisation de travail en cours de validité et ce motif suffisait à fonder légalement la décision. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur de fait de nature à entacher la légalité de la décision attaquée.
8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. En l'espèce, si M. A... établit sa présence en France depuis son arrivée en 2007, il était bénéficiaire de titres de séjour en qualité d'étudiant ce qui ne lui donnait pas vocation à se maintenir sur le territoire français où il est célibataire et sans charge de famille alors qu'il conserve des attaches familiales dans son pays d'origine où l'ensemble de sa famille réside et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 27 ans. En dépit des attestations produites, son insertion professionnelle est récente. Dès lors, la décision attaquée ne méconnaît pas son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Il ne résulte pas de ce qui précède que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour n'étant pas entachée des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité ne peut, par voie de conséquence, qu'être écarté.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " (...) Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour (...) ".
13. Il résulte de ces dispositions que l'obligation faite à un étranger de quitter le territoire français n'a pas à comporter une motivation spécifique distincte de celle du refus de titre de séjour sur lequel elle se fonde si ce dernier est suffisamment motivé. Celui-ci étant suffisamment motivé ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision d'éloignement n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte. Il ne ressort pas des pièces du dossier, par ailleurs, et comme il a déjà été dit, que le préfet de police n'aurait pas examiné la situation personnelle de M. A.... Dès lors les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen de sa situation personnelle doivent être écartés.
14. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 9 du présent arrêt, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
15. Il ne résulte pas de ce qui précède que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
16. Les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, n'étant entachées d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.
17. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
18. L'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à sa charge les sommes demandées par M. A... au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juin 2023.
Le rapporteur, Le président,
J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22PA01893