Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bonin, avocat de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Le 22 décembre 2014, Mme C... a subi à l'hôpital Henri-Mondor une laminectomie cervicale C3-C7 afin de traiter une myélopathie cervicarthrosique. Les suites immédiates de l'intervention chirurgicale ont été marquées par l'apparition d'une tétraplégie et l'IRM post-opératoire réalisée en urgence a confirmé l'existence d'une compression de la moelle épinière au niveau de la vertèbre C2. Six heures après la première opération, Mme C... a subi une nouvelle intervention chirurgicale afin de compléter la laminectomie au niveau de la vertèbre C2. Malgré les soins et la rééducation dont l'intéressée a bénéficié, elle est restée atteinte d'une tétraparésie spastique sévère. Le 5 octobre 2015, Mme C... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France qui a ordonné une expertise médicale le 28 avril 2016. Le professeur A..., désigné en qualité d'expert, a rendu son rapport le 27 octobre 2016. La commission de conciliation et d'indemnisation a rendu un avis le 16 février 2017 aux termes duquel il incombait à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) de réparer l'entier préjudice de Mme C.... Le 26 juillet 2017, l'AP-HP a proposé à l'intéressée une indemnisation à hauteur de 63 214,20 euros, en retenant que sa faute n'était à l'origine que d'une perte de chance de 25 % d'éviter le dommage. Mme C... a refusé cette offre.
2. Par une ordonnance du 6 septembre 2018, le juge du référé provision du Tribunal administratif de Melun, saisi par Mme C..., a condamné l'AP-HP à lui verser une somme de 168 750 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Val-de-Marne une somme de 182 619,86 euros au titre de ses débours. Par un arrêt du 20 juin 2019, la Cour a rejeté l'appel formé par l'AP-HP contre cette ordonnance en l'absence de contestation sérieuse de la créance de Mme C... ainsi que l'appel incident de cette dernière et la demande de la CPAM du Val-de-Marne.
3. Par un jugement du 6 novembre 2020, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'AP-HP à verser à Mme C... la somme de 818 939 euros, avant déduction de la provision déjà versée de 168 750 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2017 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 8 août 2019, à lui rembourser, sur présentation de trois devis puis sur facture, les frais d'aménagement de son logement dans la limite de 15 000 euros et à rembourser à la CPAM du Val-de-Marne la somme de 182 619,86 euros, avant déduction de la provision du même montant déjà versée, ainsi que les frais futurs engagés pour le compte de Mme C... sur justificatif. L'AP-HP relève appel de ce jugement. Mme C... demande à la Cour, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce jugement en tant qu'il a limité le montant de la condamnation de l'AP-HP à la somme de 818 939 euros. L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) demande à la Cour de prononcer sa mise hors de cause. Par un arrêt avant dire droit du 22 décembre 2021, la Cour a écarté les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué et de l'omission à répondre aux moyens invoqués en défense et a sursis à statuer sur les conclusions des parties dans l'attente de la nouvelle expertise qu'elle a diligentée. Le professeur B..., expert désigné, a déposé son rapport le 16 juin 2022.
Sur la régularité de l'expertise :
4. La circonstance que dans son rapport, l'expert ne retienne pas le nombre d'heures au titre de l'assistance par une tierce personne après consolidation de l'état de santé de Mme C... qu'il aurait retenu devant les parties lors de la réunion du 13 juin 2022 n'entache pas d'irrégularité l'expertise dès lors que les parties ont été mises à même de discuter de ce poste de préjudice. En outre, il ressort du rapport d'expertise et il n'est pas contesté que les opérations d'expertise se sont déroulées de manière contradictoire. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire lors des opérations d'expertise doit être écarté.
5. En soutenant que le rapport d'expertise est entaché de contradiction et d'insuffisances quant à l'évaluation du poste de préjudice tenant à l'assistance par une tierce personne après consolidation de son état de santé, Mme C... doit être regardée comme critiquant les conclusions de l'expert. De telles critiques portent sur le fond du litige et non sur la régularité de l'expertise.
6. Il résulte des points 4 à 5 que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'expertise serait entachée d'irrégularité.
