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21/04/2023 | FRANCE | N°22PA01602

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 21 avril 2023, 22PA01602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les avis de saisie à tiers détenteur n° 9407730817, n° 9437267417 et n° 9469443017 émis à son encontre les 15 juillet, 31 juillet et 18 août 2021 par la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger, ainsi que la décision de rejet de sa réclamation du 27 septembre 2021, de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 20 916 euros et d'enjoindre à la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Rober

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les avis de saisie à tiers détenteur n° 9407730817, n° 9437267417 et n° 9469443017 émis à son encontre les 15 juillet, 31 juillet et 18 août 2021 par la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger, ainsi que la décision de rejet de sa réclamation du 27 septembre 2021, de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 20 916 euros et d'enjoindre à la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger de lui reverser la somme de 1 919,83 euros prélevée sur son compte bancaire.

Par une ordonnance n° 2123606 du 10 février 2022, le président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 avril 2022 et 22 décembre 2022, Mme C..., représentée par Me Blin, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 février 2022 du président du tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Paris ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler les avis de saisie à tiers détenteur n° 9407730817, n° 9437267417 et n° 9469443017 émis à son encontre les 15 juillet, 31 juillet et 18 août 2021 par la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger, ainsi que la décision de rejet de sa réclamation du 27 septembre 2021 ;

4°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 20 916 euros ;

5°) d'enjoindre à la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger de lui reverser la somme de 1 919,83 euros prélevée sur son compte bancaire ;

6°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité ; la juridiction administrative est compétente dès lors qu'elle a entendu contester le bien-fondé de la créance, de nature administrative, et non seulement la régularité en la forme de son recouvrement ;

- son action contre le bien-fondé de la créance est recevable dès lors que les titres exécutoires ne lui ont pas été notifiés, qu'elle n'en a appris l'existence qu'en 2020 et qu'elle a ensuite entamé des démarches, retardées par la crise sanitaire ; ces circonstances particulières justifient qu'il soit fait une application raisonnable de l'impératif de sécurité juridique et du délai de recours juridictionnel ;

- en l'absence de titre de recettes, les bases de la liquidation ne sont pas indiquées, entachant la créance et les avis de saisie à tiers détenteur d'irrégularité ;

- la créance est dépourvue de base légale faute de production des titres de perception ;

- les frais d'hospitalisation qui lui sont réclamés devaient être pris en charge au titre des soins urgents, en application des dispositions de l'article L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles et des articles L. 251-2 3° et L. 160-9 du code de la sécurité sociale.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 14 novembre 2022 et 17 janvier 2023, le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger, représenté par Me Budet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la demande de première instance de Mme C... a été portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

- à titre subsidiaire, la demande était irrecevable en raison de sa tardiveté ;

- les moyens relatifs à la régularité formelle des actes litigieux sont présentés devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

- il y a lieu d'appeler en la cause la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

La clôture de l'instruction a été fixée au 7 février 2023.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales,

- le code de la santé publique,

- le code de l'action sociale et des familles,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- les observations de Mme C...,

- et les observations de Me Lesson, représentant le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., de nationalité camerounaise, est entrée sur le territoire français en mars 2016. Enceinte, elle a sollicité le bénéfice de l'aide médicale d'État le 22 juillet 2016. Sa demande a été rejetée. Le 25 décembre 2016, elle a donné naissance à un fils au centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger d'Aulnay-sous-Bois, où elle avait été admise la veille, le 24 décembre. Elle y a bénéficié de soins, ainsi que son nouveau-né, jusqu'au 4 janvier 2017. En juillet 2020, une somme a été prélevée sur son compte bancaire en exécution d'un avis de saisie à tiers détenteur émis le 2 mars 2020 au titre des frais liés à son hospitalisation et à celle de son fils du 27 décembre 2016 au 4 janvier 2017. La requérante ayant alors contesté le refus d'octroi de l'aide médicale d'État et demandé à la caisse primaire d'assurance maladie la prise en charge de ces frais, les poursuites ont été provisoirement suspendues. Par courrier du 10 mars 2021, la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis a refusé la prise en charge des frais d'hospitalisation. Trois avis de saisie à tiers détenteur n° 9407730817, n° 9437267417 et n° 9469443017 ont ensuite été émis à son encontre les 15 juillet, 31 juillet et 18 août 2021 par la trésorerie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger pour un montant total de 20 363,28 euros. Mme C... a contesté le refus de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie devant la commission de recours amiable le 26 avril 2021, qui a implicitement rejeté son recours. Le 13 septembre 2021, Mme C... a demandé à l'administration de la décharger de l'obligation de payer et de lui rembourser les sommes prélevées sur son compte. Par un courrier du 27 septembre 2021, le centre des finances publiques de Montfermeil hospitalier a rejeté la demande. La requérante relève appel de l'ordonnance du 10 février 2022 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des avis de saisie administrative à tiers détenteur émis à son encontre les 15 juillet, 31 juillet et 18 août 2021 comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

2. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 : " Les dispositions du présent article s'appliquent également aux établissements publics de santé. / 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / [...] / L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / 2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction résultant de la même loi du 28 décembre 2017 : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / [...] / Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés : / [...] / c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution ".

4. Il ressort de ces dispositions que l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des établissements publics de santé relève de la compétence du juge de l'exécution, tandis que le contentieux du bien-fondé de ces créances relève de celle du juge compétent pour en connaître sur le fond.

5. Alors même que Mme C... soulève des moyens relatifs au bien-fondé de la créance, sa demande tend à l'annulation non des titres de recettes émis par le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger, mais des actes de poursuite émis pour le recouvrement de créances non fiscales de l'établissement public de santé et tend en conséquence à la décharge de l'obligation de payer les sommes réclamées. Une telle demande ressortissant au contentieux du recouvrement, le juge de l'exécution est compétent pour en connaître, sans que puisse être remis en cause devant lui le bien-fondé de la créance. Il reste loisible à l'intéressée de contester devant le juge administratif, si elle s'y croit recevable et fondée, les titres de recettes émis par l'établissement public de santé.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. L'ensemble de ses conclusions d'appel doit par suite être rejeté.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que demande le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Isabelle Marion, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 avril 2023.

La rapporteure,

G. A...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

É. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA01602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01602
Date de la décision : 21/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : LEX PUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-21;22pa01602 ?
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