La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2023 | FRANCE | N°22PA03183

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 mai 2023, 22PA03183


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de carte de résident.

Par un jugement n° 2115620 du 13 mai 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 juillet 2022, Mme C..., représentée par Me Tchiakpe, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2115620 du 13 mai 2022 du Trib

unal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler cette décision implicite ;

3°) d'enjoindre au préfe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de carte de résident.

Par un jugement n° 2115620 du 13 mai 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 juillet 2022, Mme C..., représentée par Me Tchiakpe, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2115620 du 13 mai 2022 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler cette décision implicite ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de résident, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de soixante-dix euros par jour de retard ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 426-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 12 de l'accord franco-camerounais du 24 janvier 1994 ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis le 20 septembre 2022, lequel n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes (ensemble une annexe), signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- l'accord franco-camerounais relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire (ensemble six annexes), signé à Yaoundé le 21 mai 2009 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante camerounaise née le 13 mars 1994, est entrée en France en 1999, à l'âge de cinq ans. Titulaire de cartes de séjour pluriannuelles depuis sa majorité, elle a sollicité le 4 mai 2021, dans le cadre du renouvellement de son titre de séjour expirant le 17 juillet 2021, la délivrance d'une carte de résident de dix ans ou, à titre subsidiaire, le renouvellement de sa carte de séjour pluriannuelle. Le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a délivré le 11 août 2021 une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 10 août 2025. Par un jugement du 13 mai 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de résident. Mme C... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les dispositions de ce code s'appliquent sous réserve des conventions internationales. L'article L. 426-17 du même code dans sa version applicable à la date de la décision attaquée dispose que : " L'étranger qui justifie d'une résidence régulière ininterrompue d'au moins cinq ans en France au titre d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident, de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins et d'une assurance maladie se voit délivrer, sous réserve des exceptions prévues à l'article L. 426-18, une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " d'une durée de dix ans. (...) Les ressources mentionnées au premier alinéa doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance (...) " et son article L. 426-19 que " La décision d'accorder la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " prévue à l'article L. 426-17 est subordonnée au respect des conditions d'intégration républicaine prévues à l'article L. 413-7 ". Par ailleurs l'article 12 de l'accord franco-camerounais du 24 janvier 1994 stipule que : " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les nationaux de chacun des États contractants établis sur le territoire de l'autre État peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans dans les conditions prévues par la législation de l'État de résidence ".

3. Il est constant que Mme C... réside de manière régulière depuis plus de cinq ans en France, y a accompli cinq années d'études supérieures et justifie de son intégration républicaine. Mme C... produit en appel ses déclarations de revenus des années 2019 et 2020 ainsi que les contrats de travail à temps partiel dont elle a bénéficié de manière continue auprès du même employeur depuis octobre 2019, ainsi que des bulletins de paie, permettant d'établir l'exécution de ces contrats de travail pour laquelle elle a perçu une rémunération mensuelle toujours supérieure au salaire minimum de croissance. Dans ces conditions, Mme C... doit être regardée comme justifiant, à la date de la décision attaquée, de ressources stables, régulières et suffisantes. Elle atteste par ailleurs être affiliée au régime général de l'assurance maladie française. Elle est donc fondée à soutenir qu'elle remplissait l'ensemble des conditions pour bénéficier d'une carte de résident à la date de la décision implicite contestée et que, par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions de l'article L. 426-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 12 de l'accord franco-camerounais du 24 janvier 1994 en refusant de lui délivrer une carte de résident.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes de l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".

6. Compte tenu du motif d'annulation qu'il retient, et alors que Mme C... est, à la date du présent arrêt, titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée lui procurant un revenu supérieur au salaire minimum de croissance, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme C... une carte de résident, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2115620 du 13 mai 2022 du Tribunal administratif de Montreuil et la décision implicite de rejet de la demande de carte de résident opposée par le préfet de la Seine-Saint-Denis à Mme C... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme C... une carte de résident, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Mme C... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2023.

La rapporteure,

P. A...

Le président,

C. JARDIN

La greffière

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA03183 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03183
Date de la décision : 10/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : TCHIAKPE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-10;22pa03183 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award