Sur la responsabilité de l'AP-HP :
7. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
8. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise du professeur A... et du professeur B..., que Mme C... présentait une myélopathie cervicarthrosique caractérisée par une compression médullaire cervicale importante du bord inférieur de la vertèbre cervicale C2 à la vertèbre cervicale C6 associée à une calcification, épaisse et étendue, du ligament vertébral commun postérieur. Or, une telle calcification, peu commune chez les patients souffrant de myélopathie cervicarthrosique en Europe, présente un facteur de risque particulier qui impose de réaliser, dans le cadre d'une prise en charge chirurgicale, une laminectomie cervicale plus étendue que dans le cas d'une myélopathie par arthrose classique, comprenant ainsi un geste chirurgical de décompression complémentaire qui doit être effectué au niveau au dessus et au niveau en dessous des limites de la calcification. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise, que si le geste chirurgical a été adapté dans sa technique lors de l'intervention chirurgicale du 22 décembre 2014, il a toutefois été réalisé de manière incomplète en ne portant que sur les niveaux de C3 à C6 alors que, dans le cas très particulier de Mme C..., il aurait dû s'étendre au niveau C2C3. Dans ces conditions, en n'effectuant pas dès la première intervention chirurgicale une laminectomie cervicale jusqu'au niveau C2, le chirurgien a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'AP-HP, ce qui n'est au demeurant pas contesté par l'AP-HP.
9. L'AP-HP soutient, dans le dernier état de ses écritures, que le retard de décompression du niveau C2C3 ne peut être regardé comme la cause directe et exclusive de la survenue de l'œdème médullaire, lequel, ainsi que l'a relevé le professeur A..., survient selon une incidence de l'ordre de 3 % dans le groupe des myélopathiques cerviarthrosiques avec ossification ligamentaire étagée, c'est-à-dire dans le cas de Mme C..., et que par suite le taux de perte de chance pour celle-ci d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation ne saurait excéder 50 %.
10. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis les chances du patient d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
11. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur B..., que dans le cas d'une myélopathie cervicarthrosique associée à une ossification du ligament vertébral commun postérieur, il convient, dans le cadre d'une laminectomie cervicale, de pratiquer un geste chirurgical de décompression médullaire cervicale complémentaire effectué au niveau au dessus et au niveau en dessous des limites de la calcification afin d'éviter un effet classique de tension du cordon médullaire lors de la décompression. Or, il ressort des rapports d'expertise que l'IRM réalisée en urgence à la suite de la première intervention montre une compression médullaire très importante en C2C3, c'est-à-dire immédiatement au dessous de la jonction C2C3, qui aurait dû être d'emblée décomprimée, du fait d'une poussée d'œdème médullaire avec infarcissement médullaire. Le professeur B... relève expressément que " le geste mené l'a été de façon adaptée dans sa technique, mais n'a intéressé selon le compte rendu opératoire que les niveaux de C3 à C6. En post-opératoire immédiat il a été constaté une tétraplégie imposant une IRM en urgence constatant la persistance d'une compression médullaire avec souffrance médullaire en partie haute de la laminectomie, en regard de C2 et du niveau C2C3 incomplètement décomprimé : ce geste réalisé de façon incomplète au niveau C2C3 est à l'origine de la décompensation neurologique observée, qui, dès sa constatation, sera prise en charge de façon adaptée, ce qui ne permettra toutefois pas une récupération complète ". Il en déduit que " la libération du fourreau médullaire par laminectomie a été trop limitée en partie haute du rachis ; il était attendu une libération effective allant du niveau C2 à C7 ce qui n'a pas été le cas : la décompensation médullaire observée (avec œdème et souffrance médullaire) est liée pour partie à l'insuffisance de décompression ". Dans ces conditions, la compression médullaire, qui a causé les troubles dont Mme C... a été atteinte immédiatement et que la réintervention d'urgence n'a pu permettre la récupération, est la conséquence directe de la faute commise. Il s'ensuit que la responsabilité de l'AP-HP se trouve engagée à raison de la totalité du dommage corporel et que dès lors ne peut être retenue la déduction du professeur B... selon laquelle " l'ensemble de ces manquements peut être assimilé à une perte de chance d'éviter une complication inhérente à cette chirurgie, cette perte de chance pouvant être proposée à hauteur de 50 % responsable de l'évolution clinique observée à appliquer à l'ensemble des postes de préjudice ". En effet l'erreur commise au cours de la première intervention a causé le dommage de la patiente, lequel n'aurait pas été provoqué, comme l'a précisé l'expert, par un geste chirurgical de décompression médullaire cervicale complémentaire effectué au niveau au dessus et au niveau en dessous des limites de la calcification afin d'éviter un effet classique de tension du cordon médullaire lors de la décompression. Ainsi, la faute commise est à l'origine du dommage lui-même et n'a pas compromis les chances du patient d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation. Par suite, il n'y a pas lieu de retenir que le préjudice de Mme C... résulte d'une perte de chance d'éviter que le dommage soit advenu.
