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16/05/2023 | FRANCE | N°22PA04624

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 16 mai 2023, 22PA04624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2213514/1-1 du 28 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 1er juin 2022 et a enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... un certificat de résidence portant la

mention " salarié " dans le délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2213514/1-1 du 28 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 1er juin 2022 et a enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... un certificat de résidence portant la mention " salarié " dans le délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2022, le préfet de police demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 28 septembre 2022 ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de M. A....

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il avait commis une erreur de fait en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... ;

- la menace que représente M. A... pour l'ordre public est caractérisée ;

- les autres moyens soulevés par M. A... en première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Calvo Pardo, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le préfet de police ne sont pas fondés ;

- il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié prévues par les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne présente pas de menace pour l'ordre public ;

- l'arrêté préfectoral porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, violant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 13 mars 1983, déclare être entré en France en 2008. Par un arrêté du 1er juin 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de police relève appel du jugement du 28 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail ".

3. Pour annuler l'arrêté du préfet de police du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Paris a estimé que cet acte était " entaché d'une erreur de fait " dès lors que n'était pas établi par l'administration le caractère frauduleux du pacte civil de solidarité conclu par M. A... avec une ressortissante française le 22 février 2018, que les faits pour lesquels il a été condamné étaient anciens et que cette condamnation était sans effet sur son droit au séjour au titre de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il appartient à l'administration française, en application de la réglementation générale relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France, de refuser l'admission au séjour d'un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. Or, alors même qu'il remplirait les conditions de délivrance d'un titre de séjour au titre des dispositions citées au point 2 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 12 décembre 2012 par le tribunal correctionnel de Bobigny à une peine d'emprisonnement de onze mois pour atteinte sexuelle sur mineur de quinze et corruption de mineur de quinze ans. Si ces faits précèdent l'arrêté litigieux de plusieurs années, ils sont d'une gravité telle que le préfet de police était fondé à estimer que le comportement de M. A... représentait une menace pour l'ordre public et à refuser, pour ce motif, de lui délivrer un titre de séjour sur le territoire français. Il suit de là que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er juin 2022 pour " erreur de fait ".

4. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal et en appel :

5. En premier lieu, l'arrêté du préfet de police du 1er juin 2022 énonce de façon suffisamment précise les dispositions juridiques ainsi que les considérations de fait sur lesquelles il est fondé. Il est par suite suffisamment motivé.

6. En deuxième lieu, pour les motifs exposés au point 3 du présent arrêt, les moyens tirés d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet de police dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M. A... doivent être écartés.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. M. A... soutient qu'il est entré en France en 2008, qu'il a vécu plusieurs années avec une ressortissante française, qu'il a noué des liens durables sur le territoire national et qu'il travaille. Toutefois, d'une part il est célibataire, dépourvu de charge de famille et a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans ; d'autre part, sa présence en France constitue, comme il a été dit au point 3 du présent arrêt, une menace pour l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées doit être écarté.

9. En dernier lieu, il résulte de ce l'ensemble de ce qui vient d'être dit que la décision fixant le pays de destination n'est pas privée de base légale, les décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour et obligeant l'intéressé à quitter le territoire français n'étant pas entachées d'illégalité.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du

1er juin 2022, et que les demandes de première instance de M. A... doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2213514/1-1 du 28 septembre 2022 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de M. A... et ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Isabelle Marion, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

La rapporteure,

G. B...Le président,

I. LUBENLe greffier,

É. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA04624

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04624
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : CALVO PARDO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-16;22pa04624 ?
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