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13/04/2023 | FRANCE | N°22PA00609

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 13 avril 2023, 22PA00609


Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire enregistrée le 10 février 2022, un mémoire complémentaire enregistré le 11 mars 2022 et des mémoires en réplique enregistrés le

22 juillet 2022 et le 14 octobre 2022, la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) représentée par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues repré

sentatives dans la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'im...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire enregistrée le 10 février 2022, un mémoire complémentaire enregistré le 11 mars 2022 et des mémoires en réplique enregistrés le

22 juillet 2022 et le 14 octobre 2022, la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) représentée par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives dans la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeuble (IDCC n°1043) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à agir contre l'arrêté attaqué ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en ce que la formation du Haut conseil du dialogue social de la séance du 10 décembre 2021 était irrégulière ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'appréciation ;

- contrairement à ce qu'a estimé la ministre du travail, dès lors qu'en vertu de l'article 31 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n°65-557 du

10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et de la jurisprudence, le syndic exerce l'ensemble des attributs de l'employeur à l'égard du personnel du syndicat de copropriétaires et qu'il respecte dans l'exercice de sa mission la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeuble aux gardiens, la FNAIM ne saurait être exclue de la représentativité de la branche, sans que la ministre puisse lui opposer les dispositions de l'article R. 2152-6 du code du travail ;

- la FNAIM représente 3 787 syndics de copropriété gérant la carrière de 10 628 salariés ; elle est déjà aux côtés des autres organisations d'employeurs un acteur du dialogue social au sein de la branche où elle dispose d'une audience et d'une influence considérables ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une atteinte au principe d'égalité entre les organisations professionnelles d'employeurs dès lors que les conseils syndicaux et/ou les syndics non professionnels ont été pris en compte en qualité d'employeurs au bénéfice de l'ARC.

Par des mémoires enregistrés le 1er juillet 2022 et 13 octobre 2022, l'Association des responsables de copropriété (ARC) représentée par Me Aïdan, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la FNAIM le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir de la FNAIM contre l'arrêté attaqué ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 septembre 2022, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- les observations de Me Gatineau, représentant la Fédération nationale de l'immobilier,

- les observations de M. A... représentant le ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion,

- et les observations de Me Grosperrin, représentant l'Association des responsables de copropriété.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 décembre 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a fixé à l'article 1er la liste des organisations professionnelles d'employeurs représentatives dans la convention nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles (IDCC n°1043) et à l'article 2, le poids respectif de ces organisations pour l'opposition à l'extension des accords collectifs, prévue à l'article L. 2261-19 du code du travail. La Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) demande à la Cour d'annuler cet arrêté en tant qu'il ne la reconnaît pas comme une organisation professionnelle représentative.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 2151-1 du code du travail : " I. -La représentativité des organisations professionnelles d'employeurs est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants : 1° Le respect des valeurs républicaines ; 2° L'indépendance ; 3° La transparence financière ; 4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation. Cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; 5° L'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; 6° L'audience, qui se mesure en fonction du nombre d'entreprises volontairement adhérentes ou de leurs salariés soumis au régime français de sécurité sociale et, selon les niveaux de négociation, en application du 3° des articles

L. 2152-1 ou L. 2152-4. II. -Pour l'application du présent titre, sont considérées comme des organisations professionnelles d'employeurs les syndicats professionnels d'employeurs mentionnés à l'article L. 2131-1 et les associations d'employeurs mentionnées à l'article

L. 2231-1. ". Aux termes de l'article L. 2152-6 du même code : " Après avis du Haut Conseil du dialogue social, le ministre chargé du travail arrête la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives par branche professionnelle et des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel ou multi-professionnel. ". Aux termes de l'article R. 2152-6 dudit code : " Le commissaire aux comptes compétent en application, selon le cas, du 3° de l'article

L. 2152-1 ou du 3° de l'article L. 2152-4 atteste conformément aux dispositions de la présente section et des sections 2 et 3 du présent chapitre : 1° Le nombre par département d'entreprises adhérentes de l'organisation professionnelle d'employeurs candidate à l'établissement de sa représentativité ; 2° Le nombre de salariés employés par ces mêmes entreprises ; 3° Le nombre par département de ces mêmes entreprises employant au moins un salarié ; 4° Le nombre par département de ces mêmes entreprises employant au total moins de onze salariés. Il dispose à cet effet d'un accès accordé par le ministre chargé du travail à des données agrégées non nominatives issues des déclarations sociales des entreprises mentionnées à l'article L. 2122-10-3. Les règles prises en compte en matière de cotisations et définies conformément aux dispositions des articles R. 2152-1 et R. 2152-2 sont jointes à ces attestations. L'attestation du commissaire aux comptes est accompagnée d'une fiche de synthèse dont le modèle est arrêté par le ministre chargé du travail. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 31 du décret susvisé du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : " Le syndic engage et congédie le personnel employé par le syndicat et fixe les conditions de son travail suivant les usages locaux et les textes en vigueur. L'assemblée générale a seule qualité pour fixer le nombre et la catégorie des emplois. ".