Sur l'évaluation des préjudices de Mme C... :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires :
Quant aux frais d'assistance par une tierce personne avant consolidation :
12. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise, que Mme C..., qui présente une tétraparésie spastique sévère du fait de la faute commise lors de l'intervention chirurgicale du 22 décembre 2014, est dépendante de l'aide d'une tierce personne pour tous les actes de la vie quotidienne, ne pouvant notamment plus utiliser sa main droite alors qu'elle est droitière, ni se lever ou s'alimenter seule. Pour la période comprise entre sa sortie de l'hôpital le 6 novembre 2015 et la date de consolidation de son état de santé fixée au 22 décembre 2016 par le professeur B..., le besoin d'assistance par une aide-soignante a été évalué par ce dernier à deux heures par jour et l'aide par une tierce personne non spécialisée à six heures par jour. Il convient de soustraire de cette période 18 jours pendant lesquels l'intéressée a été hospitalisée, soit 15 jours correspondant à une hospitalisation de trois jours par semaine pendant cinq semaines sur la période du 6 novembre au 8 décembre 2015 et 3 jours d'hospitalisation du 8 au 10 décembre 2015 en raison d'une infection urinaire en lien avec la faute imputable à l'AP-HP. Par suite, la période à prendre en considération, réévaluée pour tenir compte des congés payés et des jours fériés sur une base annuelle de 412 jours, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du mode d'assistance choisi par l'intéressée, est de 445 jours.
13. Le coût de l'assistance par une tierce personne spécialisée deux heures par jour au domicile de Mme C... doit être calculé, ainsi qu'il vient d'être dit sur une période de 445 jours, sur la base d'un prix horaire de 20 euros comme demandé par l'intéressée. Il s'ensuit que le coût de l'assistance par une tierce personne spécialisée s'élève à 17 800 euros.
14. L'aide par une tierce personne non spécialisée s'élevant à six heures par jour, le nombre total d'heures à retenir pour la période de 445 jours est de 2 670 heures. Il résulte des factures établies par la société d'aide et de soins à domicile que pour la période comprise entre novembre 2015 et décembre 2016, Mme C... a bénéficié d'une aide à domicile financée par le conseil départemental du Val-de-Marne à hauteur de 1 248 heures qui doivent être déduites du nombre d'heures à indemniser. Il s'ensuit que la requérante est fondée à solliciter l'indemnisation de 1 422 heures. Il ressort de ces mêmes factures que Mme C... s'est également acquittée de la somme de 70,19 euros correspondant à environ 4 heures d'aide à domicile au remboursement de laquelle elle a droit. En revanche, il n'y pas lieu de mettre à la charge de l'AP-HP les pénalités de retard retenues à son encontre par la société d'aide et de soins à domicile qui ne sont pas en lien direct avec la faute imputable à l'AP-HP. Par ailleurs, l'indemnisation des 1 418 heures d'aide non spécialisée restantes s'élève, après application d'un taux horaire de 18 euros, à 25 524 euros. Par suite, l'indemnité globale au titre de l'aide par une tierce personne non spécialisée s'élève à 25 594,19 euros.
