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28/04/2023 | FRANCE | N°22PA00048

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 avril 2023, 22PA00048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé son agrément préalable aux fonctions de gardien de la paix.

Par un jugement n° 2000679 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2022, M. A... demande à la Cour :r>
1°) d'annuler le jugement n° 2000679 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de la Polynésie fr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé son agrément préalable aux fonctions de gardien de la paix.

Par un jugement n° 2000679 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2022, M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000679 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé son agrément préalable aux fonctions de gardien de la paix ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de l'admettre à suivre la formation dispensée par l'Ecole nationale de police aux candidats admis au concours de gardien de la paix ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 300 000 francs CFP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où le rapport de l'enquête administrative ayant précédé son édiction ne mentionne pas l'identité de l'enquêteur, ni celle de son chef de service, de sorte qu'il n'est pas possible de savoir si ceux-ci ont été habilités en application R. 40-28 et R. 40-29 du code de la sécurité intérieure pour accéder aux données à caractère personnel ;

- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation dans la mesure où les faits reprochés à l'intéressé sont anciens et ne présentent pas une gravité telle qu'ils justifieraient un refus d'agrément.

La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur et des outre-mer qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une lettre du 6 mars 2023, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que le moyen tenant au vice de procédure entachant la décision du 7 décembre 2020 n'était pas recevable car reposant sur une cause juridique distincte de celle fondant les moyens de première instance présentés dans le délai de recours contentieux.

Par un mémoire enregistré le 4 avril 2023, le ministère de l'intérieur a répondu au moyen d'ordre public.

Par une ordonnance du 24 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 février 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2204-192 du 27 février 2004 ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre du 6 août 2020, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a informé M. A... qu'à l'issue des épreuves du concours externe de gardien de la paix, tenues le 17 septembre 2019, il avait obtenu un nombre de points supérieur au minimum fixé par le jury national pour pouvoir être déclaré admis. Par cette même lettre, le haut-commissaire de la République en Polynésie française lui a toutefois indiqué que son admission définitive était subordonnée aux conclusions de l'enquête administrative diligentée et de la visite médicale réglementaire. Par une décision du 7 décembre 2020, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé d'agréer M. A... aux motifs d'une part, que l'enquête laissait apparaître que sa situation personnelle était incompatible avec l'exercice des fonctions et des missions de fonctionnaire de police et d'autre part, que le bulletin n° 2 de son casier judiciaire mentionnait une condamnation en date du 25 janvier 2017 pour violences sur conjoint. Par un jugement du 5 octobre 2021, dont M. A... fait appel, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 décembre 2020.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que devant le tribunal administratif de la Polynésie française M. A... n'a soulevé, à l'encontre de la décision en litige, qu'un moyen de légalité interne tiré de l'erreur d'appréciation des faits. Par suite, M. A... n'est pas recevable à soulever, pour la première fois en appel, un moyen de légalité externe tiré de ce que le rapport d'enquête administrative ne permet pas de savoir si l'enquêteur a été dûment habilité à recueillir les données personnelles le concernant, conformément aux dispositions de l'article R. 40-28 du code de la sécurité intérieure. En effet, ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, procède d'une cause juridique nouvelle. Il est donc irrecevable et doit, pour ce motif, être écarté.

3. En second lieu, il ressort des termes de l'article 5 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, dans sa version applicable, que : " Sous réserve des dispositions de l'article 5 bis Nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire : (...) 3° Le cas échéant, si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions (...) ". Aux termes de l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure : " I. - Les décisions administratives de recrutement, d'affectation, de titularisation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation, prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses, soit l'accès à des zones protégées en raison de l'activité qui s'y exerce, soit l'utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux, peuvent être précédées d'enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales intéressées n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées. Ces enquêtes peuvent donner lieu à la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification. Les conditions dans lesquelles les personnes intéressées sont informées de cette consultation sont précisées par décret (....) ". Enfin, l'article 4 du décret susvisé du 9 mai 1995 dispose : " Outre les conditions générales prévues par l'article L. 321-1 du code général de la fonction publique et les conditions spéciales prévues par les statuts particuliers, nul ne peut être nommé à un emploi des services actifs de la police nationale : (...) 3° Si sa candidature n'a pas reçu l'agrément du ministre de l'intérieur ".

4. En l'espèce, pour refuser de faire droit à la demande d'agrément de M. A...,

le haut-commissaire de République en Polynésie française s'est fondé sur le fait que l'intéressé avait été condamné le 25 janvier 2017 par le tribunal correctionnel à trois mois de prison avec sursis, cent-vingt heures de travaux d'intérêt général et une obligation de soins, pour violences volontaires commises le 14 novembre 2016 sur sa conjointe, ces violences ayant entraîné six jours d'incapacité totale de travail. Cette condamnation a été inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. A.... Le haut-commissaire de la République en Polynésie française s'est également fondé sur les conclusions de l'enquête administrative diligentée, laquelle a mis en exergue la concordance des propos de M. A... avec diverses infractions et délits qu'il aurait commis entre 2008 et 2019, notamment de conduite sous l'emprise d'un état alcoolique, de violences sur conjoint et violences aggravées. M. A... reconnaît ces faits. Pour autant, il en conteste la gravité, invoquant leur ancienneté, son jeune âge lorsqu'il les a commis et la circonstance, s'agissant des violences sur son épouse, qu'elles sont intervenues dans un contexte de forte mésentente conjugale. Il produit par ailleurs plusieurs attestations de proches faisant état de ce qu'il a mûri, qu'il est " un homme meilleur " et qu'il a trouvé une stabilité. Il produit également une attestation de la psychologue auprès de l'association polyvalente d'actions socio-judiciaires (APAJ) indiquant qu'il suit avec assiduité les séances du groupe de parole destiné aux auteurs de violences conjugales. Toutefois, ces éléments, même s'ils semblent attester d'une prise de conscience de l'intéressé et d'une amélioration récente de son comportement, ne permettent pas, compte tenu de la gravité des faits commis et de leur réitération sur plusieurs années, de considérer que le haut-commissaire de la République en Polynésie française a commis une erreur d'appréciation en considérant que le comportement de M. A... n'était pas compatible avec les garanties exigées pour exercer les fonctions de gardien de la paix. Le moyen doit donc être écarté.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente,

- Mme Briançon, présidente-assesseure,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 avril 2023.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEULa présidente,

M. C...

La greffière,

O. BADOUX-GRARELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00048
Date de la décision : 28/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : FIDELE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-28;22pa00048 ?
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