4. En premier lieu, si la FNAIM soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en ce que la formation du Haut conseil du dialogue social lors de sa séance du

10 décembre 2021 était irrégulière, elle n'assortit ce moyen, seulement soulevé dans sa requête sommaire, d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

5. En deuxième lieu, la FNAIM soutient que la ministre du travail a entaché l'arrêté attaqué d'une erreur de droit et d'appréciation en refusant de la reconnaître comme représentative dans le champ de la convention nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles faute d'audience, dès lors qu'en vertu de l'article 31 du décret du 17 mars 1967 et de la jurisprudence, les 3 787 syndics de copropriété gérant la carrière de 10 628 salariés qu'elle représente, exercent l'ensemble des attributs de l'employeur à l'égard du personnel du syndicat de copropriétaires et qu'ils respectent la convention collective en cause dans l'exercice de leurs missions. La FNAIM fait valoir que les syndics de copropriétés embauchent et licencient les gardiens, concierges et employés d'immeuble, fixent leurs conditions de travail, établissent les attestations et déclarations obligatoires, gèrent les remplacements pendant les congés, arrêts de maladie et de maternité ou, encore, gèrent la formation de ces salariés pour le compte des syndicats de copropriétaires et, dès lors, agissent comme le véritable employeur de ces salariés. Toutefois, comme la FNAIM le reconnaît elle-même, la convention nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles stipule à son article 1er que : " (...) Lorsqu'un immeuble est placé sous le régime de la copropriété, l'employeur est le syndicat des copropriétaires ; le contrat de travail est signé par le syndic qui agit en tant que mandataire du syndicat des copropriétaires et selon les dispositions de l'article 31 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 (...) ". Il en résulte le syndic de copropriété n'est que le mandataire du syndicat des copropriétaires et que la FNAIM, en tant qu'elle représente les syndics de copropriétés et non les syndicats de copropriétaires, ne peut se voir reconnaître la qualité d'organisation professionnelle d'employeurs dans le champ de cette convention. Par suite, la circonstance que la FNAIM disposerait d'une influence considérable et qu'elle serait déjà, aux côtés des autres organisations d'employeurs, un acteur du dialogue social au sein de la branche, à la supposer établie, est inopérante dès lors que la FNAIM ne remplit pas le critère de l'audience prévu à l'article L. 2151-1 6° du code du travail. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.

6. En troisième lieu, la FNAIM soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'une atteinte au principe d'égalité entre les organisations professionnelles d'employeurs dès lors que les conseils syndicaux et les syndics non professionnels ont été pris en compte en qualité d'employeurs au bénéfice de l'ARC. Toutefois, il résulte de l'article 4 des statuts de l'ARC que celle-ci représente les syndicats de copropriétaires qui ont la qualité d'employeurs, ainsi qu'il a été dit au point 5. Il ressort en outre des pièces du dossier que si les syndicats de copropriétaires adhèrent à l'ARC par l'intermédiaire des conseils syndicaux ou des syndics non professionnels, désignés comme " adhérents collectifs " aux termes de l'article 6 de ses statuts, qui agissent en leur nom, ils acquittent directement leurs cotisations auprès de l'ARC, ainsi que l'a attesté le 17 novembre 2021 le commissaire aux comptes de cette dernière. Il en résulte que la FNAIM et l'ARC ne se trouvant pas dans la même situation, la ministre du travail n'a pas entaché son arrêté d'une méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidatures à la représentativité.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par l'ARC, que la FNAIM n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2021 de la ministre du travail fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs représentatives dans la convention nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles (IDCC n° 1043).

Sur les frais de l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à la FNAIM la somme qu'elle demande au titre des frais de l'instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros à verser à l'ARC en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la FNAIM est rejetée.

Article 2 : La FNAIM versera une somme de 1 500 euros à l'ARC au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, à l'Association des responsables de copropriété (ARC) et à la Fédération des entreprises publiques locales (FedEpl).

Délibéré après l'audience du 29 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Dégardin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

I. LUBENLa greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

N° 22PA00609 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00609
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : AIDAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-13;22pa00609 ?
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