15. Il résulte des points 12 à 14 que l'indemnité totale due au titre de l'assistance par une tierce personne avant consolidation s'élève à 43 394,19 euros. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité la somme perçue par l'intéressée au titre de l'allocation aux adultes handicapés. Par suite, il y a lieu de porter à 43 394,19 euros le montant alloué à ce titre par les premiers juges.
Quant aux pertes de gains professionnels actuels :
16. Il ressort des bulletins de salaire versés au dossier que Mme C... exerçait depuis le 25 août 2011 l'activité d'agent de service. Elle a été placée en arrêt maladie en août et septembre 2014 du fait de la myélopathie cervicarthrosique avant de travailler à nouveau en octobre 2014. Elle soutient que postérieurement à octobre 2014, elle a été contrainte d'interrompre son activité professionnelle en raison des symptômes de la myélopathie cervicarthrosique. Le professeur A... a estimé qu'en l'absence de complication, elle n'aurait pas pu en tout état de cause reprendre son activité professionnelle de femme de ménage. Selon le professeur B..., elle aurait pu au contraire, si elle n'avait pas été victime de la faute médicale, reprendre son activité professionnelle sous réserve de l'adaptation de son poste de travail et l'exemption du port de charges lourdes. Aucune pièce émanant notamment de l'ancien employeur de Mme C... n'est cependant versée aux débats permettant d'étayer les propos de l'expert judiciaire. En tout état de cause, à supposer même que l'intéressée aurait pu en l'absence de complication poursuivre son activité professionnelle un mois après l'intervention chirurgicale du 22 décembre 2014, il ressort de ses bulletins de salaire au titre de 2013, dès lors qu'il n'est pas soutenu qu'elle aurait été placée en arrêt maladie du fait de sa myélopathie cervicarthrosique pendant cette année, que le salaire mensuel moyen perçu était de 595,82 euros. Or, le montant de l'allocation aux adultes handicapés sur la période comprise entre mars 2015 et décembre 2016 a été de 800,45 euros avant d'être revalorisé à 807,65 euros puis à 808,46 euros, c'est-à-dire un montant supérieur au salaire moyen que percevait Mme C.... Dans ces conditions, et à supposer même qu'elle aurait perçu le même salaire pour un poste de travail adapté à son état de santé que celui qu'elle percevait avant l'opération, elle ne justifie pas avoir subi une perte de revenus pendant la période de février 2015 à la date de consolidation de son état de santé fixée au 22 décembre 2016. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnité au titre des pertes de gains professionnels actuels.
S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents :
Quant aux frais d'assistance par une tierce personne :
17. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'état de santé de Mme C... justifie l'assistance par une tierce personne non spécialisée à raison de six heures par jour à compter de la date de consolidation de son état de santé fixée, comme il a été dit au point 12, au 22 décembre 2016. La période comprise entre cette date et le 24 mai 2023, date de mise à disposition du présent arrêt, correspond à un total de 2 326 jours. Il s'ensuit que la période à prendre en considération, réévaluée pour tenir compte des congés payés et des jours fériés sur une base annuelle de 412 jours, est de 2 626 jours. L'aide par une tierce personne non spécialisée s'élevant à six heures par jour ainsi qu'il a été dit, le nombre total d'heures à retenir pour la période de 2 626 jours est de 15 756 heures.
18. Il résulte des factures établies par la société d'aide et soins à domicile que pour la période comprise entre janvier 2017 et janvier 2023, Mme C... a bénéficié d'une aide à domicile financée par le conseil départemental du Val-de-Marne à hauteur de 4 847 heures. Les factures de février à mai 2023 n'ayant pas été versées au dossier, il y a lieu de faire une moyenne des heures prises en charge mensuellement par le conseil départemental du Val-de-Marne au titre de la même période en 2021 et 2022, c'est-à-dire respectivement 152 et 116 heures, soit une moyenne de 134 heures. Par suite, un total de 4 981 heures doit être déduit du nombre de 15 756 heures à indemniser au titre de l'assistance par une tierce personne. Il s'ensuit que Mme C... est fondée à solliciter l'indemnisation de 10 775 heures.
19. Mme C..., qui s'est acquittée pour la période en cause, ainsi que l'établissent ces mêmes factures, de 7 261,85 euros correspondant à 331 heures d'aide à domicile, a droit au remboursement de cette somme. Dès lors, l'indemnisation de l'aide non spécialisée pour les 10 444 heures restantes s'élève, après application d'un taux horaire de 18 euros, à 187 992 euros. Par suite, l'indemnité globale au titre de l'aide par une tierce personne non spécialisée doit être évaluée au total à 195 253,85 euros.
20. En second lieu, pour la période courant à partir de la date de mise à disposition du présent arrêt, l'AP-HP devra verser à Mme C..., en application d'un taux horaire de 20 euros, une rente trimestrielle d'un montant de 12 360 euros indemnisant l'assistance d'une tierce personne pour les gestes de la vie quotidienne à raison de 6 heures par jour, calculée sur une année de 412 jours, correspondant à des trimestres de 103 jours chacun. Cette rente sera revalorisée annuellement en appliquant les coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et sera, le cas échéant, diminuée de la prestation de compensation du handicap et des aides de même nature perçues et qu'il appartiendra à l'intéressée de porter à la connaissance de l'AP-HP.
Quant aux pertes de gains professionnels futurs :
21. A supposer même que Mme C... aurait pu poursuivre son activité professionnelle sur un poste adapté, il ne résulte pas de l'instruction, notamment de ses bulletins de salaires au titre de 2013 et 2014, et égard aux montants de l'allocation aux adultes handicapés et du complément de ressources perçus par Mme C... durant la période en cause, qu'elle aurait subi une perte de revenus à compter du 22 décembre 2016, date de consolidation de son état de santé. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnité au titre des pertes de gains professionnels futurs.
Quant à l'incidence professionnelle :
22. Il résulte de l'instruction ainsi que l'ont relevé les premiers juges que le handicap dont souffre Mme C... limite considérablement ses possibilités de reconversion professionnelle. Dans ces conditions, les premiers juges ont fait une juste réparation du préjudice d'incidence professionnelle en l'évaluant à la somme de 10 000 euros.
En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :
S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux temporaires :
Quant au déficit fonctionnel temporaire :
23. Il résulte de l'instruction qu'il convient de déduire de la période de déficit fonctionnel temporaire présenté par Mme C... en lien avec la faute imputable à l'AP-HP, la période de déficit fonctionnel temporaire qui aurait en tout état de cause résulté de l'intervention chirurgicale du 22 décembre 2014, c'est-à-dire selon le professeur B... un déficit fonctionnel temporaire total de dix jours, un déficit fonctionnel temporaire de 25 % pendant trois mois et un déficit fonctionnel temporaire de 10 % pendant une même période de trois mois. Il ressort ainsi des rapports d'expertise que, du fait de la faute commise lors de l'intervention chirurgicale du 22 décembre 2014, Mme C... a présenté un déficit fonctionnel temporaire total de 11 mois et 14 jours, comprenant notamment les trois jours d'hospitalisation par semaine pendant la période du 6 novembre au 8 décembre 2015, un déficit fonctionnel temporaire de 85 % pendant 5 mois et 20 jours, de 75 % pendant trois mois puis de 60 % pendant encore trois mois. Il sera fait une juste appréciation du préjudice fonctionnel temporaire total et partiel de l'intéressée en l'évaluant à la somme totale de 10 200 euros. Par suite, il y a lieu de porter à ce montant les sommes allouées à ce titre par les premiers juges.
Quant aux souffrances endurées :
24. Il ressort des rapports d'expertise que les souffrances endurées par Mme C... ont été évaluées à 6 sur une échelle de 7. Dans ces conditions, en fixant à 27 000 euros le préjudice correspondant aux souffrances endurées, les premiers juges ont fait une juste évaluation du préjudice subi.
Quant au préjudice esthétique temporaire :
25. Il résulte de l'instruction que Mme C... présente une spasticité et un déficit moteur des membres supérieurs et inférieurs et doit utiliser un fauteuil roulant. Il sera fait une juste appréciation du préjudice esthétique temporaire de l'intéressée en l'évaluant à 8 000 euros.
S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux permanents :
Quant au déficit fonctionnel permanent :
26. Il résulte de l'instruction que Mme C... présente une spasticité et un déficit moteur des membres supérieurs et inférieurs l'obligeant notamment à utiliser un fauteuil roulant. Elle ne peut plus utiliser sa main droite alors qu'elle est droitière et ne peut ni s'alimenter, ni se lever seule. Les experts ont évalué le déficit fonctionnel permanent dont elle est atteinte du fait de la faute imputable à l'AP-HP respectivement à 60 % et 65 %. Au vu des éléments ci-dessus mentionnés, il y a lieu de fixer le taux de déficit fonctionnel permanent à 65 %. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme C... en l'évaluant à 155 200 euros et par suite il y a lieu de porter à ce montant la somme allouée à ce titre par les premiers juges.
Quant au préjudice esthétique permanent :
27. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a déjà été dit, que Mme C... présente une spasticité et un déficit moteur des membres supérieurs et inférieurs et doit utiliser un fauteuil roulant. Les experts ont évalué son préjudice esthétique permanent à 4/7. Au vu de ces éléments, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 15 000 euros.
Quant au préjudice d'agrément :
28. Mme C... se prévaut, au titre du préjudice d'agrément, de ce que sa perte d'autonomie et l'impossibilité de se déplacer seule ont conduit à la disparition de toute activité sociale, physique et de loisir et à l'impossibilité de voyager. Toutefois, ces éléments ne sont pas de nature à établir l'existence d'un préjudice d'agrément distinct de celui déjà indemnisé au titre du déficit fonctionnel permanent. Dans ces conditions, et même si les experts ont estimé que Mme C... subissait un préjudice d'agrément majeur et que dans sa proposition d'indemnisation du 26 juillet 2017, l'AP-HP avait proposé une indemnité de 8 000 euros à ce titre, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnité au titre du préjudice d'agrément.
Quant au préjudice sexuel :
29. Il résulte de l'instruction que Mme C..., qui est mariée, subit un préjudice sexuel important du fait de la nature de son handicap. Compte tenu de son âge, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 10 000 euros.
30. Il résulte des points 12 à 29 que l'AP-HP est condamnée à verser à Mme C... d'une part la somme de 474 048,04 euros, sur laquelle doit s'imputer la provision déjà versée de 168 750 euros, et d'autre part une rente trimestrielle d'un montant de 12 360 euros dans les conditions fixées au point 20.
Sur la capitalisation des intérêts :
31. En se bornant à solliciter la capitalisation des intérêts à compter du 17 mars 2017, date de sa demande indemnitaire préalable, Mme C... ne conteste pas sérieusement le jugement attaqué qui fixe comme point de départ de la capitalisation des intérêts le 8 août 2019, date à laquelle était due pour la première fois une année d'intérêts à compter de la date à laquelle la capitalisation des intérêts avait été sollicitée par l'intéressée.
Sur les frais d'expertise :
32. Il y a lieu de mettre à la charge définitive de l'AP-HP les frais de l'expertise du professeur B... taxés et liquidés à la somme de 2 600 euros par une ordonnance de la présidente de la Cour du 22 juin 2022.
Sur les frais liés à l'instance :
33. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 2 000 euros à verser à Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme mentionnée à l'article 1er du jugement du 6 novembre 2020 du Tribunal administratif de Melun est ramenée à la somme de 474 048,04 euros de laquelle sera déduite la provision de 168 750 euros, soit un montant final de 305 298,04 euros.
Article 2 : L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à Mme C..., à compter de la date de mise à disposition du présent arrêt, une rente trimestrielle de 12 360 euros dont seront déduites les sommes éventuellement perçues par Mme C... au titre de la prestation de compensation du handicap et des aides de même nature. La rente sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
Article 3 : Le jugement n° 1707613 du 6 novembre 2020 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1e et 2.
Article 4 : Les frais de l'expertise décidée par arrêt avant dire droit du 22 décembre 2021, taxés et liquidés à la somme de la somme de 2 600 euros, sont mis à la charge définitive de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris.
Article 5 : L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris versera à Mme C... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris et de Mme C... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, à Mme D... C..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Copie en sera adressée à l'expert.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2023.
La rapporteure,
V. LARSONNIER Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
N. COUTY
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA00389 2